Cette étude se propose d’analyser plus spécialement les difficultés liées à la MEMOIRE.
Au cœur des trois grandes allées bordées par nos puissances de vie spirituelle, de notre dignité pneumatique (tiré du mot grec pneuma, esprit), qui nous établissent par nature au-dessus de l'animal :
la vie contemplative, la vie d'amour profond, nous possédons un trésor souvent méconnu : la vie de liberté profonde de la mémoire ontologique
Nous sommes une personne. Mais nous vivons un peu à la périphérie de nous-mêmes, dans le visible, dans l'apparence, dans ce que nous ressentons. Eh bien, dans cette troisième étape de personnalisation profonde, nous voudrions trouver la porte d'entrée pour vivre, non seulement le périphérique, mais comme il est souhaitable et … normal, toutes les dimensions de la personne :
la parenté spirituelle et sensible,
la sagesse et le divin,
l'éternel et le présent qui sont en nous.
Aujourd'hui, plus nous sommes centrés sur les zones périphériques de notre expression vitale, plus nous nous retrouvons dans la dispersion. Mais, au fur et à mesure que nous allons avancer, nous allons nous simplifier dans la découverte de la personne centrée en nous dans l'éternité et nous rassembler dans notre direction finale qui est Dieu.
Rappelons les trois grandes perspectives qui furent les nôtres pour la personnalisation profonde :
Dans le PPP I, nous avons analysé les blessures de l'affectivité. Nous avons vu comment les blessures de cette affectivité psycho-spirituelle opéraient un repli affectif, avec un premier circuit, celui de l'endurcissement du cœur, un second circuit celui de l'isolement du cœur avec une fragilisation et une vulnérabilisation de cette affectivité. Nous avons regardé, à cause de cela, de quelle manière il fallait entrer dans l'Adoration pour faire en sorte que le circuit du 6x6x6 de l'Amour en nous puisse retrouver une ouverture et donner une possibilité à l'amour humain et à l'Amour divin de revivre par le pardon et par l'adoration. Nous avons regardé comment le cœur devait entrer dans cette adoration.
Dans le PPP II, nous avons regardé comment l'imaginaire lié à l'intelligence contemplative était également fissuré. L'intelligence n'est pas fissurée, mais le lien entre l'intelligence et l'imaginaire est fissuré par le sentiment de culpabilité et la conscience de culpabilité. L'intelligence contemplative est brouillée par « la fée du logis ». A cause de l'imaginaire, notre image est brouillée, nous ne comprenons plus rien. En fait, nous comprenons beaucoup de choses, mais ce que nous comprenons s'éloigne de la réalité.
Notre conscience réflexive est blessée.
C'est le problème du « sentiment de culpabilité ». Nous avons regardé comment guérir de cette blessure, à la fois consciente et inconsciente, due au sentiment de culpabilité et à la conscience de culpabilité, par le repentir. La guérison de cette culpabilité est une guérison de la conscience. (cf. en Annexe I : le sentiment de culpabilité - sa maturation en conscience de culpabilité - leur guérison par le repentir).
Le PPP III nous invite à regarder la troisième manière de vivre humainement notre dignité en ce que nous appelons aujourd'hui, dans le monde moderne, la liberté, mais que nous, nous appellerons la Memoria Dei ou encore la mémoire ontologique.
La Mémoire ontologique est cette capacité qui nous a été actuée par Dieu dans notre lère cellule, neuf mois avant notre naissance, quand nous avons été créés par Lui dans une puissance de liberté, une innocence et un grand élan, dans le temps et dans l'éternité absolument étonnant.
Mais cette innocence est immédiatement contrée par les premières blessures qui sont donc des blessures de la Mémoire. Ces blessures font que nous oublions totalement cette expérience originelle de l'horizon d'éternité, cette expérience du Créateur et notre vocation en Dieu.
La Mémoire ontologique est vécue dans l'unité de notre âme et de notre chair, dans ce que nous éprouvons et dans ce que nous ressentons et elle s'actue dans le point de vue du corps.
Dans le PPP II, nous avions commencé à regarder quelques aspects inscrits dans le point de vue de la mémoire liée au corps, dans la première cellule, « le mental des cellules ».
Dans le PPP III, nous allons examiner le point de vue de la mémoire liée à l'âme sensible, ce qui nous fera aborder le point de vue psycho-spirituel de la mémoire.
Comme nous sommes poignardés, inhibés, paralysés, étouffés, dans notre liberté profonde, laquelle jaillit de cette puissance appelée « la Mémoire ontologique », nous serons plus sensibles à la tentation nommée orgueil.
Nous allons donc étudier cette grande structure de la mémoire avec sa dynamique très particulière en parallèle avec cette tentation que l'on appelle l'orgueil et dans laquelle nous nous reconnaîtrons tous. Nous nous réserverons des perspectives plus élevées encore de la vocation métaphysique et même surnaturelle et divine qui s’ouvrent à l’horizon de notre Mémoire spirituelle ontologique, au-delà des principes vitaux d’ordre psycho spirituel qui nous occupent pour l’instant en cette étude.
Qu'est-ce que la Mémoire ontologique ?
La Mémoire ontologique est une mémoire spirituelle reçue. Elle a une importance considérable, car elle est la marque du Père, de mon lien entre le Père et moi, son fils.
Si nous voulons parler de prédestination pour l'homme, c'est de cela seulement que nous devons parler.
Je suis fils de Dieu pour me retrouver, grâce à l'Esprit Saint, dans les bras du Père. Je suis son fils unique, ce qui fait que je suis de race divine, de la famille de Dieu, c'est-à-dire qu'il n'y en a pas deux comme moi : « Entre Dieu et l'homme existe la plus grande parenté » dit saint Macaire, à cause de la mémoire originelle.
Cette parenté divine fait que nous recevons notre nom, notre identité unique dans la Mémoire ontologique, sur « un caillou blanc » que nous sommes seuls à connaître, comme le dit saint Jean.
Notre vocation qui est appel à l'union à Dieu, est aussi appel à l'état de vie et à l'incarnation de cet appel. Tout cela est inscrit en nous dans notre Mémoire ontologique et existe avant notre naissance, au moment de la conception :
« Avant de te former dans le sein de ta mère, Je te connaissais ».
« Avant ta naissance, Je t'avais déjà consacré... »
« Dès la création du monde, II nous a prédestinés à être saints et immaculés en Sa Présence, dans l'Amour ».
Si le New Age parle de vies antérieures ou de préexistence des âmes (c'est impossible car nous sommes des êtres créés, donc nous avons un commencement) c'est qu'ils font d'une perception voilée, psychique, de l'image blessée, la réalité de la Mémoire Ontologique.
Dans cette mémoire, nous portons toute notre identité et toute notre puissance de communion à Dieu, ce qui fait de nous des êtres de mémoire. C'est pourquoi le Peuple de l'Alliance se nomme « le Peuple de la Mémoire » ou « Peuple du Père » :
« Faites ceci en Mémoire de Moi »
Faire ceci c'est faire mémoire de cette Alliance avec notre Père qui fait de nous ses fils. L'Alliance est l'axe de l'image à la ressemblance, là où pénètre la parole.
La Mémoire ontologique fait que le point de vue spirituel en nous, au sommet de notre âme, va dans trois directions qui expriment un lien particulier :
Avec le Verbe de Dieu, du point de vue de l’intellligence
Avec l’Esprit Saint, du point de vue de l’Amour
Avec le Père, du point de vue de la mémoire ontologique
Les trois se nouent en notre être, (corps – âme – esprit), dans ce lien avec l'acte créateur de Dieu, qui est Père, Fils et Saint Esprit. « C'est le Père, dès le sein maternel, qui nous donne la vie. C’est l'Esprit Saint qui nous donne la croissance. C'est le Fils, qui nous donne le modèle » (saint Irénée)… « Le Père marque tout mon être de la Mémoire, parce qu'Il est la Mémoire éternelle de toute chose. Le Fils est la Sagesse du Père, donc l'homme est marqué de cette trace unique qui est l'Intelligence, Et l'Esprit Saint est ce lien d'Amour, entre le Père et le Fils, qui fait que l'homme est un être d'amour. Et sa mémoire et son intelligence sont faites pour fonctionner dans l'Amour, par l'Amour et pour l'Amour » (saint Augustin).
La blessure de la Mémoire est une blessure par rapport au Père … II existe donc une dynamique de la Mémoire ontologique qui nous met en relation avec le Père et la blessure avec notre mémoire va nous faire rejeter tout ce qui vient du Père, tout ce qui peut venir d'une autorité qui donne vie à notre intelligence, tout ce qui ne vient pas de nous. Nous ne voulons pas de cette autorité qui nous vivifie, nous ne voulons pas de cette Paternité. Nous voulons être nous-mêmes la source de notre être et nous allons nous attacher à nos impressions, à nos idées, etc. Mais, comme nous ne voulons pas nous l'avouer, psychologiquement, nous allons rejeter tout ce qui peut représenter la Paternité de Dieu, donc toutes les analogies du Père : toutes les doctrines infaillibles, l'autorité du patron, l'obéissance, l'esprit de service, l'humilité, l'époux dans le mariage, tous les substituts du Père. C'est cela l'orgueil.
Cette blessure de la Mémoire existe dès le départ dans notre vie.
L'exercice de la Mémoire ontologique domine dès la conception, jusqu'à la 10e semaine environ.
Ce n'est, en effet, qu'à partir de cette 10e semaine que l'embryon a la possibilité de faire un exercice relationnel avec sa mère, d'avoir un exercice d'affectivité spirituelle incarnée, ainsi qu'une première prise de conscience de ce qu'il est. A ce moment-là, seulement, il peut y avoir des blessures affectives venant d'un sentiment.
Mais, entre le 1er et le 70e jour, c'est la Mémoire ontologique qui domine. Toutes les blessures, jusqu'au 70e jour, sont donc des blessures de la mémoire ; elles ne peuvent être des blessures de l'affectivité sensible. Nous ne pouvons pas dire, par exemple, que notre mère ne nous a pas aimés dès notre conception et que nous en sommes blessés, c'est une erreur. Nous ne pouvons pas avoir été blessés par un manque d'amour maternel, à cette période, puisqu'il n'y avait pas d'exercice possible d'amour. C'est une blessure de la Mémoire. II faut donc faire la distinction entre les blessures de la mémoire et
les blessures de l'affectivité,
les blessures de la Conscience,
les blessures de l'imaginaire, … qui ne viennent qu'après.
Les blessures de la Mémoire ne se répercutent pas sur l'imaginaire ; elles se répercutent sur des réactions primo-primi : c'est instinctif. Par exemple, certaines personnes refusent d'avoir un père, refusent de dépendre d'un autre et de s'attacher à cette dépendance : c'est une blessure de la Mémoire. Ce n'est pas une blessure de l'intelligence, qui, justement, va dans toutes les directions devient effervescente et donc beaucoup moins intelligente, car elle est moins enracinée dans la liberté profonde de la Mémoire. Ce sont ces blessures là qui font naître l'orgueil.
II y a une dynamique extraordinaire de la Mémoire qui me met en lien avec mon Père, dès la première cellule et jusqu'à maintenant.
Nous allons voir les trois éléments qui constituent cette pédagogie dynamique de Dieu.
Le Père, mon Créateur, ma Providence, ma vie, mon amour, va avoir trois grandes pédagogies dynamiques, originelles, continuelles, perpétuelles qui vont irriguer ma Mémoire ontologique dans mon corps, dès la première cellule jusqu'à maintenant, pour vivifier ma liberté profonde, dans mon être incarné.
Première dynamique : Dieu m'invite à une dépendance d'Amour
C'est le point de vue originel : Dieu est là tout le temps, Il est présent et Il m'invite à une dépendance d'Amour.
Il me dit « Je suis Ton Père », à travers la cellule de mon corps, qui est une espèce de haut-parleur, dans sa partie la plus radicale (le mental des cellules,)
Il me dit « Attends tout de Moi » et « Apprends-moi à me reconnaître sous les visages analogiques », de tous ceux qui sont autour de toi qui représentent la paternité : ton père, ta mère, ton maître spirituel, ton aîné, ton époux, etc.
Cette pédagogie de base revivifie tout le temps ma mémoire ontologique.
Deuxième dynamique : L'importance du temps
Dieu le Père est dans l'éternité. Mais Dieu nous dit : « C'est l'heure à toute heure », « C'est maintenant que ma Paternité est actuelle » Elle était à la conception, mais c'est maintenant qu'il faut la regarder. « Accepte la Grâce de l'instant présent »
Le Père donne la Grâce. Le Fils donne la Vérité. L'Esprit Saint donne la lumière, le feu, l'Amour.
Si nous voulons savoir à quel moment nous sommes dans un état d'esclavage, à cause d'une blessure de la mémoire, c'est lorsque nous fuyons l'instant présent. Nous faisons des projets dans l'avenir ou nous sommes nostalgique par rapport à notre passé.
Si nous refusons ce visage de la Paternité de Dieu, nous allons dans des artères psychologiques qui nous cachent le visage de cette paternité. Mais, nous ne voulons pas nous avouer psychologiquement que c'est Dieu votre Père que nous refusons.
« Sois patient dans la durée. Sois mon fils dans le temps. Dans l'instant où tu te trouves, Je suis Ton Père éternellement. Vis dans la Grâce de l'instant présent »
Troisième dynamique : Nécessité de la séparation
Le Père nous dit : « Je te mets à part ». Le Père nous met dans l'Amour d'une manière qui Lui est propre. C'est à travers un Amour séparant pour que je sois Fils plus profondément, plus personnellement, dans l'Esprit Saint. Il faut toujours se rappeler cela.
En effet, quand Dieu créé, Il sépare, Il donne une identité et enfin, Il unit plus profondément : ce sont les quatre moments.
Dieu crée l'homme, puis Il sépare Adam et ève, Il leur donne leur identité profonde et Il les réunit plus profondément : « Que l'homme ne sépare pas ce que Dieu a uni » !
A travers l'Amour séparant, Dieu fait naître à un amour personnel. Si Dieu ne m'avait pas abandonné, laissé à moi-même, mon amour pour le Père n'aurait jamais été personnel. Il me met à part car Il a un Amour spécial pour moi. Dans cette séparation, Dieu me dépose dans une relation directe avec mes parents, puis mes proches, une série de visages analogiques. Alors je crie, je refuse. Et si je refuse d'aimer le Père, si ma liberté choisit de ne pas aimer le Père, si je rejette tous les visages analogiques, en fait, c'est Dieu que je vais rejeter.
But de cette dynamique : Passer de l'image du Père à la ressemblance au Père
Au moment où le gamète mâle rencontre le gamète femelle, qui font un zygote, Dieu crée notre âme spirituelle et nous constitue ainsi dans l'être. Là, nous sommes en contact avec notre mère, nous sommes dans le tissu maternel sur le velours de l'endomètre.
Et c'est à travers les spires de chaque instant présent, dans la durée et dans la patience du fils, que nous devons passer de l'image à la ressemblance de Dieu, à travers les visages analogiques qui sont autour de nous.
Nous passons donc de l'image de la paternité sous le visage de notre mère, à la ressemblance au Père. Notons ici que de nombreuses maladies de la liberté empêchent ce mouvement. Nous allons prendre l'exemple de l'homosexualité qui a le mérite d'être clair car c'est physique, c'est une maladie de la sexualité. L'homosexualité n'est-elle pas une cassure au niveau de la Mémoire ontologique ?
Quand nous bloquons sur le visage de notre mère, trop captative, la dynamique est coupée et nous entrons dans une affectivité d'un amour de similitude d'où il est impossible de sortir. L'homosexualité n'est pas un problème d'affectivité, ce n'est pas un problème d'imaginaire, ce n'est pas un problème de sentiment de culpabilité ni de conscience de culpabilité, c'est toujours un problème de blessure de la mémoire.
Cette dynamique est importante : il s'agit de passer de la dynamique de la paternité dans mon corps, dans mon âme, dans mon esprit, dans mon être, (qui est toujours là qui fait que je reçois mon père à travers l'image de ma mère) et que de cette image de ma mère, je passe à la ressemblance à mon père. Il faut que je devienne Fils spirant l'Esprit Saint à travers mon corps, mon âme, mon esprit, mon caractère, ma sainteté, etc.
Le péché, c'est le refus de la pédagogie de Dieu
Il va, dans les trois grandes artères ci-dessous, déstructurer la mémoire et y faire naître l’orgueil.
Le refus de la dépendance d'Amour va entraîner soit l'indépendance, soit la dépendance aliénante, fusionnelle. Le refus du temps, le refus de la patience va me mettre dans l'impatience et la convoitise et dans l'impossibilité de vivre de la Grâce de l'instant présent.
Le refus de la séparation va s'exprimer soit par le détachement, soit par le refus de tout lien affectif ou encore par le retour égocentrique sur soi-même.
(Cf. tableau n° 1)
La structure de l'homme nous montre qu'Intelligence, Mémoire et Volonté (affectivité) sont liées entre elles ; ce qui nous aidera à comprendre la déstructuration de la Mémoire. De même qu'il y a cette relation d'Amour au sein de la Sainte Trinité, de même il y a ces mêmes échanges entre les différentes structures de l'homme.
Ainsi la mémoire se dira au travers de l'intelligence, dans l'amour. Nous ne pouvons ['étudier autrement. Chaque structure est au service de l'autre et s'efface devant l'autre, pourrait-on dire. Cette mémoire va se dire tout au long de l'axe de l'Alliance avec la Paternité de Dieu. C'est autour de la relation au Père que va se vivre tout ce qui est Communion et que nous découvrirons notre identité.
Mais pour passer de l'image de la Mère à la ressemblance au Père, nous devons passer par les spires des instants présents à travers tous les visages analogiques qui sont autour de nous (père et mère) et qui ne sont pas si limpides, si transparents que la vivante vivification de notre liberté profonde.
En effet, l'enfant se reçoit dans une relation d'amour, qui n'est pas parfaite, l'unité sponsale de ses parents, si bien que sa soif d'amour n'est pas comblée. Elle est, de plus, entachée par le simple fait que ses parents ne sont pas des saints. Or l'amour dont nous avons soif, c'est l'Amour infini qui nous vient de Dieu et que nos parents ne peuvent pas nous donner. Au fond de nous existe une source d'amour provenant de la Mémoire ontologique marquée par cet Amour originel.
Et l'enfant reçoit toutes ces blessures d'amour parentales passivement. Ces blessures engendrent le point de vue du doute, un doute sur l'Amour.
Il y a donc des blessures parentales, essentiellement. Mais il ne faut pas mettre tout sur le dos des parents ! Il peut y avoir des blessures au niveau des visages analogiques incarnés représentant l'autorité qui vont provoquer les mêmes résultats même s'il n'y aura pas eu les blessures parentales correspondantes.
Ces blessures vont entraîner le point de vue du doute.
Quand je commence à douter de celui que j'aime, apparaît en moi l'oubli. Le doute engendre toujours l'oubli. Et l'oubli est à la racine de tout notre combat spirituel :
« Délivre-nous, Seigneur, du doute et de l'oubli »
L'oubli est le premier coup de poignard dans notre Mémoire ontologique.
L'oubli de celui que j'aime va plus loin que cela. Que vais-je oublier ? Je vais oublier Dieu comme Père, Dieu comme Créateur, Dieu comme Source de toutes choses. Je commence à rentrer dans le doute sur ce que je suis et sur ce que le « je suis » paternel de Dieu est dans mon « je suis ». Voici l'axe de la blessure : j’oublie que Dieu est mon Père donc j'oublie que je suis son fils.
(Si nous voulons revivifier notre mémoire, nous nous arrêtons, nous nous mettons dans la conscience de notre corps, nous incarnons bien notre réalisation et nous nous rappelons que nous avons un Père et que nous sommes son fils. C'est un exercice de santé naturelle de la mémoire. Sinon, nous risquons de passer notre journée à murmurer contre tout le monde, à rentrer dans des tas de réflexions pleines d'amertume...)
Si nous sommes blessés dans notre mémoire, nous risquons de nous engouffrer dans le mental et dans l'intelligence qui le produit, c'est normal, c'est l'ordinateur, c'est moderne, parce que nous produisons ce que nous sommes, c'est la bête. Comme nous avons oublié la paternité de Dieu, oublié que nous sommes fils, du coup, nous perdons cette intelligence et produisons notre visage métallique non vivifiant.
En faisant cela, j'oublie ma propre identité. Puisque j'oublie ma relation à Dieu, cela va toucher de façon très profonde à mon identité. J'oublie que je suis une créature finie.
En oubliant mon identité, j'oublie mes limites, c'est l'oubli, au niveau parental, de mon père et de ma mère comme sources de ma vie. J'oublie que je suis tout petit dans la main de mon Père, et du coup, je m'offre un univers d'illimité que je produis moi-même, qui est complètement artificiel, qui est pure illusion (maya) comme disent les Hindous, c'est du vent, de la paille et du plomb et dès que le feu de l'Amour de Dieu passera, il ne restera plus rien.
A cause de l'oubli, je rentre dans une attitude de refus, le refus de la dépendance d'Amour.
La Blessure, le Doute et l'Oubli se situent dans la première dynamique.
La seconde dynamique commence par ce Refus.
Ma réaction concrète, dans le temps et dans le lieu, va être de refuser d'être fils. Je refuse de recevoir. Je refuse d'attendre quoi que ce soit de mon père ou de ma mère, « je n'attends plus rien de mon mari ». « Je n'attends plus rien de personne » « ni de l'Église », qui est ma Mère (le Corps Mystique maternel du Christ.) J'attends tout de Dieu directement. C'est une liberté poignardée qui agit ainsi. Derrière, il y a la révolte d'être Fils.
Ce refus d'être fils fait que je passe de l'oubli à l'ignorance : je ne sais plus qui est mon père et je ne sais plus qui je suis. Je ne sais plus comment vivre la relation, tant spirituellement que psychologiquement cela se traduit par « qui suis-je ? ».
Ce n'est pas la même chose qui domine dans notre vécu incarné quand nous portons le « qui suis-je ? » ou « l'oubli » ou « le refus » ou « la perte du Sen ». C'est pour un discernement que nous faisons cela.
Nous distinguons toutes ces étapes parce qu'elles ne vont pas se guérir de la même manière.
Cette ignorance fondamentale, spirituelle et psychologique va entraîner la perte du Sens, c'est-à-dire la perte de la finalité, du but. Cela se traduit par « Que vais-je devenir ? »
Cette perte du Sens va engendrer la déstructuration de la Mémoire dans notre être : elle en est la porte. Jusque là, la structure de la Mémoire ontologique restait elle-même. Maintenant, les torrents de la déstructuration de la Mémoire vont apparaître. Je suis déstructuré, non seulement à l'intérieur de moi, mais aussi par rapport à l'autre, parce que j'ai perdu totalement ma finalité. Elle se caractérise par le fait que, en paroles et en actes, je refuse de vivre de l'instant présent... Du coup, je détruis, et je suis destructeur de moi-même et de l'autre.
Elle va aller dans deux grandes directions, chacune de ces directions étant incompatible avec l'autre : la première direction se caractérise par le refus de s’attacher : c'est le cercle du détachement, qui est le cercle de l’autonomie, la deuxième direction se caractérise par le refus de la séparation, c'est le cercle qui va permettre la constitution de l’Ego, qui va lui-même permettre la constitution d'une identité artificielle, d'une personnalité seconde que nous appellerons l’identité néo-formée.
La constitution de l’Ego et la constitution de l'homme psychique et charnel sont deux directions différentes. Le moi, possesseur, jouisseur et dominateur va construire un ego, conséquence de la déstructuration de la mémoire qui va faire que je vais refuser de me détacher, en refusant l'Amour séparant, en m'agrippant à ce que j'ai et à mes richesses pour ne pas aller à un amour plus grand.
Dans la déstructuration de la Mémoire, je me demande ce que je vais devenir et j'en souffre. J'éprouve l'odeur d'une souffrance. Ordinairement, lorsque c'est une blessure de la mémoire venant de la perte du Sens, cette souffrance de la Mémoire va produire ce que nous appelons en psychologie « des conversions somatiques » : c'est le corps qui va réagir.
Cette souffrance fait que je perds pieds, que je suis déchiré en deux. C'est une souffrance profonde qui vient d'une blessure résultant du fait que nous avons perdu notre identité et notre finalité. C'est le lien entre l'âme et l'être profond qui souffre, c'est pourquoi c'est le corps qui réagit.
Cette souffrance donne l'angoisse métaphysique. L'angoisse, c'est la peur. Je prends peur. C'est la peur d'être abandonné. Ce sont des peurs qui se réveillent. Lorsque nous sommes enfants, que notre mère est partie et qu'elle ne revient pas, ces peurs se réveillent quelquefois. Cette peur d'être abandonné va produire une double réaction et engendrer deux cercles incompatibles entre eux : le cercle du détachement et celui du refus de la séparation.
Premier cercle : détachement ou du refus de s’attacher qui aboutit à l'autonomie
La relation me fait mal, de plus, je vois mon cœur s'endurcir, et je deviens méchant. Je souffre trop, il faut que je m'en aille : c'est l'attitude du Fils prodigue.
Je rentre dans des actes qui correspondent à la dégradation, en même temps c'est l'homme psychique et charnel qui se construit dans l'autonomie.
Le détachement va produire le repli sur moi et, finalement, je m'insensibilise par rapport à ceux qui m'aiment, qui m'ont fait vivre et qui me font vivre. Cette insensibilisation est comme l'écho dans la Mémoire de l'endurcissement du cœur que nous avions vu dans l'affectivité, qui fait que je ne me sens plus concerné. Il y a des gens dont le centre de gravité est là. Quand j'aime, je suis appelé à voir la situation se modifier et si je ne l'accepte pas, je vais me détacher parce que cela me fait souffrir.
Cette insensibilisation entraîne la rupture définitive de la relation qui fait que je me retrouve seul, dans une attitude d'orphelin. Je ressens que je suis seul, sans père, ni mère. Les personnes comme les S.D.F qui vivent cette relation, en pleine liberté, sont plus avancées que ceux qui sont dans des étapes précédentes.
Cette attitude d'orphelin fait que je vais me débrouiller tout seul. Je vais m'établir dans une sacro-sainte indépendance. Cette attitude d'orphelin est très importante à retenir car elle peut conduire à une des portes de guérison de la mémoire : la recherche et la découverte de sa vocation. C'est grâce à cette attitude d'orphelin que je vais découvrir ma vocation personnelle qui est d'entrer dans la Maison du Père, de pardonner, de rentrer dans une dépendance vivante d'amour, dans un esprit de serviteur. Mais si je refuse encore de pardonner, de me réconcilier, de retrouver cette dépendance d'Amour vivante au Père, le cercle va continuer à s'accentuer, à paralyser, à poignarder ma liberté et cela me fera rentrer dans une habitude sacrée d'indépendance : mon indépendance est sacrée. Là, c'est ennuyeux, car ce n'est pas seulement une mémoire qui se déstructure, c'est aussi et surtout un être qui s'obstine volontairement, librement à l'indépendance : « je vais me débrouiller tout seul ».
Alors, je rentre dans un nouvel oubli, celui de toute relation d'amour, j’oublie librement toutes mes relations d'amour. C'est un oubli total, parce qu'il est libre, de l'amour relationnel. Alors, je rentre dans l'écho du cercle de l'isolement du cœur où ma liberté se blinde, et je rejette toute forme de dépendance d'amour, donc je rejette la première Pédagogie de Dieu, comme Père.
Comme je m'isole, c'est la nuit, c'est le silence, c'est le cri effrayant de la chouette.
Il n'y a pas de beauté, car la beauté est un visage de la Paternité.
Il n'y a pas de prière, car la prière est une relation d'amour, et je suis dans le rejet, l'oubli et refus.
Alors, j'ai peur : c'est la fameuse boule qui monte, comme une boule d'acier. En fait, cette peur traduit la peur d'autrui, la peur de tous les autres. Alors, physiquement, je me replie sur moi-même et je cours le risque d’entrer dans un amour de similitude.
Cette peur, enfin, redynamise le cercle du détachement.
Ce cercle continuera à tourner tant que nous ne retrouverons pas notre vocation et que nous n'accepterons pas de pardonner, tant que nous refuserons le pardon, tant que nous n'accepterons pas de dépendre d'un autre que nous. Si nous refusons d'obéir, il s'agit ici d'obéir intérieurement à quelqu'un d'autre que soi, cela continuera ; parce que ce rejet trahit le refus de l'instant présent, le refus de ce que je suis et le refus de ce que Dieu veut me donner. J'ai alors complètement perdu ma finalité, je l'ai oubliée, rejetée, mais je peux la retrouver tout le temps. Heureusement ! J'ai une peur de plus en plus grande, de plus en plus incarnée, de plus en plus somatique. Du coup, je me blinde encore plus. Les ruptures sont encore plus graves. Quand tout va mal dans ma vie, à un moment donné, je me dis qu'il faudrait peut-être changer. Mais tant que je n'en suis pas encore là, je dis « tant pis », je me débrouille tout seul, c'est comme ça.
Mais, l'infini ressort de la liberté et de la vie est en moi, alors, je me reprends, je re-existe à nouveau comme moi-même. Voilà ! Je retrouve mon Père, j'accepte d'adorer, je ne suis pas au-dessus de Dieu, et j'accepte de recevoir ce qu'il a dit d'une manière infaillible. Ce n'est pas moi qui commande, c'est Lui.
Nous pouvons tourner autour de ce cercle ou engendrer un deuxième cercle.
Deuxième cercle : refus de la séparation qui aboutit à la constitution du moi
Ce n'est pas la même attitude que précédemment. C'est le refus de la séparation comme seconde pédagogie d'Amour de Dieu. C'est l'attitude du Fils aîné de la Parabole qui s'attache à ses richesses ; comme l'enfant qui s'agrippe à sa mère et qui ne veut quitter ni le ventre (pour le bébé), ni le sein (pour l'enfant), ni la maison, ni la mère (pour l'adolescent).
On rentre alors dans une liberté qui commence à se paralyser, qui va engendrer un phénomène de fixité qui engendre lui-même un refus de grandir, un refus de croissance (phénomène de l'anorexie) et qui va s'intérioriser dans un refus de croître et de s'approfondir dans son identité ; parce que, dans l'identité, je suis lié au Père.
Le refus de ma propre identité fait que toutes les relations affectives qui vont me rappeler le visage de la Paternité vont provoquer le refus de la relation profonde avec qui que ce soit ; ce qui me met dans l'égocentrisme : je centre tout sur moi. C'est une réaction de défense que les psychanalystes appellent l'inconscient et qui est une excroissance de la personnalité.
Cet égocentrisme me fait rentrer dans un nouveau refus qui est le refus de traverser la souffrance en lui donnant un sens. Je vais, quelque part, accepter de souffrir, d'être paralysé, d'être malade, mais je vais refuser de donner un sens à cette souffrance pour qu'elle devienne féconde. Je refuse d'offrir cette souffrance, il ne me reste plus qu'une souffrance sans sens, absurde. Alors, je me révolte contre la souffrance. Je n'aime ni moi, ni ma souffrance ; ce qui entraîne une haine contre moi-même et une révolte.
Alors, je rentre dans un repli sur moi-même où il va falloir beaucoup de compensations. Ce système de compensations aboutit à la constitution de l'Ego : L’Ego jouisseur, l’Ego possesseur, l’Ego dominateur !
Le repli sur soi doit s’entendre de ce qui se passe au plan de l'âme, et non au plan de l'esprit ; c'est le retour au métapsychique par les énergies (le New Age), par refus d'aller au-delà de la souffrance. Comme il y a le refus de ce que « Je suis », je vais chercher des compensations ; et les compensations, qu'elles soient affectives, intellectuelles, sexuelles, sensibles, matérielles, sont toutes liées au point de vue « de l’avoir ». Alors apparaît l’Ego jouisseur, qui est la quête du plaisir.
Ce système de défense, au niveau de l'avoir se structure et me fait rentrer dans un nouveau système de défense. Non seulement je vais avoir beaucoup d'avoirs, je vais m'y attacher, mais je vais défendre mon bien : c'est l'esprit de propriétaire ; alors apparaît l’Ego possesseur.
Ainsi les compensations vont être liées à tout un système de défense des avoirs pour ne pas souffrir. L'ésotérico-gnostique, c'est de l'Ego possesseur ; c'est celui qui s'approche le plus de l'intimité avec l’Antichrist, qui est l'Ego dominateur. Il faut un orgueil fou pour faire cela. L'Antichrist reste à l'intérieur de nous, « il est chez nous », comme dit saint Jean. C'est pourquoi le Christ dit pour les derniers Temps : « Que votre Oui soit oui et que votre Non soit non ! »
Vous êtes dans le corps mystique, oui ou non ! Mais si vous choisissez de rester dans l'ego possesseur c'est le choix de l'enfer éternel. Il faut un orgueil fou pour faire cela ! Dans l’Ego dominateur, Je vais refuser tout ce qui est contraire au fait que je domine la situation. Je vais refouler tout ce qui est contraire à mon Ego. Et s'il m'arrive de « craquer » et de faire des confidences à quelqu'un, je vais mettre en place une grille d'interprétation pour faire de mon récit, non pas une belle histoire d'amour et de liberté, mais une histoire de malheurs. « Ma vie, c'est du malheur ». Toute mon histoire est une histoire de malheurs. Je ne vois pas les choses autrement !
Il ne faut pas paniquer car nous sommes tous empoisonnés par l'orgueil. La guérison, dans ce cercle, consiste à donner un sens à ses souffrances, car nos souffrances ont un sens. C'est la troisième porte pour la guérison de la Mémoire. Si la souffrance est là, c'est parce que je suis appelé à un amour plus grand que celui qui a échoué, pour me montrer qu'il faut que je l'aime encore plus, et non que je me venge.
Troisième cercle : Le cercle de l’identité néo-formée
Cette histoire de malheurs va réactiver le cercle de la constitution de l'Ego et faire naître l'identité néo-formée, la double personnalité avec Le cercle de l’identité néo-formée. Je vais faire en sorte que tout continue à se passer pour que ma vie soit une histoire de malheurs, puisque c'est à elle que je m'identifie, elle est mon identité. Mais, en fait, cela n'est pas mon identité car mon identité est d'être appelé à la sainteté,
Cette identité néo-formée réactive le point de vue de l'oubli, l'oubli que je suis fils et que je dois aimer. Je vais refuser les nouvelles sollicitations à l'Adoration et à la reconnaissance de Dieu comme Père, l'oubli de ce que je suis, l'oubli que Dieu est mon Père ; j'approfondis la perte du Sens. Je réactive alors indifféremment les deux cercles de la déstructuration de la mémoire ; mon ignorance et mon aveuglement augmentent...
La réactivation du cercle de l'identité néo-formée va faire que mon histoire est de plus en plus une déformation de mon identité et que je me trouve dans une situation où je n'y comprends plus rien. Ma situation est de plus en plus intolérable.
C'est ce que certains appellent « avoir de la personnalité »
Alors, je rentre dans une quête affective, qui est une attitude de prostitution, qui me remet dans la possibilité de rentrer dans la déstructuration de la mémoire qui me fait souffrir. Le moteur de cette nouvelle fixation affective est la souffrance, ce n'est pas l'Amour.
A ce moment-là, je réactive la souffrance, et mon angoisse, qui n'était qu'une angoisse de solitaire, devient une angoisse sociale. Je récupère toutes les angoisses du monde, et je cours le risque d'entrer volontairement, dans l'angoisse, qui est le corps mystique de l'Antichrist. Mais ce n'est pas de l'Amour ! L'orgueil fonctionne toujours par omission ; je rentre dans l'angoisse volontairement : « Je ne veux pas faire autrement ».
Jésus me dit comment faire : « II faut adorer, se confesser, communier, faire oraison, aimer son prochain et accepter la Crucifixion pour vivre de la Résurrection »
Conclusion
Le premier cercle, le cercle du détachement
correspond à la recherche de l'autonomie, du « moi autonome » C'est ce que fait le P.R.H. (Personnalité - Relations humaines). Pour éviter toutes ces souffrances de la Mémoire et de l'affectivité, il faut entrer dans son moi autonome, qu'ils appellent l'odeur de l'être. Mais ce n'est pas juste car, trouver l'odeur de l'être, de notre liberté profonde, ce n'est pas trouver son moi autonome.
Le second cercle, le cercle du refus de la séparation
est celui de la construction du moi, que les mystiques ésotériques appellent le soi. En fait, il y a beaucoup de gnose, beaucoup de volonté de puissance, beaucoup de soi, et ils pensent trouver ainsi une étincelle du Divin. NON ! Il faut adorer.
Le troisième cercle, le cercle de l'identité néo-formée
réactive le deuxième cercle, celui de la constitution de l’EGO, avec le moi, possesseur, jouisseur, dominateur (agressif).
L'inconscient et le subconscient sont des excroissances qu'il faut vaincre pour retrouver son identité réelle.
Il s'inscrit dans la deuxième dynamique de la pédagogie de Dieu.
C'est à partir de ce double phénomène, le refus de s'attacher et le refus de la séparation, que se construit l’orgueil : La relation me fait mal, je vois mon cœur s'endurcir ; donc, vite, il faut que je me détache.
Il faut que je m'agrippe à mes richesses pour ne pas quitter la demeure où j'ai trouvé une sécurité.
L'orgueil est une fausse confiance en soi qui produit une impossibilité de vivre de l'instant présent.
Du coup, je vis dans mes idées, c'est-à-dire dans l'idéologie, dans un système interprétatif qui me pousse dans mes actes concrets, dans deux directions : dans une fuite vers l'avenir ou dans une nostalgie du passé.
Je me plains... ou je fais beaucoup de projets. Il y a comme une spiritualité de la nostalgie qui se met en place. Dans la fuite vers l'avenir, il y a comme une nostalgie. Quelqu'un qui fait beaucoup de projets, ne peut plus se situer dans l'obéissance. L'Esprit Saint ne peut pas le guider car l'imagination joue alors un grand rôle. C'est la raison pour laquelle, au Noviciat, il est demandé de ne pas faire de projets, afin de pouvoir vivre de l'instant présent. Il est aussi demandé de faire silence pour ne pas vivre de son vécu nostalgique. Quand nous faisons oraison, il ne faut pas rabâcher « je suis malheureux ! je suis malheureux ! » ou bien « je suis heureux ! que je suis heureux ! », ce qui revient au même. Il faut se taire ! Dieu le Père nous dit : « Tais-toi, Je suis là, sois poli ! Puis-je placer un mot ? »
Ces deux phénomènes sont simultanés et ils ne sont pas incompatibles. Ils produisent le refus de la Grâce de l'instant présent. Dans la Grâce, c'est tout intérieur, tout est mobilisé pour entrer entièrement dans l'instant présent.
Quand je refuse la Grâce, je participe un peu, mais je ne suis pas dedans, je ne m'y mets pas tout entier et cela finit pas me mettre dans une situation où je refuse le mystère du temps, seconde pédagogie de Dieu qui permet à mon amour d'aller vers la sainteté, s'il est vécu dans la spire de l'instant présent. Alors, je suis dans une attitude d'impatience : je veux tout, tout de suite.
Alors apparaît le caprice.
Comme je m'impatiente, il faut que je me trouve des compensations et des avoirs. Cette recherche de compensations va réactiver les deux premiers cercles. Plus mon égocentrisme se renforce, plus je refuse de me séparer ; plus j'ai du mal à entrer en relation, plus j'ai du mal à donner mon cœur ; plus je suis indépendant et plus j'ai du mal à vivre l'instant présent.
Alors, je vais prendre des plis habitudinaires qui sont maintenant des habitudes sacrées qui sont réactivées cette fois par l'orgueil. Elles sont donc peccamineuses parce que spirituelles, pneumatiques et volontaires : cela devient spirituel par action alors qu'auparavant c'était spirituel par omission.
L'orgueil naît avec le fait de donner beaucoup de temps à ses opérations de vécu intérieur : « je n'oublie pas que ma vie est une histoire de malheurs ! ». Cela va contribuer à réactiver l'orgueil et à spiritualiser cette destruction totale de mon identité. C'est la métaphysique nietzschéenne qui apparaît.
C'est extraordinaire de voir la dynamique de la mémoire blessée qui réactive toujours plus les deux cercles. Mais la Paternité de Dieu n'a pas disparu, Elle est toujours là, derrière moi, et me redynamise sans arrêt. Mais le fait de vouloir aller toujours plus loin dans le refus de la Grâce sanctifiante accentue l'orgueil.
Conclusion : Voilà comment se construit l'homme psychique, dans la blessure de sa Mémoire ontologique, avec le refus des trois Pédagogies de Dieu.
Après avoir regardé le tableau des blessures de la Mémoire, nous allons essayer de voir les différentes manières de les gérer, de les reconnaître et éventuellement de les guérir par l'acceptation, le travail de deuil.
Rappelons que nous avons en nous trois puissances de vie spirituelle qui nous permettent d'avancer humainement et d'être de plus en plus pris par Dieu, pris par la sainteté : une mémoire spirituelle, un cœur profond et une intelligence contemplative. Si vous ne le savez pas encore, c'est embêtant ! Et ces puissances peuvent retrouver une certaine santé, un certain dynamisme dans la continuité ; car bien souvent, notre voiture « broute » !
Notre intelligence broute à cause de la paresse, mais il n'y a pas à en réparer le moteur. Dans le cœur il y a beaucoup de mécanique à réparer. La Mémoire broute, elle aussi, elle est poignardée ; mais nous continuons à vivre parce que la Mémoire est immortelle, elle ne meurt pas.
Nous avons regardé comment la Mémoire se déstructure à cause de l'ignorance de ce que nous sommes ; elle est brouillée parce que nous ne nous rappelons plus en quoi est constitué notre être vivant, nous avons oublié notre Innocence originelle.
Nous avons vu comment ces blessures entraînent la perte du sens. Quand nous disons que nous sommes désorientés, ce n'est pas un problème de cœur ni de vie contemplative, c'est un problème de guérison de la mémoire. Nous ne savons plus où aller, la perte du Sens de ce que nous sommes dans le Principe est liée à la perte de notre finalité, car l’Alpha et l’Oméga se rejoignent toujours.
A cause de la perte du Sens, il y a toute une souffrance profonde qui va provoquer une réaction de défense qu'on appelle les déstructuration de la mémoire. C'est par ces opérations de défense qu'il va y avoir la constitution des trois cercles, celui du moi, celui de l'autonomie et celui de la création un peu artificielle d'une personnalité avec une identité néo-formée.
Si ces cercles se forment un peu trop séparément et indépendamment d'une guérison de la mémoire, c'est-à-dire, si je ne reviens pas à la pureté de mon être profond, à mon identité originelle, va apparaître assez vite, sur le plan spirituel les trois cercles que nous venons de voir dans la déstructuration de la mémoire :
La constitution d'une espèce d'autonomie : je me détache, je ne veux plus être dépendant du Père, d'une source de vie, et je fais comme l'enfant prodigue, je vais me débrouiller tout seul.
Ou bien, je m'attache et je m'accroche désespérément à ce que j'ai déjà et se constitue un moi psychologique où se constituent les phénomènes étudiés pas les psychanalystes : l'inconscient avec tout un ensemble de mécanismes de défenses. Je me fais toute une histoire pour me protéger dans ce que j'ai déjà : c'est ainsi que se constitue le moi jouisseur, possesseur et dominateur.
Comme je fais tout pour protéger cela, il faut bien me constituer une personnalité nouvelle, différente de ma personnalité réelle, profonde. Le phénomène de la double personnalité fait que nous avons l'impression d'avoir deux personnages en nous. Certains disent qu'ils ont une « entité » en eux ; c'est le personnage que construit l'identité néo-formée. Ordinairement, c'est cela que l'on appelle « avoir de la personnalité » !
Ce phénomène de la constitution d'une autonomie, d'une indépendance, d'une double personnalité va opérer un retour au spirituel appelé l’orgueil, avec le refus de l'instant présent.
On peut se réfugier dans l'art pour créer un anti-destin pour lui-même ; c'est la grande source de la mystique nietzschéenne dont nous sommes tous imbibés.
Il s'agit donc de rentrer dans la guérison de la Mémoire par une prise de conscience pour guérir l'orgueil forcené qui est en nous et qui est une fabrication. Il s'agit de retrouver l’innocence divine qui n'est jamais perdue même si elle est recouverte de plusieurs couches de gangue.
Il va falloir faire sauter toutes ces couches pour revenir dans notre vraie vie.
Les nœuds de notre problème sont la perte du Sens, la perte de la finalité et la souffrance qui fait que nous ne sommes plus fixés par rapport à notre principe et à notre fin.
(cf. Tableau n°l)
Dans cette déstructuration de la mémoire, il y a une trentaine d'étapes que nous venons de repérer. Habituellement, le centre de gravité de notre cheminement dans la mémoire blessée est sur une de ces 30 étapes. Mais, il y a trois étapes-clef par lesquelles nous pouvons obtenir la guérison.
Il n'y a que trois portes d'entrée pour la guérison de la mémoire. C'est pourquoi la guérison de la mémoire est beaucoup plus difficile que la résolution du problème du sentiment de culpabilité et plus difficile aussi que la résolution d'une blessure affective et c'est pourquoi on en parle si peu.
Première porte : Au niveau des blessures parentales
L'enfant se reçoit dans une relation d'amour, celle de ses parents qui n'est pas parfaite ; si bien que sa soif d'Amour n'est pas comblée. Elle est, de plus, entachée par le simple fait que ses parents ne sont pas des saints.
Or, l'amour dont nous avons soif, c'est l'Amour infini qui nous vient de Dieu et que nos parents ne peuvent pas nous donner. Au fond de nous, existe une soif d'amour provenant de la mémoire ontologique.
Quand l'enfant est en train de croître dans le sein maternel, alors qu'il est encore dans l'expérience éblouissante du ravissement initial de l'Acte créateur de Dieu qui a rempli quasi totalement son vase d'Amour, il reçoit, dans sa mémoire originelle, toutes les déterminations d'amour de ses parents et il les reçoit passivement. Ces blessures parentales provoquent bien souvent un recul, ce qui entraîne un doute sur l'amour. Il en oublie que Dieu est Amour. L'oubli est le premier coup de poignard dans notre Mémoire ontologique.
Mais, avant cette blessure-là, je suis dans l'Amour, j'ai soif d'Amour et je choisis toujours l'Amour autant que je peux (à partir du 2e mois seulement). Par ces blessures parentales, qui ont entamé un mouvement de recul et de séparation vis-à-vis de mes parents, je peux, au niveau de la rupture de la relation, re-choisir l'Amour, malgré mes blessures. En re-choisissant l'Amour malgré ma blessure je peux revenir à mon expérience initiale et ainsi réapprendre à faire confiance à l'autre, qui est proche de moi, mon père et ma mère qui sont ma source.
Deuxième porte : Au niveau de la perte du Sens
Par la perte du Sens, qui fait que j'oublie qui je suis et que j'oublie ma finalité, je peux rejoindre mon origine par une prise de conscience.
Comme je n'arrive pas à me dévoiler à moi-même mon vrai problème, et que je n'arrive pas à faire mémoire de moi-même, je m'enferme dans des structures artificielles. Au niveau de la perte du Sens, la prise de conscience me permet de retrouver le Sens qui était dans mon principe. Elle me permet de comprendre pourquoi et comment j'en suis arrivé là. C'est l'opération de dévoilement sur le voilement de mon innocence originelle, toujours présente.
Cette prise de conscience se fait à partir des événements analogiques. Elle va me permettre de donner un autre sens aux événements analogiques, de me rendre à l'image de Dieu. Cela ne peut se faire que par la prière.
Troisième porte : Au niveau de l'attitude d'orphelin
Grâce à cette attitude d'orphelin, je peux découvrir ma vocation personnelle, qui est une vocation au pardon, une vocation à la réconciliation, à la dépendance d'Amour.
Cette troisième porte est très intéressante, elle est plutôt religieuse.
Dans ces moments-là, je me sens seul, abandonné, et je proclame que Dieu est absent et que tout le monde est absent. Mais, en priant près de quelqu'un qui est dans cet état d'orphelin et en l'aimant, je peux obtenir qu'il découvre sa vocation, par voie de révélation, qu'il découvre que Dieu est son Père.
Grâce à cette attitude d'orphelin, il découvre qu'il n'est pas seul, que sa vocation est dans cette blessure du cœur. Il découvre sa vocation à cette dépendance d'Amour de Dieu le Père, dans la Blessure du Cœur du Christ qui est une dépendance d'Amour encore plus grande, dans l'esprit de service.
Voilà remis en place le deuxième élément de la Pédagogie de Dieu qui va me rendre attentif à cette heure du Père où je vis de l'instant présent. Cela va me permettre d'entrer de plus en plus dans la patience qui m'établit dans l'être où je suis aimé, et où j'aime et non dans l'avoir. Je suis établi dans l'oblativité. Mais cela ne peut se faire qu'au terme d'un travail de deuil.
C'est le propre de la mémoire de me redonner une parenté familiale (père et mère), humaine (l'Église) et divine (être Fils).
Mais si je refuse encore de pardonner, de me réconcilier, de retrouver cette dépendance vivante avec la Volonté du Père, le cercle continue de s'accentuer continuera à terroriser, à paralyser et à poignarder ma liberté.
Alors, j'entre dans une habitude sacrée : Mon indépendance est sacrée !
Je peux rejoindre mon origine par une prise de conscience qui va permettre à mes souvenirs de se dévoiler.
Le contraire du dévoilement des souvenirs, c'est de consentir à rester dans son identité néo-formée. Il ne faut pas que le dévoilement des souvenirs soit psychologique, sinon nous renforçons notre identité néo-formée, en renforçant les mécanismes de défenses.
Les blessures de la mémoire peuvent bénéficier d'une écoute thérapeutique. Mais, si la thérapie peut m'aider à poser de nouveaux choix, à me rapprocher de l’axe de l’Alliance, à faire remonter des souvenirs blessants, à faire des prises de conscience, elle ne permet pas à l'homme spirituel qui est en moi de vivre. Le dévoilement des souvenirs doit être fait de la manière la plus spirituelle, la plus contemplative qui soit. Pour cela, il ne faut pas que cela se fasse par des techniques de remontée à la surface, comme la dynamique de groupe ou les techniques de régression ou la psychanalyse... Je vais respecter le temps. Il ne faut pas être pressé. Il ne faut pas dire : « celui-là a un problème, vite, je vais le charcuter pour que cela remonte le plus vite possible ». Non ! C'est pourquoi nous allons voir les 10 étapes de la guérison de la mémoire.
Une technique ne peut guérir les blessures de ma mémoire.
C'est l’Esprit Saint qui, en même temps, dévoile et libère. Et, l'Esprit Saint respecte le temps ! Il respecte la personne !
Ce que ne fait pas une thérapie habituelle.
1. – Nécessité de l'oraison
Ce dévoilement est porté avant tout par la prière, par l'oraison, qui est une relation de Cœur à cœur avec Dieu.
Cette oraison est aussi en relation avec une prière de demande :
« Seigneur, guérissez-moi », « Seigneur, faites que je vois ». Mais nous verrons cela ultérieurement.
En effet, ce n'est pas moi qui vais trouver en moi les ressources pour mettre la Lumière sur les souvenirs, surtout pour les souvenirs venant des blessures affectives de la Mémoire, notamment les blessures parentales. D'autant plus que les blessures les plus radicales de la Mémoire celles qui vont donner leur détermination à toutes les blessures analogiques suivantes, sont reçues dans une Mémoire Ontologique qui n'est pas reliée à une mémoire affective, ni à une mémoire conceptuelle, ni à une mémoire d'appui, ni à une mémoire sensitive.
Nous avons vu que la mémoire ontologique est absolument seule au moment de la constitution de la première cellule, quand les deux gamètes constituent un zygote. Ce n'est qu'ultérieurement qu'il y a la constitution d'organes récepteurs au niveau du sens du toucher, récepteurs au niveau de l'audition, récepteurs et transmetteurs au niveau du concupiscible et de l'irascible, donc qu'il est possible d'avoir une première activité réflexive, avec la possibilité d'une affectivité. Saint Thomas parle de 40 jours, mais les médecins disent plutôt 70 jours.
Une psychanalyse peut remonter jusqu'au 70e jour à la rigueur, mais pas avant, et grâce à certaines techniques plus ou moins douteuses comme « les techniques de régression ».
Mais il est impossible de remonter à la première cellule, car il n'y a pas d'organes permettant de conserver le souvenir de l'événement. Lorsque nous nous souvenons, c'est au niveau de la mémoire sensible, de la mémoire affective, de la mémoire conceptuelle ou de la mémoire d'appui. Mais toutes ces Mémoires impliquent des organes ; tandis que la Mémoire ontologique s'exerce avant la formation des organes
II existe différentes formes de mémoire :
La mémoire sensible : Par exemple, si vous faites mal à un animal, il peut s'en souvenir durant des années: un chien, une âne, un éléphant a une mémoire sensible.
La mémoire affective : Par exemple, je suis en relation avec mon frère jumeau, dans le sein maternel, et nous nous aimons. Puis, ma mère apprend qu'elle attend des jumeaux alors qu'elle ne voulait qu'un enfant : II y a là une blessure affective et cette mémoire affective est reçue dans les organes du concupiscible et de l'irascible.
La mémoire conceptuelle : Par exemple, quand je comprends pour la première fois la différence entre une vache et un cheval.
La mémoire d'appui
II y a encore d'autres types de mémoires qui impliquent des organes.
Mais la mémoire spirituelle, la mémoire originelle, la Mémoire Ontologique est toute pure dans ma première cellule. C'est là où se trouve mon nom, qui doit se déployer, là où se trouve le germe de ma sainteté qui resplendira à la face de tous les élus. Je chéris mon Nom dans cette Mémoire ontologique.
Mais la Mémoire Ontologique ne s'exerce plus car il y a tout de suite le péché originel, le péché symbiotique et le péché communionnel.
Quand on est très innocent, très pur, très fragile, on est un récepteur formidable de toutes les forces noires, de toutes les forces contraires : c'est cela le péché originel !
Quand on verse du sang sur une flaque de boue, cela ne se voit pas ! Mais lorsqu'on met une goutte de sang sur de la neige immaculée, c'est extraordinaire ! Il ne se produit pas du tout le même phénomène ! (S.Veil)
En effet, quand une personne impure (identité néo-formée) se trouve confrontée au mal, le mal vient sur la personne, entre en elle et engendre un nouveau mal car l'impureté n'arrête pas l'impureté ni le mal. L'impureté rejoint l'être impur pour engendrer une nouvelle impureté : comme un être humain engendre un nouvel être humain. Ainsi la colère engendre la haine, la haine engendre le meurtre, le meurtre engendre les compensions, les compensions engendrent l'hypocrisie et l'hypocrisie engendre l'oubli. C'est le mal en cascade.
Quand une personne pure se trouve confrontée au mal, le mal s'arrête sur elle (le sang sur la neige) et au lieu de se transformer en vice, en l'universalité du mal, le mal se transforme en croix, et il s'arrête. L'innocent face au mal devient l'Innocent Crucifié. Quelque part le mal s'arrête sur lui.
Nous sommes tous porteurs, dans notre Mémoire ontologique de cette vocation dans le Christ, car Dieu a créé tout homme dans son Fils. Dieu nous a prédestinés à reproduire l'image de Son Fils, à devenir fils. Et Son Fils, c'est l'Innocent crucifié.
À ma manière, je participe à cette prédestination du Christ pour glorifier éternellement la Victoire de l'Amour sur tout, même sur le mal.
Nous sommes tous porteurs de cette Innocence Crucifiée.
Mais, nous ne nous en rappelons pas, car nous n'avons pas d'organes pour nous en souvenir. Pourtant elle est bien là, présente.
Toutes les traditions, orientales et occidentales, essaient de retrouver cette Mémoire ontologique. Nous avons vu la recherche du Samadhi sans racine qui est la recherche de cette mémoire originelle. Le New Age essaie aussi de retrouver cette mémoire par des voies métapsychiques, paranormales, mais du coup, il y a le risque de se faire posséder par des puissances intermédiaires
Nous, nous voulons retrouver cette Mémoire toute pure, pour vivre de cette Innocence, retrouver notre vocation et revivre.
L'Innocence Crucifiée est une blessure de la Mémoire toute pure. Ce n'est pas une blessure de la mémoire affective, ni conceptuelle, ni réflexive, ni sensible. Nous n'avons pas de sentiment de culpabilité à cause de cela. Nous n'avons aucun sentiment de culpabilité d'avoir eu le péché originel : celui qui se sent coupable et qui prétend avoir développé une névrose à cause du péché originel se trompe lourdement !
2. – Nature de la blessure parentale
La nature de cette blessure parentale qui véhicule l'introduction dans notre innocence de la tache du péché originel dans notre âme incarnée, n'est pas la même pour tous.
Le véhicule de la transmission du péché originel va être différent selon l'unité sponsale des parents. Nous n'avons pas tous la même blessure parentale véhiculant le péché originel au premier instant de la conception, car le péché originel est véhiculé dans un atavisme qui implique aussi le péché communionnel et le péché symbiotique, véhiculés par les parents.
Mais ce type de blessures va se retrouver tout au long des périodes de la vie humaine. Après la naissance, nous allons subir blessure sur blessure ; nous allons nous rendre compte, par exemple, que c'est toujours par rapport à l'autorité que nous sommes blessés. Dans des circonstances différentes, ce sont les mêmes paroles dites par des gens différents qui vont provoquer en moi le même type de comportement. Il y a un événement analogique qui se répète ; et je développe dans ma vie spirituelle des phénomènes portés par ma mémoire psycho-spirituelle qui sont du même ordre que cette blessure initiale. C'est grâce à la mémoire sensible du dévoilement de mes souvenirs, par les événements analogiques, que je peux percevoir la détermination particulière de la crucifixion de mon innocence, de la blessure de ma mémoire ontologique. Mais c'est une approche très intuitive.
La prise de conscience se fait par le dévoilement des souvenirs.
3. – Le dévoilement des souvenirs est une initiative de Dieu
Le point le plus important du dévoilement des souvenirs, c'est que Dieu seul peut faire le lien entre les blessures de ma vie et ma blessure originelle. Sans l’Esprit Saint, nous n'arriverons même pas à distinguer les premiers prolégomènes d'une lumière sur ce qui perturbe notre comportement et qui fait que nous avons une identité néo-formée.
Il faut retrouver la véritable mémoire de ce que nous sommes, la mémoire vivante.
C'est un vrai problème car la blessure que nous avons subie était une véritable trahison ; et celle que nous avons subie à tel ou tel moment est la même trahison que nous ressentons lorsqu'une personne nous dit la même phrase que celle dite par notre père à notre mère le jour où il apprend que nous existons. C'est pourquoi certains pensent qu'il y a un unique esprit qui anime tous les êtres humains, puisque les mêmes événements se reproduisent toujours dans la vie. C'est ce que certains appellent l'inconscient collectif.
En réalité, cela n'est pas extérieur à moi. C'est moi qui, après la perte du Sens, refuse de rentrer dans ma véritable identité, dans mon nom. Alors, je provoque, inconsciemment, une réponse de l'autorité ; car eux ont la Grâce pour cela ! Je dois prendre conscience de cela, ce qui me permettra de ne pas accuser le Père. C'est moi qui suis menteur quelque part et je dois cesser de me mentir à moi-même, je dois retrouver mon innocence crucifiée pour qu'elle ne soit plus destructive, mais constructive, conquérante et triomphante, au lieu que ce soit un phénomène de repli et d'isolement dans l’attitude d’orphelin (personne ne m'aime : 1er cercle), au lieu que ma vie ne soit qu'un drame (2e cercle), que je me replie sur moi et que je sois obligé de « refaire » ma vie (facere).
C'est ainsi que se cristallise un orgueil forcené : II faut prendre conscience de cela mais il ne faut pas s'empêcher de vivre pour autant.
4. – Le dévoilement des souvenirs vient de l'Esprit Saint.
Il faut donc apprendre à faire oraison, Il faut prier, supplier l'Esprit Saint qui est au fond de moi, blotti au sein de l'Image de Dieu en moi, dans mon nom, et qui ne demande qu'à déployer Sa Lumière pour me faire voir ce que j'ai oublié.
Quand nous entrons dans cette guérison de l'orgueil, nous avons envie de guérir la racine de notre orgueil, qui est la guérison de la mémoire par la guérison des souvenirs et, en même temps, nous n'avons pas envie de guérir. C'est un sentiment psycho spirituel que nous provoquons inconsciemment pour nous protéger dans notre identité néo-formée et dans notre ego possesseur, jouisseur et dominateur. Bien sûr que tout ce que nous ressentons ne veut pas le voir.
Mais grâce à l'oraison, je vais retrouver la Lumière originelle, actuelle, finale, personnelle, qui lave tout et qui est au centre de moi-même. Il n'y a plus que l'Amour de Dieu qui est en train de faire de moi un saint, en ce moment, sous l'obombration du Saint-Esprit ; et je laisse la Gloire de Dieu s'emparer de la moindre cellule de mon corps, de mon âme ; et je revis la réalité de ce que je vis au centre de mon âme incarnée, dans mon nom véritable. Cette oraison prend tout en moi, si c'est à partir de la lumière originelle, actuelle et finale que je fais oraison. Je reste ainsi une heure pour qu'il n'y ait plus que la Sainteté de l'Amour de Dieu qui glorifie tout. C'est facile à faire. Ce qui est difficile, c'est de faire oraison 8 heures de suite. On peut y arriver mais cela demande du temps. Le moine qui fait oraison tous les jours commence par 20 minutes par jour... On espère qu'à la fin de sa vie, cela lui prendra toute la journée. Et si cela ne prend pas toute sa journée, il ira au Purgatoire ; mais il ira au Ciel beaucoup plus vite que tous ceux qui ne font pas oraison du tout.
5. – L'oraison fait jaillir le désir de la guérison
Après l'oraison, nous nous rendons compte que, dans notre état actuel, nous sommes vraiment malade (identité néo-formée), et que nous avons besoin d'une guérison. C'est cela la première prise de conscience : nous sommes malade car l'Esprit Saint n'est pas en nous, tout le temps, actuellement.
Mais, la guérison ne se fera pas sans nous. Nous devons nous engager dans cette lutte contre l'orgueil. Cette lutte demande un très grand héroïsme. Dans cette lutte, nous sommes aussi grands que sainte Jeanne d'Arc. Dans l'oraison, nous allons découvrir la puissance de Dieu.
Nous devons donc coopérer à cette guérison. Pour cela il faudra faire revenir ces souffrances initiales, les revivre. Et ce ne sera pas toujours drôle.
C'est donc l’Esprit Saint dans l'oraison, qui, en nous, va nous inviter à guérir pour que notre sainteté soit là.
6. – La prise de conscience est une initiative de Dieu
Toi, tu es là et tu te dis que ce serait bien, mais tu n'en as pas envie. Si tu es enthousiaste pour entrer dans ce processus de guérison, que tu n'as aucune retenue, aucune réticence, c'est que cela ne vient sûrement pas d'une initiative de l'Esprit Saint. Cela prouve que tu souhaites que l'on s'occupe de toi, c'est une nouvelle tentation de faire gonfler encore plus ton moi jouisseur. Si tu dis oui et que tu ressens oui, c'est suspect. Par contre, si tu dis oui et que tu ressens non, alors tu peux te tourner vers Jésus, et tu comprends ce qu'il dit dans l'Évangile quand il dit : « Veux-tu vraiment guérir ? » ou « Que veux-tu que Je fasse ? »
Alors, dans la prière, j'accepte cette conversion, ce retour et cette acceptation de moi-même ; et je dis « Oui, je veux ». Ce sera dur pour mon ego artificiel, mais ce sera une béatitude pour mon être, pour ma personne véritable, pour mon innocence profonde, pour mon nom, pour ce que je suis réellement. Et ce sera un baume pour mon innocence crucifiée, une transfiguration, un retour, un jaillissement.
Si je rentre dans le regard de Jésus ou de l'Esprit Saint sur moi, Il va me donner, dans ce Cœur à cœur avec Lui, son regard sur moi, au lieu que ce soit mon propre regard ou le regard de ceux qui sont proches de moi ou celui du psychothérapeute. Jésus va me donner son regard et le regard de l'Immaculée sur moi. Et, petit à petit, je vais m'habituer à ce regard de Jésus sur moi et à me voir comme Jésus et l'Immaculée me voient ; car Ils ont les yeux fixés sur moi, parce que Dieu est là avec un regard d'admiration et d'Amour éperdu, puisque Jésus et Marie, dans la vision béatifique, ne font que regarder le Père.
Et je découvre, dans ce Cœur à cœur avec Dieu, dans ce regard de Dieu, que Dieu est présent là où justement je Le croyais absent, là où je me croyais abandonné ! C'est beaucoup plus qu'un simple regard, c'est une Présence, c'est la présence de Dieu !
C'est cela l'examen de conscience du soir, la prise de conscience du soir ! C'est puissant ! Je regarde l'événement avec le regard de Jésus et de l'Immaculée depuis le début de ma journée jusqu'à maintenant.
Dans ce cœur à cœur va se dévoiler, petit à petit, à mes yeux, l'événement qui doit se dévoiler pour moi. Et je dois choisir de me convertir par rapport à cet événement. Ce choix va m'amener progressivement à ce regard de Dieu sur l'événement qu'il faut.
Chaque matin, nous nous réveillons dans un état d'innocence :
« Mon amour, chaque matin, se renouvelle » dit le psaume et la tradition des Pères dit :
« Le Christ donne au matin une Grâce de Résurrection, c'est la Grâce de l'Aurore »
Si nous étions très attentifs à cette Grâce de l'Aurore, nous verrions que nous sommes dans un certain état de grâce surnaturelle, mais actuelle, donc transitoire (tandis que la Grâce sanctifiante est habituelle).
Dans l'examen de conscience du soir, il faut regarder le moment où nous avons dérapé. Car il y a eu un moment de révolte contre Dieu dans la journée, à travers un événement, un geste analogique. Il faut repérer cet instant, sous le regard de l'Esprit Saint, car c'est cet acte qui a poignardé l'Amour de Dieu en nous, alors que je vais essayer de le camoufler pour me donner bonne conscience.
Je dois le repérer car il est de même nature que la blessure première de ma réaction contre Dieu lorsque j'étais dans la cellule initiale : « Même le juste, le saint, pêche sept fois par jour »
C'est à partir de ce nouveau regard, à partir de l'oraison, à partir de cette saveur de l'Amour de Dieu vécu dans toutes mes puissances, que s'établit cette première étape du dévoilement des souvenirs que l'on appelle la prise de conscience. Il faudrait que cette prise de conscience demeure toujours.
C'est la racine de tout le cheminement de la Résurrection de mon innocence crucifiée qui fait que « je reviens » ! Je suis l'Enfant prodigue qui revient dans la Maison du Père. Je reviens moi-même à ma place, dans la Béatitude d'un festin rempli d'allégresse.
S'il y a cette première prise de conscience, je vais alors accepter les lumières qui me viennent de l'extérieur. Par exemple, je vais lire la Bible et y découvrir des passages de guérison qui seront comme des coups de projecteur parce que je suis dans cet état de prise de conscience à la fois divine et humaine. Et cela va faire revivre quelque chose qui était comme anesthésié en moi. Car il y a une espèce d'anesthésie de ma véritable identité, de ma vitalité profonde, dans ma nature blessée.
Ce ne sera pas le même passage pour tout le monde, car chacun est blessé différemment et a des événements analogiques différents. Mais, cela va me dire quelque chose sur la guérison du souvenir, et cela va me donner une nouvelle lumière du point de vue de la prise de conscience.
Par exemple, je vais assister à la liturgie, je vais suivre l'Église dans son cheminement, dans sa liturgie. Je vais vivre les grandes Fêtes liturgiques : vivre l'Avent, vivre Noël, vivre Pâques, vivre la Présentation au Temple, vivre le Mystère de la Résurrection du Christ, vivre le Mystère de la Pentecôte... Et je vais regarder comment je vis ces événements liturgiques, car ils seront révélateurs de ma blessure.
Si je vis la Fête de Noël, la naissance de l'Innocent crucifié, bien que j'y mette toutes mes puissances spirituelles, avec indifférence (premier type de réaction) cela veut dire que je suis un être broyé car l'indifférence est un mécanisme de protection en béton. Cela veut dire que j'ai un orgueil forcené et que ma mémoire ontologique est fortement blessée. Si je la vis dans l'angoisse (deuxième type de réaction) c'est un deuxième mécanisme de défense, bien moins fort que l'indifférence.
Je peux aussi vivre cette Fête de façon très forte ou de façon très simple mais ce sont là deux types de réaction positive.
Mais les deux premiers développent des mécanismes de protection.
Il faut alors se poser la question, sous le regard de Dieu : quelle est la raison de mon indifférence ? Pourquoi cette angoisse ? Car il est important de comprendre d'où viennent mes réactions.
Il faut aussi que j'analyse mes réactions vis-à-vis de ceux qui vivent autour de moi, dans la même communauté, dans la famille ou dans le groupe de prière.
C'est cette prise de conscience qui va me permettre de comprendre pourquoi, face aux mêmes situations, j'ai des réactions complètement irrationnelles, en actes ou en paroles !
Par exemple, quand mon mari me parle d'une certaine chose, je réagis toujours de la même façon à certains points et de façon complètement irrationnelle.
Si je suis dans cette étape n° l de la prise de conscience, je vais accepter de guérir. Si Jésus me dit : « Veux-tu guérir ? » je vais accepter et coopérer.
Cette étape est très importante.
C'est le point de départ de ma coopération. Et c'est là seulement que je vais découvrir que Dieu est présent en moi, dans ma vie, et que c'est justement là où Il est le plus présent.
Cette guérison de la Mémoire se fait en 10 étapes, car 10 est le chiffre du Père. Et il est normal que nous passions par ces dix étapes puisque, pour nous, il s'agit de retourner au Père, en nous re-situant comme Fils.
Première étape : Prise de conscience de la nécessité d'une guérison
Rappel de ce que nous venons de voir :
Dans la mesure où j'accueille la Grâce, dans ce Cœur à cœur avec Lui, Dieu me fait entrer dans son regard à Lui sur moi, sur les autres, sur Lui-même ; et l'événement qui doit se dévoiler, va se dévoiler peu à peu. Cela peut être à l'occasion d'un événement ou d'un accompagnement et pas seulement par l'oraison, même si elle est la voie royale.
La communauté peut être source de dévoilement. La liturgie de chaque jour me révèle qui je suis, selon ce que je ressens dans les différentes fêtes liturgiques. être dans l'indifférence ou dans l'angoisse sera révélateur d'un système de protection plus ou moins fort.
La Parole évangélique peut aussi être révélatrice de ce que je suis. Telle scène peut me faire revivre un événement vécu dans l'enfance.
Et parce que tout est vécu dans le regard de Dieu, c'est beaucoup plus qu'un simple regard, c'est une Présence, la Présence de Dieu. Dans cette étape, je découvre que Dieu m'aime dans mon être.
Deuxième étape de la prise de conscience : Dieu m'aime dans mes actes (dissocier les actes de ma personne)
Si je découvre que Dieu est présent dans ma blessure, alors que j'ai le sentiment de son absence, je prends conscience de deux choses :
Là où j'avais l'impression que l'Amour de Dieu était absent, je découvre qu'il est présent. C'est dans ma blessure qu'il est le plus présent, en moi, de la manière la plus vivante, la plus féconde, la plus efficace, la plus brûlante.
Quand je me croyais souillé, sali, je découvre que je suis une merveille de Dieu. Si je me croyais abandonné, c'est-à-dire si je me croyais un être abandonné, parce que je ne suis pas aimable (personne ne m'aime, j'ennuie tout le monde, les gens m'ont toujours délaissé, je ne vaux rien...), en fait, je découvre que je suis accompagné de l'Amour de Dieu et de ceux qui m'aiment.
Par contre, si je suis un peu abandonné par ceux qui sont autour de moi, ce sont mes actes qui provoquent ces réactions de rejet.
Dans la prise de conscience, je découvre que ce sont de mes actes faux dont ils veulent se séparer, en même temps, qu'ils veulent s'unir à mon être profond car ils m'aiment.
Je fais alors la distinction entre mon Être (ma vraie personne) et ma fausse personnalité (néo-formée), c'est-à-dire entre mon être et mes actes.
Nous avions déjà vu que, pour le sentiment de culpabilité, l'erreur est de se définir par ses actes au lieu de se définir par son être. Quand une mère dit à sa fille « tu es une menteuse », elle a confondu son être avec son acte et en plus elle a aussi peut-être mal interprété cet acte. Et c'est cela qui provoque la blessure.
Dans la guérison de la mémoire, c'est le contraire : il s'agit de faire une distinction entre mon être et mes actes. Je suis à l'image de Dieu. Je suis rempli de l'Amour de Dieu. Je suis un héros, un saint dès cette terre. J'ai des potentialités d'amour infinies en moi. Je découvre ces trésors de vie, de lumière, d'amour, d'éternité en moi, je découvre le saint qui est en moi.
A l'inverse, quand j'ai l'impression d'être sale, d'être impur, mauvais, perdu, etc. j'ai un sentiment de honte, ce qui entraîne un sentiment de culpabilité. Je dois retrouver la cause de l'acte qui a provoqué cette -honte et je le donne à Jésus. Alors, je retrouve mon être.
L'acte n'est pas la substance, ce n'est qu'un accident, ce n'est qu'une pellicule et je ne m'assimile pas à une pellicule tombée par terre !
Cette étape de la prise de conscience est très importante car assimiler ce que je suis à mes actes est une erreur profonde de l'intelligence, c'est une mort de la volonté, du cœur profond et c'est un oubli de la mémoire.
Alors, je peux regarder les choix que j'ai faits comme pécheur et les contempler avec attention et beaucoup d'amour au lieu de les voir avec un sentiment de culpabilité et de honte. Car, si je suis brisé par le péché, c'est à cause de ces actes qui entraînent une sorte de haine envers moi en tant qu' Ego mais aussi envers mon entourage.
Je découvre là aussi que ces attitudes d'agressivité, de haine, d'indifférence sont des attitudes qui ne s'enracinent pas en moi, elles ne sont que les conséquences d'actes posés ou de blessures de ma mémoire. C'est cela qui décide de la différence entre le remords de Judas et le repentir de Pierre :
– JUDAS se condamne, il a honte, car il s'assimile entièrement à son acte.
– PIERRE, lui, se détache de son acte et il pleure dans la gratitude de l'Amour du regard de Jésus posé sur lui.
C'est cette distinction entre l'être innocent que je suis qui ressuscite dans la Victoire de l'Amour et les actes que j'ai commis, qui ouvre la porte au repentir. Le repentir ne peut venir que si je suis déjà dans le pardon, il prouve que je suis dans une attitude vraie.
Dans la première étape, je découvre que Dieu m'aime dans ce que je suis.
Dans cette deuxième étape, je découvre que Dieu m'aime dans les actes que j'ai commis. Je constate que, si je suis pécheur, je suis aimé de Dieu dans la blessure de mon péché, car la première chose détruite par le péché, c'est moi, mon Ego, ce n'est pas mon être. Donc, je fais la découverte que Dieu m'aime, non seulement dans mon être mais dans les actes que j'ai commis. Dieu me rejoint d'ailleurs à travers ces actes qui semblent me séparer de Lui, et qui sont, en réalité, cette espèce de cri de l'enfant dans le désert qui demande un Rédempteur.
Dieu m’aime le plus, là, dans ces actes que je perçois comme des actes de séparation qui sont en fait des actes de réconciliation avec Dieu. C'est la raison pour laquelle Jésus abandonne les 99 brebis pour aller à la recherche de la brebis perdue, vers l'acte qui est un cri de révolte, mais aussi un cri d'appel du Rédempteur, de Dieu concrètement présent dans une étreinte qui va jusqu'au physique.
Alors, je peux vivre de cette rencontre personnelle avec Dieu, concrètement incarné en Jésus. Cette rencontre personnelle avec Jésus est la signature de la deuxième étape de la prise de conscience. Cela prouve que je suis dans le repentir et que je suis dans une attitude juste.
Jusqu'à maintenant, c'est Dieu qui a tout fait, c'est Dieu qui a eu l'initiative et je n'ai fait qu'essayer de ne pas mettre d'obstacle à son action en moi.
Troisième étape : La prise de distance : La Foi - L'abandon - La confiance
Après cette 2e prise de conscience que mon péché est un cri vers le Dieu vivant et qu'il y a cette étreinte du Rédempteur, je vais re-demander la Grâce, je vais me re-trouver sous le Regard de Jésus, je vais réentendre Sa Parole qui me demande « Veux-tu vraiment guérir ? ». Je vais alors renouveler ce choix de guérir et de changer.
Cela va impliquer une attitude de confiance et d'abandon en Jésus, car tous ces actes me donnaient une sorte de sécurité pour ne pas « me faire manger ». Cette prise de distance consiste à faire la distinction entre le je de mon je suis et le moi de mon Ego pour qu'ils se dissocient, car ce qui constitue le moi, ce sont les actes de l'Ego possesseur, jouisseur, dominateur.
Je vais donc de plus en plus vivre de mon être de toujours, de mon je de toujours, qui ne demande qu'à croître et le dissocier de tous ces actes artificiels qui sont autant de systèmes de défense mis en place pour me protéger et pour ne plus souffrir. Je les abandonne à Jésus. Mais ce lâcher prise, vis-à-vis de tous mes systèmes de défense, ne peut se faire sans une attitude de complète confiance et de total abandon à Jésus, qui est tout-puissant et réceptif.
Si je ne fais pas: confiance, je risque de me dire : « c'est sûr que si je fais cela, mon mari va me –bouffer » et je ne vais pas vouloir lâcher prise. Mais Dieu est là.
Ce travail de la Prise de distance implique le temps. Je ne peux pas toujours me réfugier dans mes peurs, je dois vivre de l'instant présent. Et comme ce n'est pas en mon pouvoir de le faire, je demande à l'Esprit Saint une intervention miraculeuse pour que lui fasse cette séparation pour que j'aie une haine absolue de tous mes systèmes de défense et pour qu'ensuite Il les fasse sauter car il m'est impossible de trouver en moi la ressource, la force nécessaire pour faire cette séparation. Mais je suis d'accord pour guérir et je laisse à l'heure de l’Esprit Saint d'opérer cette séparation. Cette guérison de la Mémoire ne sera pas immédiate, elle peut demander un certain temps, car elle dépend de l'heure de l'Esprit Saint.
Quand l'Esprit Saint a réussi à opérer cette distance entre mon Ego (mon identité néo-formée) et ma vocation à la sainteté, je vais enfin pouvoir vivre moi-même, et commencer à réaliser l'être nouveau que Dieu et moi allons réaliser ensemble par la Grâce. Je prendrai une direction nouvelle.
Lorsque j'étais dans mon identité néo-formée, j'étais enfermé dans une tour, et je tournais en rond autour de mes murs (les murs de Jéricho : Israël a dû faire sept fois le tour des murs de Jéricho, avec des trompettes, pour que les Sept Dons de l'Esprit Saint puissent faire sauter ses murs.). Du coup, la direction nouvelle, dans l'oraison, est à nouveau sous mes yeux : il faut aller à Jérusalem.
Quatrième étape : Faire de ma vie une histoire sainte
A partir du moment où je fais distance, je m'aperçois que ce qui est pur en moi me permet de voir un fil rouge de toute ma vie. Je relis toute ma vie en fonction de cette dissociation et je me rends compte que j'ai été mené par Dieu à travers ces méandres et que ce fil rouge est cette partie pure de moi-même par rapport à tous mes blocages.
A partir de cette direction nouvelle, je vais faire de ma vie une histoire sainte, et non plus une histoire de malheurs. Il ne m'arrive plus que des Grâces. Le vilain petit canard d'Andersen est une merveilleuse illustration de cette étape. Le vilain petit canard va devenir un cygne blanc. Tout comme lui, ma tristesse, ma peur et mon découragement, vont se changer en joie parce que je découvre que je suis un cygne de Dieu, une merveille de Dieu. Cette nouvelle lecture de ma propre vie n'est possible que dans une relecture par Dieu à travers différentes sortes de regards : celui du thérapeute, celui d'un ami ou d'un confesseur, etc.
Cinquième étape : Le recadrage positif
J'entre alors dans une nouvelle vie. Cette nouvelle étape me permet un recadrage positif. Je vis ma vie intérieure comme une vie de grâce, je retrouve un Sens qui débouche sur la vie et qui donne vie. Je vais vers Jérusalem. Je débouche alors sur la sixième étape qui est l'oblativité et l'offrande.
Sixième étape : Les ressources nouvelles – L'oblativité
Dans cette direction nouvelle, je vais trouver des ressources nouvelles qui vont me permettre d'accepter de changer. Les psychologues appellent cela le P.N.L. (programmation neurolinguistique).
Pratiquement, les adeptes du New Age shuntent les cinq étapes précédentes et commencent par la sixième, si bien qu'il n'y a pas de spirituel, ni de Grâce, ni d'énergie pneumatique, ni d'énergie personnelle, métaphysique, il n'y a plus que des énergies métapsychiques pour faire le travail ! C'est efficace, mais c'est sans Dieu, sans moi. C'est anti-Dieu, c'est anti-homme, c'est anti-personne... mais c'est pro santé. Jusqu'à maintenant, je n'avais pas encore vraiment décidé de me mettre en marche. C'est Dieu qui a commencé, qui a tout fait ! Ces ressources nouvelles, je vais les prendre là où elles sont et où je ne les prenais pas. Ces forces nouvelles, je vais les trouver, par exemple, dans une nouvelle manière de prier, ou dans la confession où je vais demander à Jésus Confesseur, à Jésus Rédempteur ces forces que je n'ai jamais demandées ; je vais puiser dans le fruit de tous les sacrements ; je vais prier d'une manière nouvelle où je vais vivre de façon plus théologale, plus dans le sens de l'Union transformante où sont toutes les ressources nécessaires.
Grâce à ces forces nouvelles, je vais pouvoir accepter de me mettre en marche. Je vais poser un nouveau choix, en collaboration avec Dieu, en réponse à son appel, pour devenir ressemblant. C'est Dieu qui me dit : « Tu es mon Fils, mon bien-aimé ». Jésus a pris corps c'est-à-dire toutes nos opacités ; et à travers cette opacité, Il remercie le Père. Ce choix comporte nécessairement l'acceptation de L'oblativité qui se distingue par trois attitudes, qui sont des portes ouvertes très grandes à la guérison.
1. La louange et la gratitude
Elles nous mettent dans une attitude complètement nouvelle : je chante les Psaumes, je loue le Seigneur... La gratitude consiste à savoir simplement dire « Merci, Seigneur, pour tout ce que Tu as fait pour moi ». La louange consiste à dire joyeusement « Merci, Seigneur, pour Ce que Tu es ! »… Mais, si je n'arrive pas spontanément à cette attitude de louange, cela voudrait dire que je suis encore dans le murmure par rapport à ce blocage : « j'en ai marre, toujours moi ». Ou bien que je fais du forcing : « Je suis malheureux mais je Te loue malgré tout ». C'est une attitude fausse qui prouve qu'il y a une prise de conscience qui n'est pas faite !
Je commence à voir un nouveau sens à ma vie, j'entre dans l'Amour plus profondément, au-delà de mon blocage : « Je viens, ô Père, pour faire ta Volonté » … J'aime prier les Psaumes. Et je remercie Dieu d'être choisi. C'est dans cette gratitude que je vais pouvoir intercéder pour les autres.
2. L'intercession
S'il y a en nous, spontanément, cette gratitude et cette louange, cela montre que nous avons fait le recadrage positif. Alors nous pouvons intercéder pour nos frères qui n'en sont pas encore là. C'est un excellent moyen de donner sa vie : « Celui qui prie pour son frère est comme celui qui donne son sang » dit Silouane.
3. Être au service des autres
Si j'aime et si je suis aimé vraiment, l'Amour se communiquant, je vais spontanément aider les autres, je vais visiter les prisonniers, je vais aller à l'hôpital, je vais accueillir des enfants abandonnés... Je vais bousculer tout dans ma vie. Ces trois attitudes me poussent à sortir de moi-même ; c'est ce qui caractérise l’oblativité.
Je peux alors entrer dans le travail de deuil, dans une coopération avec Dieu. La souffrance était pour moi un obstacle, la Croix devient pour moi une Source. Cette étape de l'Oblativité est très importante. Elle est un point de repère dans l'authenticité de notre démarche de conversion.
Il y a bien des gens qui s'arrêtent, qui ne veulent pas guérir, qui murmurent, qui restent là-dedans et qui -disent au Seigneur : « quand vas-Tu me guérir ? » C'est que l'étape de la prise de conscience n'a pas bien fonctionné. C'est dire aussi : « Je voudrais bien mais je ne peux pas ! »
Comme nous l'avons vu, dans le New Age on entre directement dans cette étape, on shunte les cinq étapes précédentes. C'est efficace, mais sans Dieu. Il n'y a que les énergies métapsychiques. Cela ne guérit pas la source, ni la cause ; cela ne guérit ni l'identité profonde, ni le mal. Il y a, en nous, un péché profond, juste là où nous nous accrochons, là où nous nous obstinons ; « Seigneur, Tu ne m'auras pas là-dessus », et qu'il faut guérir.
Cette sixième étape doit être considérée comme essentielle pour permettre la conversion de l'Ego et enfin entreprendre le travail de deuil.
Septième étape : Le travail de deuil
II a lui-même sept étapes.
Ce travail consiste à convertir l'égocentrisme dans le mouvement des béatitudes. Il fait perdre la vie. C'est le mouvement du grain de blé qui tombe en terre pour porter du fruit.
C'est le passage des avoirs à l’être. C'est là que la guérison s'obtient. C'est l'acceptation de la séparation pour un plus. Mais cela ne peut se faire sans souffrance ni angoisse.
C'est la reconstitution du 1er cercle, celui de la communion et du 2e cercle, celui de l'identité réelle. C'est la Parole du Christ : « Venez à Moi et Je vous soulagerai ». Nous devons traverser la souffrance comme Jésus l'a fait, c'est-à-dire en aimant.
Huitième étape : Le lâcher prise
Ce lâcher prise va me permettre de laisser faire toutes les puissances de vie, de grâce et d'éternité qui sont en moi. A ce moment-là, et pas avant, une fois que j'ai accompli ce travail de deuil, je peux me réconcilier avec mon passé.
Neuvième étape : La réconciliation avec le passé — Le pardon
Tant que ce travail de deuil n'est pas accompli, il reste plein de zones obscures en nous, des blocages dont il faut prendre conscience pour pouvoir pardonner, car il s'agit de pardonner.
Le saint est celui qui est transparent, qui est limpide, car Dieu est passé partout ; il est réconcilié avec son passé. La mémoire reprend sa fonction de pureté naturelle, totale. Plus nous serons dévoilés par rapport à notre passé, plus notre passé sera dans notre présent, plus il sera source de vie. L'angoisse ne nous sera plus enlevée, mais sera vécue différemment, car elle sera dans le regard de Jésus.
Et comme je me rends compte que Dieu était présent dans tous ces obstacles, mon passé devient un tremplin pour un plus de vie et me donne un dynamisme extraordinaire.
Je vais m'appuyer sur mon passé, sur toutes les souffrances endurées. Elles ne seront plus un obstacle pour moi, mais au contraire une chance pour un plus. Du coup, il y a un dynamisme extraordinaire lorsque je prends conscience que, de ma conception à aujourd'hui, la Présence de Dieu est passée à travers toutes mes contradictions.
Au lieu que ces blessures, ces souffrances me cassent aujourd'hui encore, elles me projettent en avant dans une coopération avec Jésus dans les bras du Père.
Dixième étape : L'identité nouvelle
Je ne vis plus que du Père
Étant réconcilié avec mon passé, avec mon Père, je peux aller avec Jésus vers le Père, en tant que fils et retrouver la possibilité physique de commencer une vie chrétienne, mystique, contemplative, en passant de la religion à la Grâce. Je suis un être nouveau. C'est mon identité nouvelle. Je redécouvre l'image enfouie sous la terre. Il y a quelque chose qui va se recréer en moi, quelque chose d'étonnant, à la fois pour Dieu et pour moi. Je serai étonné de la Paternité de Dieu et je commencerai à voir ce que j'éprouverai dans la vision béatifique où, dans une communion continuelle de Gloire, je ne vis plus que du Père, de Sa Miséricorde ; et dans les parties les plus opaques de ma vie, je retrouve l'image du Père, le Fils qui est dans Son Père.
Conclusion
Les blocages qui sont en nous ne disparaissent pas si facilement. Il faut les repérer.
Ces 10 étapes sont un tour de spire autour de l’axe de l’Alliance ; elles permettront d'approfondir ce travail de deuil pour arriver à faire de nous des saints.
Mais nous ferons un deuxième tour de spire, puis un troisième, etc. pour ainsi être amené à une union à Dieu de plus en plus grande, car nous allons vers une réconciliation de plus en plus grande.
C'est bien de voir ces différentes étapes car il faut retrouver sa vocation profonde.
Mais nous constatons que cela ne se fait pas en un instant. On s'aperçoit qu'on bute et que l'on n'arrive pas à être dans un état total d'oblativité. On s'aperçoit aussi qu'il faut du temps pour arriver à repérer les blocages qui sont encore là. Il faut une nouvelle prise de conscience pour un nouveau tour de spire.
Il faut revenir à l'oraison, revenir à la prière.
Ce chemin a une dynamique extraordinaire où nous sommes en marche vers le Père, avec le Seigneur.
Nous devons, en effet, passer de l'homme psychique à l'homme spirituel, comme dit saint Paul.
Cette croissance se fait autour d'un axe que nous appelons l'Axe de l'Alliance. Elle se fait d'attachements en séparations successives, d'un nouvel attachement affectif en une nouvelle séparation. Ce cycle répété se fait dans l'émergence d'un sentiment obligatoire, en raison du contexte du péché, qui est la souffrance.
Il n'y a pas de vie sans amour, il n'y a pas de vie sans attaches ni de vie sans séparations, il n'y a pas de vie sans souffrances, depuis le péché. Il n'y a pas de vie sans traversée de la souffrance.
Si je cherche à donner un sens à ma souffrance, je vais entrer de plus en plus dans un processus de vie ; et le seul sens à donner à la souffrance est la croix : c'est ce chemin que nous appellerons le travail de deuil.
Le travail de deuil sera habité par le sentiment de souffrance et d'angoisse, mais avec des modalités différentes selon l'endroit où nous nous trouvons sur le chemin.
Il n'y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux qu'on aime, c'est à dire de se dessaisir de sa vie ; car la souffrance est tellement contraire à la nature que nous voulons tout, sauf souffrir. Et celui qui accepte de souffrir ne peut le faire que par amour ou par masochisme, mais ce dernier ne porte pas de fruit.
C'est dans la souffrance et la douleur qu'est donnée la preuve de la véracité de l'Amour.
Nous allons parcourir un chemin qui ne se dit pas par des mots ou par des réflexions intellectuelles, que nous connaissons tous plus ou moins, et qui ne se révèle que par l'expérience. La souffrance se traverse par l'expérience, elle ne s'explique pas par des mots.
Jésus ne nous dit rien sur la souffrance. Il se tait et la traverse. Il m'invite à faire de même. « Venez à Moi » veut dire : venez sur le chemin du travail de deuil, qui ne se fait pas sans souffrance, c'est sûr, mais « Venez à Moi, vous tous qui peinez sous le poids du fardeau de vos souffrances, de vos culpabilités, de vos péchés et je vous soulagerai». « Venez à moi », veut dire « porte ta croix et suis-Moi ». Suis-Moi et tu comprendras, tu comprendras comment traverser ta souffrance.
Cela veut dire que Dieu veut nous apprendre à traverser la souffrance comme Lui l'a traversée, avec comme seules armes, l'amour, la confiance et l'abandon. « Venez à Moi » veut dire « Venez à l'amour », car je suis le chemin, c'est-à-dire l'unique porte qui mène au Père et dans ce chemin vous trouverez le repos pour vos âmes.
Il faut se mettre en chemin et parcourir le chemin en découvrant les oasis dans le désert, c'est-à-dire les étapes où Dieu nous appelle, où nos frères nous appellent, où notre souffrance nous appelle. Et nous découvrirons dans ces étapes que nous sommes habités par différents faux visages de Dieu qui nous apprendront à traverser nos souffrances selon le Cœur de Dieu.
Nous avons vu que le travail de deuil est la septième étape de la guérison et qu'elle vient après l'étape de l'oblativité.
S'il nous arrive une nouvelle catastrophe alors que nous sommes dans l'étape d'oblativité, c'est là que le travail de deuil va pouvoir se faire, car ce nouvel événement catastrophique, exactement semblable aux autres, arrive à un moment où notre problème est capable de se résoudre dans une conversion et un travail de deuil où nous allons pouvoir accepter de lâcher prise.
Car on ne peut résoudre un problème sur un circuit univoque par rapport à un événement extérieur, mais par rapport à un mal qui est en moi et que ces événements analogiques révèlent.
Dans chacune de ces étapes, nous aurons un faux visage de Dieu différent.
Première étape : Le déni — la dénégation — un dieu qui fait souffrir
Quand nous apprenons une catastrophe ou quand nous sommes frappés par une nouvelle épreuve, quelle est notre réaction ? Tout de suite, nous disons non, ce n'est pas possible ! Nous avons envie de fuir. Cette réaction est normale, elle est humaine, elle est saine. C'est une réaction de défense élémentaire, face à la réalité douloureuse. Les Apôtres eux-mêmes vont tous prendre la fuite.
Quand nous regardons la parabole des vignerons, nous constatons que le deuxième fils refuse d'aller travailler à la vigne car il est dans le réel ; il sait qu'il va souffrir et il dit non.
La souffrance n'est pas faite pour nous. Devant cette souffrance, notre réaction est la fuite ou l'oubli. C'est normal mais pour un temps seulement.
Car l'important est de revenir à Jésus. Dieu continue de nous appeler ainsi : « Voici que Je me tiens à la porte et Je frappe. Si tu M'ouvres, Je viendrai demeurer chez toi ».
Lui seul peut donner un sens à mes souffrances et il dit « Venez à Moi, et je vous procurerai le repos ! »
Nous lisons dans Isaïe (ch. 30) que le Seigneur nous invite à venir, mais que nous n'avons pas voulu, nous avons dit non, nous fuyons à cheval. Mais le Seigneur attend le moment où Il pourra nous faire grâce pour nous montrer Sa Miséricorde.
Ce sera le moment où j'aurai le courage de regarder ma souffrance en face, avec Lui.
Cette fuite peut se manifester dans le corps. Le corps peut exprimer le non : c'est alors l'apparition des maladies somatiques et des maladies psychosomatiques, les psychoses et les névroses.
Le sentiment qui nous habite est la peur. Nous avons peur de la souffrance, peur du changement, peur de l'inconnu... Et derrière cette peur, il y a aussi la peur d'être abandonné par la Source de Vie et la peur que l'Amour ne fasse souffrir, souffrances déjà ressenties à cause des parents.
Dans cette étape, j'ai peur d'un dieu qui fait souffrir, d'un dieu qui me fait tordre de douleur. Mais n'ai-je pas plutôt peur de DIEU qui demande tout quand je ne veux lui céder qu'un tout petit peu ?
C'est ce faux visage de Dieu que nous rencontrons dans cette première étape. Car, aller à Jésus, ce n'est pas souffrir plus, sinon Jésus serait un menteur puisqu'il nous dit : « Venez à Moi et Je vous soulagerai ». Venir à Jésus, c'est souffrir différemment car c'est souffrir avec Lui, souffrir dans l'Amour, avec l'Amour et pour l'Amour.
DIEU est un Dieu qui soulage et qui fortifie : « Fortifiez les mains défaillantes », « Affermissez les genoux fléchissants » et aussi « Dites aux gens qui s'affolent : prenez courage, voici Votre Dieu, qui vient Lui-même vous soulager ».
Jésus nous dit : « Ne crains pas, petit troupeau car il a plu à Votre Père de vous donner le Royaume » !
Le Pape Jean-Paul II nous dit : « N'ayez pas peur ! »
Jésus a affronté cette peur : « Quelle n'est pas mon angoisse jusqu'à ce que Mon Heure soit accomplie » ! Et Jésus nous invite à le suivre.
Devant cette peur, nous avons besoin d'être sécurisé, d'être réconforté par un frère qui nous tend les bras ; et spirituellement, nous aurons besoin que Dieu nous prenne dans Ses Bras. Alors, nous sommes invités à crier, vers ce frère, vers Dieu car nous sommes invités au « courage d'avoir peur », comme dit le Père Molinié.
Elle est là, la croissance de la vie ; il est là, le travail de deuil ; elle est là, la Victoire du Christ sur la Mort, la Résurrection.
La peur se traverse, elle ne se fuit pas.
Deuxième étape : La protestation — La révolte — un dieu qui agresse
Traverser la peur se manifeste par un double sentiment :
- un sentiment spirituel qui est la colère
- un sentiment psychique qui est l'agressivité et la révolte
Nous sommes dans une phase extrêmement importante, car lorsque nous fuyons la souffrance, nous fuyons le réel. Cette révolte et cette colère sont le signe de la confrontation à la réalité de nos souffrances. Si nous allons à Jésus, c'est le signe que nous traversons ces souffrances.
Mais, je veux comprendre pourquoi je souffre et je ne comprends pas : « Pourquoi moi ? Je ne veux pas, c'est injuste. En quoi ai-je mérité une pareille chose ? » Mais aussi, je veux savoir « Qui a provoqué cette souffrance pour qu'il paye ? »
La première réponse qui me vient à l'esprit est que je souffre parce que Dieu me punit, parce c'est de ma faute, et parce que je suis un pécheur. C'est bien ce que nous avons entendu dans notre enfance : « c'est bien fait pour toi », « Dieu t'a puni » ou « tu souffres, parce que c'est de ta faute ».
Alors, à ce moment là, la souffrance nous rend honteux de nous-mêmes et cette honte engendre un sentiment de culpabilité. Cela vient à la fois de la blessure du péché originel et de l'éducation. Nous avons envie de tout couper, de nous couper de DIEU. Et nous nous enterrons comme des taupes.
Et nous voyons Dieu comme un agresseur et la souffrance comme une punition et je porte sur moi-même un regard de culpabilisation : « C'est de ma faute, je suis moche, etc. ». C'est le deuxième visage d'un dieu (avec un petit d) que nous rencontrons.
Il faut bien distinguer la colère de la révolte. Nous sommes un mélange de pur et d'impur, de colère et de révolte. Si nous voulons nous empêcher de voir la révolte qui est en nous, chaque fois que nous souffrons, nous risquons de comprimer la colère qui est un sentiment spirituel fondamental pour traverser la souffrance à la suite de Jésus.
Il y a deux types d'excès : dévier vers la révolte ou dévier vers le refoulement (surtout si nous sommes chrétiens). Le refoulement est encore plus dangereux car il a quelque chose de faux. Je refuse de voir en moi ce bouillonnement, ces deux aspects du pur et de l'impur, de la colère et de la révolte.
Par quelle Grâce extraordinaire le peuple juif est-il toujours debout ? C'est parce qu'il a très bien franchi cette deuxième étape. Elie Wiesel dit : « Un Juif est un homme qui est parfois avec Dieu, souvent contre Dieu, mais jamais sans Dieu » Le Juif fait des scènes de ménage à son Seigneur, mais il ne divorce pas. Voilà l'homme en vérité.
Mais nous, nous sommes un peu pharisiens, c'est-à-dire que nous croyons que nous sommes en bonne intelligence avec Dieu, alors que, forcément, dans notre humanité blessée, nous sommes porteurs de cette source pure qu'est la colère et la révolte.
Cette réaction de révolte est normale, c'est l'occasion pour l'ego d'être vaincu. Mais il faut y déceler l'appel de Jésus, comme la sève au centre de l'écorce : « Suis-Moi ». Il faut la laisser s'exprimer jusqu'au bout d'elle-même, mais l'important c'est de ne pas rester dans la révolte, car elle nous coupe de Dieu et nous bloque dans notre croissance, elle réactive le cercle de l'identité néo-formée.
Quand nous vivons avec quelqu'un, il faut le laisser exprimer cette colère et cette révolte mais, en même temps, il faut prier pour lui, pour qu'il se convertisse, pour qu'il puisse retrouver en Dieu une consolation, qu'il voit en Dieu un vrai Dieu. C'est quelque part un exorcisme qui s'est fait à travers lui car le visage d'un dieu agresseur est ce visage que tant d'hommes ont comme schéma mental. Il faut absolument que ce faux visage de Dieu sorte de nos esprits.
C'est à travers des événements et grâce à eux que notre idée de Dieu émane de nous : alors, nous le connaissons mieux, car nous ne pouvons pas reconnaître DIEU à travers un visage déformé et faux. Il nous faut le voir à travers un visage plus juste : Dieu est proche et nous demande de durer et de persévérer.
« La colère de l'homme rend Gloire à Dieu » car cette colère crie que le souffrance est injuste, et dit à Dieu « Tu ne m'as pas créé pour souffrir ». Cette colère crie en fait la bonté de Dieu. Nous avons des exemples dans la Bible, avec Jacob et Job. Job va jusqu'au bout de sa révolte, mais il n'y reste pas.
Jacob, dont le nom signifie « le tortueux », est un homme faible, un peureux qui va tromper son père et son -frère. Nous le voyons avoir peur d'affronter la souffrance. Et en pleine nuit, il se retrouve devant ce Dieu qui l'agresse et il n'a pas fui. Il a empoigné Dieu et il a lutté : « Je ne Te lâcherai pas que Tu ne m'aies béni », c'est-à-dire : « Je ne Te lâcherai qu'après avoir compris que Tu es un Dieu plein de douceur et de miséricorde » Et l'Ange bénit Jacob, et Dieu dit : « On ne t'appellera plus Jacob, mais Israël, car tu as lutté avec Dieu et tu l'as emporté ». Il lutte avec Dieu et ainsi il devient droit parce qu'il ne fuit plus dans la peur. Le dieu agresseur est mort : c'est une idole de moins en lui.
« Le Royaume de Dieu appartient aux violents et à ceux qui s'en emparent » c'est-à-dire à ceux qui ne se laissent pas arrêter par la peur ou par l'impression que Dieu est un agresseur.
Si Dieu était un agresseur et la souffrance une punition, la souffrance de l'innocent n'aurait aucun sens. Le Seigneur fustige ceux qui pensent que Dieu est un agresseur :
« Quelle est la faute de ceux qui ont péri sous la tour de Siloé ? » (Luc 13)
- « Seigneur, qui a péché, lui ou ses parents, pour qu’il soit né aveugle ? »
- « Ce n'est ni lui, ni ses parents, qui ont péché, mais c’est pour que, en lui, se manifestent les œuvres de Dieu » (Jean 9)
Les œuvres de Dieu, c'est que le mal soit vaincu par la Puissance de la Croix, c'est que Jésus soit mis à mort, mis à mal, pour que la mort soit définitivement vaincue par la Résurrection. La gloire, c'est l'Amour victorieux de tout.
« Mais si vous ne vous convertissez pas, il vous arrivera pire encore » (Luc 13)
C'est l'absence de conversion, c'est la présence du péché qui est à l'origine de la souffrance dans le monde.
Et le Seigneur nous dit : « Revenez à Moi, Convertissez-vous ». Car le risque est de demeurer dans la colère et de prétendre que le bonheur m'est un dû et d'en demander des comptes à Dieu.
Et Jésus nous dit :
« Heureux l'homme qui ne tombera pas à cause du Fils de l'Homme, devant le scandale de la Croix »
« Heureux l'homme pour qui le Fils de l'Homme ne sera pas un scandale ».
Jésus, qui n'a jamais connu la révolte, a connu la colère, une colère douce et infiniment profonde : « Père, éloigne de Moi cette coupe ». Jésus formule bien ce qu'il pense, Il ne dit pas « Amen », mais « Que Ta Volonté soit faite, Père ».
C'est le cri de la prière qui vient toucher tout droit le Cœur de Dieu. Nous avons besoin de laisser vivre en nous cette colère, car elle nous donnera le courage et la persévérance pour lutter :
« Dieu est le Dieu de la persévérance et du courage » (Epître aux Romains, 15)
Sinon, nous tomberions dans l'amertume et dans l'épuisement qui mènent au désespoir.
Le Livre de Job reprend toutes ces étapes ; dans celui-ci, les amis de Job lui disent qu'il n'a pas le droit de se révolter. Jésus leur en fera le reproche. Au contraire, il faut crier sa révolte, hurler, mais ne pas rester dedans.
L'expression « vide ton sac » est bien significative. C'est d'ailleurs ce que font les groupes du New Age au cours de séminaires où les participants expriment leur révolte, chacun leur tour, en tapant sur un coussin.
Stan Rougier raconte l'histoire de deux grenouilles tombées dans une soucoupe de lait. L'une se débat, nage dans tous les sens et meurt, noyée d'épuisement ; la seconde, voyant cela, se dit qu'il faut nager plus lentement. Alors, elle nage doucement, tranquillement, de plus en plus lentement car ses forces s'épuisent. Puis le lait devient crème, alors elle se fatigue encore davantage, mais poursuit son effort. Puis la crème devient beurre et elle prend appui sur ce beurre. Alors, elle s'écrie « Croah ! » « Crois, crois, crois », car elle prend pied sur le beurre qui doit la nourrir au lieu d'être noyée dans le lait.
Cela veut dire : « Aie confiance en Celui qui va te mener sur le chemin de la Croix, en traversant ta souffrance par Son Amour ». Du coup, survient la constance dont parle saint Jean. La constance, c'est se tenir debout (stare), comme la Vierge Marie au pied de la Croix pour affronter la Colère de Dieu, qui est une Colère d'Amour et de Miséricorde.
Il y a d'autres colères. Citons tout particulièrement :
La colère de Moïse, quand il brise les Tables de la Loi : ce n'est pas une colère par rapport à quelque chose qui est en lui, mais par rapport à un événement qui s'est passé dans le cœur d'Israël et qui l’a touché. Il descend de la montagne et se révolte contre Aaron et il brise les Tables de la Loi.
La colère de Jésus, dans le Temple de Jérusalem.
La colère de la Vierge Marie, quand Jésus est au Temple à 12 ans. C'est une colère mariale « Pourquoi nous as-Tu fait cela ? ».Et tout de suite après, l'Evangile dit : « Et Il Leur était soumis ».
Cette colère est source de constance, de persévérance, d'humilité. C'est un processus psychologique qui révèle tout un processus spirituel. Si je reçois un coup, je trouve que c'est injuste alors je suis en colère contre untel et je me rends compte rapidement, puisque je suis chrétien, que ma colère, si elle me prend tout entier, est dirigée contre Dieu. Je me révolte contre Dieu ! « Seigneur, c'en est trop, je n'en peux plus ! ». Cela montre un manque de discernement, un manque de maturation spirituelle.
Mais c'est vrai que Dieu a laissé faire quelque part.
Cette révolte me remplit d'amertume et m'empêche d'avancer, car Dieu se cache derrière le visage paradoxal de ceux qui sont autour de moi. Et je dois arriver à unir l'Amour de DIEU et l'Amour de mon prochain en un seul acte, en une seule victoire qui est celle de la Résurrection.
À cette révolte qui dit toute l'injustice, s'ajoute une autre révolte qui consiste à dire « Qui est responsable pour qu'il paie ». Cette révolte peut nous couper de Dieu, si c'est à Dieu que nous voulons faire payer !
Alors, je rencontre le regard de Jésus, au fond de moi qui me dit : « Venez à moi ».
Et le jour où nous rencontrons le regard de Jésus, de cet Homme Jésus, qui n'a plus apparence d'homme, nous rencontrons un regard de pardon : « Je te demande pardon de cette souffrance que tu traverses et à laquelle Je ne t'arrache pas. Tu me demandes de payer, vois, j’ai payé ».
Et je comprends que c'est le cœur de Jésus, broyé à cause de mes péchés, qui peut me sauver et me guérir.
Ce n'est pas avec mes propres forces que je trouverai la constance et la persévérance, c'est avec la Force du Cœur de Jésus broyé qui ne regarde que le Père.
Alors, je pleure et j'expérimente pour la première fois, un Don du Saint Esprit : « Bienheureux les affligés, bienheureux ceux qui pleurent, ils seront consolés ».
C'est la Parabole du grain de blé :
« Si le grain de blé tombé en terre ne meurt, il ne porte pas de fruit, il reste seul ».
Troisième étape : Le lâcher prise — Un dieu qui prend tout
La troisième étape est celle du lâcher prise, où nous acceptons tout : « c'est bien à moi que cela arrive ». Nous acceptons jusqu'au bout et cela provoque un sentiment de tristesse.
Pour les blessures les plus profondes, les blessures spirituelles, et pour les blessures au niveau de l'âme, s'il persiste un problème qu'on n’a pas résolu vers l'âge de 3 ou 4 ans et si, à travers cela, nous avons refusé de demander pardon, de nous confesser, de nous convertir, c'est Dieu que nous avons refusé. C'est une révolte contre Dieu et nous sommes restés dans cette révolte, mais sans plus savoir pourquoi ! Et, vers l'âge de 15 ans, à un nouvel événement similaire, nous allons passer la 1ère étape, puis la 2e étape, mais nous ne pourrons pas passer la 3e ni la 4e étape de ce travail de deuil.
Nous resterons dans cette étape de révolte jusqu'au prochain événement qui va poser problème ou au suivant où nous déciderons enfin de nous convertir, de lâcher prise : c'est ce que nous appelons les événements analogiques.
À ce moment-là, l'endurcissement du cœur va éclater : c'est les pleurs.
« C'est donc vrai, c’est bien moi ! »
L'écriture dit : « D'un cœur brisé, broyé, Seigneur, Tu n'as point de mépris ».
Dieu agréé deux sacrifices : la compassion et le cœur brisé, le cœur immergé dans la Miséricorde.
Je pleure car je me rends compte qu'il faut me détacher de quelque chose. Cette tristesse m'enferme dans mes avoirs, comme le jeune homme riche de l'Evangile qui s'en alla tout triste « car il avait de grands biens ».
À cette tristesse vient se joindre un autre sentiment, la peur, la peur de perdre ce à quoi nous tenons. C'est vrai que nous allons peut-être perdre quelque chose : nos avoirs, nos pouvoirs et peut-être un être qui représentait pour nous le bonheur. Mais nous ne perdons pas l’amour.
Mais, je ne peux lâcher prise si je ne fais pas, avant, l'expérience d'un plus être.
Le premier risque, à ce stade, est de regarder en arrière, comme les Hébreux qui regrettent leur esclavage. Mais, nous rencontrons le Regard de Jésus qui nous dit : « Viens, suis-Moi ».
Le second risque, est de rester dans cette tristesse, car c'est tellement bon de se sentir aimé dans cette tristesse que nous préférons rester dans cette « robe de tristesse ». Mais Jésus nous dit « Jérusalem, quitte ta robe de tristesse. Va plus loin. »
Le visage de Dieu que nous avons à ce moment-là est un petit peu le passage à l'état adulte, c'est l'instant où il faut nous engager, où il faut offrir notre vie. Mais pour donner sa vie, il faut la donner complètement. Par rapport à Dieu, c'est une étape extraordinaire. Nous donnons tout à Dieu et nous nous apercevons que nous reprenons tout en détail.
En fait, Dieu ne prend pas. Dieu accueille, avec le cœur brisé d'Amour et de Reconnaissance, la tristesse que je Lui donne. Cela ne l'empêchera pas de me proposer d'aller plus loin, car ce sera le chemin d'un plus grand don et Dieu sait que ce sera, pour moi, le chemin d'un plus grand bonheur. Mais ce sera sur le mode d'une proposition. Il sera triste de me voir triste et malheureux parce que je ne veux pas donner davantage.
Il est bon de rencontrer un frère qui nous dit « tu as le droit d'être triste, de pleurer », un frère qui soit présent, en silence, avec un Cœur de compassion. Jésus a pleuré Lui aussi devant son ami Lazare décédé.
Il y a un temps pour les pleurs. « Il y a un temps pour tout » nous dit l'Ecclésiaste. Mais il faut aller de l'avant.
Même à travers ces larmes, il n'y a pas tout de suite le lâcher prise. Il y a un phénomène d'acceptation, « mais à condition que » : c'est l'étape du marchandage.
Quatrième étape : Le marchandage — Un Dieu qui délivre de toute souffrance (éviction de la Croix)
C'est un peu le « Oui, mais » « Oui, à condition que ».
Dans cette quatrième étape, nous allons entrer dans une espèce d'exaltation mystique derrière laquelle se cache une angoisse profonde. Les infirmiers connaissent très bien cette étape chez leurs malades.
Durant cette étape du marchandage, nous pensons que Dieu va supprimer la liberté du mal ou les conséquences du mal et que la Toute-Puissance de Dieu va changer à ce moment-là.
Le marchandage consiste à se servir de sa Foi, en disant que « peut-être » avec plus de Foi, je vais évacuer la Croix.
Quand nous sommes avec des personnes qui souffrent ainsi, prostrées dans une période de tristesse ou dans une angoisse qui s'exprime par une sorte d'euphorie, une période d'exaltation, nous devons les respecter et les laisser exprimer leur détresse profonde, leurs sentiments, les écouter et surtout prier pour elles afin de leur obtenir des grâces actuelles pour qu'elles ne soient pas brisées dans leur guérison, et qu'elles passent de l'espoir à l'espérance.
Placer son espoir dans la Toute-Puissance de Dieu, alors que nous sommes dans quelque chose qui correspond à des lois naturelles, n'est pas juste.
Pourtant, il faut respecter les étapes, même celle du marchandage, car il faut avoir une foi qui débouche sur l’espérance. Il faut garder l'espoir que ce mal humain va disparaître et, en même temps, il faut entrer dans l'espérance qui ne supprime pas la Croix, mais qui est l'au-delà de la croix quand elle a été jusqu'au bout d'elle-même. Nous entrons dans une ligne de crête très difficile, « la porte étroite », qui fait que nous allons passer de l'espoir à l'espérance.
Dans cette étape du marchandage, nous passons de l'Esprit de Science : « Bienheureux les affligés » à l'Esprit de Crainte de Dieu : « Bienheureux les pauvres en esprit, ils seront appelés fils de Dieu ».
Je pense que si je prie cela va peut-être aller mieux. Si je dis oui, j'espère que Dieu fera quelque chose pour moi et que cela va changer ; alors, j'accepte de devenir un saint ; et si j'accepte de faire ce travail de deuil, Dieu va sûrement intervenir. Bien sûr que si je me convertis, Dieu va intervenir parce que je Lui laisse une plus grande liberté. Mais, Dieu ne va pas intervenir sur le champ qui correspond à ma prise de conscience antérieure, II va intervenir sur un champ plus profond, à Sa manière, dans Sa Sagesse qui est celle de la Croix comme sur celle de Son Fils et qui nous déconcerte.
Mais il ne faut pas non plus désespérer de la Providence de Dieu sous prétexte qu'on a la foi.
Cinquième étape : Le découragement — Un Dieu qui envoie la souffrance à ceux qu’Il aime
Dans cette étape, nous entrons dans une espèce de déprime. Cette étape est très importante. « Hélas, c'est bien moi ! » Là, le lâcher prise est total. Il est possible que, dans notre vie, nous ayons des phases de déprime qui arrivent d'ailleurs souvent après avoir obtenu une certaine guérison. Alors qu'avant cette guérison, nous étions toujours en état d'agressivité et de révolte, après cette guérison vient une phase transitoire où nous sentons le découragement nous gagner.
Même si l'espoir n'est pas l'espérance, nous avons besoin de lui, sinon nous entrons dans le désespoir. C'est ce qu'essaient de faire les faux amis de Job quand ils lui reprochent de souffrir à cause de son manque de foi, quand ils lui reprochent de ne pas accepter la Providence de Dieu. Ils risquent ainsi de le faire entrer dans le désespoir, alors qu'il n'était que dans la révolte. Il faut donc laisser un espoir à celui qui souffre pour ne pas être coupable de le faire entrer dans le désespoir.
Quand le désespoir nous taraude, avons-nous la main tendue vers Dieu pour Lui permettre de nous saisir le poignet ? La tentation est grande de faire comme la grenouille et de couler.
Un mourant disait : « Je suis sur une ligne de crête, je ne dois pas me laisser tomber ni à droite, c'est-à-dire me cacher la réalité et dire que je suis sûr de m'en sortir ; ni à gauche, c’est-à-dire, désespérer de guérir et me laisser prendre par la mort. Je dois garder espoir et en même temps, je dois entrer dans l'espérance. Pourtant, je suis sur cette croix et tout en moi craque, la vallée de l'ombre de la mort est sur moi, le secours disparaît, c'est la nuit, personne ne peut plus rien pour moi, la Foi vacille quelquefois, et le doute s'empare de moi. »
Alors, c'est le temps de l'Espérance !
Ils sont nombreux ceux qui meurent à l'aube. Et pourtant dans cette nuit de la Foi, c'est le temps de l'espérance.
« J'attends le Seigneur plus qu’un veilleur n’attend l'aurore » ! (Psaume 129)
Il faut en même temps garder l'espoir et rentrer dans l'espérance.
Alors je prie. Et je pense que Dieu va tout arranger. C'est vrai que Dieu est tout-puissant, et que tout peut se faire par la prière ! Si Dieu le veut ! Et si Dieu ne voulait pas quelque chose de plus grand que cela ! Et probablement, Il veut quelque chose de plus grand que cela !
Il ne faut pas « se laisser tomber ». Nous devons toujours garder l'espérance et garder la main tendue vers Dieu, comme cette petite fille qui a failli se noyer et a été sauvée in extremis par son père grâce à sa main tendue dépassant de l'eau. Il y a aussi cette fillette de 4 ans qui se promenait avec son père au milieu d'un torrent et qui est morte car son père a dû lâcher cette main à un certain moment, mais qui a gardé sa confiance en son père jusqu'au bout. Il faut bien voir cette relation entre un père et sa fille au milieu d'un torrent.
Si nous tendons la main vers Dieu, Il la saisira.
Aussi noyés que .nous soyons, il faut toujours garder l'espérance que Dieu notre Père est là : « Papa nous prendra ».
Quand nous commençons la journée, il faut toujours la commencer ainsi, en tendant la main vers Dieu, L'Espérance c'est l'Amour de Dieu qui descend dans notre cœur. Nous avons un critère précis pour savoir si nous sommes dans l'Espérance ou non. Si, dès le réveil, spontanément, nous tendons la main vers Dieu, c'est signe que nous sommes dans l'espérance.
L'espérance est de vivre déjà de la Grâce de la Résurrection.
Alors, nous pouvons rouler de notre tombeau (votre lit) et vivre de l’Esprit Saint (dans l'oraison).
Le New Age prend les mêmes étapes, mais s'arrête au plan métapsychique. Il ne remonte pas jusqu'à la Paternité de Dieu Créateur, puisqu'ils ne guérissent ni la source, ni la cause, ni le péché, ni l'identité profonde, ils ne guérissent que leurs actes (qui en sont seulement les conséquences).
Nous, chrétiens, nous repérons la cause qui est le péché sur lequel nous nous accrochons et où nous nous obstinons « Seigneur, Tu ne m'auras pas là-dessus ! » et nous serrons les dents. Nous disons au Seigneur : « je veux bien » mais sans vouloir vraiment jusqu'au bout.
Quand je me décourage, je me laisse couler, je n'ai plus envie de m'accrocher. C'est la tentation du désespoir : je ne vois plus que le côté négatif de ma vie, j'observe un champ de ruines.
Quand l'angoisse augmente, apparaît la culpabilité, et la souffrance devient très intense. Le risque est de fuir vers le suicide. C'est le refus de la dépendance d'Amour qui aboutit au désespoir et qui fait que je désespère, même dans le salut de Dieu.
Ce Dieu que nous rencontrons est le Dieu qui envoie la souffrance à ceux qui L'aiment : c'est un autre faux visage de Dieu.
Il y a deux façons de mal vivre cette étape : la tentation du suicide et l'euthanasie.
Que se cache-t-il derrière l'euthanasie ? C'est la peur de souffrir ou de voir souffrir celui que nous aimons.
Une personne qui est trop proche affectivement d'un ami, d'un parent, est incapable psychologiquement de prendre une décision. Or, l'euthanasie est un meurtre, c'est un homicide volontaire. En même temps, il ne faut pas pratiquer l'acharnement thérapeutique qui empêche la mort naturelle ; ce qui est criminel par rapport à la dignité de la personne. C'est parce que nous ne supportons pas qu'il passe par l'angoisse et la souffrance ; c'est le mépriser. Le sacerdoce est interdit à quiconque a commis un meurtre.
L'euthanasie ou l'acharnement thérapeutique sont les deux aberrations qu'engendré la peur de la souffrance.
À Garches, on rencontre des jeunes complètement handicapés qui ont échappé à l'euthanasie, qui souffrent, mais qui ont trouvé un sens à leur souffrance grâce à ceux qui pensent à eux tout le temps pour avoir le courage de vivre et qui les remercient d'être là.
Nous ne pouvons pas passer cette étape tout seul. Nous avons besoin de quelqu'un qui soit là, qui nous comprenne à demi-mot, qui nous entoure de sa présence pour nous faire comprendre que « Dieu est là », le Père est là, la Famille est là. On ne dit rien mais on est présent.
La meilleure façon de traverser cette épreuve est de rester dans la louange, qui était le prélude de tout ce travail de deuil. C'est comme une liqueur de plus en plus pure quand on arrive au fond. Cette louange de la fin est de se rendre compte que « Tout passe ; Dieu seul demeure » selon les paroles de sainte Thérèse d'Avila. C'est Dieu qui me dit : Confiance ! Espérance ! On rentre dans une passivité d'Amour qui implique une Confiance totale. On ne s'accroche plus.
Si nous n'avons pas géré nos émotions, c'est-à-dire si nous avons encore un visage de Dieu qui soit faux, nous ne pouvons pas nous offrir à ce Dieu que nous ne connaissons pas.
Il faut s'offrir au vrai visage de Dieu. Il faut aussi s'offrir joyeusement et il faut le faire vraiment. Le jour où nous nous offrons vraiment et joyeusement, nous devenons véritablement un être humain ! C'est cela l'Oblature.
Mais pour cela, il faut avoir fait tout le travail de deuil.
Désormais, quand nous nous sentirons mal, si nous percevons un faux visage de Dieu, nous regarderons quel est ce faux visage de Dieu :
Un Dieu qui fait souffrir ?
Un Dieu qui agresse ?
Un Dieu qui prend tout ?
Un Dieu qui délivre de toute souffrance ?
Un Dieu qui envoie la souffrance à ceux qu'il aime ?
Ces cinq faux visages de Dieu nous empêchent de rencontrer le vrai Dieu, celui qui soulage et sauve et qui permet de vivre des dons du Saint-Esprit.
Sixième étape : Le consentement — L'acceptation
Le travail de deuil est terminé, seul demeure l'Amour.
Quand j'accepte ma croix, Dieu va clouer ce mal sur ma croix pour que je l'accepte, comme sur celle de Son Fils crucifié, d'une façon que je ne comprends pas, qui me dépasse et entre dans la Sagesse de la Croix. Mais Dieu intervient par la Puissance de Son Fils Crucifié dans ma vie.
Mais il ne faut pas aller trop vite en se disant cela car c'est l'Esprit Saint qui fait cela en nous. C'est en me ré-offrant, en me re- révoltant, jusqu'à ce que mon mal, ma souffrance soit transformée en croix et que je réalise que je suis transformé en plaie vivante, de telle sorte qu'il n'y a pour ainsi dire plus de différence entre Lui et moi, en croyant que c'est Lui qui a voulu s'unir à moi d'une manière telle qu'il n'y ait plus qu'une seule plaie.
Alors, après les ténèbres, vient tout progressivement la lumière, et apparaît très profondément, au centre de nous-mêmes un sentiment qui devient spirituel, qui est une joie profonde mais qui ne supprime pas la souffrance en question.
Je commence à comprendre que je ne suis pas un « vilain petit canard ». A travers cela, je découvre ma vocation, une identité nouvelle, mon cœur se réchauffe, je suis à nouveau relié à la Source et je peux ainsi m'offrir et passer à la septième étape.
Même dans l'angoisse, il y a un petit filet de paix et de joie, signe que notre chemin de guérison est près de se terminer et que nous sommes près de tomber dans les bras du Père. Cette paix est spirituelle.
« Acquérez la Paix et des milliers autour de vous trouveront la Paix », dit saint Séraphim de Sarov.
Quand nous expérimentons ce filet de paix au fond de nous, comme une sève, c'est que nous passons de « l'Esprit de science » à « l'Esprit de Sagesse ».
C'est l'heure de la paix et de la joie.
Nous sommes arrivés au terme du travail de deuil. Le Seigneur nous a guéris.
Septième étape : L'Offrande — La Participation
Ce travail de deuil étant terminé, je me demande comment faire pour que cette épreuve donne le plus de fécondité possible.
Il y en a qui vont plus loin et qui entrent dans le mystère de la Participation à la croix des autres. C'est là où joue notre responsabilité. Ils entrent de plus en plus dans la douceur et l'humilité du Cœur de Dieu, dans sa joie, sa paix, sa miséricorde, sa compassion. Ils disent oui, non seulement pour eux-mêmes mais pour les autres, voire même à la place d'autres qui ne peuvent dire oui, pour qu'ils aient la vie et pour qu'ils puissent recevoir la prise de conscience sur des nœuds analogues dans leur âme. Ils disent oui dans le secret de leur cœur et ils vivent à leur regard et aux yeux des autres hommes une défiguration.
C'est l'exemple du Père Arnoux, de Montmorin, qui, soufrant physiquement, moralement, psychiquement, mystiquement à l'extrême, disait dans ses pointes de lucidité : « La Croix n'est pas assez grande pour moi »
Le terme que le Seigneur nous donne est la transfiguration :
« Et Jésus fut transfiguré devant eux ».
C'est la fécondité extraordinaire de la souffrance quand elle est ainsi vécue et traversée. La souffrance des personnes handicapées porte le monde quand, dans le secret de leur cœur, ils offrent leurs souffrances. Ils deviennent co-rédempteurs. À ce moment-là, nous devrions pouvoir vivre n'importe quelle souffrance comme un don, à condition de n'être pas dans la première ou la deuxième étape.
Quand nous vivons ce mystère de participation, nous avons une grande joie de consoler le Cœur de Dieu, là où personne n'a envie d'être et où se trouve Jésus, c'est-à-dire, sur La Croix.
Alors, au lieu de dire à celui qui souffre « Tu n'as pas le droit de te révolter, tu n'as pas le droit de pleurer... », nous prenons sur nous cette révolte, cette tristesse pour qu'il arrive à l'intégrer. C'est la Béatitude « Bienheureux les miséricordieux, ils obtiendront Miséricorde ». Tout se termine dans le Don de Piété.
Plus nous avancerons dans ce chemin, plus nous serons saisis par Dieu qui n'est qu'amour, plus nous serons consolés et plus nous deviendrons consolateurs du Cœur de Dieu et consolateurs du cœur de nos frères. Il nous faut parcourir ce chemin nous-mêmes pour devenir, à notre tour, transparent du seul Consolateur, le Christ.
Conclusion
Le travail de deuil est terminé. Mais cette spire du travail de deuil ne cesse de s'approfondir ; elle reste la même car cette Innocence divine en nous ne cesse de prendre plus de place, jusqu'à prendre toute la place. L'innocence divine est notre identité. Le Christ prend toute la place à l'intérieur de notre innocence crucifiée qui triomphe dans l'Innocence du Christ parce que nous sommes entrés dans la Grâce capitale du Christ, dans la Grâce de la Vierge Marie, dans la Grâce de l'église et dans les Plaies mystiques cachées en nous qui sont celles du Cœur broyé de Jésus.
Si nous acceptons de vivre ce travail de deuil dans l'acceptation pour les autres, à ce moment-là, par rapport à un événement analogique qui s'est répété de nombreuses fois et a permis de mettre à nu cette blessure, il est possible pour nous d'entrer dans une étape suivante qui est l'étape de la guérison des souvenirs et de la réconciliation avec son passé.
La guérison de la mémoire vient prendre son appui là, dans la réconciliation avec son passé et dans la guérison des souvenirs.
Le travail de deuil est terminé, mais il y a d'autres choses à guérir, sur lesquelles je dois lâcher prise et dont je n'ai pas encore pris conscience et qui sont la source des blocages encore présent en moi. À ce moment-là je dois faire un autre tour de spire... Je n'avais pas encore repéré ce blocage car j'étais pris dans une autre problématique.
Ce qui prouve que le 1er travail de deuil est accompli.
Jusque là, je ne peux pas encore pardonner, ni me pardonner à moi-même, ni pardonner aux autres, ni pardonner à Dieu. Mais si je pardonne, je vais être capable d'entrer dans l'étape suivante de la réconciliation avec mon passé concernant cette blessure. A ce moment-là je retrouve l’axe de l’Alliance, avec le Christ où je passe de l'Image à la Ressemblance de Dieu, je retrouve mon innocence crucifiée qui triomphe dans l'Innocence du Christ, je retrouve mon identité et je redeviens fils, avec le Fils du Père dans les bras du Père. Il n'y a plus cet obstacle entre Lui et moi.
C'est bien de faire le travail de deuil ; mais il faut savoir que les souffrances les plus profondes sont souvent les plus cachées, les plus intimes.
Il faut revenir à cette prise de conscience sur ce blocage qui est en moi : tout blocage qui est en moi, tout mal qui reste en moi et que je n'arrive pas à dissocier de moi, implique un renoncement de mon ego. Il y a un point sur lequel je n'ai pas lâché prise, ce qui est mal, et sur lequel je constate que « je suis bloqué ».
Mais je suis incapable de dissocier, de distinguer en moi le « je suis bloqué » d'avec mon comportement mental ou affectif ou les habitudes concrètes ou un acte commis vis-à-vis duquel je suis toujours d'accord et dont je n'ai pas demandé pardon ; je n'en suis donc pas détaché et c'est lui qui constitue la pierre d'achoppement.
Il faut du temps pour repérer tous ces blocages. C'est bien de faire ce travail de deuil, mais il faut savoir prendre conscience du nombre de deuils que je n'ai pas encore faits, dès la conception, dans ma petite enfance, à l'adolescence ou à l'âge adulte.
Surviennent des événements analogiques qui répercutent et réveillent cette mort. La vie et la mort sont tellement co-adjacentes que j'aime retrouver les lieux de la mort et que j'essaie de me rapprocher le plus possible, dans des circonstances analogiques, de cet instant de mort qui est ancien. Ce n'est pas si difficile à voir, il suffit de regarder par exemple les déboires sentimentaux dont nous n'avons pas fait le deuil.
Mais, parce qu'il y a un appel profond de l'âme, il faut renouveler cet instant d'échec pour le faire revenir, à travers un événement analogique, de manière à revivre cet échec, mais sous un autre mode, pour me permettre d'aller jusqu'au pardon ; car il faut faire ce travail de deuil par rapport à cet événement.
La guérison de la mémoire nous permet de voir qu'il y a des événements, qui paraissent le fruit du hasard et ne le sont pas et que nous appelons les circonstances analogiques. Elles sont l'appel à retrouver cette source de vie que je n'ai pas encore trouvée et qui est derrière le deuil que je n'ai pas encore fait.
Donc, il faut retrouver cette circonstance analogique de mort, par rapport à des morts que j'ai vécues, donc par rapport à des pardons non encore donnés.
Parmi les circonstances analogiques, il y a le phénomène de la mémoire et de la relation.
La 1ère étape du travail de deuil est donc de revenir à cette prise de conscience de ce que je suis par rapport aux actes que j'ai posés et qui fait que je ne dois pas tout mélanger.
Je ne suis pas un échec, je suis un saint « à l'image et à la ressemblance de Dieu », de sorte que se dissocient en moi, dans mon corps et dans mon esprit :
– cette sainteté, cet élan, cette soif, cette immaculation, ce visage d'homme qui est le mien, qui est un visage d'Amour, de lumière et créateur d'éternité, qui ne m'a jamais quitté et
– ces actes de non-amour, d'échec et de mort, qui ont pénétré dans mon psychisme, dans mon âme, et qui n'ont rien à voir avec mon identité de personne, avec ce que je suis.
Justement, ces actes et ces événements imparfaits, au contraire, me révèlent par différence mon vrai visage qui est un visage de sainteté.
Car la sainteté ne se bâtit pas sur le bien, elle se bâtit sur la chute, sur les failles, à partir des ténèbres qui sont en nous, à partir de l'obscurité en nous. La sainteté ne vient-elle pas dans les zones qui n'ont pas été torturées par le mal, éclaboussées par le mal, changées en mal ? La sainteté apparaît à partir de ce qui est en moi abîme de ténèbres, à partir de mes fissures. C'est dans cet abîme là que la Sainteté du Christ va pénétrer pour bétonner.
Je suis appel, je suis abîme d'amour et de réceptivité par rapport à la Gloire du Très-Haut, qui est la Sainteté toute pure. Les échecs sont là pour ouvrir ma sensibilité à cet appel, à cette capacité de réceptivité de la Grâce de Dieu, de l'Amour Pur de Dieu.
Donc, je fais la distinction entre ce que je suis et les actes que j'ai posés, qui ne disent absolument rien de ce que je suis.
Le fruit des actes que j'ai posés qui sont des fruits de mort, je peux les reprendre à partir de cette force qui est en moi, qui vient du fait que Dieu m'aime encore plus, qu'il m'appelle à une sainteté encore plus grande, à cause de cette confrontation à la mort. À partir de cet amour de Dieu, l'Esprit Saint me montre comment je dois faire le travail de deuil, je dois prendre à pleines mains cette mort, à partir de sa racine et non pas à partir de circonstances analogiques extérieures. Il faut bien respecter toutes les étapes du travail de deuil.
C'est un travail de guérison à la fois psychologique et spirituelle. Ce n'est pas un commandement. Dieu ne nous a pas demandé de faire un travail de deuil pour une guérison psycho-spirituelle. Dieu nous a demandé de faire un travail de conversion pour notre vie spirituelle incarnée. Il faut guérir non seulement les blessures psychiques, mais leurs racines qui sont le péché.
Mais il est vrai que c'est très désagréable de porter tout le temps dans notre psychisme la marque d'une blessure de la mémoire. C'est bien de rentrer dans une guérison de la mémoire psychologique et sensible, car c'est pesant. Donc, c'est bien de faire ce travail de deuil sur les principales failles de mort qui sont en moi et de respecter ce cheminement donné par le bon sens et la prière, ce cheminement spirituel du travail de guérison, de la Grâce, qui vient colmater, guérir et mettre la Résurrection là où la mort domine, mais dans l'aspect psychique de notre âme.
Le Travail de la foi, c'est de faire en sorte que ce soit le point de vue spirituel, pneumatique de notre âme qui soit toujours en éveil.
C'est bien de faire la perspective de personnalisation profonde pour montrer que la guérison par la Grâce peut pénétrer jusque dans le point de vue animal, psychique et sensible qui est en nous.
Cette première étape de la prise de conscience est très importante car assimiler ce que je suis et mes actes est une erreur de l'intelligence, c'est une mort de la volonté, du cœur profond et c'est un oubli de la mémoire. Dire « Je suis un salaud, Je suis menteur, Je suis un traître » ce n'est pas vrai.
Lorsque je refuse de faire le travail de deuil, c'est ainsi que je me vois, fichu, je me renouvelle dans ce que je ne suis pas, dans ce que je ne veux pas être, dans des actes qui ne sont que des accidents.
Pour que dominent l’amour, l'extase et la création d'éternité, je dois revenir à la réalité : c'est cela le travail de deuil. Je recommence à vivre, mais c'est moi qui vis grâce à ces blessures. Et je demande à l'Esprit Saint de me montrer la sainteté qui est la mienne et qui ne m'a jamais quittée, et à partir de là, je vois les actes que j'ai commis, j'en vois la profondeur, l'ennui.
Mais parce que je ne suis plus assimilé à ces actes de mort auxquels je suis confronté, je vais pouvoir faire ce travail de deuil et de transformation.
C'est à l'intérieur de l'oraison que j'ai cette clarté.
Il y a plusieurs possibilités d'événements analogiques pour mettre à jour les racines amères profondes. Il faut se rappeler qu'il faut toujours faire oraison d'abord. C'est à l'intérieur de l'oraison, quand l’ESPRIT Saint est là, que cela devient évident que ce que je suis et la mort que j'appelle tout le temps par l'instinct de mes actes et des circonstances analogiques, sont des choses distinctes.
Mais je peux m'aider aussi de choses qui sont particulièrement évidentes. Il y a des blessures en moi qui sont en rapport avec des choses cassées en moi dans mes relations d'amour d'origine, dans mes racines. Mes racines, c'est la relation première que j'ai eue dans l'amour lorsqu'elle a été possible avec ma mère, avec mon père, avec moi-même. Ce sont souvent des choses qui relèvent de la période embryonnaire.
Nous pourrions comparer notre vie à un bateau qui vogue sur la mer.
La mer représente nos années : il y a beaucoup de couches.
De la profondeur de la mer, jaillissent des racines, d'où montent les algues
A la surface de la mer, il y a un petit voilier, qui est chahuté par les vagues et qui va rencontrer et butter sur le flot de ces algues.
Le flot d'algues est le même que celui sur lequel vous avez butté à 30 ou 40 ans, et c'est le même événement analogique qui s'enracine dans les toutes premières réactions d'agressivité et de colère contre Dieu, contractées en héritage du péché originel d'où sont nées les deux passions - mères : la convoitise et l'orgueil.
Les algues sont les émotions superficielles : l'agressivité, la tristesse, la révolte, le découragement, les convoitises. Ces algues vont gêner la progression du bateau.
Et ces algues n'ont qu'un désir : grandir et proliférer !
Elles prennent leur origine dans le fond de la mer et nous n'en voyons que la partie en surface.
Nous n'en voyons pas la racine amère.
Et l'algue, la racine amère, ne cesse de monter dans notre océan intérieur pour se développer.
Mais l'écho dans notre psychisme d'un feu spirituel ne procède pas d'une montée, il procède par la descente. C'est pourquoi on lit dans l'Ecriture :
« L'Esprit Saint descendit sur les Apôtres »
« Le Verbe de Dieu descendit en nous, Il S'incarna »
Par la descente, le feu d’en-haut va nous inviter à descendre dans les profondeurs de la mer et à visiter avec Jésus, progressivement, comme Lui le veut, nos sources vitales les plus profondes, nos régions inférieures, nos enfers, nos racines amères.
Il y a deux racines amères, deux passions - mères, toutes deux conséquences du péché originel : l’orgueil et la convoitise constituent la racine de l'algue.
Nous allons reprendre tout le travail de deuil en l'approfondissant.
Comment passer d'un événement analogique à un autre événement analogique pour aller jusqu'à sa racine ? Il faut enlever de notre cœur toutes les racines d'amertume. Pour cela, il faut d'abord les repérer, grâce aux événements analogiques avec tous les analogues des origines de nos blessures :
Est-ce une blessure : par rapport à la paternité ?
par rapport à la maternité ?
par rapport à la fraternité ?
par rapport à la filiation ?
par rapport à la sponsalité ?
On va regarder derrière quel type d'événement analogique se cachent ces blessures. Je m'aperçois que j'ai des blessures toujours par rapport à un certain type de relation.
Grâce à cela, je peux trouver que j'ai un travail de deuil à faire par rapport à ma mère ou à mon père, donc par rapport à la Providence de Dieu.
C'est dans la prière, que se fait cette prise de conscience Il faut redescendre dans les racines amères grâce aux événements analogiques.
Je reçois les événements de plein fouet et je constate que les événements se reproduisent toujours dans la même direction. Et je m'aperçois que c'est moi qui attire ces événements. Peut-être même, la Providence divine est-elle obligée d'accepter que ces événements se produisent à cause d'une racine d'amertume sur laquelle je n'ai pas lâché prise.
C'est tout le problème de l'extériorité, et de l'intériorité
En effet, plus je suis blessé, plus je mets la Providence de Dieu extérieure à moi, alors que la vie divine, l'image et la ressemblance de Dieu, est intérieure. Si je transpose les événements qui m'arrivent sur des événements extérieurs, la Providence me le rend bien ! Mais ce n'est pas Dieu qui me le rend, c'est moi qui projette cette Providence de Dieu, qui est au fond de moi, dans une extériorité et, du coup, c'est moi qui provoque Ces événements analogiques.
Par exemple : quelque chose en moi fait que, par rapport à une personne ayant autorité sur moi, chaque fois, je subis des injustices criantes ; et cela ne tient pas à la personne qui me les fait, cela tient au fait qu'il y a des choses en moi qui ne sont pas guéries et que je projette sur Dieu. Par exemple, à bien y regarder, ce n'est pas l'autorité qui me rejette, car l'autorité est obligée d'agir en fonction d'une communauté ; et la communauté demande le rejet car il y a en moi un problème vis-à-vis de la communauté, de l'Eglise, de la famille, de tout ce qui est maternel, de tout ce qui m'enveloppe. Cela cache un problème profond, spirituel, impossible à ressentir puisqu'il est spirituel ; c'est un événement caché dans ma mémoire spirituelle, lequel événement cache la manière dont j'ai reçu la première blessure maternelle de ma mémoire.
Il y a des événements qui créent des blocages, des peurs, des angoisses... Et nous devenons nos propres persécuteurs. Nous nous apercevons qu'ils s'enracinent dans des amertumes : nous avons un fond d'amertume.
Le problème de la guérison des souvenirs consiste à prendre conscience de cette amertume, puis à faire le travail de deuil, permettant ainsi de revivre les mêmes événements, mais sans amertume, en coopérant et en entrant dans un mystère de participation.
Nous avons étudié toutes ces étapes à respecter.
Dans notre vie, nous avons rencontré des personnes qui sont allées jusqu'au bout du travail de deuil et qui sont totalement réconciliées avec ce qui leur a fait mal ou ceux qui leur ont fait mal. Ils vivent avec cela et ils en sont heureux. Avec les mêmes phénomènes de blessures, il ne s'en dégage plus du tout des racines d'amertume. Ces personnes entrent dans une attitude où elles sont heureuses de vivre cela, elles coopèrent avec cela et rentrent dans un mystère de participation.
Si tout le monde n'a pas la vocation d'être « une plaie sanglante », nous sommes tous appelés au travail de deuil.
Quand nous sommes dans cette étape d'oblativité, quand nous sommes fermement établis dans la Miséricorde de Dieu, nous pouvons alors nous réconcilier avec notre passé, avec nos racines amères, et ainsi retrouver notre Mémoire ontologique. Mais nous ne pouvons pas nous réconcilier avec nous-mêmes, avec un passé, donc avec père et mère, avec nos racines, si ce travail de deuil n'a pas été fait. Il peut y avoir un phénomène de blocage par rapports aux parents qui fait que le travail de deuil étant fait pour soi-même, nous avons l'impression de ne pouvoir « détacher les wagons » par rapport au passé : il ne s'agit pas de se séparer de son passé, mais de pardonner, de se réconcilier avec ce passé.
Je ne « m'accroche » plus à mon passé, grâce à l'Esprit Saint.
Il faut que je repère mes blocages psychologiques qui font que je suis triste, je suis épuisé, etc. Ces processus psychologiques vont me faire prendre conscience des blocages qui sont en moi profondément derrière cela.
Quand je suis dans l'Axe de l'Alliance, dans la finalité qui est l'amour, mon « Je suis » est dans le « Je Suis de Dieu ». C'est mon identité, en tant qu'homme, qui me permet de voir que je suis un être d'espérance.
Mais, à partir d'un moment, au lieu que mon existence tourne autour de mon axe, je vais avoir un refus de vivre dans cette ascension où je suis dans le « Je Suis de Dieu ». Je vais refuser le travail de deuil ; c'est le refus d'entrer dans les Béatitudes : pour moi être persécuté, ce n'est pas cela être heureux, être affligé, ce n'est pas cela être heureux. Alors, je bloque tout et je me développe sur une horizontale artificielle. Lorsqu'un nouvel événement, analogique à une blessure antérieure, arrive, je me bloque et je me révolte.
Je refuse l'événement analogique car il est trop dur pour moi.
Je refuse l'événement et le travail de deuil : c'est le refus du mouvement de la croissance.
Ce refus du mouvement de la croissance va se manifester, en nous, de plusieurs façons :
Par un phénomène d'isolement : Je vais être tout seul.
Par des fuites : Je vais me précipiter dans des fuites de toutes sortes : l'alcool, la drogue, la sexualité, le travail excessif, la boulimie ou l'anorexie, le sur engagement, etc. Cela m'oblige à faire autre chose, en dehors de mon axe qui me fait entrer dans une identité nouvelle, imaginaire.
Par le repli sur moi dans une identité imaginaire, non réelle, dans une identité néo-formée, en dehors de mon axe. Alors, je suis dans un brouillard qui m'empêche de voir mon axe véritable. Je suis dans un égocentrisme où mon « je suis » n'est plus dans le « Je Suis de Dieu », qui lui est réel.
Par des morts de substitution : Je suis mort, puisque je ne suis plus dans ma propre vie, mais je ne veux pas me l'avouer. Alors, je rentre dans des morts de substitution, comme la soif de vengeance, des tentations suicidaires, des instincts d'auto destruction et toutes sortes de convoitises.
Par des compensations : Puisque je ne vis plus, que je suis dans une identité néo-formée, que je suis en dehors de mon axe, dans des fuites et même, en dehors du temps, je ne suis pas comblé. Alors, j'ai besoin de compensations car les fuites ne me donnent aucune compensation. Et, je me donne mes propres compensations : ce sont la tristesse et la colère.
La tristesse est extraordinaire car il y a en elle quelque chose de juste, puisque je suis en dehors de mon axe mais c'est aussi une compensation car c'est une passion du concupiscible « Que je suis malheureux !? » Et plus vous êtes malheureux plus cela vous fait du bien. Se complaire dans la tristesse est une certaine masturbation psychologique. Cette tristesse n'est absolument pas une tristesse spirituelle, puisque vous êtes en dehors de l'axe, qui, elle, est une tristesse juste, à l'intérieur du travail de deuil.
La colère est aussi un phénomène de compensation.
L'avantage de cette colère qui d'ailleurs prend appui sur la tristesse est qu'elle me permet de commencer le travail de deuil ; car il y a une prise de conscience à faire du fait que je suis en dehors de mon axe. Et je me pose la question : « Pourquoi ? Qu'est ce qui a fait que je me suis retrouvé ailleurs, en dehors de mon axe ? ». Alors je dois accepter de revenir à mon axe en respectant les dix étapes que nous avons déjà vues. Je reviens à ma blessure initiale, à mon point de départ et je repars. Mais il faut continuer à lutter.
A la nouvelle blessure, il y aura un nouveau travail de deuil à faire. Alors, la perte de proximité par rapport à l'identité va se résorber. A force de vivre cette guérison des souvenirs, je me rapproche de plus en plus de mon axe, de mon identité, par des séances successives de travail de deuil.
La Maturité de la Personne c'est que la perte d'identité, qui est d'être de plus en plus le Fils, l'enfant innocent, dans les Bras du Père, se fait de moins en moins lointaine de mon axe. (cf. tableau de l'Axe de l'Alliance)
Ma vie va se développer de plus en plus dans le sens existentiel, dans le sens de ma finalité. Mais dès qu'on se réfugie dans les fuites, c'est une perte de temps. C'est pourquoi il faut faire le travail de deuil tout de suite. Mais cela va prendre du temps.
Grâce à tous ces phénomènes de refus de croissance, de tristesse et de colère, nous comprenons qu'il faut faire ce travail de deuil. Mais nous n'arrivons pas à voir où il faut revenir et comment guérir.
Les blocages qui sont en nous ne disparaissent pas si facilement ; il faut les repérer. On constate d'une part que l'on bute et que l'on n'arrive pas à être dans un état total d'oblativité, et d'autre part que les 10 étapes ne se font pas en un instant, qu'il faut du temps pour arriver à repérer des blocages qui sont encore là. Il faudra une nouvelle prise de conscience pour un nouveau tour de spire du travail de deuil, car nous étions dans une autre problématique. Le travail d'identification se rétrécit au fur et à mesure de ce travail de spire. Il faut revenir à l'oraison, il faut revenir à la prière, revenir à cette demande adressée à l'Esprit Saint de nous faire rentrer dans le regard de Jésus, pour qu'Il nous donne la lumière sur ce qui nous bloque et que nous n'avons pas encore vu.
Ce sera la question du voilement et du dévoilement des souvenirs. C'est une autre manière de regarder le problème. Ce qui n'est pas voilé, c'est que je suis mal
Ce serait très intéressant de voir comment se fait ce travail de deuil, à travers saint Jean de la Croix, cette guérison des souvenirs, cette guérison de la mémoire. Elle se fait par l'oraison, par le travail de l'Esprit Saint, dans la Montée du Carmel. C'est probablement la voie la plus rapide.
Le dévoilement des souvenirs n'est pas une fin en soi, il n'est qu'un moyen de retrouver notre finalité, la direction et le sens de notre vie qui est d'être fils du Père. Ce dévoilement est un mouvement opéré par l'Esprit Saint pour élargir l'espace de notre tente.
Pour cela, nous pouvons utiliser des techniques, mais elles ne sont qu'un moyen pour prendre conscience de ce qui nous habite, pour relire notre histoire, pour la réorienter vers son but, sa finalité, pour transformer notre histoire de malheurs en histoire sainte et y découvrir la Présence et l'appel de Dieu. Et aussi, pour utiliser notre passé, non pas comme un moyen d'aliénation qui va nous couper de Dieu, des autres et de nous-mêmes, mais bien au contraire, pour en faire un moyen de réconciliation et d'union à Dieu, de relation et d'amour envers nos frères et nous-mêmes.
Les techniques de dévoilement n'ont pas pour but un bien-être, un confort intérieur, une paix, une sérénité. Certaines personnes peuvent y trouver une sérénité, mais c'est en réussissant leur identité néo-formée. Elles vont « prendre leur pied » dans une des fuites, surtout si elle est sacralisée, c'est-à-dire si elle a une connotation religieuse : c'est le phénomène des sectes.
Mais nous chrétiens, notre but est de découvrir notre vocation profonde : être Fils du Père. Je suis un verbe intérieur du Père, donc je me replace dans une dépendance d'amour et non dans une dépendance aliénante, pour m'inscrire dans ma vocation, et je vais croître dans le temps dans cette longue patience et accepter les séparations nécessaires, c'est-à-dire le travail de deuil, pour aboutir à ma véritable vocation : l'oblativité.
Nous nous mettons dans une attitude bien différente de la psychologie moderne qui utilise des techniques pour faire remonter les souvenirs, faire revivre les blessures de l'enfance et celles de la naissance, pour faire revivre les émotions en pensant que, par l'expression de ces émotions, nous serons guéris. Comme par exemple, la bioénergie qui consiste à taper sur un coussin pour exprimer son agressivité personnelle. Il est vrai que nous sommes dans une situation de blocage et que ces techniques vont avoir le mérite de permettre aux sentiments compensatoires de s'exprimer : au refus, à la tristesse, à la colère de s'exprimer.
L'expression des sentiments permet effectivement une prise de conscience de ces sentiments, mais pas davantage et cela ne suffit pas. C'est un pas vers la guérison, mais cela ne nous remet pas dans notre vocation de Fils. Cela ne fait pas de notre histoire de malheurs une histoire sainte aux yeux de Dieu, ni un moyen de reconstruction, d'expression de Mort – Résurrection de Jésus de manière à ce que cette blessure, cet échec soit source de vie.
Cette prise de conscience par ces différentes techniques aboutit en fait à un sur-attachement (la bioénergie, c'est que vous pouvez repartir et aimer quelqu'un d'autre).
Il est intéressant de comprendre ce qu'exprime un souvenir. Il y a toutes sortes de souvenirs qui émergent de ma mémoire avant même d'être entrés dans mon monde intérieur, même les souvenirs les plus anodins. Mais je me rappelle aussi de certains souvenirs qui m'ont blessé profondément ; sans aller chercher des souvenirs lointains, ce qui compte est de savoir ce qu'expriment les souvenirs qui sont là. Il y a des événements qui m'ont blessé profondément et dont je ne me souviens pas, et d'autres dont je me rappelle. Pourquoi ?
Qu'exprime un souvenir ? Beaucoup plus qu'un simple passé, car le passé n'appartient pas au passé, il m'a construit, donc il est bien présent et particulièrement présent par mes émotions.
L'analyse transactionnelle nous apprend que nous avons trois états du moi :
1. le moi parental :
C'est tout ce que nous avons introjecté de ce qu'il est bon que nous fassions, d'où l'importance des relations parentales. Le « il faut » des parents devient le mien puisque j'ai abandonné mon identité.
2. le moi adulte
C'est le moi prudentialiste, qui réfléchit, raisonne, pèse le pour et le contre et, finalement, permet le repli sur soi : méfiance ! méfiance !
3. le moi de l'enfant
C'est le moi émotif, le moi des émotions compensatoires : la peur, l'angoisse, la culpabilité, la tristesse, la convoitise, la haine. Chaque fois que je vis une émotion, c'est l'enfant en moi qui parle, l'enfant du passé mais qui est bien présent.
Le souvenir est l'expression d'un vécu du passé, mais qui est vivant, bien présent aujourd'hui. Il est donc important de comprendre ce qui se cache derrière ce souvenir, tout son soubassement. Ce qui compte, ce qu'il faut, c'est être vrai avec Dieu, vrai avec soi-même, vrai avec son prochain, en découvrant le fondement de toutes ces bêtises.
Il y a quatre étapes dans le dévoilement des souvenirs. Le souvenir est comme une maison qui a tout un climat affectif, notre maison intérieure a quatre étages :
C'est sur la terrasse que se situe le souvenir d'enfance, bien particulier. Il est facilement accessible à la mémoire, il est visible. C'est là où je suis dans le rêve.
En dessous, il y a toute une maison que nous allons explorer. Derrière l'émergence d'un souvenir, il y a toute une personne humaine, jusqu'à ses fondements intimes qui sont l'image de Dieu et la Mémoire ontologique.
II y a la condensation de tout un climat relationnel. Ceci est très important : Pourquoi est-ce que je me souviens de tel événement et pas d'un autre ?
Dans l'événement dont je me souviens, je ne me souviens en réalité que d'une toute petite partie de cet événement, car le souvenir fait partie de tout un ensemble. Il s'inscrit dans une situation relationnelle particulière, il est le signe d'une ambiance. Il faut essayer de sentir ce climat, de se souvenir de cette relation coupée, pour pouvoir pardonner et reprendre la relation coupée. C'est à travers le climat relationnel que je vais pouvoir exprimer ce souvenir.
Par exemple, quand je me remets dans ce souvenir, où telle personne m'a blessé et où je ne lui ai pas pardonné, je me replace en relation avec elle, et cela me met dans un certain climat relationnel avec elle.
Dans mon souvenir, je me situe en présence de la personne la plus proche, cause de mon refus, et j'essaie de sentir le climat relationnel. Il va me mettre dans un certain climat affectif qui va me faire ressentir la peur ou un sentiment d'injustice ou un sentiment de solitude ou d'abandon.
Par exemple, si dans l'événement qui caractérise ma relation avec mon père, j'ai le souvenir cuisant d'une fessée magistrale, alors que je m'attendais à un pardon, à une tendresse (c'est peut-être la seule fessée que j'ai reçue dans mon enfance, mais je m'en souviens), c'est un événement dont je me rappelle et qui me parle.
Qu'est-ce que ce souvenir, cette fessée, exprime comme climat, comme ambiance générale, tant à la maison qu'en moi, surtout comme enfant, dans la relation avec mon père ? Si le souvenir qui m'en reste est cette fessée, cela révèle quelque chose de ma relation avec mon père, sur un mode d'injustice ou un mode d'insécurité. Je ne me souviens peut-être pas de la cause de cette fessée, mais cet événement est représentatif d'un type de relation avec mon père, par exemple, un manque de dialogue ou une réaction de peur.
Le climat, signifié par le souvenir, laisse une grande place à l'affectivité.
Il est très important de pouvoir mettre un nom sur ce climat. Ce souvenir dit la peur dans ma relation avec mon père. Mais il peut révéler un sentiment de méfiance ou une impression de solitude ou bien un sentiment d'injustice ou encore une relation de mensonge, une sensation d'absence...
Ce climat va exprimer toute une expérience quotidienne relationnelle, toute une expérience vécue.
La dernière blessure était avec telle personne ; mais en réalité, elle reproduit une blessure analogue dans les relations vécues avec mes proches, donc dans la relation que j'ai avec moi-même et dans la relation que j'ai avec Dieu ; car la relation avec Dieu est toujours impliquée.
Mais cela, c'est dans la théorie. Il va falloir que je retrouve concrètement, en le repérant, le climat dans lequel cela me met. Et si je veux en savoir plus et réussir à interpréter ce climat, je dois descendre d'un étage.
Derrière un climat, il y a toute une interprétation de l'événement, toute une interprétation de la relation.
Ce n'est plus tant la part de l'émotion, de l'affectivité, que celle de l'imaginaire, c'est-à-dire la façon dont j'ai vécu, intériorisé et mémorisé l'événement.
Que l'événement soit vrai ou faux n'a aucune importance, ce qui m'intéresse c'est le vécu subjectif et la façon dont j'ai vécu et mémorisé cet événement.
Il est intéressant de voir que, dès que nous nous coupons d'une relation, nous entrons dans la création d'une nouvelle identité à partir de l'imaginaire. L'imaginaire me fait sortir de cette dynamique de l'axe autour de l'existentiel. C'est pourquoi les psychanalystes aiment tant interpréter les rêves.
Par exemple, lorsque nous prions, quel type de vision avons-nous du Christ ou de la Vierge Marie ou des Saints ? Car, nous les voyons en fonction de ce que notre imaginaire a besoin de voir.
L'important est donc de voir comment mon imagination a travaillé, la manière dont j'ai réagi à l'événement à cet instant précis et comment je l'ai vécu. Comment ai-je reçu telle blessure, telle injure, telle insulte et comment l'ai-je interprétée ? A quoi ai-je pensé ? Comment l'ai-je mémorisée ? A cet appel téléphonique, comment ai-je réagi dans mon imagination ? Alors, je demande à l'Esprit Saint de m'aider à exprimer, explicitement, objectivement (et non pas émotivement, affectivement) la façon dont j'ai vécu l'événement qui m'a blessé.
C'est un phénomène relationnel qui a provoqué la blessure. Le fait de se le dire à soi-même ou à Dieu, à un ami ou un confident, c'est relationnel.
Dans ce 1er temps, dans ce phénomène relationnel, nous avons d'abord exprimé nos sentiments, nos émotions.
Si nous sommes en adoration, si nous sommes capables de nous accompagner nous-même par rapport à cela, nous allons nous rendre compte qu'il y a plusieurs choses qui nous empêchent d'exprimer objectivement la manière dont nous avons vécu un événement douloureux, récent ou ancien. En effet, cette interprétation de l'événement va reposer sur trois principaux mécanismes de défense, trois mécanismes d'interprétation qui empêchent toute objectivité :
La généralisation :
Elle consiste à faire d'un seul souvenir bien précis une généralisation.
La phrase caractéristique est de dire « c'est toujours comme ça ! ».
Par exemple : ma petite fille me dit : « tu dis toujours non ». C'est vrai, s'il m'arrive quelquefois de dire « non », mais elle va généraliser en disant « toujours ». Mais en même temps, elle me dit autre chose de plus profond « que je ne l'écoute pas assez, que je ne la comprends pas assez, etc. » Cela vient souvent d'une introjection parentale
C'est aussi ce que nous faisons en disant à un enfant « tu es un voleur », alors qu'il a pris quelque chose sans intention de voler : je définis l'enfant par ses actes, je généralise.
C'est aussi ce que nous faisons, étant adultes, en mettant systématiquement une étiquette sur les autres.
C'est l'imaginaire qui généralise.
La sélection :
Dans le phénomène de la sélection, je choisis, c'est-à-dire que, dans la manière dont je revis ou réexplique l'événement, je prends ce qui m'arrange, ce qui entre dans ma grille de lecture et je laisse de côté tout le reste. Je vais seulement dire ce qui me permet de confirmer mon interprétation, confirmer ce qui m'arrange, ce que je pense et confirmer la façon dont je vis.
C'est ainsi que nous faisons de la désinformation, de la sélection. Cela permet de voir comment l’imaginaire a travaillé pour restituer une réalité.
La distorsion :
Dans le phénomène de la distorsion je transforme l'événement, je le tords, je le modifie pour le faire entrer dans mon cadre.
Par exemple : ma mère me fait un cadeau pour me prouver son affection, et je vais m'en servir pour prouver le contraire : elle ne m'aime pas car son cadeau ne me plaît pas. C'est ainsi que nous pouvons même parvenir à transformer un événement heureux en une catastrophe.
Nous utilisons chaque jour, dans notre comportement, ces trois mécanismes psychologiques de défense. Il faut repérer celui que nous utilisons.
Dans ce 3e étage, nous trouvons ces trois filtres, cette grille de lecture qui me permet d'interpréter chacun des événements selon ce qui est inscrit dans ma mémoire et qui a déjà été coloré par l'imaginaire et l'affectif blessé.
Dans ce deuxième étage nous allons accepter, ce qui demande une conversion, de retrouver tout ce qui se cache derrière les mécanismes de défense qui vont bien au-delà de ce que telle personne vient de nous faire. Cela prouve que ces attitudes sont antérieures et qu'il faut trouver ce qui se cache derrière. C'est là que nous allons trouver tout ce qui relève des attitudes cachées et de nos sentiments cachés, car sentiment et attitude sont très liés.
Si j'ai une attitude particulière, une attitude de défense, c'est parce que j'ai un sentiment sous-jacent, un sentiment du moi qui est beaucoup plus profond que l'émotivité. Ces sentiments et attitudes sont la peur, la souffrance, l'angoisse, qui m'amènent à sélectionner, à généraliser et à distordre. Mais, c'est aussi des sentiments du moi, comme la culpabilité ou la fausse culpabilité, la honte de soi qui est liée à la peur de n'être pas aimable. Il y a aussi des sentiments du moi qui engagent ma responsabilité, comme des sentiments de haine, de violence, pour me protéger ; c'est pour cacher ces sentiments que j'ai mis en place tout un système de défense (à l'étage supérieur).
Pour aller plus loin, il faut descendre dans ce 1er étage, au vrai niveau, celui de la croyance. C'est là que s'élaborent les choix responsables, c'est là que je suis capable de choisir. Le choix, qui est l'expression de la liberté, est antérieur et sous-jacent au souvenir.
Dans ce choix vont intervenir la grille de lecture, mais encore un élément bien plus profond, le péché originel et le péché de lignée, qui font que nous avons tous une liberté blessée dans son agir.
Derrière le besoin d'être aimé, d'être reconnu, il y a un choix, que j'ai fait d'une manière responsable, avant tous ces souvenirs de blessures et qui est sous-jacent à ces souvenirs.
Par exemple : un jour, j'ai fait lucidement un choix qui est un péché et qui correspond au péché, c'est-à-dire à être moi-même rempli d'amour par moi-même, indépendamment de Dieu et des autres. Cette croyance en moi, associée à un choix responsable, est derrière tous les souvenirs de blessures.
Ces souvenirs de blessures cachent ce choix responsable où nous allons retrouver le péché originel, le péché de lignée et tous les atavismes.
C'est jusque là que ma liberté dans l'ordre du dévoilement peut aller.
Je reçois de mes parents, du contexte social tout un atavisme.
En effet, le péché de lignée me soumet aux plis habitudinaires et chaque fois que je serai confronté à la souffrance, à l'angoisse, à la peur, j'aurai comme choix possible d'opter pour ce que ma lignée me montre (alcoolisme, drogue, violence, révolte...) ; ou, du fait de ma liberté plus profonde, de ne pas choisir cet atavisme.
Mon choix responsable est là : il n'est jamais trop tard pour se séparer d'un péché parental, lié au péché originel et au péché de lignée. Nous n'avons pas le droit de suivre nos parents dans leurs erreurs, quand ils sont dans un choix d'athéisme, de « non-don » et de « non-pardon » ; mais cela relève d'un choix personnel.
L'enfant agressé dès le sein maternel va poser un choix. Dans la mesure où il est un être « à l'image » et où il est confronté à une situation de non-amour à laquelle il n'est pas préparé, il va réagir d'une façon qui va le construire et qui est en même temps inadaptée, car sa réaction dépassera ce qu'il voulait faire réellement, du fait même de ce péché de lignée ou du péché originel. Un enfant blessé dès le sein de sa mère va faire un choix de vie ou un choix de mort : il pourra mourir dans le sein maternel ou naître prématurément, mais cela entraînera un mouvement de haine envers lui-même et envers la vie (la mère).
Donc, plus profondément que toutes mes croyances, il y a cette personne unique que je suis, porteuse de cette Mémoire ontologique, qui fait de moi un être de communion et me donne une liberté absolue de désir, d'intention, mais pas d'agir, et qui fait que mon « je suis » est dans le « Je Suis » de Dieu.
Nous en arrivons au fondement. Notre « je suis » est dans notre corps, dans notre être, dans toutes nos cellules, dans notre Mémoire ontologique ; notre « je suis » est dans l'Acte créateur de Dieu, dans l'Innocence divine, dans la Paternité de Dieu.
Nous sommes l'image de Dieu, le Temple de Dieu, alors nous renonçons à cette croyance, qui est une complicité avec la résistance.
Mais ce choix personnel, que je n'ai pas fait quand j'étais petit, va donner une fragilité plus grande du point de vue de la liberté profonde de vivre notre « je suis » dans le « Je Suis » de Dieu.
Après avoir vu le processus du dévoilement des souvenirs, voyons comment se fait le processus du voilement, comment les choses se voilent.
Le lien, entre la croyance, l'expérience vécue et le sentiment, va engendrer un processus de voilement.
Un homme, blessé dans l'élaboration de ses choix responsables, va entrer dans toute une croyance qui va lui permettre d'agir envers ses sentiments de peur et de culpabilité, interprétant selon ses choix ce qui lui permettra de relire un climat d'une certaine façon et d'en retenir un souvenir particulier.
Si j'ai une certaine croyance, elle va donner une coloration, un certain sentiment par rapport à l'expérience et qui sera confirmée par l'expérience que je vivrai. Il va y avoir des interconnections entre la croyance, le sentiment et les expériences vécues qui vont engendrer un endurcissement du cœur : c'est le phénomène du voilement.
Par exemple, quand je dis « telle personne ne m'aime pas », c'est en fait un sentiment profond qu'on a vis-à-vis de Dieu « Dieu ne m'aime pas ». Et à chaque événement, je me sens confirmé dans cette croyance. C'est le même sentiment vis-à-vis des parents quand je dis : « Mes parents ne m'aiment pas » qui devient aussi une croyance. Pourtant mes parents m'aiment. Mais il y a eu ce sentiment qui a engendré cette croyance. Et les événements suivants vont me confirmer ces croyances.
Voilà le processus de voilement.
Voici un autre processus de voilement :
Quand je crois que je ne suis pas aimable, « personne ne m'aime, personne ne me regarde, on ne me reconnaît pas ». Cela engendre un sentiment de peur, d'angoisse, qui va provoquer un mécanisme de défense, d'agressivité qui va mettre les autres en danger. Et ils vont se protéger se sentant ainsi agressés et angoissés. En se protégeant, ils vont m'agresser à mon tour et en m'agressant, je fais l'expérience d'être source de rejet, ce qui confirme ma croyance de n'être pas aimable.
C'est ainsi que ceux qui ont une blessure profonde d'abandon vont aller de lieu en lieu. Ils veulent toujours être aimés, mais ils se font partout rejeter « parce qu'ils ne sont pas aimables ».
C'est pour cela que ces croyances « personne ne m'aime » ou « je suis rejeté » doivent être purifiées pour retrouver la Foi.
Ma Foi est de savoir que Dieu m'a créé pour l'amour, qu'il n'y a que de l'amour, que tout a été fabriqué dans l'Amour, que rien n'a été fabriqué en dehors de l'amour, que tout a été créé dans la Lumière, à l'image et à la ressemblance de Dieu.
Dans le travail de deuil, les croyances vont mourir les unes après les autres pour laisser place à cette Foi, à la réalité, la croyance étant mon interprétation de la Foi, à travers mes choix blessés.
Voyons maintenant la tension qui existe entre le voilement et le dévoilement des souvenirs.
Dans le dévoilement, il s'agit de faire remonter les souvenirs pour me rendre transparent. L'Esprit Saint est Esprit de dévoilement, de transparence, qui, selon son rythme à Lui, veut faire remonter mes souvenirs pour me rendre transparent. Mais il existe une tension entre le voilement et le dévoilement. C'est la peur qui mobilise le voilement contre le dévoilement.
« Nous sommes liés par la peur au prince des ténèbres » dit saint Paul.
Cette peur peut entraîner des blocages qui vont engendrer toutes sortes de maladies : notre corps manifeste des troubles psychosomatiques qui sont cet autre lieu du souvenir, qui sont l’ailleurs des souvenirs. Ces souvenirs sont cet autre lieu du choix de la croyance du non-amour avant que commencent à me frapper les événements blessants. Un événement n'est blessant que si j'ai choisi le non-amour avant. Quand nous aimons profondément un ami, nous comprenons ce qu'il dit, ce qu'il fait. Mais dès que nous choisissons de le rejeter, de ne plus l'aimer, de le juger, la moindre petite chose va faire l'objet de doute et de suspicion. Il est intéressant de voir où le corps porte le souvenir d'un événement qui ne veut pas entrer dans la purification :
la peur s'exprime au niveau du ventre,
la tristesse s'exprime au niveau de la poitrine,
la colère s'exprime au niveau de la tête.
La peur se complique en tristesse et la tristesse en colère et c'est le circuit de l'identité néo-formée : La souffrance engendre la honte qui engendre le sentiment de culpabilité qui engendre l'angoisse qui engendre une plus grande souffrance qui engendre l'agressivité qui fait que je deviens persécuteur des autres ; alors je vois mes responsabilités, d'où une souffrance encore plus grande et je me sens victime : voilà les dix étapes du circuit de l'identité néo-formée. Car souffrir comme victime est plus facile à porter que souffrir comme responsable. Derrière le fait que je me présente comme victime, il y a cette peur du lâcher prise, la peur du changement. Si nous ne changeons pas, nous croyons que nous allons vivre notre souffrance plus paisiblement. Mais ce n'est qu'apparent. Et aujourd'hui, on parle de plus en plus de cette peur du lâcher prise.
Et sous cette triple peur, il y a le point d'orgueil, le point d'honneur. Une attitude qui me met fondamentalement en rupture avec Dieu, avec toute forme d'autorité, me maintient tout seul, dans l'indépendance comme si j'étais la source de ma vie, comme si j'étais moi-même ma propre origine.
Le désir de vivre des 7 dons du Saint-Esprit, de cette tension d'Amour entre le Père et le Fils, le désir de vivre du Seigneur, touche ce point d'orgueil, le déracine et le pulvérise. Car tout ce qui est refus de perdre, refus de devenir un être d'amour, en relation, tout ce qui est refus de donner un sens à ses souffrances vient du point d'orgueil.
La thérapie classique n'est pas capable de faire cela, car je ne verrai pas chez elle l'axe de l'identité métaphysique, l'axe de la Mémoire ontologique, laquelle me remet dans les bras du Père de manière immaculée, innocente, originelle, originale et divine. Dans ce qui est pur Amour, pure dépendance, les blessures ne sont qu'extérieures : « les chiens aboient, la caravane passe »
À ce moment-là, je revis des 7 dons du Saint-Esprit.
S'il y a des phénomènes évidents où j'ai ces mécanismes d'introjection parentale, de trop grand scrupule ou d'infantilisme d'une part, et d'autre part des phénomènes de défense, de généralisation, de sélection, de distorsion (que nous avons vus), et qui ont tordu quelque chose, c'est bien de s'en rendre compte, c'est bien d'accepter de demander à un ami de nous aider pour ne pas être complice d'une telle attitude et de pouvoir en demander pardon.
Pour cela, il faut accepter de renoncer à ce point d'orgueil : « Oui, je reconnais qu'il y a une blessure ». J'essaie de la retrouver, de la reconnaître, et je vais accepter d'y renoncer, et de me convertir. Mais pour cela, il faut du temps.
Voilà reconstitué l'ensemble de cet être que je suis, à la fois, avec son être le plus profond qui va pouvoir exprimer sa liberté, ses choix, mais aussi sa personnalité, sa responsabilité, cet être qui est appelé par Dieu à un chemin bien particulier : entrer dans une relation de fils par rapport à son Père.
Le but du dévoilement des souvenirs est de révéler notre personne profonde dans le regard de Dieu.
Cela veut dire remettre en évidence les sentiments douloureux, une angoisse ou une souffrance. Si certains sentiments remontent facilement, d'autres, comme la haine, remontent très difficilement. Et j'aurai beaucoup de mal à mettre en évidence un événement que j'ai distordu, sélectionné, généralisé. Mais le plus difficile sera de remettre en cause mes croyances et d'accepter ma responsabilité dans des choix qui augmentaient ma souffrance.
C'est l'étape la plus difficile, car je dis à tout le monde que je souffre, que je suis une victime et en même temps, je prends conscience que je suis persécuteur. Jamais l'événement n'aurait dû me faire souffrir, c'est moi qui ai augmenté ma souffrance et m'en suis servi pour que l'on s'occupe de moi, que l'on me plaigne... Cette prise de conscience est particulièrement difficile et elle n'est possible que si l'on va au plus profond, jusqu'à l'identité personnelle :
Je suis pécheur mais je suis aussi une merveille de Dieu.
Mes actes ne me définissent pas. Je découvre que Dieu m'aime. Ce que je suis est inaliénable.
Mais il faut aussi voir la gravité de mes actes, et découvrir que je suis pécheur, mais un pécheur non condamné, non jugé, qui est pardonné et qui est passionnément aimé. Ainsi, le souvenir pourra remonter dans la Vérité, dans la Lumière de Dieu qui va mettre en évidence tous mes systèmes de défense, ce qu'il y a de faux, de mensonger en moi. Ce regard de Dieu est indispensable pour découvrir que je ne suis pas caractérisé par mes actes, mais par ce que je suis.
Un bon accompagnement va me permettre de découvrir progressivement les différentes étapes de ma maison, de découvrir en moi la divine Présence de façon à ce que la Lumière de Dieu soit diffusée en moi à tous les niveaux, et me permettre ainsi d'accueillir la vérité du souvenir.
Nous allons voir dans quel contexte peut survenir le travail de deuil. Nous allons envisager essentiellement la relation.
L'homme est un être d'amour c'est-à-dire un être de relation. Le simple fait d'être en relation d'amour va nous permettre de découvrir qui nous sommes par et dans cette relation. Ainsi, le petit enfant se reçoit dans la relation d'amour qu'il a avec son père et sa mère et découvre ainsi qui il est.
C'est dans une relation de filiation que se construit une identité.
Mais cette identité se construit par un mouvement centripète. L'homme va comparer ce qu'il porte en lui, et qui est reçu (sa Mémoire ontologique) avec ce qu'il reçoit au niveau sensible dans la relation maternelle. Il est blessé, ce qui entraîne des relations affectives.
Une relation qui se coupe : c'est l'isolement
Une relation qui fusionne : c'est la dépendance aliénante
II y a en moi un être sensible, qui est blessé. Ce sont les circonstances analogiques, dans la relation qui vont me révéler mes manques à être, c'est-à-dire, découvrir les blessures de ma mémoire.
Les blessures qui sont en moi sont en rapport avec des choses qui se sont cassées dans mes relations d'amour d'origine, dans mes racines. Mes racines, c'est la première relation que j'ai eue dans l'amour quand il a été possible avec mon père, avec ma mère, et avec moi-même. Il est vrai que ce sont souvent des choses qui relèvent de la période embryonnaire.
Cette relation avec la paternité, cette relation avec la maternité, cette relation avec l'altérité, vont dire quelque chose de ce qui s'est passé en moi dans mes relations primitives cassées. C'est pourquoi il est intéressant de regarder les équivalents paternels et maternels.
Il s'agit de découvrir qui nous sommes, à l'intérieur de nos relations d'amour, pour nous permettre de revenir à notre « je suis », qui est dans le « Je Suis » de Dieu, « Je Suis du Christ qui dit « Je Suis la Résurrection ». C'est une manière très belle de faire coopérer nos blessures à l'Acte d'Adoration.
Car là où le Seigneur ne nous quitte pas, c'est dans nos blessures et nos plus grandes pauvretés, là où notre mort s'acclimate à un désir, à une soif, à un cri de l'enfant dans le désert qui est le cri du Christ qui attend la Résurrection des pécheurs. Dans toute souffrance qui touche jusqu'au point de vue de l'identité et de l'être, il y a la Présence réelle du Christ.
À travers ces relations d'amour, et même de non-amour, qui sont un moyen possible de guérison de cette mémoire blessée, il y a une relation privilégiée qui est révélée, c'est la relation avec l'autorité.
Cette relation avec l'autorité m'établit dans une relation de filiation, qui est la relation fondamentale, la relation première.
Nous allons tenter de retrouver, à travers cette filiation, notre identité personnelle. Dans notre « je suis » initial, nous avons été créés soif d'amour, soif d'actuation, soif de création, soif de Grâce, soif d'identité, soif de transparence.
Le jour de notre création, c'est-à-dire, le jour d'aujourd'hui, nous avons été établis dans la filiation, métaphysiquement : Dieu est notre Père et nous sommes son fils.
La filiation est la relation qui fait notre identité permanente, la plus continuelle, puisqu'elle est celle de notre origine.
Nous pouvons comparer notre identité personnelle à une maison.
Le Seigneur compare souvent l'homme à une maison pour regarder quelle est son identité.
Comme toute maison bien construite, elle a des fondations.
Ce qui fonde notre identité, c'est la relation de filiation, la découverte que nous sommes fils.
Le double fondement de la filiation
1. Les FONDATIONS
Cette prise de conscience que nous sommes fils a lieu vers l'âge de 9 mois. Jusque là, nous sommes identifiés totalement, dans la perception de conscience de notre identité, à l'identité de notre mère ; c'est la conscience psychologique que nous sommes fils ou fille de notre père et de notre mère.
2. Le ROC
Mais, du point de vue spirituel, les racines de notre filiation sont portées par notre corps, bien avant l'âge de 9 mois, depuis la conception ; c'est la prise de conscience que nous sommes fils de Dieu, dans notre Mémoire ontologique.
Il faut donc faire la différence entre la prise de conscience psychologique de notre filiation, par rapport à notre père et notre mère, et la prise de conscience spirituelle de notre filiation, par rapport à Dieu qui se fait dans notre Mémoire ontologique, corporellement, dès la conception.
C'est à partir de cette double filiation que va pouvoir se construire la maison que nous allons habiter toute notre vie.
Après avoir vu les fondations, voyons maintenant le rez-de-chaussée, et les étages :
Le rez-de-chaussée
Le rez-de-chaussée qui se bâtit sur cette double fondation me permet de réaliser que je suis un homme ou une femme et que je suis un être humain, avec ma vocation spécifique qui touche mon corps, mon psychique et ma vie spirituelle.
Le premier étage
Au premier étage, à partir de cette humanité dans sa signification sponsale, je découvre que je suis appelé à me donner, en tant qu'époux, à me donner en tant qu'épouse. Je commence à comprendre que je suis fait pour me donner à un autre que moi, même si je ne le connais pas encore !
C'est en effet vers l'âge de 6-7 ans que le petit garçon réalise qu'il sera prêtre, qu'il est prêtre : il se découvre dans sa dimension sponsale. La fillette, au même âge, se découvre comme épouse, en rentrant dans un acte de gratuité éternelle, dans l'acte créateur de Dieu. Elle réalise qu'elle est faite pour être épouse et elle appartient déjà à l'époux qu'elle rencontrera bien plus tard, mais déjà elle est unie à lui.
La prise de conscience de l'être humain, en tant que tel, appelée « âge de raison », est un peu antérieure, vers l'âge de 4-5 ans : c'est la phase d'identification au parent du même sexe. Et cette prise de conscience ne cesse d'augmenter dans une relation de filiation.
Je vous rappelle que c'est dès la conception que nous avons cette connaissance sur le plan de la Mémoire ontologique où la partie vitale, animale de notre perception vient s'unifier à notre mémoire ontologique.
Voilà les trois étapes de la prise d'identité en tant que nous sommes fils. Il faut souvent demander à l'Esprit Saint de revenir à ces étapes dans le travail de deuil. L'Esprit Saint peut nous éclairer.
Il ne faut pas repartir dans la vie, après un échec, en disant « je vais re-faire ma vie », car à ce moment-là vous refaites votre vie à partir d'un échec, d'une mort non résolue parce que vous n'êtes pas revenu à votre identité, à cette vocation d'homme ou de femme, d'époux ou d'épouse, que vous aviez connue vers l'âge de 5 ans. Il faut revenir à cette source. Charles Péguy dit : « Un homme est quelqu'un capable de revenir à sa source ». Mais le courant est contraire ! Il vous pousse à ne pas revenir à cette source. Alors, vous ramez : c'est cela le travail de deuil. Et si vous ne ramez pas pour revenir à cette source de votre filiation, vous allez exactement à la même vitesse qu'un cadavre. Si c'est cela « refaire votre vie » vous êtes à plaindre !
Pour que s'épanouisse la relation d'époux et d'épouse, dans ce 1er étage, il faut que le rez-de-chaussée soit bien établi, là où nous découvrons que nous sommes un être humain, dans notre source intérieure qui est une racine de filiation. Cette racine de filiation qui va de la conception jusqu'à la fin de notre vie est donc la plus fondamentale. C'est elle que nous devons retrouver.
La toiture, avec le grenier
Sur le premier étage s'édifie la toiture avec le grenier.
Nous pouvons arrêter notre Maison au 1er étage, mais nous serons un peu mal dans notre identité.
La toiture de la Maison, c'est la Paternité et la maternité.
Notre vocation ultime est d'être Père ou Mère selon le Cœur de Dieu. Elle se bâtit sur les 2 étages précédents et elle fait que nous sommes source d'autres êtres humains.
Si elle ne se construit pas sur une filiation profonde, nous n'avons pas une paternité ou une maternité humaine, selon le Cœur de Dieu, ce ne sera pas une paternité ni une maternité responsable. Dieu est Père, Dieu est Mère et nous sommes créés « à l'image et à la ressemblance de Dieu » ; comme Dieu, nous sommes Père et Mère. Si nous refusons d'être Fils, nous aurons une paternité et une maternité irresponsable.
Quand la maison a de bonnes fondations, que le rez-de-chaussée est bien établi, et que le 1er étage est solide, la toiture ne risque pas de s'effondrer.
Mais si la fondation est fissurée, le rez-de-chaussée va être à peu près correct (je me reconnais homme ou femme), mais au 1er étage (époux / épouse) ce sera déjà branlant (nous allons sentir des difficultés conjugales) et la toiture menacera de s'effondrer : notre fécondité humaine, notre responsabilité vitale Paternité / Maternité va être ébranlée. Il nous sera alors impossible d'être père et mère spirituellement, impossible d'enfanter nos enfants spirituellement. C'est alors comme un clignotant rouge qui s'allume et me dit de refaire le travail de deuil, pour redescendre dans l'authentique de ma relation comme Fils ou Fille de Dieu.
Le fondement de notre identité, c'est la Filiation
Le terminal, c'est la Paternité / Maternité
L'intermédiaire, c'est la Sponsalité
Pour être Père ou Mère, il faut d'abord être Époux ou Épouse ; il y a donc une gradation, une progression des valeurs : j'apprends à être Fils ou Fille, moyennant quoi je deviens qui je suis. Je peux alors devenir époux ou épouse. Et enfin, j'accède à une Paternité ou une Maternité « responsable ».
Il nous faut recevoir le Seigneur comme le grand Architecte, le grand Ami, le Jumeau, pour visiter notre Maison afin de nous permettre de voir le lieu (la fondation ou l'étage ou la toiture) où cela ne fonctionne pas bien, et nous guérir.
Cela ne gêne pas le Seigneur de venir habiter ma Maison, quel que soit son état, à condition que je L'invite chez moi. Mais si je Lui dis que je n'ai pas besoin de Lui, que tout va bien, il ne pourra rien faire. Il y a donc à faire un minimum de prise de conscience que « je ne vais pas bien ».
Le Seigneur va nous donner la Vie fraternelle pour voir l'état de nos fondations
Nous allons voir comment le Seigneur va pouvoir entrer dans notre maison. C'est à travers les relations d'amour que nous avons les uns avec les autres, aujourd'hui, dans la vie communautaire, mais vécue dans le Seigneur, dans la Charité fraternelle, dans la Présence spirituelle du Christ,
Nous vivons en relation les uns avec les autres dans différents types de modalité. Nos relations sont de trois types :
1er type de relation : La relation avec les personnes ayant autorité sur moi : les parents et tous les équivalents paternels ou maternels.
Ces relations m'éveillent dans une relation de filialité. Elles me révèlent l'état branlant de ma filialité. Cela va se traduire par des émotions.
Par exemple : c'est sûr que je n'ai pas envie d'aller dans cette Paroisse, rencontrer des gens inintéressants... En plus je n'ai pas envie que quiconque visite mon intérieur, mes fondations, mon identité...
Car ce sont les relations fraternelles qui vont faire cela, c'est-à-dire qui vont révéler l'état de ma paternité, de ma sponsalité et de mon identité.
Dès que je rentre dans une communauté, je souhaite ne pas ressembler à untel ou je me dis qu'ils m'énervent ou je m'ennuie, etc.
Ce sont différents types de réactions auxquels il faut être très attentif car ils révèlent le lieu de ma défaillance. Alors, il faut se poser la question et se demander ce que cela signifie.
L'état branlant de ma filiation se traduit par des émotions : Est-ce que je ressens plutôt :
de la peur ou de l'angoisse ?
de la révolte, de l'amertume ou de l'agressivité ?
de la tristesse ou du découragement ?
de la culpabilité ou de la honte ?
de la jalousie ?
de la joie ou de la paix ?
Il faut repérer le type d'émotion que j'ai, dans le contexte vital, vis-à-vis de celui qui a autorité sur moi car nos relations avec l'autorité vont nous révéler l'état fondamental de notre filiation.
2e type de relation : La relation fraternelle avec des frères, d'égal à égal
La relation fraternelle, cette relation d'égal à égal va me dire quelque chose sur mon identité et sur la façon dont je suis époux ou épouse.
Ce 2e type de relation va me donner des émotions qui vont me révéler l'état de mon rez-de-chaussée et de mon 1er étage.
Le 3e type de relation : La relation avec les enfants.
Elle va me renseigner sur l'état de ma Paternité, de ma Maternité. Les émotions ainsi éveillées vont me révéler l'état de mon grenier et de ma toiture.
Ces émotions ne seront pas les mêmes selon les blessures que j'ai subies, selon les pardons que je n'ai pas accordés, selon les deuils non accomplis, selon les résurrections que je n'ai pas voulu accepter de faire passer en moi, elles vont se traduire par des sentiments de peur ou d'angoisse, de révolte ou d'agressivité, d'amertume ou de colère. Elles vont me révéler des deuils non accomplis et me situer dans le travail de deuil à accomplir.
C'est curieux comme nous acceptons volontiers de nos jours de redevenir Fils mais comme nous avons du mal à accepter d'être Père ou Mère. Cela prouve que notre filiation est branlante. Peut-être que nous n'avons pas envie de nous faire enseigner parce que nous ne voulons pas devenir Père par rapport à d'autres ; le refus de la doctrine vient peut-être de là.
La relation quotidienne avec les personnes qui nous entourent et la lecture, devant le Seigneur, des émotions qui nous habitent et des difficultés relationnelles que nous avons dans ces trois types de relation, vont révéler quelque chose de l'état de notre maison, donc des deuils non accomplis.
Voilà la réalité du combat spirituel où Dieu nous attend. Dieu ne désire qu'une chose : construire notre maison pour qu'elle soit belle et qu'Il puisse y habiter.
1er type de relation : La relation avec l'autorité
Elles constituent nos fondations
II faut redevenir comme de petits enfants, redécouvrir l'enfant intérieur qui est en nous et qui fait jaillir des émotions avec les équivalents paternels et les équivalents maternels. Il est très intéressant de voir comment nous nous comportons vis-à-vis de tous ceux qui ont autorité sur nous, aujourd'hui.
Les équivalents paternels
Quel type de sentiment va dominer dans mes relations avec les équivalents paternels ? Suis-je bien ou cela engendre-t-il en moi une peur d'être agressé ou une agressivité... ? Nous avons vu comment le corps réagit somatiquement à ces émotions.
Qui a autorité sur nous aujourd'hui dans notre vie ?
Quel type d'émotions avons-nous avec le Pape, avec notre évêque, avec notre curé de paroisse, avec notre responsable de communauté, avec notre Père spirituel, avec notre directeur d'usine, notre chef de bureau ou avec notre professeur ou avec notre beau-père, notre époux, notre aîné ?
Dans certains cas mon mari a autorité sur moi. Dans ces moments là, dans mes relations avec lui, est-ce que j'ai envie de lui obéir, c'est-à-dire de devancer son désir ? Ou bien, est-ce que je refuse de me recevoir de lui ? Ce qui arrive souvent. En effet, au début de la rencontre, la relation sponsale entre l'homme et la femme met une plus grande proximité de la découverte de cette femme avec la mère, car la jeune fille ressuscite un peu le jeune homme, elle le materne, elle est mère. Mais, au bout de six ou sept ans, il y a le phénomène de l'apparition de la fécondité paternelle, maternelle, où c'est l'époux qui a autorité. L'épouse alors ne supporte pas de se recevoir de lui et il y a souvent des divorces à cette période : c'est le 1er étage qui ne fonctionne pas.
Dans la relation de filiation spirituelle, quels sentiments vont dominer ? Est-ce de l'agressivité, de la révolte, de la colère, de la jalousie ou bien le désir de lui plaire ? Dans le désir de plaire, il y a la peur du jugement de l'autre, cela revient à dire que nous avons honte de nous, d'où un sentiment de culpabilité.
Tout cela nous renvoie à l'enfant en nous, donc au regard paternel sur nous.
Les équivalents maternels
Quel sentiment va dominer avec toute personne ayant sur moi une fonction d'enfantement ?
Est-ce un sentiment d'agacement, d'agressivité... ?
Ce sont les relations avec toutes les formes de communauté.
Quel type d'émotions avons-nous avec l'Église, avec la famille, avec la société, avec la Paroisse, notre belle-mère, ou avec notre épouse dans les premières années du mariage ?
Quel sentiment avons-nous vis-à-vis du Maître ou de la Maîtresse des novices, si nous entrons au couvent ? Cela va arriver bientôt, plus vite que nous ne le pensons ; car les événements s'accélèrent et nous allons bientôt entrer dans des monastères invisibles, parce que nous allons entrer dans l'Église des Catacombes où nous serons bien obligés de vivre de manière communautaire. Il y aura tout un travail de renouvellement surnaturel et c'est le maître des novices qui est chargé de ce travail et nous lui obéirons en tout.
Quel type d'émotion ai-je avec quelqu'un qui me porte dans la prière et qui me le dit. Est-ce de l'agacement, de l'agressivité etc. ?
Quelles relations ai-je avec le groupe de prières auquel j'appartiens et qui me porte ? Si j'ai un problème avec un des membres de ce groupe, je dois me demander ce que cela signifie.
Les relations fraternelles, dans une communauté, vont être parlantes si nous essayons d'être « éveillés », c'est-à-dire de prier ensemble, de rendre service, d'écouter l'enseignement du Pape car cela n'est pas tabou pour nous.
Nous sommes d'accord pour admettre que la Vérité du Christ nous est communiquée par l'Église. (Jésus a voulu communiquer cette Vérité jusqu'à la fin des temps, infailliblement, sans aucune trace d'erreur ; c'est une Promesse du Seigneur quant aux Institutions et à la communauté humaine.)
Si telle personne m'ennuie, ce n'est pas un hasard : la réaction qu'elle produit en moi, d'étouffement, d'écrasement, va me rappeler par exemple celle d'une mère trop possessive.
Quelles relations ai-je avec l'Église dans son ensemble (équivalent maternel) et avec le Pape (équivalent paternel) ? Ce n'est pas la même relation !
Quelles relations ai-je avec la société ?
Il y a une différence entre la relation avec la maternité représentée par la société politique, et la maternité représentée par la société en voie de Sainteté (la Jérusalem céleste) : ce sont deux niveaux différents de maternité, mais ce sont néanmoins tous les deux des équivalents maternels.
Il y a des personnes qui étouffent complètement dans de la vie communautaire. Il n'y a que la vie fraternelle qui peut faire sauter certains blocages. Il faut dire que les équivalents maternels sont très difficiles à repérer, car les blessures vis-à-vis de notre mère, dans notre origine, dans les trois grandes périodes de la construction de notre maison, sont beaucoup plus enfouies, car elles sont antérieures et touchent à la source de la vie. Elles sont aussi plus profondes et plus douloureuses : elles vont révéler tous les espaces où mon cœur, comme enfant, a dit « non » et à partir de là, continue à dire « non », en se coupant, à travers ce « non », de sa filialité vis-à-vis de Dieu. Ce « non » dit avec mon cœur à ma mère, à 4 ou 5 ans, c'est clair que c'est à Dieu que je l'ai dit et je m'en souviens ! Il est inséparé en conscience de ce non à la Providence de Dieu. Et je continue à me couper de cette filiation avec Dieu à travers des non sur des équivalents maternels analogiques. Ce qui montre bien que ce non, ce n'est ni à ma mère, ni à l'équivalent analogique maternel, mais à Dieu que je l'ai dit. La preuve en est que je change tout le temps. C'est bien à la source de tout enfantement que je dis ce non, profondément, dans ma mémoire spirituelle et ontologique ; mais psychologiquement, c'est à ma mère ou à un équivalent maternel que je dis non !
Quand je refuse d'être fils de mon père ou de ma mère, je me coupe de la filiation par rapport à Dieu.
C'est Jésus le Fils obéissant du Père qui va m'aider à reconstruire mes fondations à travers son humble obéissance humaine au Sanhédrin, aux rabbins, à la Thora, à saint Joseph et à la Volonté du Père jusqu'à la Croix. C'est à travers cette obéissance de Jésus, dans laquelle je vais entrer, que je vais découvrir comment Jésus obéissait, comment Jésus continue d'obéir à saint Joseph, à la Vierge Marie, à l'Église, au Pape, aux évêques, aux prêtres. Car Jésus obéit, Jésus s'exécute chaque fois que le prêtre dit « Ceci est mon Corps ». Jésus s'exécute, comme saint Joseph, à l'instant, à chaque baptême.
Pour que Notre Père soit bon et miséricordieux, il va falloir faire pénétrer cette obéissance de Jésus et cette guérison de ma filiation dans tous mes manques de filiation, mes manques de soumission (la contestation).
La Maman idéale, c'est la Vierge Marie qui ne m'a jamais blessée. Le Papa idéal, c'est saint Joseph, vivante image du Père. Ils sont les deux équivalents, paternel et maternel, que Dieu nous a donnés.
Tous les problèmes de sentiments correspondant à l'agressivité et au manque de soumission (refus d'obéir, contestation) vont être le signe que ce que j'ai vécu, étant petit, a réveillé une liberté personnelle beaucoup plus du côté de la curiosité et de l'orgueil que de la perversité. Mais cela a néanmoins réveillé une liberté située en dehors de cette obéissance.
À travers cette obéissance de Jésus, je vais retrouver la bonté et la miséricorde du Père pour Lui, Jésus, et donc pour moi, de telle manière que je vais pouvoir re-consentir, avec Jésus, à redevenir le Fils du Père.
C'est la grande voie de guérison.
Vous voyez l'importance tout à fait extraordinaire du Rosaire pour vivre cela !
Jésus a souvent dit : « Je suis le Fils de l'Homme » mais saint Jean n'a entendu qu'une seule fois Jésus dire « Je suis Fils de Dieu »
À ce moment-là, je vais re-consentir à être Fils ; et je vais m'aider, à travers tous les équivalents paternels et maternels, à retrouver cet état tout simple qui me permettra de dire « Papa » à saint Joseph. Saint Joseph est mon Papa, c'est vrai ! (Evangile de saint Luc et de saint Mathieu).
Nous avons tous été créés par le Père à l'Image du Fils (épître aux Ephésiens) et le Verbe de Dieu (épître de saint Jean) illumine tout homme venant en ce monde : Le Fils illumine mon âme, mon corps et l'unité des deux dans la personne que je suis. Ce lien avec le Sein du Père nous fait saints et immaculés, en Sa Présence, tout au long de nos jours. Et le Visage physique du Père Eternel, c'est saint Joseph, le Père de Jésus « Saint (ter) est le Seigneur ». Le Fils de l'Homme et moi, quelque part, c'est la même chose, spirituellement, surnaturellement ; car saint Joseph est l'origine de tout le domaine physique dans le Christ qui me rejoint.
Et mon corps, par le baptême, rejoint le Corps mort et ressuscité du Christ, lequel vient de la Substance de la Vierge Marie, et de ce qui, dans la Chair de Marie, relève de son unité sponsale avec Joseph.
Voilà ce que le Verbe de Dieu, le Fils du Père, a « assumé » dans la Substance de Marie. Quand Il a pris chair dans le Sein de la Vierge Marie, en Se constituant un Corps, il a pris quelque chose qui relève de la matière assumant en Elle tout ce qui relevait, dans sa substance, de son unité sponsale avec Joseph, (son unité de chair virginale avec lui).
Saint Joseph est le Père de la partie humaine de Jésus et c'est dans cette partie humaine du Christ que j'ai été créé (Eph. 1, 1-18). Saint Joseph est mon vrai Père par la cause finale, surnaturellement parlant. Cette cause finale est beaucoup plus forte que la cause « mayique », la cause illusoire plus forte, que toutes les autres causes. Aujourd'hui, certains se réfugient dans la cause exemplaire ; c'est le drame du néo-platonisme et du New Age qui fuient la cause matérielle, la cause efficiente, la cause formelle et la cause finale.
C'est dans le creuset de la Sainte Famille de Nazareth que nous pouvons guérir nos blessures de filiation. Il faut prendre saint Joseph comme Papa, il faut prendre l'Immaculée comme Maman. Cette relation de filiation ne peut se faire sans une attitude de confiance et d'abandon ; Sainte Thérèse de l'Enfant Jésus l'a très bien compris.
C'est sur la filiation que va se construire notre identité. Il faut s'habituer à la gestion de ses émotions. Au lieu de fuir les équivalents paternels et maternels, il faut s'y habituer et gérer les émotions qu'ils suscitent ; je le fais avec Papa, je le fais avec Maman, je le fais avec Eux, en relation avec l’unité sponsale de Joseph et de Marie. Je plonge mon amertume, mon agressivité, ma blessure, ma mort, ma paralysie, dans cet Océan de Paternité et de Maternité humaine, corporelle où Jésus a trouvé le moyen de devenir Fils de l'Homme.
2e type de relation : la relation fraternelle
À partir de la filiation, et là-dessus seulement je peux revenir à une guérison de mon principe d'identité.
La relation fraternelle, d'égal à égal, va être de deux types :
avec ceux qui sont du même sexe que moi,
avec ceux qui sont de l'autre sexe.
Il y a une différenciation sexuelle qui structure l'homme et la femme et la relation d'égal à égal doit accepter cet amour de complémentarité.
La signification des émotions qui apparaissent dans les relations d'égal à égal, avec quelqu'un de même sexe ou de sexe différent, va avoir des connotations différentes.
1 – Relation avec une personne du même sexe que moi
Dans la relation concrète, profonde, réelle, qui existe avec une personne de même sexe que moi, quelle émotion va apparaître ? Est-ce de la tristesse, de l'agressivité ou de la convoitise qui domine ?
Ce sont les trois grands types d'émotion qui vont engendre trois attitudes différentes et qui vont révéler l'état de ma Maison.
L'attitude fusionnelle
Quand je suis attiré par une personne du même sexe que moi, je veux être très proche. Cela va être le signe d'un manque d'identité, d'une fuite d'identité, et je tombe dans un amour fusionnel, un amour de similitude qui prouve que je suis en recherche d'identité. Cela révèle un manque d'identité profonde puisque je la puise dans celle de l'autre. Le signe d'un amour qui fusionne est le désir de posséder les qualités de l'autre que je n'ai pas. C'est bien un amour de similitude, mais je ne suis pas amoureux.
Il y a une différence entre : Un amour de similitude
L'attitude fusionnelle
L'homophilie
Et l'homosexualité
Car il ne faut pas confondre : Mes actes,
Mon âme,
Mon identité personnelle
et mon identité métaphysique
II y a un phénomène de relation fusionnelle normale qui me donne effectivement une émotion physique. Mais il n'y a aucune continuité entre l'émotion sensible (affectivité) et l'émotion sexuelle, aucune. Le blocage entre les deux vient de l'idéologie, notamment l'idéologie freudienne, qui intervient dans toute l'éducation que j'ai reçue ; et nous en sommes tous imbibés.
Donc, quand je tombe dans des relations amicales qui pourraient me sembler un peu homosexuelles, en réalité, je tombe dans une relation idéologique. C'est très important à réaliser car, dans la réalité, l'affectivité sensible n'a pas de continuité nécessaire avec l'affectivité sexuelle ; sauf si j'ai perdu mon identité ou si elle est perturbée, parce que tout est mélangé dans le « melting pot » de l'anarchie imaginative.
Quand je suis devant cette personne très proche, frère, sœur, ou ami du même sexe que moi, je vais m'écraser devant elle dans une sorte de fusion, une espèce d'admiration où je vais abdiquer moi-même ce que je suis. Cela risque de provoquer en moi un sentiment de culpabilité ou d'agressivité, dirigé contre moi-même, tout en vivant cette relation dans la jouissance parce que la similitude, la fusion me font du bien, me font jouir.
Mais c'est vécu dans l'agressivité et la culpabilité au prix de la destruction de ma propre identité. Finalement, c'est une relation qui ne sera pas libre, pouvant, à l'extrême, me faire tomber dans une relation homophile, qui est de l'affectivité sensible.
L'attitude d'indépendance
L'attitude fraternelle peut être vécue dans une relation d'indépendance.
Au bout d'un certain temps, quand l'effet de nouveauté se termine, j'ai des réactions d'agressivité ouverte ; « l'autre » n'existe pas. C'est souvent parce que se révèle en moi tout ce que je ne voudrais pas voir : je me reconnais trop en l'autre ! Nous sommes pareils !
L'attitude d'opposition
L'autre a fait des choix contraires aux miens, si bien que je suis confronté à l'inverse de ce que je suis, et je ressens des sentiments d'agressivité car les choix que j'ai faits sont très importants pour moi puisqu'ils m'ont permis de survivre par rapport à mon père ou à ma mère (s'il s'agit d'une relation entre frères, entre l'aîné et le cadet et les équivalents du cadet...).
Donc, l'autre m'énerve parce que je me trouve confronté à l'inverse de ce que je suis !
Conclusion
Une relation concrète et profonde avec une personne du même sexe, va donc réveiller un certain nombre de choses en moi. Il faut être très attentif à ce que cela peut réveiller en moi et révéler de moi et quelles émotions s'en dégagent.
« Ne faites pas comme les chiens ! » disent les pères spirituels.
C'est le très grand rôle de la charité fraternelle.
La charité fraternelle est vraiment nécessaire pour que je puisse retrouver quelque chose de vrai dans mon cœur de Fils et dans la manière dont mon cœur de fils me situe par rapport aux autres Fils de cet unique Père et de cette unique Mère.
La charité fraternelle joue ce très grand rôle dans la relation que j'ai avec eux et dans les émotions qui s'en dégagent : c'est le combat spirituel où la gestion des émotions a une très grande importance.
Pour l'instant, nous essayons de voir comment il est possible de faire rejaillir les émotions dans les événements analogiques et relationnels. Mais il va falloir regarder comment gérer ces émotions. Car la gestion des émotions ne consiste pas à leur obéir pour que se reproduise l'événement analogique (par exemple : j'ai bien mis six ans avant de me marier, il faut absolument reproduire cet événement-là (!) car cela me mettrait dans tous mes états si cela se passait différemment.) Une émotion doit être gérée et assumée, et non pas retransmise, car je dois réapprendre à obéir à Dieu comme Fils.
2 – Relation avec une personne de l'autre sexe
La relation entre les époux, les fiancés, les conjoints, les amis, ne touche pas seulement l'identité, mais le mystère sponsal des épousailles.
Je suis en relation avec ceux qui sont « tout autre » que moi. C'est l'autre, en tant qu'individu, qui va me renvoyer à mes manques d'identité.
Si, comme homme, j'ai des inquiétudes ou des angoisses dans cette identité d'homme, parce qu'il y a eu des ruptures de relation avec mon père, je ne vais pas me retrouver comme Homme dans mon identité. Alors je vais être angoissé à l'idée de rencontrer celui (celle) qui est autre que moi qui va me révéler mon manque d'identité masculine.
Alors, la peur va dominer dans la relation et j'aurai deux réactions différentes : soit la relation sera trop proche, fusionnelle pour que je ne vois pas « ma différence », soit elle sera lointaine, pour ne pas dépendre d'elle afin de me protéger. Derrière la relation à l'autre sexe, il y a toujours, en filigrane, ce qui a été introjecté dans mon vécu d'enfant par rapport à ma mère (ou à mon père).
Si je suis une femme, certaines émotions vont apparaître lorsque je serai en relation concrète avec un homme. Cet homme va réveiller tout ce qui a été introjecté dans mon enfance par rapport à mon père.
* Un petit garçon découvre ce qu'est une femme, une épouse et une mère, en regardant vivre sa propre mère : elle est le modèle qui va construire son être intérieur dans sa future relation avec l'autre. C'est à travers le visage de sa mère qu'il va découvrir la femme, l'épouse et la mère. Il va donc chercher dans les équivalents fraternels, l'introjection qu'il va vouloir retrouver.
Alors, dans la vie conjugale, quand il sera fatigué, malade, en perte d'identité, il verra dans sa femme un visage maternel (celui de l'infirmière) car la femme est une infirmière née.
* Il en est de même pour la petite fille. Quand elle sera femme, elle transposera dans son mari une quête paternelle qui l'a déçue lorsqu'elle avait 4, 5 ou 6 ans.
Dans les relations de ce type, les émotions ressenties ne sont pas anodines ; il ne faut pas toutes les décortiquer ni les analyser, ce serait une erreur. C'est simplement une direction ou une orientation. Les émotions qui apparaissent à ces occasions là sont des émotions qui me relient à toutes mes soifs d'amour et pas seulement à des émotions liées à telle ou telle personne en particulier.
Si je suis agressif, ce n'est pas la faute de l'autre, c'est moi qui suis impliqué. Je le constate et ensuite, je gère mes émotions. Car si ces émotions apparaissent, c'est pour me montrer que je dois me réorienter en Dieu, et reprendre un chemin humain et un visage humain dans un corps spirituel et non dans l'affaissement d'une affectivité liée au sensible, au terrestre, aux pulsions de mort psychologique (Jung, Freud, Lacan ou Reich interprètent cela de façon contraire).
La grande guérison ici, c'est avec Jésus adulte :
Pour la femme : Jésus est mon Frère, ma Sœur, mais aussi mon Époux. Il est toujours avec moi, Il est Celui que je préfère ; et c'est moi qu'Il préfère, il joue toujours avec moi.
N'oublions pas les deux dimensions de Jésus : Jésus mon Frère, Jésus ma Sœur. Dans la Très Sainte Trinité, le Père est l'Époux véritable et le Fils est l'Épouse véritable. De l'Unité profonde d'Amour entre les Deux, jaillit l'Esprit Saint, ce poids d'Amour et de Gloire qui fait que Dieu est un seul Amour, une seule Vie.
Le Fils, dans la Très Sainte Trinité, Jésus Christ, Notre Seigneur dans l'Humanité masculine qu'il assume dans Sa Divinité est donc pour moi, le visage, surnaturellement et corporellement parlant, qui fait que je vais pouvoir m'unir à Jésus dans l'union transformante. Il va me permettre, dans ma dimension sponsale et mon cœur de femme, de ne faire qu'une seule Chair avec Lui ; puisqu'il est tout autre que moi, Il est masculin, il y a une union possible. Grâce à cela, je vais pouvoir pénétrer dans la Personne Divine de Jésus. Donc, Jésus est en même temps mon Époux, dans sa masculinité humaine, et ma Sœur dans sa divinité incréée.
À l'inverse et d'une manière tout à fait différente, pour les hommes, Jésus est mon Frère dans Son Humanité en tant que Fils de l'Homme et mon Épouse dans Sa divinité assumant le Christ Total : je fais une Seule Chair glorieuse avec Lui. Nous sommes comme deux frères jumeaux.
Cela implique que nous soyons contemplatifs.
Seule la contemplation peut guérir l'identité de la masculinité et de la féminité.
Il faut être une petite Carmélite ou un Chartreux dans l'âme pour pouvoir vivre du mariage. C'est pour cela qu'il faut trouver la guérison dans cette relation avec notre Seigneur Jésus-Christ en vivant totalement cette relation d'unité de chair avec Lui : c'est lucide, clair, contemplatif. Or, on est contemplatif avec le corps, avec les mains, avec le cœur de Jésus, Verbe de Dieu.
Dans l'union transformante, les chrétiennes et les chrétiens ont une expérience totalement différente. Saint Jean de la Croix épouse le Verbe. Sainte Thérèse d'Avila épouse le Christ homme.
C'est étonnant de voir à quel point ces deux expériences sont différentes sur le plan des émotions surnaturelles. C'est pour ces motifs que si moi, chrétien, j'ai une relation avec une chrétienne qui voudrait que je vive les choses à sa façon (et vice versa), il faut fuir. Et également que pour un Père spirituel ne doit pas muer son autorité paternelle en pouvoir : et se contenter d'être seulement « témoin » de ce que nous vivons, pour l’intensifier, sans jamais imposer sa propre façon de vivre.
3e type de relation : la relation avec les enfants
Notre enfant selon la chair nous ramène à notre propre identité donc à notre relation avec DIEU et avec nos propres parents. Si notre enfant nous agace, cela signifie quelque chose dans notre rapport avec nos propres parents et avec Dieu. Il en est de même pour un enseignant dans ses rapports avec ses élèves ou pour une infirmière dans ses rapports avec les malades.
Si un enfant nous énerve, comme il a envers nous une relation équivalente à celle que nous avons avec Dieu, nous commençons à en comprendre la raison. « II y a un sur-moi, qui fait que je vais traiter les enfants comme j'ai moi-même été traité » dirait Freud.
À ce moment-là, je ne peux entrer dans la Miséricorde car Elle est infinie.
Il y a en moi un enfant que j'aime car il correspond à ce qui attirait l'amour parental quand j'étais enfant, mais ce n'est pas parce qu'il était ou non aimable. Et il y a en moi « le vilain petit canard » que je mets aux oubliettes parce que je ne veux pas être comme lui ; et je deviens agressif si je rencontre un être qui lui ressemble. Il y a en effet des enfants vis-à-vis desquels nous sommes proches et d'autres vis-à-vis desquels nous devenons agressifs.
Spirituellement, je guérirai cet enfant intérieur à travers le Visage de Jésus Enfant.
Il faut que je comprenne que je suis fils de l'Homme, fils de David, fils d'Abraham, fils d'Adam, fils de Nathan... et que Jésus m'est confié. Je prends Jésus, petit Enfant, dans mes bras, Il est mon Enfant ; ou bien je prends la Vierge Marie dans mes bras, Elle devient ma petite Fille. Car ce n'est pas pour rien si Jésus s'est fait tout petit Bébé. Il faut vivre avec Jésus enfant, le plus concrètement possible. Jésus naît à partir de moi, dans une unité très profonde avec la Paternité concrète ; je L'enfante, j'aime que Jésus me soit confié.
Dans l'Eucharistie, Jésus dépend de moi, totalement. C'est Jésus Enfant, c'est Jésus fragile dont je me nourris et que je porte en moi pour qu'il enfante à nouveau le monde : Jésus m'est donné, Jésus m'est offert. Jésus est ma fragilité, Il est mon Hostie. Il me faut voir Jésus à la manière de sainte Thérèse de l'Enfant Jésus. Il faut savoir reconnaître Jésus parmi tous les enfants, dans une cour de récréation, par exemple. Aujourd'hui la spiritualité chrétienne est loin de cela. Nous disons plus facilement « Jésus, mon Maître », « Jésus mon Sauveur », « Jésus, mon Seigneur » que « Jésus mon enfant ! ».
Quand la Sainte Vierge Marie apparaît, Elle nous donne Jésus enfant, dans les bras. Quand vous prenez Jésus dans la Résurrection, c'est Jésus mon Père ; dans l'Eucharistie, c'est Jésus mon Frère, Jésus Homme ; dans la Bible, c'est Jésus Enfant.
Dieu s'est fait Chair pour me guérir de toutes mes blessures d'enfantement où j'ai été refusé comme enfant et où les miens m'ont dit « Tu nous déranges, qu'est-ce que tu fais-là ! ». Avec toute personne vis-à-vis de laquelle nous avons une mission spirituelle d'enfantement, de guide ou d'autorité, nous pouvons commencer à guérir l'enfant intérieur qui est en nous… en prenant Jésus Enfant avec moi, en moi : cela va soulever des émotions caractéristiques : vais-je ressentir une sorte de honte ou bien une douleur ou bien une souffrance ? En prenant Marie petite fille avec moi, quelle émotion vais-je ressentir au fond de mon cœur de femme ? Il faut apprendre à aimer Jésus, à travers tous ses substituts. Prendre Jésus Enfant va amener des émotions.
Petit à petit, la Paix se fera en moi, dans ma maison à force d'entrer dans ces équivalents surnaturels de la Paternité et de la Maternité, de la Sponsalité et de la Filiation, de la petite Enfance. Actuellement, notre Maison est comme un champ de démolitions que Dieu veut rebâtir. Jésus nous dit :
Je vais rebâtir ta maison. Je vais te rebâtir,
Je vais faire refleurir ton désert. Je vais te rendre solide.
Mon Épouse est comme une cité généreuse et indestructible.
Si Jésus veut que nous vivions les uns avec les autres, que nous ne restions pas seuls dans notre coin, c'est pour nous guérir et nous donner la possibilité de voir ce qui nous habite.
Il s'agit de devenir Fils de Dieu.
Le plus beau cadeau d'amour d'un père et d'une mère à leur enfant est le baptême qui engendre la Foi.
La souffrance ne peut être vécue pleinement qu'en lui donnant un sens par la Foi ; sinon nous ressentons une injustice qui nous met dans l'angoisse et l'agressivité, la culpabilité et la révolte.
Le sens spirituel, c'est la Croix qui va laisser émerger la colère. La colère est un terme biblique pour dire ce grand cri qui habite le cœur de l'homme et le Cœur de Dieu quand il est dans la souffrance. La colère, c'est aussi le zèle, le dynamisme du serviteur brûlant pour le Royaume.
Nous sommes tous porteurs de cette colère spirituelle : c'est elle qui rend brûlant. Elle peut naître directement de la blessure ou de la souffrance et nous fait entrer directement dans le creuset de la Croix. Si nous la laissons s'exprimer, elle va libérer en nous le désir d'infini, c'est-à-dire le désir de Dieu.
Chez l'homme psychique, la blessure entraîne la peur, alors que chez l'homme spirituel, la blessure entraîne la colère qui permet de faire brûler le désir de convoitise.
Il ne faut pas confondre l'agressivité et la colère spirituelle qui nous permet d'être :
« La colère de l'homme rend gloire à Dieu » (Ps. 75 v. 11)
Le désir de Dieu nous ouvre à une deuxième vertu : l'espérance. Celui qui espère vit et aime :
« Celui qui espère ce qu'il n'a pas encore est déjà dans l'Amour » (saint Paul)
C'est ainsi que grandit la troisième vertu : la charité. Nous arrivons à l'Amour dans l'offrande de nous-mêmes.
Dieu va me faire entrer dans son regard sur moi et au lieu d'être couvert de honte, je vais comprendre que je suis revêtu de la Beauté de Dieu, et que même mon péché n'enlève rien à ma beauté. La tache est superficielle, mais ma beauté est profonde :
« Je suis noire, et pourtant belle, filles de Jérusalem » (Cantique des Cantiques)
À ce regard, va s'associer une prise de conscience que je suis cette merveille et que cette beauté vient de Dieu. Il y a là une épreuve de vérité :
« Je trouve mes délices à habiter parmi les enfants des hommes »
En même temps que cette prise de conscience, Dieu peut venir toucher ma conscience de culpabilité et me faire souvenir de ce que j'ai fait et non pas de ce que je suis. Je vais alors entrer dans l'aveu :
« Contre Toi et Toi seul j'ai péché, ce qui est mal à tes yeux, je l'ai fait » (Ps 50)
L'aveu s'accompagne toujours d'un effondrement intérieur, même physique. Dans l'épreuve de vérité, tout s'écroule. Nous prenons conscience de la gravité de la blessure dans la relation avec le prochain qui est bien plus grave qu'elle n'y paraît.
Les deux sentiments vont ensemble, car nous ne pouvons pas prendre conscience d'une faute si nous ne nous savons pas être aimés formidablement.
Sinon, nous passerions de la honte au désespoir.
Cette prise de conscience de mon péché va faire émerger un sentiment spirituel magnifique qui est le repentir. Mon cœur devient comme de l'eau et j'explose en sanglots: « J'ai tué la source de l'Amour » (Psaume 50). Cette liquéfaction du cœur est douloureuse mais, en même temps, c'est une anamnèse de libération accompagnée d'une joie exultante. Le véritable repentir est la joie spirituelle.
Sinon, c'est du remords et le remords m'enferme dans un désespoir qui peut mener au suicide : je m'accuse, je me critique, je me condamne.
Dans le repentir, mon cœur s'effondre, mais il n'y a aucun sentiment de culpabilité, aucune honte.
Nous sommes invités à vivre continuellement dans ce sentiment spirituel. Toute la Tradition nous y invite :
« Repentez-vous et croyez à la Bonne Nouvelle »
À ce moment-là, nous sommes dans le Royaume ; mais cela ne dure pas. Tandis que le bon larron, sur la croix, sera immergé dans ce repentir et y entrera pour toujours.
Ce sentiment nous permet d'entrer dans une relation nouvelle avec Dieu, qui n'est plus le désir de plaire et l'abdication de ma personnalité, mais dans ce que la Tradition appelle l'enfance spirituelle.
Quand Dieu me visite dans ma honte, dans mon péché, je réalise que je suis sauvé de ma détresse car elle me révèle la Paternité de Dieu qui veut que je sois fils.
Le repentir nous fait grandir dans la filiation.
Nous allons entrer dans une maturité spirituelle. Nous allons entrer dans une relation nouvelle avec nos frères, dans une dépendance de communion, une dépendance d'amour, libérante.
Je n'ai pas besoin de me composer un visage pour que Dieu m'aime.
Le combat spirituel contre les tentations se situe à deux niveaux bien différents : celui des pensées et celui des émotions.
La première grande règle du combat spirituel est de ne pas confondre le combat spirituel contre les pensées et la lutte pour la gestion des émotions.
Les pensées viennent toujours de l'extérieur. Elles s'impriment sur notre imaginaire et provoquent la tentation.
L'imaginaire est extérieur à notre âme spirituelle qui, elle, est au centre de nous. Il est à l'extérieur de notre psychisme qui trouve sa source dans notre âme au centre de nous. Il est à l'extérieur de notre vie spirituelle puisque notre esprit est à la pointe de notre âme, au plus intime de notre intime. Il ne vient pas de Dieu, puisque Dieu est au centre, à l'intérieur de l'image et de la ressemblance de Dieu.
Les pensées sont dans la tête, d'où l'expression « en avoir plein la tête ».
Il y a trois types de pensées :
les pensées spirituelles,
les pensées psychiques
et les pensées charnelles.
Les pensées spirituelles
« Si vous êtes dans l'adoration, dans la prière, la première pensée qui jaillit vient du Saint Esprit » dit saint Séraphim de Sarov.
La seconde pensée ne vient pas de Dieu. C'est un critère de discernement.
Les pensées psychiques
Elles s'impriment dans mon imagination, quand je réfléchis, quand je pense, quand j'essaie de comprendre mon problème ou celui des autres, quand je regarde mes opinions : tout cela s'inscrit dans mon psychisme. Mais mon psychisme est blessé par les séquelles du péché originel, il n'est pas entièrement informé par la vie spirituelle. Si je veux retrouver mon psychisme dans sa nature originelle, il faut que je fasse un acte d'adoration très puissant.
« Vos pensées (psychiques) ne sont pas mes pensées (spirituelles, du Saint Esprit) » dit le Seigneur.
Dans l'état normal, la première pensée qui nous vient, n'émane pas du Saint-Esprit. C'est possible qu'elle vienne de la tentation ou du moi, du philosophe qui est en moi. Cela ne veut pas dire que c'est mauvais, mais cela ne vient pas du Saint-Esprit.
Les pensées psychiques m'amènent vers l'illusion ou l'ignorance et m'empêchent d'être à l'écoute du Saint-Esprit.
Les pensées charnelles
Elles ne viennent ni du Saint-Esprit, ni de l'homme, mais du démon, par le biais de l'imaginaire : c'est la tentation. Il faut la fuir.
Si vous êtes dans l'état de la serpillière ou de la bouse de vache, c'est charnel et toutes les pensées qui surgissent à partir de là viennent du démon : « J'en ai marre » ou « Je suis malheureux » ou « Je suis content »... Et la deuxième pensée qui vous vient, vient de vous ; et si alors, vous adorez, la première pensée qui vous vient ensuite vient de Dieu.
L'activité de la pensée, tant psychique que charnelle est cérébrale, alors que les pensées spirituelles consistent, avec l'intelligence, à descendre dans le cœur pour y découvrir la Présence de Dieu.
Mais passer de l'intelligence au cœur, c'est aussi descendre dans le lieu des émotions.
La gestion des émotions est quelque chose de très différent du combat contre les pensées, car elles ne viennent pas de l'extérieur.
Les émotions viennent toujours d'une tension ou d'une rupture qui s'est faite entre les très grandes profondeurs d'Amour et de soif d'amour qu'il y a au centre de notre âme dans son lien avec le corps, et Dieu.
Les émotions viennent de l'intérieur. Elles montent de notre cœur, elles viennent de nos profondeurs d'Amour.
Dieu nous a fabriqués par amour, comme source d'amour, comme soif d'amour, avec un corps d'amour, un corps spirituel de soif d'amour, un corps en creux d'amour, une coupe. Et c'est le creux de la coupe : il faut regarder à l'intérieur de la coupe : « Regarde à l'intérieur de la coupe » nous dit l'écriture ; parce qu'il y a ceux qui ne regardent que l'extérieur de la coupe, les Pharisiens !
Ma relation à Dieu est au fond de moi ; s'il y a encore quelque chose qui s'est brisé, cela remonte tout le temps. Et si j'essaie d'arracher, d'enlever les émotions qui s'en dégagent, cela ne sert à rien, elles reviendront tout le temps et même au grand galop. Ce serait une grande erreur du combat spirituel de les traiter comme des pensées.
Il y a deux types d'émotions :
les émotions psychiques
et les émotions spirituelles
Les émotions psychiques (ou sentiments psychiques)
Les émotions psychiques sont de trois sortes :
Les émotions agréables 1. Le sentiment amoureux.
2. Le sentiment de paix
3. Le sentiment de joie
Elles viennent d'une adhésion profonde à notre vocation intime d'union à Dieu de manière concrète.
Les émotions désagréables, crucifiantes et purifiantes qui sont normales
1. La peur
2. L'angoisse
3. La douleur affective
4. La souffrance qui monte de l'intérieur
5. La culpabilité
6. La honte
Elles me rappellent qu'il faut que je revienne à ma source d'Amour pour que je me réconcilie avec mon identité qui est source d'amour.
Les émotions désagréables peccamineuses
1. L'agressivité
2. La haine
3. La rancune
4. L'amertume
5. La convoitise
6. La jalousie
7. Une certaine forme de tristesse
Elles vont naître parce que je refuse Dieu et que je ne veux pas réussir ma vie sur le plan de l’amour : elles me rongent.
Les émotions spirituelles
1. Le repentir
2. La contrition
3. La Joie spirituelle
4. La Paix spirituelle
(Sentiment d'unité absolue et vivifiante
qui persiste, même quand on est dans la souffrance)
5. La compassion
6. L'Amour des ennemis
Elles viennent du Saint-Esprit, de la Chambre nuptiale, elles ne viennent pas de l'homme.
Elles émanent des Noces du Fils où Dieu nous appelle à rester vigilants et à veiller comme le prophète sur les Remparts de Jérusalem.
Nous ne pouvons pas continuer à piétiner dans les ornières dans lesquelles nous sommes depuis des années, alors que nous voulons (soi-disant) nous convertir. Un jour ou l'autre, il faut décider de s'en dégager. Il faut laisser la liberté à l'Esprit Saint de nous dégager des ornières que sont les émotions qui nous submergent parfois complètement.
Il y a des phénomènes de paralysie, d'inhibition qui nous empêchent d'avancer dans la vie spirituelle. Nous restons stables, nous persévérons, mais nous retrouvons toujours le même marécage. C'est cela vivre le Chemin de Croix. Ce sont les trois premières demeures.
Un jour, il nous faut descendre jusque dans la Blessure du Cœur du Christ qui est la quatrième demeure, le repos du Sabbat et vivre de la Résurrection qu'est l'Union transformante. Il faut pour cela accepter de se convertir sur ces nœuds qui montrent que nous refusons, quelque part, de lâcher prise.
Tous les sentiments en nous, de dénégation, de protestation, de colère, de révolte, de tristesse, d'exaltation, de découragement, montrent que nous n'avons pas décroché, qu'il y a un pardon que nous n'avons pas voulu donner, une sécurité terrestre à laquelle nous sommes encore accrochés. Ces sentiments nous entraînent dans des problèmes de maladies somatiques ou de maladies psychosomatiques ou de maladies problématiques, sans parler des maladies spirituelles qui sont l'état de péché sous-jacent.
Il y a certainement un péché non avoué et impossible à évacuer qui est l'origine de tous ces sentiments… La gestion des émotions contribuera donc à vivre dans l'Amour et à se savoir aimé.
Nous allons retrouver le tableau du Travail de Deuil dans cette gestion des émotions.
Les émotions ne sont pas seulement des émotions psychiques, des émotions psychologiques, mais surtout des émotions psycho-spirituelles enracinées profondément en nous et qui remontent en vertu de notre relation avec Dieu. Il existe dans notre relation avec Dieu quelque chose qui s'est tordu du fait que nous avons eu une complicité peccamineuse, c'est-à-dire que nous avons conscience d'avoir commis une faute, avant, pendant ou après la maladie, l'échec, la trahison ou la mort qui nous est tombé dessus.
C'est à cause de ce double aspect psychologique et spirituel des émotions que montent en nous ces grandes émotions. Nous allons étudier la manière de gérer ces émotions sous leur double aspect
Ceci est très important, car il faut passer de la prière simple, à la prière chrétienne qui nous permet de rentrer dans l'union transformante. Nous entrons dans cette union à partir du moment où nous avons lâché prise, et où nous nous sommes offerts. Sinon, nous ne pourrons pas vivre humainement sur cette terre, nous serons soumis aux émotions, nos émotions vont nous guider. Et nos choix seront pris en fonction de nos émotions ; et, ce ne sera ni Dieu, ni moi, ni ma liberté, ni celui que j'aime qui vont me guider ; car les émotions sont quelque chose d'accidentel.
Pour gérer ces émotions, il n'y a pas de recette miracle ! Il faut accepter d'aller à Jésus et de comprendre que c'est Jésus qui porte notre croix. Ainsi, toutes ces émotions éclatent dans une nouvelle spiritualité, dans une nouvelle motion, qui se révèle être beaucoup plus un mouvement intérieur théologal : c'est à dire que nous pouvons commencer à faire des actes surnaturels de Foi, d'Espérance et d'Amour.
Comment va-t-il falloir gérer notre croix, dans notre relation au quotidien, au fur et à mesure de la confrontation avec les événements puisque, un nouvel échec, une nouvelle impasse, une nouvelle chute, un nouveau mensonge va faire rejaillir une émotion que je n'ai pas su gérer jusqu'à maintenant et qui peut remonter très loin, à un moment où je me suis bloqué et où je suis resté bloqué ; et je vais de nouveau me bloquer et rester où j'en suis resté quand j'avais 6 ans et que je n'avais pas voulu aller plus loin, bien que Dieu m'ait donné des Grâces très fortes à cet âge pour dire oui.
La gestion des émotions est quelque chose de très différent du combat contre les pensées.
Une émotion doit être gérée, assumée et non pas retransmise, car nous devons assumer le fait d'obéir à Dieu comme Fils.
Nous sommes invités à veiller sur la garde de notre cœur comme un veilleur sur les remparts de Jérusalem.
Les émotions viennent toutes du centre de notre âme et nous mobilisent totalement. Cela crée une tension, car l'homme est un être capable d'Amour ; c'est pour cela qu'il est capable de souffrance, qu'il est capable d'avoir des émotions. L'amour nous met en relation avec le prochain, avec le tout autre. Le dynamisme intérieur qui procède de l'amour fait que nous sommes dans un état émotionnel tendu, que nous sommes « sous tension » et que cette tension demande à être gérée.
L'agressivité, la tristesse, la culpabilité, la peur, la joie, la paix, sont autant d'émotions qui naissent de l'Amour, car nous sommes des êtres d'amour.
Certaines émotions sont déviées de leur source.
*Le premier but de la vie spirituelle sera de laisser aller les émotions, de les accepter, pour les dépasser et trouver leur source. Pour cela il faut descendre à travers ce canal lumineux de la tension émotive d'amour, jusqu'au plus profond de nos émotions pour toucher le Feu de l'Amour de Dieu là où le Verbe de Dieu se cache en nous.
Dans le yoga, c'est le mouvement inverse qui se produit, c'est la montée des énergies, la montée kundalinique. Pour les drogués, c'est aussi un mouvement de montée, et ils savent tous qu'il ne faut pas prendre de l'acide quand ils sont dans un état d'angoisse.
Le deuxième but de la vie spirituelle sera ce grand principe : à partir du moment où il y a une déviation à la source de l'Amour, va se créer cette grande tension intérieure qu'il va falloir apprendre à gérer. Il faut réorienter les émotions si nous avons choisi l'Amour, non pas cet amour imposé en raison des échecs ou des blessures ou en raison d'accidents, mais un amour que nous choisissons, nous, et que l'Amour choisit lui-même. C'est un Amour essentiel, ce n'est pas un amour accidentel, ce n'est pas un amour dégradé, mais un Amour qui sera notre béatitude.
Arrivés à la source du cœur, nous pourrons choisir à nouveau l'Amour, pour rétablir un nouveau choix, un amour nouveau, dans un corps nouveau, pour une vie nouvelle, dans un monde nouveau, et ainsi arriver à une décharge de cette tension intérieure pour obtenir un épanouissement et une liberté dans l'Amour : ce sont les 2 ailes de l'aigle. C'est ainsi que s'opère la guérison de la mémoire. Car la tension intérieure, qui ne s'est pas déchargée, va s'ajouter à une autre tension qui s'ajoutera encore à une nouvelle tension et cela va donner la dépression avec toutes ses dérives pathologiques.
Les psychologues montrent que l'émotion monte en nous quand nous avons un profond besoin intérieur d'amour. Les différents événements qui nous arrivent vont réactualiser ce besoin. Tous les changements qui nous arrivent remettent à nu nos besoins profonds d'amour. Et ces besoins vont faire réapparaître une nouvelle tension.
Ce sentiment réactive une émotion, non résolue, en attente depuis des années.
Ce besoin se traduit par l'émergence d'un sentiment donc d'une mise en tension.
Cela est vrai aussi sur le plan psycho spirituel.
Et si nous ne gérons pas cette tension, elle va demeurer et s'ajouter à une autre tension.
Cela va engendrer une surtension et engendrer toutes les dérives pathologiques et les troubles psychiques. Il faut dire que tout ce que nous soulevons dans le travail de la gestion des émotions va provoquer des décharges affectives profondes. Mais c'est notre réalisme de chrétien d'accepter de reconnaître que nous ne voulons pas nous convertir.
Les différents stades de l'émotion
Les psychologues disent que les émotions s'expriment dans notre vie à différents niveaux : au stade 0, au stade 1 ou au stade 2 auxquels nous ajouterons un stade 3.
Le stade 0 : Nier l'émotion.
Je méconnais l'émotion qui m'habite, je ne la reconnais pas car je ne la sens pas. Je n'ai jamais d'émotions : ni de peur, ni de colère, ni de tristesse, ni d'agressivité, ni d'amertume...
Je méconnais mes émotions à cause du contexte éducatif en général ou du contexte social ou à cause de mes habitudes de défense. Par exemple : dans la famille ou à l'école, on dit volontiers à un enfant que c'est laid d'être jaloux ou en colère ; alors, il va nier ce sentiment. C'est grave car cela va empêcher l'enfant de gérer son émotion et il risque de la tramer de longues années.
Et à ce moment-là, on en arrive à gérer ses émotions comme on combat les pensées.
La 2e cause peut être un refoulement. Certaines personnes s'enferrent et ne veulent plus rien savoir. Par exemple : quand j'étais petit, on m'a dit que ce n'était pas bien de mentir; je l'ai fait une fois, puis une deuxième fois, puis une troisième fois et j'ai pris l'habitude de mentir. Je me suis forgé un système de défense qui consiste à ne plus recevoir l'émotion, à la refouler. Alors elle se transforme en honte, en culpabilité qui elle se transforme en agressivité.
Le stade 0 est un stade d'immaturité émotionnelle absolue. Le sentiment est là, mais je ne le ressens pas. C'est la source de la plus grande partie de nos maladies corporelles ; la tension va se faire si forte qu'il va y avoir une somatisation. Ainsi, apparaissent les maladies psychosomatiques qui vont se traduire, par exemple :
par un torticolis répétitif et des problèmes de cervicales, (signes d'une colère intérieure mal gérée)
par des fragilités respiratoires, (signes d'une angoisse et d'une anxiété non gérées)
par des troubles digestifs, (signes d'une terreur intérieure qui est le signe d'une dénégation continuelle)
par des insomnies, (signes d'une anxiété)
par des migraines répétitives et des montées céphaliques, (signes d'une agressivité refoulée, d'un sentiment de culpabilité)
Et quand il n'y a pas ces manifestations physiques, ces complications somatiques, la tension, s'ajoutant à une autre tension, va provoquer ce que l'on appelle les troubles psychiques, comme la dépression si fréquente de nos jours, mais aussi toutes les dérives pathologiques, les psychoses, les névroses, les délires pathologiques...
Le stade 0 est un stade pathologique : c'est une maladie. Il consiste à ne ressentir aucune émotion. C'est un comportement psychotique : je vais m'enfermer dans une bulle mentale où je ne ressens plus aucun type d'émotions. Je vais être muré dans quelque chose qui m'a complètement blindé par rapport à la réalité de mon psychisme, de mon âme profonde, de mon identité et à la réalité de tout ce par quoi je suis en relation.
Par contre, le fait de ne pas ressentir certaines émotions est un problème différent. Vous sentez bien la différence qu'il y a entre une émotion venue de l'extérieur (une tristesse due à un deuil) et une émotion profonde (une tristesse intérieure sans nom).
Si je ne ressens pas certaines émotions élémentaires et normales, c'est la preuve que dans le travail de deuil j'ai refoulé certaines émotions ; je me suis arrêté dans mon travail de deuil, je n'ai pas voulu franchir une étape pour aller plus loin. Je n'ai pas pardonné à Dieu, ni à mon prochain, ni à moi-même, je me suis arrêté. Cela m'amène à me poser des questions sur moi-même : je trouve anormal de ne pas ressentir cette émotion.
Le stade 1 : Ressentir l'émotion mais refuser que cette émotion m'habite.
C’est le stade minimum de la gestion et du contrôle des émotions. Il consiste à ressentir l'émotion, mais sans être capable de la reconnaître : est-ce de la jalousie, de la haine ou de la tristesse que j'éprouve ?
En fait, c'est surtout parce que je ne veux pas m'avouer que cette émotion m'habite, alors, je la nie ou je la refoule : ce sont deux attitudes possibles d'erreur à ce niveau. Du coup je tombe malade.
Premier exemple : Vous rentrez dans un groupe. Au bout d'un certain temps, apparaît en vous un sentiment de jalousie. Vous sentez ce sentiment monter en vous, et en même temps, vous le niez, vous faites autre chose, vous pensez à autre chose... Et quand un proche vous met le doigt sur ce sentiment en vous, vous le niez et cela vous énerve encore plus. C'est bien le signe que vous avez cette émotion en vous, mais que vous n'en êtes qu'au stade 1 : « Ce n'est pas moi qui suis en colère, c'est lui qui m'énerve ! »
Deuxième exemple : Vous dites à un petit garçon que ce n'est pas beau d'être jaloux ou bien qu'il n'a pas le droit de pleurer, car ce n'est pas digne d'un homme ; alors l'enfant va refouler ce sentiment tant et si bien qu'il n'arrive plus à le reconnaître car il ne s'est pas exprimé.
Quand les émotions remontent, c'est très bon, car l'émotion est une force d'amour, une force minimum vitale pour ne pas se couper de toute vie affective et de toute relation d'amour. L'amour n'est pas décapité, il a encore son effervescence, son dynamisme ; il pourra être géré au stade 2 et guérir au stade 3. Cela prouve que je n'ai pas renoncé à toute possibilité d'aimer.
Nous sommes dans ce stade 1 à un stade très important sur le plan du combat spirituel.
Pour aller plus loin, il faudra reconnaître cette émotion qui m'habite, qui me fait souffrir, qui me fait honte, qui me met devant mes responsabilités, au lieu de la nier et de réagir par le déni.
Il faudra accepter la réalité de ce qui monte en nous, la révolte, la haine, la jalousie, si nous voulons en refuser l'acte, c'est-à-dire l'application, car si nous n'en refusons pas l'application, nous garderons en nous cette émotion en la refoulant, par le déni qui est le moyen de défense habituel. Alors, l'émotion gardera son côté peccamineux et sournois. Par exemple, vous avez envie de tuer votre femme ! Il ne faut pas le nier. Mais ce n'est qu'une émotion. Il va falloir la gérer ; nous verrons comment ultérieurement.
Il ne faut surtout pas se sentir responsable d'une émotion. Une émotion se situe au niveau de la culpabilité et non de la responsabilité. Une émotion n'est qu'une déviation. Au plan spirituel, nous ne sommes pas responsables de ce que nous ressentons, mais de ce que nous en faisons. Nous devons faire cette différence énorme entre la responsabilité et la culpabilité. C'est pourquoi nous ne devons jamais nous appuyer sur nos émotions, ni sur nos impressions, ni sur ce que nous ressentons.
Nous devons nous habituer à reconnaître l'émotion qui nous habite car si nous la repoussons, comme si elle venait de l'extérieur elle restera bloquée au stade 1 de la responsabilité embryonnaire où nous n'avons pas pu assumer cette émotion. Nous l'avons détournée dans l'une des quatre déviances embryonnaires qui sont :
L'orgueil
La haine
La volonté de puissance ou
La concupiscence
Comme nous n'avons pas dépassé le stade 1, nous allons être bloqués et cela va engendrer la tristesse qui nous submerge par exemple. Les tristesses viennent souvent chez des personnes qui en sont au stade 1. Ce sont des émotions qui viennent de blessures très profondes de l'enfance, c'est pourquoi elles nous submergent.
En conclusion, le stade 1 consiste à ressentir les émotions, mais à ne pas les gérer.
Le stade 2 : Le stade normal.
Il consiste :
1. à ressentir mes émotions
2. à savoir les reconnaître et les exprimer de manière juste,
3. pour apprendre à les gérer.
Chaque émotion est une chance pour aller jusqu'au bout du travail de deuil et retrouver cette énergie qui me permettra de choisir l'amour concrètement.
Nous allons entrer dans une montée de la vie chrétienne, vers l'an 2000, où l'on ne pourra plus se permettre de rester au stade 0 ni au stade 1. Si nous voulons être les disciples, le petit reste, l'oasis, autour du Sacré Cœur du Christ et de la très Sainte Vierge Marie et être entourés de toute l'armée angélique pour opérer le miracle des trois éléments, pour être capables de créer un Monde Nouveau, nous devons être capables de gérer nos émotions, c'est-à-dire de rentrer dans le combat spirituel.
1. Il faut apprendre à ressentir les émotions
Le stade 1 de ce combat spirituel est d'accepter de se convertir au niveau de l'amour et d'apprendre à gérer ses émotions. Refuser de gérer ses émotions est le signe du refus de l'amour. C'est un examen de conscience très important !
Si nous acceptons de rentrer dans le combat spirituel, nous pouvons entrer dans la vie théologale dont la base de départ est le Corps spirituel, le microprocesseur théologal qui nous permet de créer un Monde Nouveau et de nous trouver sur le tremplin profond où le centre de notre âme est lié à notre corps et d'où nous sommes à l'image et à la ressemblance de Dieu.
C'est là que je peux recevoir la Grâce sanctifiante, à partir de la Lumière qui illumine toute mon intériorité, à partir de mon corps qui est unifié à mon âme, et c'est là que je peux entrer dans le grand combat eschatologique, et ce combat eschatologique implique tout le monde angélique.
Et le monde angélique ne pourra se mobiliser que par ceux qui auront accepté de rentrer dans le pardon, donc dans la guérison de la mémoire. En effet, si nous refusons de rentrer dans le pardon il n'y a aucun danger, à ce moment-là, que l'on puisse vivre de la Mémoire ontologique.
On entend souvent dire : « Je veux bien pardonner, mais je ne peux pas oublier ». non, il faut pardonner et oublier ! Si je n'oublie pas cela veut dire que je n'ai pas pardonné. Je suis donc appelé à pardonner au centuple. C'est une Grâce de Dieu qui prouve que je suis appelé à tout pardonner. C'est grâce à cela que l'oubli s'efface plus difficilement que l'exigence du pardon. Le pardon permet la transfiguration.
Si je ne rentre pas dans la gestion des émotions, mon corps ne pourra jamais devenir un corps spirituel dès cette terre.
La Mémoire ontologique va utiliser le point de vue de notre humanité intégrale jusqu'aux retrouvailles avec notre innocence divine, avec notre origine et va nous permettre de mobiliser toutes les puissances angéliques. C'est là où notre âme spirituelle avec le point de vue le plus fondamental de notre corps entre dans le combat spirituel avec son efficacité prodigieuse, avec toute sa puissance qui terrorise les démons.
« Faites ceci en mémoire de moi » dit Jésus à propos de Son Corps, en s'adressant à nous qui sommes Son Corps. A travers l'Eucharistie, nous sommes son corps. Et dans l'Eucharistie, le Sacrement du Corps du Christ est efficace immédiatement « ex opere operato »
Mais, si, à cause de nos petits problèmes, nous ne voulons pas pardonner jusqu'au bout et faire ce travail de deuil, notre corps sera inefficace contre les démons, car c'est notre corps qui terrorise les démons, ce ne sont pas nos vertus parce que le démon peut avoir des vertus mais pas un corps.
C'est pourquoi il est si important de comprendre comment il faut rejoindre notre corps spirituel, notre âme spirituelle, dans cette grande Mémoire de la Paternité de Dieu dans notre corps. La Présence de l'image et ressemblance de Dieu pénètre alors jusque dans nos cellules. Alors, à travers nos émotions, au cœur de ces émotions, surgit le feu qui brûle physiquement le Cœur du Christ dans la Résurrection où Jésus emporte nos corps. Entre Lui et nous, à l'intérieur de nous, il y a cette tension où tout notre monde vivant peut mobiliser tout le monde angélique, où toute notre humanité s'unit à l'Amour rayonnant du Sacré-Cœur de Jésus Ressuscité, uni au Divin Cœur de l'Immaculée, pour se rassembler en un seul amour, en ce que l'on peut appeler « le Miracle des trois éléments ». Un émetteur-récepteur se trouve au centre du monde, c'est notre liberté de Fils en notre corps spirituel ; et c'est le seul moyen pour nous de demander aux Anges et aux Archanges exterminateurs de désagréger le mal, de chasser le démon, et de remplacer le mal par le bien.
C'est notre vocation, c'est la vocation de l'Église, d'être les témoins de l'Apocalypse, d'être de ceux qui préparent le Retour du Christ.
La gestion des émotions est un préalable important : Nous avons été choisis avec l'Immaculée Conception dans sa Royauté d'Amour parce que « l'homme est enveloppé par la Femme » comme le dit le prophète Jérémie. Le Divin Cœur immaculé de la Vierge enveloppe le Cœur Sacré de Jésus ; et c'est la même enveloppe, tout comme notre âme enveloppe notre corps et notre corps enveloppe notre âme. Le Cœur immaculé de la Vierge Marie rayonne du Feu sacré qui brûle le Cœur du Christ Ressuscité.
Et cette unité de Feu sacré corporelle entre l'Amour féminin absolu et l'Amour masculin absolu, dans le Mystère de l'Assomption, produit une fécondité de Grâce. Cette fécondité est l'immense Grâce qui est ma grâce à moi, en moi, et qui est comme une immense cuve d'où jaillissent des tensions d'amour nouveau d'où émanent à leur tour plein d'émotions qui montent.
Le fond de notre âme est irrigué par la Grâce sanctifiante de Marie Reine. Nous sommes dans le Sacré-Cœur, dans l'unité sponsale glorieuse du Christ et de l'Immaculée E qui n'est ni l'Époux, ni l'Épouse, qui est l'Unité des Deux. Et l'unité des deux, c'est pour nous ; c'est nous qui sommes les acteurs de la Jérusalem Céleste. Notre grâce est le germe de la Jérusalem Céleste dont nous sommes les acteurs.
La Vierge Marie, l'Immaculée, était seule à pouvoir engendrer le Christ Jésus. Mais il est réservé aux apôtres des derniers temps d'engendrer la Jérusalem Céleste. C'est un apostolat tout intérieur, caché, petit, pauvre ; car les apôtres, les disciples se sont désappropriés de toute agressivité, jalousie, peur et haine, en allant jusqu'au bout de leur réalisation, jusqu'à la source. Alors, nous trouverons la Grâce, là où elle se lie à notre corps.
Ainsi, notre corps deviendra un corps spirituel. C'est le grand émetteur-récepteur, le grand microprocesseur de la Centrale divine, qui doit faire exploser toutes les puissances de mal dans ce monde. C'est très efficace et cela va être spectaculaire. Notre puissance dans l'âme, ce n'est pas tout à fait la vie contemplative, même si elle est impliquée, ni tout à fait la charité, notre cœur profond, c'est la Mémoire ontologique, ce lien entre notre âme et notre corps, là où notre humanité devient instrument
Dans la vie contemplative, par la Foi, nous sommes cause première,
Dans la vie d'amour et de charité, nous sommes cause seconde,
Dans la vie finale, dans la sainteté, nous sommes cause instrumentale.
Nous devons apprendre à laisser monter du fond de nous, grâce au Sacrement de Réconciliation, cette flambée d'Amour de l'unité sponsale du Cœur Immaculé de Marie uni au Feu qui rayonne le Sacré Cœur de Jésus dans la Résurrection, dans notre corps, pour chasser toutes les puissances du mal dans le monde. C'est très facile à faire !
Avant le Retour du Christ, il y a la Résurrection des corps. Il faut se préparer à cela pour que notre corps soit un corps spirituel. Il y a cette grande préparation pour que notre corps puisse être disposé spirituellement à ce dernier acte de la Résurrection de la chair et de la Glorification. Saint Paul dit, dans son épître aux Thessaloniciens, que « ceux qui seront encore sur terre au moment du Retour du Christ, et qui auront préparé leur corps, ne connaîtront pas la mort ».
Nous allons voir en quoi consiste cette dernière préparation pour que notre corps soit un corps spirituel. Il est important de bien cerner ces nœuds psycho spirituels qui nous empêchent de passer de la 3e à la 4e demeure, c'est-à-dire à l'Union transformante. Si ce ne sont que des nœuds psychologiques, nous pouvons passer de la 3e à cette 4e demeure.
C'est pour cette raison qu'il faut savoir guérir les blessures de la Mémoire ontologique.
Le stade 2 consiste à ressentir nos émotions, à pouvoir les reconnaître et à les exprimer d'une manière juste pour apprendre à les gérer.
2. Il faut savoir reconnaître les émotions et les exprimer de manière juste
Par exemple : je vais exprimer sous un mode de tristesse ce qui est en réalité une souffrance animée par une colère profonde. À ce moment-là, je me trompe dans mon émotion, et j'agis doublement mal : d'une part, ce n'est pas juste, et ensuite cela va aggraver la situation.
Au stade 2, il s'agit d'être transparent par rapport à sa vie affective. Il s'agit de savoir où est son cœur. Il faut laisser monter ses émotions, pour qu'elles aillent jusqu'au bout, mais ne pas les prolonger par un acte délibéré, qui devient alors une idée : et je me trompe de combat. Il faut reconnaître l'émotion et faire ainsi l'expérience d'un type d'émotion particulière.
Il faut laisser s'exprimer en moi l'émotion, mais il ne faut pas obéir à l'émotion, sinon cela devient un acte responsable.
Dans Son Agonie, Le Christ a connu une montée des émotions sans qu'il y ait péché, parce que dans le Verbe de Dieu, il y a cette unité entre Son Corps et Son Âme spirituelle, mais il y a aussi une unité de mémoire corporelle car Le Christ reçoit Son Corps de l'humanité. Aussi, le Seigneur a une limpidité de Mémoire extraordinaire, II est en relation avec tous les corps, de sorte qu'il reçoit en Lui, dans Sa Mémoire ontologique toute pure, toutes les souffrances de l'humanité, de tous les corps vivants et ces souffrances montent en Lui sans qu'il y ait péché : c'est cela l'Agonie du Christ, mais c'est le Mystère du Christ.
C'est par la Mémoire ontologique que nous sommes en relation avec les autres corps, notamment le cosmos, mais aussi le corps de l'humanité.
3. Il faut oser se dire à soi-même ses émotions pour apprendre à les gérer
Il est assez difficile de se dire honnêtement à soi-même ses émotions.
Par exemple : Je suis jaloux, je suis en colère, je suis orgueilleux, je suis fragile, je suis triste, je souffre, j'ai mal et non pas : « tu me mets en colère », « tu m'as fait mal »... ou « on ne me comprend pas », « on me rejette ! »
Pour passer à la vérité, il faut pouvoir se dire, oser se dire, que c'est mon « je » qui est atteint, c'est moi qui suis en colère, moi qui suis orgueilleux... Ce n'est pas l'autre, c'est moi. Cela s'exprime par une tension intérieure qui vient de la source d'amour qui est en moi. Je commence alors à ne pas me faire des illusions sur moi-même !
Il faut que l'intelligence descende dans le cœur. Et c'est cela l'immense grâce d'avoir des émotions difficiles à porter, car mon intelligence peut commencer à descendre dans le fond de mon cœur ; et je commence à être un homme, à être une femme. Alors, je vois les choses telles qu'elles sont en réalité.
Notons que si la pensée fait naître des émotions, elle les fait naître parce qu'elle engendre un péché. La pensée devient une tentation qui s'imprime dans notre psychisme par l'imaginaire et elle engendre une émotion, mais c'est second.
« La vie spirituelle repose sur le fait de tout dire, et, en tout, trouver le conseil qui y correspond » (Dorothée de Gaza)
La première prudence est d'apprendre à gérer nos émotions en commençant par mettre un nom juste sur cette émotion, car nous pouvons rester bloqués des années, quand nous n'avons pas fait transparence sur une émotion. Il faut trouver quelqu'un pour nous aider à mettre un nom sur notre émotion.
La transparence ne consiste pas, au plan des émotions à dire tout ce que l'on pense. Elle ne consiste pas à tout dire, mais à dire ce qui vient de notre source. Ainsi, la part imaginative, la part d'illusions, la part d'ignorance, l'espace d'action du démon en nous, vont peu à peu se dégonfler et disparaître.
Oser faire transparence, c'est commencer à entrer dans le réel où Dieu peut nous aider, où Dieu nous éclaire.
Quand nous faisons les Exercices de saint Ignace de donc, pendant 33 jours, nous faisons cinq fois par jour des exercices spirituels ; et le soir nous pouvons confier au directeur spirituel tout le fruit que nous en avons éprouvé. En fonction de ce que l'on a éprouvé le premier jour, il donne les exercices pour le deuxième jour et ainsi pendant les 33 jours. Au bout de ces 33 jours, toute la grisaille a disparu, tout ce qui vient du moi, du mental, des influences extérieures bonnes ou mauvaises quelles qu'elles soient, a disparu ; il n'y a plus que l'Esprit Saint et nous. Alors nous pouvons faire un choix, qui est plus personnel car il vient de l'Esprit Saint. Et ce choix est vrai. Il correspond à notre besoin d'amour profond.
D'où l'importance du stade 2 dans le combat spirituel qui est de pouvoir dire en vérité « Je suis prêt à entrer dans ce combat ». Un jour ou l'autre, il faut bien commencer à se lever pour aimer vraiment. Et c'est nous qui, librement, aimons. On ne se laisse pas guider par des affectivités accidentelles mais par un amour substantiel, c'est bien nous qui nous levons pour aimer.
Les deux attitudes d'erreurs possibles : Nous avons tous, une certaine carapace, une armure, une insensibilisation progressive, face à une certaine douleur morale ou physique.
1ère attitude : L'attitude pharisienne ou attitude perfectionniste
Le premier danger est d'entrer dans une attitude perfectionniste où je vais me dire : « j'ai dépassé le stade de la gestion des émotions, je suis au-dessus de tout cela, il n'est plus nécessaire de voir ce qui m'habite », c'est à dire de mener ce combat de la gestion des émotions ; et je commence à refouler mes émotions. Mais pour que la transformation et l'amour soient libres, on ne doit jamais s'arrêter.
En effet, après un certain temps, nous pensons avoir fait des progrès : Dieu nous a guéris et nous ne cherchons plus à reconnaître nos émotions ; c'est se tromper. Nous allons arrêter le combat contre les émotions et les gérer alors comme des pensées. Si une émotion nous habite, nous allons la rejeter : c'est ainsi que nous agissons dans la garde du cœur, dans le combat contre les pensées, en rejetant la pensée et en priant.
Mais dans la gestion des émotions, il ne faut pas entrer dans la prière comme dans le combat contre les pensées. Sinon, nous nous trompons de combat et entrons dans une attitude de déni.
Dans cette attitude, je dépasse l'émotion et je rentre dans une attitude de soumission, je vais dans le sens de l'émotion en la transcendant, en la sublimant. C'est le sens ascendant du yoga, dans le sens des énergies psychiques. Plus je m'assume et plus je me blinde ; plus j'en ai plein la tête et plus mon cœur est de plus en plus inhibé. J'adopte la même attitude que vis-à-vis de mes pensées. Il faut chasser les mauvaises pensées, mais il ne faut pas chasser les émotions.
Par exemple, quand une jalousie ou une haine remonte du plus profond de soi, il ne faut pas prier, car ce n'est pas une pensée, c'est une expression d'amour déviée. Il faut alors entrer dans cette émotion jusqu'à sa racine amère, qui est une énergie d'amour, une tension d'amour, où nous attend Jésus Sauveur. Cette émotion vient de l'intérieur et non pas de l'extérieur. Ou bien, nous sommes tristes, pleins d'amertume, découragés... alors c'est la déprime, le cafard.
C'est l'attitude perfectionniste de l'orgueilleux : c'est le signe d'un orgueil blessé.
Nous devons accepter de vaincre cette attitude qui consiste à croire qu'il n'est pas nécessaire de descendre jusqu'à la racine de ce qui nous habite, à cette source, afin d'être capable de saisir la Grâce cachée dessous.
C'est pour cela qu'il ne faut pas chasser nos émotions, ni les sublimer, ni les refouler, car alors, nous nous mettons en état de déni et nous nous trompons de combat. Le signe évident que nous confondons les deux combats, c'est le jugement que nous portons sur les autres.
Il faut au contraire descendre au fond de soi pour trouver cette Grâce cachée.
Quelquefois, pensées et émotions sont liées, et c'est très délicat.
Premier exemple : mon agressivité demeure, ma jalousie est latente. Alors pour ne plus y penser je fuis mes émotions en allant dans un groupe animé et je refuse de reconnaître l'émotion qui m'habite !
Deuxième exemple : Je fais un sourire en pensant pouvoir me réfugier dans une idée de condescendance : alors, je juge, je condamne, je méprise. Je ne vois plus en moi que l'extérieur de la coupe et je ne gère pas l'émotion qui commençait à monter en moi.
Il faut savoir que la transparence ne s'arrête jamais. Plus nous avançons dans la vie spirituelle, plus nous découvrons des émotions.
2e attitude : II ne faut pas affronter l'émotion de face
II ne faut jamais affronter l'émotion de face, ni tout seul. Nous devons faire face à nos émotions dans un dialogue avec un ami ou avec Dieu devant le Saint Sacrement.
Si vous voulez affronter un sentiment de jalousie par de la jalousie ou un sentiment de tristesse par de la tristesse... vous allez tomber, car vous allez verbaliser, en agissant en fonction de cette émotion.
Seuls les saints rompus au combat spirituel peuvent éventuellement affronter les émotions de face, car ils sont déjà dans une attitude d'humilité, disent les Pères du désert.
Quand vous serez dans l'Union transformante, vous pourrez recevoir toutes les Agonies de Gethsémani -que vous voûtez. Ce n'est pas ma volonté, c'est la Volonté de Dieu que je veux !
Sur le plan des pensées, c'est le même problème : si nous avons une tentation charnelle, par exemple, il ne faut jamais l'affronter de face ni lutter avec elle, car nous entrons en elle et elle en nous ! C'est ce qui a fait succomber Ève. Vous devez nous réfugier tout au fond de notre âme, pas de notre cœur ni de notre esprit, imposer silence à notre corps, et nous réfugier dans le Cœur de Jésus pour que Jésus puisse porter avec nous cette souffrance, cette vulnérabilité. Il faut en parler, nous en confesser, sinon nous pensons que nous sommes assez fort pour lutter contre l'aspect peccamineux de cette tentation. Nous allons faire nous-même notre petite analyse. Et nous allons agir en fonction de cette émotion Alors que le simple fait de « la verbaliser », de la confesser nous permet de « passer dessous », comme le dit sainte Thérèse de l'Enfant Jésus, qui ne l'affronte pas.
« Celui qui reconnaît son péché est plus grand que celui qui ressuscite un mort » dit Isaac le Syrien. C'est évident : celui qui d'ailleurs avoue la racine de son péché est plus grand que celui qui ressuscite un mort.
« En Ton Nom, Seigneur, nous avons chassé les démons, nous avons guéri les malades, nous avons ressuscité les morts » et Jésus leur répond : « Je ne vous connais pas ! Je ne vous ai jamais connus ».
Jésus se cache dans nos pauvretés et c'est là qu'il est venu nous voir. Et Il nous dit :
« C'est dans tes pauvretés que Je Me suis fait le plus Présent à toi »
II y a parfois des perversités très difficiles à avouer, qui nous poussent à des choses abominables. Il faut avouer les déviations dans lesquelles nous nous trouvons. On n'en est pas responsable ! Il faut les reconnaître, reconnaître la vérité de l'émotion qui nous ronge, la vérité de nos racines amères, qui est une déviation de l'Amour profond en nous. Mais, à ce moment-là, il ne faut pas non plus aggraver cette émotion en la bombardant de pensées !
« II faut apprendre à combattre les émotions avec science, c'est-à-dire en les connaissant » dit Dorothée de Gaza
« Quand tu commences à voir tes péchés aussi nombreux que les grains de sable de la mer, c'est le début pour toi, de l'illumination de l'âme » dit saint Jean Climaque.
Ce n'est pas quand je dis : « Je vais beaucoup mieux, je fais moins de péché » car c'est une attitude pharisienne.
Il faut se convertir. Il faut que la source d'Amour en moi soit libre pour que ce soit Jésus qui me porte. C'est ce que dit Jésus aux Pharisiens :
« Si vous dites que vous n'avez pas de péché, vous mentez et votre péché demeure ».
Les grandes étapes du stade 2
Voir et reconnaître l'émotion qui m'habite, comme faisant partie de moi. Je confesse ce qui m'habite et j'admets que j'ai un mouvement de haine, etc.
Éviter de combattre cette émotion de front. Je vais m'aider par un dialogue avec un ami, peut-être aussi avec Jésus dans le Saint Sacrement ou avec quelqu'un d'extérieur à moi ou qui est proche de moi qui pourrai m'aider à verbaliser. Je ne dois pas non plus analyser.
Je vais recueillir dans mes mains cette émotion et la déposer au pied de la Croix de Jésus. Je vais la déposer moi-même comme un fruit mûr aux Pieds de Jésus. Je vais l'offrir pour être lavé, délivré de cette émotion.
En ayant fait cela, je vais éprouver de la gratitude. En déposant cette émotion aux Pieds du Christ, je vais découvrir à quel point je suis orgueilleux. Je découvre le vrai visage de cette source de déviation de l'amour ; du coup, je suis reconnaissant par rapport à cette émotion de haine, de découragement.
Enfin, je découvre en plus où est la faille en moi et je rentre alors dans une véritable humilité, une grande pauvreté et je retrouve ma véritable identité.
Alors, dans ma pauvreté, je deviens joyeux. Car personne n'est plus joyeux qu'un pauvre ; les riches ne sont pas joyeux. Et je suis capable de dire « Merci » au Seigneur.
La confession nous donne automatiquement ces quatre choses :
La gratitude qui nous vient, ne vient pas du fait que Jésus nous a lavés de cette faute, mais de ce que nous sommes humiliés par cela. Au fond de notre cœur peut commencer l'expérience de l'humilité. Nous trouvons en nous la source du silence et nous sommes heureux de n'avoir plus rien à dire : je suis pauvre et j'y trouve mon bonheur parce que c'est vrai.
Cette humilité ouvre la porte à la joie spirituelle vraie. À travers cette angoisse d'être tout nu, je découvre que Dieu me sauve, là où je n'étais pas sauvé. C'est « la petite voie » de sainte Thérèse de l'Enfant Jésus. C'est la joie de faire l'expérience de la Miséricorde, qui est la découverte de la douceur et de la paternité de Dieu.
C'est là que je console le Cœur de Dieu, quand je permets à Dieu de me guérir. Au cœur de ce magma, il va y avoir une joie spirituelle permanente, mais qui ne va pas supprimer la souffrance.
Chaque fois que nous laissons Jésus nous laver, nous guérir, nous bénir, nous allons chercher dans le Cœur de Jésus, la Joie de Jésus qui dit : « Je suis le Bon Berger ».
Le stade 3 : la maturité affective – le chemin de la sainteté
C'est la juste gestion du combat spirituel.
Ce stade n'existe pas en psychologie où nous déposons, en vrac, pensées et émotions, devant un psychanalyste. Nous, nous déposons toutes nos pensées et nos émotions aux pieds de Jésus- Christ sur la Croix qui nous a dit :
« Je suis la Voie, la Vérité et la Vie ».
C'est la voie de la sainteté, la voie chrétienne de la gestion des émotions, le point de vue uniquement spirituel. Cette voie implique une pleine maturité affective et une juste gestion du combat spirituel, qui consiste à agir :
1. d'une façon adaptée,
2. par une action appropriée,
3. dans l'Esprit Saint, en répondant au besoin en moi qui est sous-jacent au sentiment et qui est un besoin d'Amour absolu, éternel, parfaitement surabondant qui consiste à se laisser aimer par Dieu, et à se laisser aimer par son frère, même s'il est agressif; car derrière l'agressivité de ce frère se cache une demande d'amour, c'est une agression d'amour, pourrait-on dire.
L'autre est là pour Dieu et pour moi !
Ce besoin profond qui est en moi est souvent bloqué par un refus fondamental de me laisser aimer. C'est ce refus qui nous empêche d'être des saints. Il s'agit d'être source d'amour pour les autres, il s'agit de susciter l'amour, pas de séduire !
Le refus de se laisser aimer est en fait, un refus de Dieu, du Saint-Esprit, du Consolateur, du Rédempteur, du Sauveur, du Cœur maternel immaculé de la Vierge Marie, un refus de la sainteté, de la vie spirituelle. Il faut se laisser aimer, consoler, cajoler par la Grâce, par l'Esprit Saint, par la Miséricorde profonde de Dieu, (pas par une apparition extérieure) c'est-à-dire se laisser guérir, être sauvé, être pardonné afin de pouvoir enfin vivre de son affectivité en toute vérité. Notre intelligence pourra alors descendre dans notre cœur, et nous pourrons vivre d'une paisible harmonie entre notre vie contemplative éclairée par l’Esprit et notre cœur trempé dans la Vérité de l'Amour et de notre vie affective.
Il y a trois incarnations de la Grâce :
1. Quand Dieu s'incarne, c'est Jésus
2. Quand l'Amour divin s'incarne, c'est le Sacré-Cœur de Jésus
3. Quand la Grâce s'incarne, c'est le Divin Cœur de la Vierge Marie.
C'est l'Amour du Père et du Fils qui va pouvoir éclairer notre intelligence et nous permettre de vivre de l'Esprit de Sagesse. Dans l'oraison, nous pouvons avoir des « touches » d'amour, des touches anagogiques, des touches d'intelligence, des touches de lumière, des touches du Don de Science, mais rarement l'Esprit de Sagesse qui est l'harmonie extraordinaire, la saveur indicible de l'Esprit Saint, qui fait saisir l'intelligence de l'Amour de Dieu par l'expérience du cœur.
Cet Esprit de Sagesse est le cœur même de la gestion des émotions au stade 3.
Grâce à l'Esprit de Sagesse, au stade 3, je vais trouver au fond de mes blessures, et grâce à elles, des ressources nouvelles, mes vraies ressources, non seulement les ressources psychologiques du P.N.L. mais aussi les ressources spirituelles. Je vais trouver des mots nouveaux d'une puissance incroyable ; car ce ne seront pas des mots qui vont me servir pour accuser, pour juger ou des mots d'illusion, mais ce seront des mots vivants émanant de mon corps lié à mon âme, lié à Dieu et où le Verbe de Dieu se formule lui-même à travers moi.
C'est beaucoup plus que les stades psychologiques des thérapies P.N.L. lesquelles se situent au niveau du « facere » : c'est un effondrement en dessous du stade psychologique, c'est métapsychique.
Il y a une différence entre « facere » et « agere ». « L'agere » est une activité profonde, une activité du cœur. L'artiste fait, mais l'homme qui aime, agit. Et si nous agissons de façon juste, cela devient une source de croissance. La tension d'amour, cachée derrière une émotion, devient alors source de croissance :
au niveau psychique
au niveau spirituel
au niveau du Corps mystique de l'Église ( pour ceux qui font corps avec nous : pour la communauté)
Agir de façon juste veut dire que « là où le péché abonde, la Grâce surabonde » (saint Paul)
Agir de façon appropriée signifie que, derrière une émotion peccamineuse, se cache toujours une grâce à saisir, à découvrir, une ressource nouvelle. La Grâce, liée à une émotion (celle-ci n'étant qu'une enveloppe), nous permet de saisir le Feu rayonnant de l'Amour de Dieu qui y est lié.
Première CHARTE pour la gestion des émotions au stade 3
« Toute la finesse du combat spirituel consiste à apprendre et à saisir la Grâce qui est associée à l'émergence et à la remontée de l'émotion, qui est cachée dessous »
Au stade 3, quand monte en nous une des six émotions fondamentales, nous pouvons dire au Seigneur si par exemple, c'est un sentiment de terreur qui monte en moi : « Tu ne vois pas que mon amour se transforme en un sentiment de terreur. J'en ai assez ! Seigneur, donne-moi de saisir la Grâce qui est cachée dessous, celle que Tu veux me donner ». C'est la manière dont notre soif d'amour était manifestée dans notre sensibilité.
C'est ainsi que nous passerons en dessous de l'obstacle. Sous la fumée se trouve la lumière cachée de l'Amour de Dieu. Et des ressources nouvelles apparaissent. Nous sommes dans le Mystère de la Croix. Là où est le mal, où nous sommes mal, à sa racine, le Seigneur a mis la Vraie Vie.
« Heureuse faute qui nous a valu un tel Rédempteur » dit saint Augustin.
« La vie spirituelle, c'est l'acquisition du Saint-Esprit et tu ne peux l'acquérir que là » (Saint Séraphim de Sarov)
II faut chercher dans la prière quelles sont les émotions les plus fréquentes, les travers les plus courantes qui montent en moi car, derrière ces émotions, se trouve une Grâce à saisir que je laisse passer depuis des années ; car il ne faut pas vivre de l'émotion mais de la Grâce qui est cachée dessous.
Elle me permet de saisir où est localisée mon âme spirituelle. Je peux savoir où est mon âme spirituelle par le point de vue de l'intelligence en faisant une induction de l'âme, mais il ne s'agit pas de cela. Il s'agit de faire descendre mon intelligence dans mon cœur. C'est l'intelligence liée au cœur qui va me permettre de trouver mon âme spirituelle.
C'est la première étape du combat spirituel : situer où est notre âme spirituelle.
Dans mon âme spirituelle est venue s'accumuler la res de tous les Sacrements que j'ai reçus, et que je n'ai pas encore exploitée. La res des Sacrements, c'est la Grâce, le Feu qui brûle le Sacré-Cœur de Jésus dans la Résurrection. Au fond de mon âme spirituelle se trouve la Grâce. Cette Grâce, liée à l'émotion que je saisis et qui en est l'aspect enveloppant, me permet de saisir au fond de mon âme spirituelle la Présence réelle, la lumière amoureuse du Cœur de Jésus ressuscité.
Dans la Grâce cachée sous mon émotion, le Cœur de Jésus et mon âme spirituelle sont là en même temps. La source de mon unité sponsale avec le Christ est peut-être là ! Il s'agit en fait de retrouver son âme là même où nous découvrons le Sacré-Cœur.
(Pour bien comprendre cela, il faut avoir fait la théologie de la Sponsalité, de la Mémoire ontologique et de la res de tous les Sacrements que nous avons reçus)
C'est là où nous pouvons prier et voir surgir saint Michel Archange, source de sérénité absolue, parfaite, cosmique. Mais, attention ! Ce n'est pas une méthode, c'est une vie.
Les grandes étapes du stade 3
Quelle attitude spirituelle avoir pour saisir la Grâce ? Le stade 3 est un chemin de sainteté, car, nous dit saint Paul, nous sommes des saints dès que nous entrons dans un chemin de conversion. Nous ne trouverons pas ce chemin avec ses 7 étapes dans les manuels de psychologie.
1ère étape : L'émotion est là. Je la laisse aller jusqu'au bout d'elle-même, je la repère, je la formule, sans m'y attarder. Je crie vers Dieu : « Seigneur, sauve-moi ! Je coule ! » . C'est le cri de l'enfant dans le désert. Ainsi, par ce cri, je ne participe pas à la croissance de l'émotion, je l'ai repérée mais je ne l'augmente pas, mon cri supprime la croissance et l'aspect peccamineux de l'émotion :
« Le Seigneur dispersera mes ennemis ». Ainsi je n'obéirai pas à l'émotion en posant des actes.
2e étape : Cette émotion, je vais la déposer au pied de la Croix de Jésus, l'offrir au Sacré-Cœur de Jésus qui est en dessous d'elle, au plus profond de nous.
3e étape : Quand j'ai offert mon émotion à Dieu, je Lui pose cette question : « Seigneur, pourquoi cette émotion ? Qu'est-ce que cela veut dire ? Que veux-Tu me faire comprendre ? »
Alors le Seigneur peut me donner très vite la réponse ou seulement quelques années plus tard, cela dépend. Le Seigneur nous montre pourquoi et en quoi nous ne sommes pas au bon niveau, nous ne sommes pas nous-mêmes, et pourquoi nous sommes dans la fumée, dans la fuite et non au cœur de nous-mêmes.
4e étape : Si je devine bien ce que cela veut dire, je peux poser un nouveau choix ! Je vais m'ouvrir à un nouveau choix.
Par exemple, à telle période de ma vie, j'ai fait un choix qui a eu telle ou telle conséquence ; et cela a engendré tout un système de défense. Aujourd'hui, dans la même circonstance, je peux faire autrement, je peux retrouver ma liberté ou je peux refuser.
5e étape : Posant ce nouveau choix, je vais saisir la Grâce cachée sous mon émotion de dégoût, d'agressivité, de révolte, d'amertume. Je vais y correspondre. C'est comme si j'entendais Jésus me dire : « Je frappe à la porte de ton cœur, veux-tu M'ouvrir ? » Et je vais répondre : « Amen, Seigneur, rentre là où Tu frappes, à la porte de mon cœur, là j'ai si mal, à la source de l'émotion ».
6e étape : Je vais être le spectateur et saisir ce qui se passe intérieurement. C'est toujours perceptible, et sensible. Les Pères du désert le savaient bien : cette grande source de chaleur qui se répand en nous, notre cœur qui commence à s'élargir et à sourdre, mais c'est sur un type d'émotion seulement ; il y en a d'autres, plus importantes.
7e étape : Une nouvelle vie commence. Il y a un changement radical dans notre vie, dû à la Grâce retrouvée du cœur humain et chrétien. Sans aucun effort, d'un seul coup, nos parents, nos amis ou nos ennemis, ne nous énervent plus. La Grâce du Cœur peut s'éprouver de manière sensible, notre corps sera de plus en plus un corps spirituel, le Cœur du Christ ayant quelque chose de sensible et de spirituel. L'Esprit Saint commence. Et cela n'a rien à voir avec ce que nous imaginions ou ce que nous pensons être. La Vie nouvelle ne peut se comprendre qu'à partir du moment où on l'expérimente.
C'est ainsi que le corps va devenir de plus en plus un corps spirituel. C'est quelque chose de tout à fait ordinaire et en même temps, de très extraordinaire ! La gestion des émotions est un enseignement fondamental pour nous apprendre à vivre de l'Union transformante.
Il est important d'apprendre à pénétrer notre cœur spirituel jusque dans notre corps spirituel pour que Dieu puisse se servir de notre humanité pour désagréger le mal de ce monde.
L'être, c'est l'unité entre cette source de vie en moi et mon corps : soit elle est plongée dans le Cœur du Christ, soit elle traîne dans des émotions, (tel est le corps psychique, le corps terrestre.)
Pour toutes les joies que Tu nous donnes, Merci, Seigneur !
« Le Seigneur fit pour moi des merveilles, Saint est son Nom »
« Toutes les Œuvres du Seigneur. Bénissez le Seigneur,
à Lui haute Gloire, louange éternelle ! »
« Et vous les enfants des hommes. Bénissez le Seigneur,
à Lui haute Gloire, louange éternelle ! »
« Chantez au Seigneur un chant nouveau. Louez-Le dans l'assemblée de ses fidèles ! »
« Rendez grâce au Seigneur : Il est bon. Eternel est son Amour ! »
Que de psaumes nous pouvons chanter en remerciement des joies quotidiennes offertes aux enfants de Dieu ! En fait, il est plus facile d'offrir au Seigneur nos joies quotidiennes que de Lui offrir nos souffrances.
En ce qui concerne les souffrances, nous avons une certaine capacité, une certaine habitude d'encaisser. Il est assez facile de se blinder et d'encaisser les chagrins, les douleurs, les vexations, au quotidien. Même vis-à-vis des très grandes douleurs, nous sommes finalement « blindés », d'où une certaine indifférence devant les émotions que nous éprouvons et « on prend sur soi ! »
Comment qualifier cette conduite ?
Est-ce une indifférence devant les grands chagrins, les gros chocs ? Pourtant nous prenons part à la souffrance ; mais nous finissons par n'y attacher qu'une importance relative ! Est-ce un détachement, de l'égoïsme, une peur d'être à nouveau blessé ou un besoin de voir plus loin qu'une douleur passagère ? Est-ce un repli sur soi ? Est-ce un laxisme ? Est-ce une fatalité ? Ou encore, est-ce un dégoût ou un certain mépris des petits aléas chez mes proches qui se plaignent pour des choses sans importance ou superficielles ?
Nous avons une armure. Il n'y a certainement pas insensibilité mais une certaine insensibilisation progressive à une certaine douleur morale ou physique.
Nous avons vu cela dans l'attitude perfectionniste du stade 2 où « j'en ai plein la tête » et où mon cœur se durcit de plus en plus, en disant qu'il faut que je dépasse ce qui m'habite. En fait, je rentre dans une attitude de soumission qui est une attitude islamique où, à partir de l'émotion, le mouvement d'amour est d'aller dans le sens de l'émotion, non pas en lui obéissant, mais en en le dépassant, en la sublimant, comme dit Freud. C'est le sens yoguique ascendant : je vais dans le sens des énergies psychiques. Et finalement, j'en ai plein la tête, même si ce sont des pensées positives et mon cœur est de plus en plus inhibé.
Il faut toujours vaincre cette attitude qui consiste à dire qu'il n'est plus nécessaire de descendre dans mes émotions à la racine de ce qui m'habite ; car l'émotion, c'est le ferment qui m'habite. La Grâce, c'est la braise ardente qui est en dessous et qui va me permettre de localiser mon âme spirituelle (ceci ne se fait pas ici par une induction intellectuelle, mais par une intériorité du cœur profond).
1. Il y a les émotions fondamentales où notre cœur s'endurcit
Ce sont :
1. La peur
2. L'angoisse
3. La souffrance
4. La honte
2. Il y a les émotions peccamineuses, issues du péché
Ce sont :
1. La convoitise – la jalousie
2. L'agressivité
3. La haine
4. La tristesse
5. Le découragement
1. — La jalousie
Nous avons vu que la relation fusionnelle est particulièrement douloureuse parce qu'elle nous fait vivre une perte d'identité et elle entraîne une frustration.
Si nous avons vécu dans l'enfance une frustration profonde, elle fera surface un jour ou l'autre. Chez l'homme, ce sera vers les 40-50 ans, elle émerge chez la femme un peu plus tardivement. C'est souvent le moment de la prise de conscience de notre identité que nous avons toujours refoulée.
Et cela engendre un sentiment nommé la jalousie
Ce sentiment vient des circonstances blessantes qui ont fait se développer en nous tout un système de défenses, souvent au moment de l'adolescence. La jalousie ne vient ni de Dieu, ni des parents.
La jalousie consiste à s'accrocher à un avoir, à un savoir, à un pouvoir, à une fécondité que je n'ai pas.
Mon émotion se fixe là-dessus mais ce n'est pas au niveau de l'être. J'ai perdu ce que je suis du point de vue de l'Amour et la jalousie me révèle ce manque à être.
Il y a une différence entre dire : « Je suis la Résurrection et la Vie » et dire : « J'ai le pouvoir de ressusciter les morts » ! Le démon, avec l'anti-Christ, aura le pouvoir de ressusciter les morts, ce sera un avoir, mais il ne sera pas la Résurrection, ce ne sera qu'une apparence.
Il y a un moment dans ma vie où je n'ai pas bien passé l'épreuve et où j'ai choisi, par un système de défense, de me fixer sur l'avoir, le pouvoir ou sur une fécondité visible, au lieu de me fixer sur ce que je suis.
Toutes nos émotions s'originent dans une des trois épreuves de la vie : l'enfance, l'adolescence et la maturité, et c'est là que se situent toutes nos déviances d'amour.
Comment gérer la jalousie ?
Quand j'ai un sentiment de jalousie irrépréhensible durant mon oraison, parce que quelqu'un passe devant alors que c'est moi le plus fort, je commence par dire « Non, il ne faut pas que je sois jaloux ! ». Alors je refoule cette émotion et c'est encore pire, la jalousie me ronge un peu plus et je crie vers le Seigneur : « Ce n'est pas possible ! ».
Puis, je demande au Seigneur «Qu'est-ce exactement ? ». Je constate ensuite que « je suis jaloux ».
Alors, je passe à l'étape suivante et je descends jusqu'à la racine de cette jalousie, jusqu'à la Grâce cachée dessous, car je sais bien que je suis appelé à une purification, (les 4 étapes du stade 3)
La Grâce cachée sous la jalousie
La jalousie me révèle mon « manque à être ». La Grâce cachée sous ma jalousie me dit qu'il me manque une portion d'être et que Dieu veut me la donner, au centuple.
Si je ne ressens pas cette émotion de jalousie très fort, cela veut dire que Dieu estime que ce n'est pas encore le moment de me donner cette portion d'être, ce plus être qui me manque, au centuple. « Au centuple », veut dire que cette émotion sera brûlée par la Présence d'Amour, là où c'est mon amour qui vivifie mon être.
Qu'est-ce que cette portion d'être qui me manque ?
Dès que je vis au niveau de cette Grâce cachée derrière l'émotion, elle me dévoile ce manque à être que je suis seul à comprendre et que nul ne peut m'expliquer. Alors, je peux trouver une nouvelle manière d'être qui m'est donnée par Jésus. Je découvre que cette jalousie était d'une puissance infernale ; et elle émerge pour me faire comprendre que, depuis ma conception, avant ma naissance, depuis l'éternité, Dieu m'a choisi pour passer devant un certain type de mission ou de Grâce. Car pour être le premier dans un certain ordre, il faut que le Christ le mérite en nous, avec nous et pour nous. Il faut donc passer le second dans un autre ordre. Si je ne suis pas le premier dans un certain ordre, cela veut dire que je suis le premier dans un autre ordre, que je dois découvrir, pour être enfin là où je suis choisi par Dieu.
Et grâce à cette émotion de jalousie, je peux découvrir ma vocation. Alors, je rentre dans une vie nouvelle. Il faut pour cela que je vive de cette Grâce.
La jalousie est l'émotion la plus dure à vaincre : il ne faut pas oublier que Jésus a été condamné par la jalousie des grands prêtres.
D'où la nécessité d'apprendre à gérer ses émotions pour se convertir et être tout proche du Cœur de Jésus.
2. — L'agressivité : la colère – la révolte
Ces émotions correspondent à la 2e étape du travail de deuil, qui est la protestation.
L'agressivité est un sentiment normal.
Elle est présente chez tous les hommes. Il ne faut pas avoir peur d'une montée d'agressivité. Nous ne sommes pas responsables de cette émotion. Mais, nous sommes responsables de ce que nous en faisons. Nous sommes responsables si nous commençons à lui donner une expression verbale ou gestuelle, c'est-à-dire si nous lui obéissons.
C'est une émotion indispensable pour pouvoir rentrer dans le travail de deuil et dans la guérison de la Mémoire. Le problème est de rester bloqué dans une émotion d'agressivité pendant des années ; cela veut dire qu'au niveau du travail de deuil, il y a une étape que je n'ai pas franchie, ce qui est anormal.
L'émotion d'agressivité va émerger chaque fois que je me sens en danger. En fait, je vois l'agressivité, mais je ne vois pas que je suis en danger. Je sens le danger car elle touche mon espace vital de sécurité. Et chaque fois que je suis en danger de perdre quelque chose, en danger de séparation, en danger de déstabilisation ou de changement, je présente le panneau « Défense d'entrer » ou « Propriété privée » ou « Ne pas toucher ».
C'est très important de reconnaître cette agressivité dans le combat spirituel car il y a dans l'agressivité une double émotion : un sentiment peccamineux, psycho spirituel (la révolte) et un sentiment spirituel (la colère) ; ces deux sentiments sont mêlés.
1. Le sentiment de colère est un sentiment spirituel
La colère est provoquée par un sentiment d'injustice, à cause du sentiment de justice, déposé par Dieu et inscrit au plus profond de nous ; c'est un sentiment de non-amour. La colère jaillit de cette conscience d'Amour profond.
La justice de Dieu est la Justesse de son Amour.
Cette colère manifeste un dynamisme absolument nécessaire pour traverser l'épreuve et entrer dans la 3e étape du travail de deuil : le lâcher prise.
2. Le côté peccamineux de l'agressivité est la révolte
II y a une perversion dans le sentiment d'agressivité qui consiste à transformer cette soif de justice en l'attaquant précisément dans sa source, en attaquant l'occasion. Nous en avons un exemple dans la bible avec l'histoire de Gédéon, au Livre des Juges.
Dieu demande à Gédéon de prendre trois choses : la cruche, la torche et la trompette.
Gédéon rentre dans le camp ennemi (comme nous descendons dans nos émotions, ce qui est toujours désagréable), puis il casse la cruche (la cruche cache la vérité de nos émotions). Alors la Lumière se fait dans le camp. Et il sonne de la trompette. (Dans l'Apocalypse, la trompette sonne au moment où Dieu intervient).
A ce moment-là, les 100 000 soldats de l'armée ennemie sortent de leur tente et ils se tuent tous entre eux. Et c'est ainsi, qu'avec 300 hommes, Gédéon et son armée dispersent toute l'armée ennemie. Il ne restait à Gédéon que 300 hommes sur 50 000.
C'est extraordinaire comme symbole.
L'erreur de l'agressivité est que nous sommes sur le qui-vive et que nous tirons sur nous-mêmes alors que cette agressivité vient d'une soif de justice d'Amour de Dieu. C'est en raison de cette tension d'Amour déviée de sa source que nous agressons le mauvais ennemi.
Le côté peccamineux de l'agressivité est la révolte. Il s'agit de trouver un coupable, « une tête de turc ».
Quand nous sommes révoltés, c'est en fait contre Dieu que nous sommes révoltés : « Seigneur, Tu me fais souffrir », « Seigneur, Tu m'agresses ». Il y a une révolte contre Dieu et en même temps une révolte contre la première ombre qui passe. La révolte est un signe négatif, un signe de non pardon, c'est un signe de désir de vengeance qui s'origine dans une des épreuves de la vie (enfance, adolescence ou maturité).
Dans notre révolte contre Dieu, se cache une réalité que nous ne voulons pas remettre en question.
Le panneau « Défense d'entrer » signifie interdiction d'aller voir ce qui se trouve en dessous, bien caché dans « les racines amères », là où nous sommes séparés de Dieu, révoltés contre Dieu, avec l'humanité révoltée.
Car, sous cette révolte il y a une connivence, une complicité : à chaque révolte, je peux détecter, démasquer une complicité profonde, une connivence latente depuis des années, peut-être même depuis ma conception. Il y a quelque chose que je ne veux pas voir : c'est un peu mon armoire secrète où j'ai entassé tous mes cadavres.
Voilà ce qui est caché derrière chaque émotion d'agressivité que nous transposons sur n'importe qui. Mais la raison profonde est que je ne veux pas descendre dans cette racine amère pour y trouver Jésus, je ne veux pas changer cet état de révolte contre Dieu.
À chaque agressivité, Dieu me met le doigt sur ce que j'ai refusé de Lui offrir, tout en Lui disant que je Lui ai Tout donné ; et je trouve que c'est injuste qu'il m'agresse.
Voilà ce que dit le sentiment d'agressivité, mais c'est faux. Ce qui est vrai, c'est la connivence cachée derrière. Et la Grâce cachée sous le sentiment d'agressivité me permet de voir quelle est ma connivence avec le péché.
Je dois arriver à vaincre cette révolte qui est la même que celle à laquelle j'ai participé au moment du péché originel et dont je suis responsable. Lorsque que je l'aurai vaincue, je serai lavé, et mon bateau pourra naviguer ; et elle ne reviendra plus
Mais, si je veux vaincre en moi cette racine amère, conséquence du péché originel et dont je n'ai pas conscience, il faut laisser remonter cette émotion d'agressivité, qui va être pour moi l'occasion de mettre un nom sur cette racine amère et de la vaincre.
Dans la Parabole des vignerons de l'Évangile, quelle est l'attitude des deux fils. Quand le Seigneur demande au second fils d'aller travailler à sa vigne, il comprend tout de suite que Dieu lui demande d'aller jusqu'au plus profond de lui, jusqu'à la racine amère qui est en lui. Et il dit « Non ». Cela le fait souffrir, mais il dit « non » car il reconnaît cette racine amère qui sort de l'eau. Le Seigneur l'a touché directement au niveau de sa connivence où se trouve le refus d'ouvrir une porte en lui pour que Jésus puisse descendre.
Quand le Seigneur pose la même question au premier fils, il dit « Oui » tout de suite, mais il n'y va pas. Cela veut dire qu'il n'a pas été proche de son cœur, qu'il n'a écouté son cœur, ni écouté l'émotion soulevée par cette proposition. Il a répondu « oui », spontanément. Il voulait bien aller à la cuve boire le bon vin, mais pas au pressoir ; il était dans l'illusion, car il n'avait pas réalisé que le Seigneur l'invitait à descendre au fond de lui-même, mais dès l'instant où il le réalise, il dit non.
Il est vrai que cela met dans une attitude d'humiliation. En effet, que représente la vigne ?
La vigne est le lieu du bon vin qui réjouit le cœur de l'homme, mais c'est aussi le lieu du pressoir où la grappe doit être moulue pour produire le vin. C'est le Lieu des Noces du Fils, immolé comme l'Agneau. C'est le Lieu de la souffrance et de la traversée de la souffrance pour parvenir au Festin des Noces du Fils de Dieu.
Après avoir dit non, le second fils dit oui grâce à l'Amour de Jésus. Ainsi, grâce à cet Amour de Jésus, il va pouvoir accepter de descendre en lui, de mourir à lui-même, et de faire la vérité sur lui-même, uniquement par Amour de la Présence du Père au fond de lui: Quand il dit oui, il va autoriser Jésus à descendre dans le « Non » qui est le sien et porter avec Lui ce « Non ». Donc, Jésus est là dans son cœur blessé et il peut, grâce à Jésus, être crucifié et le Golgotha du Christ n'est pas vain. À cet instant, le second fils trouve la Grâce cachée et il boit le vin des Noces.
Car se donner n'est pas quelque chose d'extérieur, c'est tout intérieur. C'est vivre nous-mêmes dans notre propre identité, là où nous sommes, dans les Mains du Père, tout ajustés à Son Amour, comme dans notre origine, avant que nous ayons été persécutés par l'héritage du péché originel, avant que nous ayons été comme un buvard, absorbant tout le mal du monde ; car nous sommes très récepteurs, très capteurs dans la première cellule.
Conclusion
Chaque fois que nous sommes confrontés à une remise en cause profonde, à faire la vérité sur nous, nous sommes dans un état d'agressivité qui est une attitude juste. Dire « Non », c'est normal !
Seul l'Amour de Jésus peut débloquer ce « Non » qui met le doigt sur une connivence, pour nous faire franchir cette impasse... En obéissant à l'agressivité, nous changeons l'ajustement à l'Amour de Dieu en une connivence, une complicité avec l'esprit de révolte.
La connivence est l'endroit en moi où je dis oui et où je fais non : c'est le lieu de la duplicité. Quand nous sommes de connivence avec l'ennemi, nous disons oui et nous faisons non, en obéissant à la connivence. On agit d'une manière incorrecte dans le stade 3, en obéissant à la connivence. C'est parce que nous n'avons pas su gérer cette révolte que nous sommes obligés de lui obéir.
Comment gérer l'agressivité ?
Il y a plusieurs attitudes possibles :
1. Les attitudes mauvaises
1ère attitude : rentrer dans l'émotion
Je rentre dans cette émotion, j'en prends conscience, et je reste dedans en manifestant par exemple de la violence verbale, mentale ou gestuelle. Alors, si je persiste dans mon émotion, je chute puisque je l'ai projetée sur l'extérieur, dans mon mental. Je l'ai mal gérée et cela se traduit par le fait que je me justifie et que je condamne mon prochain.
2e attitude : l'attitude perfectionniste
C'est l'attitude du pharisien, c'est l'attitude du perfectionniste qui consiste à refouler son émotion : je ne dois pas être agressif, je dois coopérer, je dois prendre sur moi, à la force du poignet, (de peur d'avoir une mauvaise réputation). Alors je me blinde et je refuse de voir ce qui m'habite.
C'est l'impératif catégorique de Kant : « C'est à moi de me maîtriser, c'est à moi de le faire ». Non ! C'est le Christ qui Seul peut le faire. C'est le secret de la vie chrétienne.
Si je maîtrise l'agressivité par ma seule force, je refuse alors de voir ce qui m'habite et je me blinde ; et quand cela explose, ça fait très mal et je meurs !
2. Les bonnes attitudes : Ce sont les attitudes du stade 3.
1 – Je reconnais l'agressivité qui est en moi, juste quelques minutes, pas trop longtemps. Je reconnais que je dis « Non » à mon Père. Cela va me faire de la peine, mais, du coup, je vais pouvoir regarder en face ce « Non » à mon Père et voir ainsi cette racine amère qui sort de l'eau.
2 – Je vais exprimer cette colère à un tiers, à mon confesseur par exemple. Car il faut bien que je me -donne le droit d'exister, de verbaliser mon émotion, d'être en colère.
C'est l'attitude du 2e fils qui dit « Non ».
3 – Je vais déposer mon agressivité au pied de la Croix, dans le Cœur de Jésus, broyé par mes péchés.
Je ne vais pas la maîtriser, mais en l'exprimant, en la confessant, elle va perdre son mordant. Je ne vais pas combattre mon émotion de front, en l'alimentant. Je vais la prendre dans mes mains et la déposer l'offrir au pied de la Croix, dans le Sacré-Cœur de Jésus, broyé par mon Non et tous mes péchés.
C'est le moment où 2e fils accepte de mourir à lui-même par Amour de son Père et de faire la vérité sur lui.
Alors, j'entre dans la joie progressive de voir ce lieu où Dieu se cache, me lave et me guérit. Ce Lieu est Son Cœur Sacré. Je suis heureux de savoir que c'est à cet échelon que Dieu m'attend, avant de pénétrer dans l'union mystique avec Lui. C'est la porte d'entrée dans l'union transformante. Le « Je Suis » du Christ est mon chemin, ma vérité et ma vie. Je vais pouvoir redémarrer avec Jésus. Il ne faut pas forcer, cela se fait progressivement.
Je vais ressentir l'humiliation, goûter à l'humiliation que cela engendre, et je vais laisser Jésus me laver ; et dans ce cri, je vais demander la Lumière du pourquoi ?
4 – Pourquoi, Seigneur ? Pourquoi suis-je comme cela ?
Il ne s'agit pas d'une auto-analyse, ni d'une introspection, mais d'une attitude de prière, d'union, avec le Sacré-Cœur.
À travers mon intelligence spirituelle, le Seigneur va me donner une Grâce illuminante car Dieu seul sait où et comment je suis blessé et ce que je dois comprendre. Moi, je ne m'en souviens plus. Dans l'introspection, je suis seul face à moi et je m'auto-analyse, je m'auto-regarde, cela soulève des nœuds.
Il est des choses que nous n'avons pas le droit de sortir comme le fait la psychanalyse par ce que ce n'est pas le bon moment !
Il faut que cela soit fait sous le mode de la gestion des émotions.
Je dois demander le Don de Science où l'Amour bien ajusté du Père m'attend aujourd'hui. Et tout d'un coup, je comprends qu'il y a eu telle blessure, et je vais m'en rappeler.
5 – Le remède à la colère n'est pas de se mettre en colère, mais de déposer cette colère dans le Cœur de Dieu, de s'agenouiller pour demander à Dieu le pourquoi de cette colère, où est ma connivence, où est mon refus car Dieu veut me montrer cette connivence sinon je n'aurais pas cette émotion de colère dans l'oraison. Dieu va me montrer pourquoi je n'ai pas voulu Lui donner cela quand j'étais plus jeune : cela peut être un avoir à lâcher, une convoitise à lâcher ou une perte qui m'a beaucoup coûté ou un pouvoir de domination sur les autres... c'est-à-dire, tout ce qui touche à l'orgueil et à la convoitise. L'orgueil et la convoitise sont les deux passions mères, à la source de tous nos péchés :
L'orgueil, c'est de donner, en dominant, comme si j'étais la source, alors que c'est Dieu qui est mon Père, ma Source. La convoitise, c'est de prendre pour soi : c'est l'amour captatif.
Je ne peux lâcher prise que si je le fais par Amour, par désir de Lui donner de la joie et de consoler son Cœur. Et si je résous le point correspondant à ma racine, toute la ligne sera guérie jusqu'à ma racine profonde. C'est cela l'intérêt.
6 – Je vais saisir la Grâce cachée sous l'agressivité. Cette Grâce est un plus être. Mais personne ne peut expliquer cela. C'est du domaine de l'expérience. C'est une nouvelle manière d'exister. Nous allons être beaucoup plus sensible, plus vulnérable à l'amour des choses de ce monde, et en même temps plus fort intérieurement car plus sensible à l'Amour de Dieu.
Cela va être aussi une Grâce de Pardon, car il n'y a pas de pardon sans l'offrande de soi, jusqu'à la racine. Je vais entrer dans un don de moi-même plus grand, et ainsi rentrer dans une plus grande dépendance à la Paternité vivante d'Amour de Dieu en moi, corporellement, vitalement, c'est Lui qui va me défendre : « Il est mon repos, ma citadelle, mon rempart »
L'agressivité est le symptôme du désir de celui qui veut se défendre tout seul !
Nous saurons que nous sommes dans la bonne direction si, juste sous la connivence, sous l'agressivité, apparaît une petite angoisse. Elle est le signe que nous avons décidé de lâcher la connivence, donc que nous avons choisi de lâcher une sécurité, de « perdre » quelque chose, et cela nous met dans un état d'angoisse. Tout de suite, il faut se raccrocher à la Présence du Père qui est la Sécurité. Cela veut dire que la connivence est franchie (étape n°4).
3. — L’angoisse et la peur
L'angoisse correspond à la 4e étape du travail de deuil : celle du marchandage. L'angoisse est plus terrible que la peur, car il y a en elle une notion d'éternité.
Un mot traduit bien cette émotion de la peur, de l'angoisse, c'est le danger, c'est une certaine odeur de danger.
Derrière tout danger quel qu'il soit, il y a le danger fondamental, qui vient de notre innocence divine, qui consiste à avoir peur d'être coupé de la Source de Vie.
J'ai peur de perdre l’Amour qui s'origine vitalement dans l'éternité, peur d'être abandonné de la Source divine, peur d'être rejeté pour toujours de la Vie – même si ces émotions sont vécues dans des artères subséquentes : les racines amères. C'est cela l'angoisse. Dans l'enfance, c'est la peur d'être abandonné par ses parents.
Cette peur d'être abandonné est très liée à l'agressivité et à la révolte car je confonds l'être et l’avoir, ce que je possède et ce que je suis.
Mais elle s'origine différemment que dans l'agressivité car j'ai peur d'être coupé de la Source de Vie éternelle Mais ma peur va s'exprimer, concrètement, ultérieurement par la peur de perdre un avoir : ma liberté, ma dignité, mon identité, mon statut social, mes facultés intellectuelles, peur de perdre ma sérénité, peur de perdre mon pouvoir, peur de perdre, avec l'âge, mes facultés intellectuelles. Quand on a peur, on crie !
La peur est le signe d'un dynamisme intérieur d'amour très fort qui s'origine dans mon âme spirituelle, même s'il est mal vécu.
Puisqu'il y a danger, il y a un besoin d'être sécurisé, d'être protégé et consolé, dans le Sein du Père. Cela devient une nécessité, une urgence, d'être écouté, réconforté et rassuré.
Si nous n'éprouvons pas d'angoisse, cela veut dire que nous sommes au stade 0 de la gestion des émotions et que cela va se manifester, non par des bouffées d'angoisses mais par des maladies psychosomatiques, (au niveau du plexus).
Comment gérer nos peurs et nos angoisses ?
Les attitudes mauvaises du stade 0
Fuir l'angoisse vers toutes les compensations égocentriques ou imaginaires.
La drogue est le symptôme d'une angoisse collective ; comme la télévision qui exerce une fascination par l'image et qui est le symptôme d'une angoisse collective, ainsi que certaines musiques.
Fuir dans la zoophilie qui consiste à aimer affectivement une bête (le chien, contre la peur ou le chat, pour la tendresse). Aristote condamne cette inversion de l'amour profond de l'affectivité. C'est un péché.
Nier l'angoisse en la refoulant.
Les bonnes attitudes
Il faut reconnaître cette angoisse : « oui j'ai peur ». Ensuite il faut l'exprimer, car les émotions s'expriment avant de s'expliquer.
Il faut savoir que la modalité particulière de la peur est d'augmenter en la disant, tandis que la colère n'augmente pas en répétant "je suis en colère". Donc, il faut avouer : « j'ai peur », mais il ne faut pas s'y arrêter longtemps car, c'est, de plus, contagieux.
La « Peur-Angoisse » est le sentiment d'un être faible d'une grande fragilité, mais qui l'a oublié. C'est l'équivalent de ce que nous avons vu avec l'agressivité pour la connivence.
C'est l'émotion du cri de l'enfant dans le désert, du cri dans la Prière.
Il faut relire le passage du livre de la Genèse où est raconté l'abandon du fils d'Abraham dans le désert, par sa mère.
« J'ai crié vers le Seigneur et Il m'a délivré de toutes mes angoisses » Psaume
C'est donc une émotion très forte qui porte ma prière, qui porte le cri de ma prière et qui touche le Cœur de Dieu, la Miséricorde de Dieu. Il ne faut pas s'arrêter à la peur en la prolongeant dans une trop grande prise de conscience, mais tout de suite crier.
Après avoir crié, je demande au Seigneur « Pourquoi cette peur ? »
II faut, en général, pour savoir d'où vient cette peur, se faire aider par l’Esprit Saint, par un frère, par une sœur, par une anamnèse... ; car il faut identifier le motif véritable de la peur : j'ai peur de souffrir, j'ai peur de voir mon péché, j'ai peur de voir mes responsabilités, j'ai peur de l'effort, j'ai peur de la mort, etc. Quand j'ai trouvé la raison de ma peur, la bouffée émotive diminue. Mais l'angoisse est beaucoup plus terrible que la peur…
Je peux alors poser un nouveau choix !
C'est toujours un peu du même type de choses dont j'ai peur et que je repère dans les événements analogiques. Alors, le Seigneur m'invite à perdre quelque chose que je ne veux pas lâcher. Vais-je accepter de perdre cela ?
Cette peur engendre parfois un désir de suicide. Le suicide est une agressivité contre soi-même, car on a peur de perdre, peur de perdre davantage, peur de mourir à soi-même, peur que ce soit l'autre qui vive. L'angoisse est liée à cette peur, car notre vocation c'est l'amour : aimer, c'est mourir à soi-même.
Un Père du désert dit : « Tu as la pensée du suicide parce que tu refuses de demeurer dans la déréliction et dans l'enfer, et du coup, tu refuses de laisser jaillir en toi cette force de l'Espérance ».
Au fond, tu n'acceptes pas de lâcher prise (c'est après le lâcher prise qu'apparaît l'angoisse), tu continues à t'accrocher à des fausses sécurités et tu t'en veux à mort ; donc tu cherches à te supprimer.
Le Seigneur dit à Silouane : « Maintiens ton esprit en enfer et ne désespère pas ».
Je ne dois plus chercher à lutter contre cette vague qui me répète « je suis perdu », je dois me laisser aller « oui, je suis perdu ».
Bien des bouffées émotives se rejoignent comme la peur, l'agressivité et l'angoisse.
Quelle est la Grâce cachée dessous ?
Je retrouve mon vrai trésor, je rejoins la Source de Vie, le Père, j'en vis, je suis au-dessus de tout car je ne suis pas « attaché » affectivement. Je vis du don du Saint-Esprit qui y correspond.
4. — La tristesse
La tristesse correspond à la 3e étape du travail de deuil, au lâcher prise.
C'est la Parabole du jeune homme riche de l'Évangile. Le Seigneur l'appelle à être avec Lui, Fils de Dieu ; et il en est très heureux. Mais il avait beaucoup de biens, beaucoup de qualités, beaucoup d'œuvres, beaucoup d'avoirs ; et il s'en alla tout triste car il ne voulait pas quitter ses grandes richesses. Le Seigneur a mis immédiatement le doigt sur ses idoles.
Comment gérer la tristesse ?
1. Les attitudes mauvaises
Justifier cette tristesse et ainsi, la faire proliférer : je vais me plaindre et pleurer pour que les autres m'aiment et me consolent ; c'est une attitude d'immaturité du stade 0.
Refouler la tristesse en disant « je suis heureux » et faire un grand sourire charismatique, un faux sourire.
2. Les bonnes attitudes
Il faut, au minimum (stade 1), accepter cette tristesse et dire « je suis triste ».
Il faut ensuite recueillir cette émotion et la déposer au pied de la Croix de Jésus et me déposer avec elle.
Il faut se tourner vers Dieu et Lui demander « Seigneur, pourquoi suis-je triste ? »
La réponse est immédiate, beaucoup plus rapide que pour la jalousie par exemple, si j'écoute l'Esprit Saint.
Tu es triste parce que tu refuses de lâcher quelque chose de quelque ordre que ce soit. Ce peut être quelque chose de concret, un avoir. Cela peut être un certain idéal du moi, déçu ou un désir de reconnaissance des autres (ils ne comprennent pas ce que je suis) Et le Seigneur m'invite à lâcher cela.
Alors, arrive une nouvelle tristesse qui me révèle que j'ai une idole cachée au fond de mon cœur, une idole que j'adore au lieu d'adorer Dieu. Ce peut être ma propre sainteté ; c'est très subtil. En faisant cela, c'est moi que j'adore. J'aimerais encore être ce que j'ai perdu, cet idéal du moi :
« Là où est ton trésor, là aussi sera ton cœur ».
C'est l'histoire de saint Antoine de Padoue, enterrant un homme, qui découvrit que son cœur humain battait au milieu de ses écus !
Dieu me montre mes idoles ! Jésus va mettre son doigt sur mes idoles ; voilà ce qui est caché sous la passion de tristesse : une idolâtrie va paraître à l'évidence dans les événements quotidiens. Et Jésus m'invite à un choix : celui de décrocher, d'extraire cette idole ; alors je choisis de ne plus m'en occuper, elle est dehors.
La tristesse, comme la peur, est un sentiment touchant à l'imaginaire. Je confonds le beau et le bien. C'est typique du New Age d'essayer de trouver une joie fausse dans une tristesse radicale. Confondre le bien et le beau, c'est toute la mystique moderne. Il faut que je lâche cela, qui est si beau ! Les idoles, c'est toujours beau.
Dans le nouveau choix que je vais poser, je vais pouvoir tourner la page du passé, résolument. Je dis « Amen, Seigneur », je lâche tout, je quitte mon idole, je laisse là les filets, comme saint Pierre ; Abraham aussi a tout quitté pour un pays qu'il ne connaissait pas ! Il faut le faire !
J'ai le droit d'être triste à cause de ce que je quitte. Mais aussi, je m'ouvre au droit de vivre l'avenir, au niveau de l'être et de mon existence réelle. En lâchant cela, je ne m'accroche plus à un instant présent lié à un passé et à un avoir, mais je m'ouvre à un avenir d'éternité et de Vie dans l'instant présent. Je m'ouvre à cette liberté-là.
Cette attitude qui consiste à accepter de perdre sa vie et de mourir, va être posée dans un nouveau choix -qui est un choix d'éternité. Ce choix de s'offrir à l'éternité : (c'est cela l'Oblature) me fera goûter aux Fruits de l'Esprit Saint: une joie jamais expérimentée, une paix de plus en plus envahissante. J'aurai des grâces de compassion, je deviendrai plus attentif à ceux qui m'entourent. Auparavant, j'étais replié sur moi-même, maintenant, je peux comprendre les autres, sans qu'ils parlent, sans leur arracher leur secret, à demi-mot.
La Grâce cachée derrière la tristesse
La Grâce à saisir est celle de la profondeur de notre Vie : c'est donc une Grâce d'Amour, de Lumière et de profondeur. Et le lien entre les trois est l'odeur vivante d'éternité.
Cette Grâce nous permet de saisir ce que Dieu fait à travers toute notre vie. Quand nous avons résolu notre problème de tristesse, avec Jésus, nous comprenons le grand fil rouge qui a guidé toute notre vie. Et nous commençons à comprendre pourquoi nous avons vécu tel événement et ce que nous devons quitter. C'est grâce à cette émotion de tristesse que nous comprenons notre vocation.
Et plus nous allons perdre notre vie, plus nous allons trouver notre vocation et savoir qui nous sommes. Il y a en moi une grande liberté, une liberté dans l'ordre du Don, liée à ma Mémoire ontologique C'est une grâce de lumière d'Amour et de profondeur dans l'Amour : je m'ouvre au choix de l'oblativité, c'est cela l'Oblature.
Dès qu'Adam et Ève ont quitté cette Grâce d'origine, faite de Lumière, d'Amour et de Vie, ils ont connu la tristesse.
La Grâce cachée sous une émotion de tristesse est celle du Fiat de la Vierge Marie, la Grâce du oui : « Seigneur, que Ta Volonté s'accomplisse en moi selon Ton Verbe de Gloire et d'éternité ! »
Je vais comprendre et expérimenter toujours plus profondément ce que la très sainte Vierge Marie a vécu quand Elle a dit « Fiat ». Une nouvelle vie commence où mon oui sera de plus en plus profond.
5 — Le découragement
Le découragement correspond à la 5e étape du travail de deuil, après le marchandage.
C'est dans cette étape que je commence à avoir des tentations-pièges de suicide.
Je crois comprendre que, plus je suis dans la vie chrétienne, plus je suis saint et plus Dieu m'envoie des épreuves, plus je suis dans la souffrance, plus je suis triste : c'est un faux visage de Dieu que je perçois.
Si j'en suis au stade du découragement, cela prouve que j'ai réglé tous mes problèmes antérieurs de jalousie, de dénégation, de colère, de révolte, d'agressivité, et de tristesse ; donc je suis déjà bien avancé. Le découragement est toujours le symptôme que je m'appuie sur mes propres forces et que je ne peux faire confiance à personne. C'est le signe que je suis dans une attitude d'indépendance au lieu d'être dans une dépendance d'Amour avec Dieu : c'est moi qui fais, et moi seul qui peux. Je refuse de voir ma propre faiblesse, ma grande fragilité, ce qui peut m'amener jusqu'au désespoir ; c'est un signe de présomption et non un signe d'orgueil.
C'est aussi mon dernier recours pour arriver à tenir Dieu en échec ! C'est notre dernier péché.
Et puisque je n'y arriverai pas, je vis la mort, c'est le découragement. Mais je n'ouvre pas la porte au Sacré-Cœur qui pourrait faire en moi tout ce que je ne peux pas faire.
Dans le découragement, je masque le « Je ne veux pas T'ouvrir la porte » qui est la parole vraie, la parole libre, par un « je ne peux pas », tout en sachant que Dieu peut tout en moi. Mais, je ne veux pas que ce soit Dieu qui m'aide, qui agisse en moi, je veux que ce soit moi. Le découragement est toujours une déclaration de ma propre toute-puissance, ma vraie parole est « je ne veux pas être aidé », je ne veux pas que la Grâce du Seigneur et la Présence de Son Esprit Saint me portent et fassent le principal en moi.
Je préfère mon découragement ! Je prends toute la place, devant Dieu, car je ne veux pas renoncer à ma toute puissance. Cela remonte très loin dans l'enfance. Ce choix de « ne pas être aidé » me replace dans le découragement.
Comment gérer le découragement ?
Il faut aller jusqu'au nouveau choix qui y correspond et avoir le courage d'aller jusqu'à la kénose. Alors, seulement, je peux faire les six étapes du stade 3. : « Je ne peux pas, mais je veux que Tu m'aides ! »
La Grâce cachée derrière le découragement
Là où je suis très fragile, c'est là où je serais le plus fort : c'est le don de la force : « Je me glorifierai de mes faiblesses » dit saint Paul.
En savourant l'humiliation de ma fragilité, en la formulant en confession, concrètement, je vais saisir la Grâce cachée dessous : c'est une Grâce de Patience, une Grâce de Persévérance, une Grâce de Louange. C'est le Don des Larmes, c'est la Grâce de l'Humilité par excellence, la Grâce de l'Esprit de Pauvreté.
L'exemple typique est celui de Silouane à qui Jésus dit : « Maintiens ton esprit en enfer et ne désespère pas, car J'y suis Tout-Puissant et là seulement ». A partir de cet instant, Silouane a eu une Grâce d'humilité parfaite qu'il demandait depuis tant d'années.
La traversée de l'émotion du découragement est une expérience physique, concrète, sensible, humaine, personnelle et surnaturelle, de la Grâce de la « Mort-Réssurection » du Christ. C'est d'une puissance totale ; et cela vient tuer en nous toutes nos illusions sur nous-mêmes. Cela détruit en nous l'expression « je peux ou je ne peux pas ». Il ne reste plus qu'une Parole : « Je veux que Ta Volonté s'accomplisse en moi ».
Je permets alors à Jésus de pénétrer dans ce qui me détruit pour pouvoir vivre de la Résurrection, dans mon âme et mon corps, unifiés dans ma croix. À ce moment-là, j'aurai mon odeur de Résurrection et de sainteté. Je fais la nouvelle expérience de la confiance et de l'abandon.
« Il m'a tiré de l'horreur du gouffre et de l'abîme. Il a raffermi mes pas ». (Psaume 39)
À ce moment-là, je vis de l'Esprit de Force : « Je Suis la Résurrection ». C'est la Force du Sacré Cœur.
Le combat contre l'émotion du découragement se fait en sautant dans le vide, sachant que, même si je m'écrase, je tomberai dans les bras de Mon Père.
Ce fut le combat de Job. Job est de plus en plus découragé, mais à la fin, il dit :
« Seigneur, même si Tu m'écrasais, je ferais confiance à Ton Amour,
car je sais maintenant que Tu m'as visité »
Ce fut la confiance de sainte Thérèse d'Avila :
« Même si je dois aller en enfer éternellement, même alors, je Te louerai »
(Je le décide dès maintenant)
Ce furent aussi les paroles du Père Emmanuel :
« Une des choses extraordinaires, c'est d'exister. J'existe. Je risque assez de me retrouver en enfer ; mais, même là, je continuerai d'exister, de bénir Dieu. Exister, cela me suffit »
II faut vivre ces paroles avec votre expérience personnelle de découragement !
Au Ciel, c’est Dieu qui détermine ma Béatitude.
En enfer, c'est moi qui détermine mon existence.
Le Ciel, c'est la persévérance éternelle dans l'humilité, la pauvreté. C'est amoureux.
L'enfer, c'est le découragement éternel.
« Nous devons, et c'est le Père Tout-Puissant qui le demande refaire un Monde Nouveau (actuellement, maintenant). (Et ne mettez pas le Père à des kilomètres, Il est là, sous vos émotions, au centre de votre âme, là où Il donne vie à votre corps), mais ce Monde Nouveau ne peut se refaire que spirituellement. C'est donc l'Homme ou être spirituel qui doit resurgir (Résurrection = Victoire sur le découragement). Cet être existe déjà depuis la Création (c'est l'odeur de notre origine), mais il erre (déviance, errance) à la recherche de ce corps humain dont il fait partie (c'est une déviance à cause de l'imaginaire, à cause des passions, nous sommes un peu désincarnés).
»Chaque personne a, devant elle, son corps spirituel et elle a le devoir, pendant sa vie sur terre de rentrer à nouveau dans cette enveloppe (le Corps Spirituel). C'est dans cette enveloppe que se trouvent toutes les qualités intérieures de l'Amour qui vont rendre le pouvoir d'aimer à celui qui la pénètre, qui vont lui permettre de se purifier, de se vivifier, de se fortifier et d'entrer en contact (comme pour l'électricité, cela va faire une onde : c'est comme un rayonnement d'Amour qui se fait) avec le Père Créateur par le Sacré Cœur de Jésus et le divin Cœur de Sa très Sainte Mère :
« Renaître Homme (ou Femme) ou être nouveau : Être spirituel »
« Cette enveloppe, véritable matrice, va nourrir le fœtus jusqu'à sa métamorphose, ou véritable naissance de fils de Dieu, qui reçoit par cet acte, la Vie éternelle »
Chaque fois que nous avons une montée d'émotion, il faut accepter de traverser cette émotion et demander au Seigneur de nous faire connaître la "grâce" qui est cachée dessous. Au moment où nous rejoignons la grâce cachée sous cette émotion, nous rejoignons notre source de vie, là où notre âme spirituelle rejoint notre incarnation concrète, sans illusion, en toute vérité.
Donc chaque fois que nous avons une bouffée émotive, laissons-la monter en nous et tout de suite déposons la au pied de la Croix du Christ en Lui demandant de descendre en nous et en disant : "Cœur Sacré de Jésus !!!" et en lui demandant d'où cela vient « Seigneur, fais-moi voir la grâce cachée sous mon émotion ». C'est alors seulement que nous rejoignons notre source de vie, que nous sommes en contact avec notre être spirituel.
À partir du moment où nous entrons dans cette expérience élémentaire, atomique, cellulaire, de l’être spirituel, nous allons pouvoir pénétrer le Monde Nouveau, dans la Toute Puissance de Dieu ; c'est-à-dire que Dieu, par ses Anges et Archanges exterminateurs, va pouvoir se servir de notre humanité pour désagréger le mal de ce monde.
C'est moi qui fais que mon être va vers la boue ou vers sa spiritualisation. L'être est ce qui fait l'unité entre cette source de vie et mon corps : ou nous choisissons que cette source de vie soit plongée dans la vie spirituelle, grâce au Christ, ou nous vivons au niveau de nos émotions en leur obéissant. À ce moment-là, notre corps est un corps psychique, terrestre, un corps humain, comme dit saint Paul.
Il faut entrer dans la source de vie qui est en nous et qui unifie notre âme et notre corps, qui nous ouvre à la mise en place du corps spirituel et qu'il nous faut retrouver.
Il faut que, physiquement, le Corps ressuscité du Christ brûle notre corps pour devenir un corps spirituel dans le Corps ressuscité du Christ. Il faut savoir qu'au Jour de la Résurrection, c'est notre corps spirituel qui ressuscitera et non notre corps psychique.
Si nous n'avons aucune expérience du corps spirituel, cela prouve que nous avons toujours vécu notre foi au seul niveau de nos pensées, sans jamais être descendu dans notre âme liée à notre corps, sans jamais avoir mené le combat spirituel au niveau de l'Amour.
C'est la dernière étape de préparation à la résurrection. Le chrétien est celui qui prépare son corps pour la Résurrection de la chair. Nous développerons cette Charte à Lourdes
(cf. Session de Lourdes : « Le Monde Nouveau ou Règne du Sacré-Cœur »)