Le Pape annonce ce mystère de la manière suivante :
‘‘Chacun de ces mystères lumineux est une révélation
du Royaume de Dieu désormais présent dans la personne de Jésus
…. Le deuxième mystère, le début des signes à
Cana, est un mystère de Lumière au moment où le Christ
changeant l’eau en vin ouvre le cœur de ses disciples à la
foi, grâce à l’intervention de Marie, la première
des croyantes.’’
Autant les mystères joyeux ont été des mystères
par lesquels la Personne divine de Dieu vivant s’est rendu présente
dans la chair et dans l’humanité, autant ici, vous le voyez, c’est
le Royaume de Dieu, c’est à dire l’ensemble de la Jérusalem
spirituelle, de la Jérusalem glorieuse, du Peuple de Dieu, et avec lui,
au fond, de la création, qui s’intègre dans la Personne
de Jésus.
Pour ceux qui ne le savent pas, nous trouvons le mystère de Cana dans
le chapitre 2 de l’Evangile de saint Jean, versets 1 à 12. Saint
Jean, à sa manière à lui, très habité qu’il
est toujours par l’onction mariale, va dévoiler le mystère
des noces de Cana.
Il y eut d’abord le baptême de Jésus par Jean Baptiste :
premier mystère lumineux.
Puis saint Jean dit dans l’Evangile que le lendemain, Jean désigna
Jésus comme l’Agneau de Dieu ( vous vous rappelez cela : c’était
le jour des expiations, le 11 du mois de Tisri ).
Le lendemain, deux disciples de Jean Baptiste suivent Jésus.
Le lendemain suivant, Jésus appelle Philippe et Nathanaël.
Trois jours après, le sixième jour, c’est Cana. Pour saint
Jean, cela se passe tout de suite après le baptême de Jésus
par Jean Baptiste : le décompte de six jours est symbolique puisque nous
savons qu’il s’est passé bien des semaines entre le baptême
de Jésus et les noces de Cana. Saint Jean répète ‘le
lendemain’ pour donner un rythme, et aussi pour donner une signification
: une révélation se cache là derrière ...
A partir du moment où le Verbe de Dieu a pris chair et s’y enracinant
de plus en plus au cours des cinq mystères joyeux jusqu’à
la mort de son père, et où la mort humaine en son père
s’est intégrée à Lui dans son cœur sacerdotal,
alors, à ce moment-là ( nous l’avons vu dans le premier
mystère lumineux ) le ciel s’est ouvert, la Lumière de Dieu
a pu être manifestée, et désormais c’est cette Lumière
du Verbe de Dieu qui va devenir le réceptacle de toute la création.
Ce n’est plus seulement la création qui va être le réceptacle
de l’Incarnation du Verbe de Dieu.
La crêpe s’est retournée.
Nous avions vu pour le premier mystère lumineux que le passage des mystères
joyeux aux mystères lumineux est très impressionnant : c’est
un renversement de toute l’économie surnaturelle de Dieu dans le
monde. Et à partir de là, tout va commencer.
L’Evangile de Jean montre que le chiffre 6 est très présent
dans les noces de Cana. Vous vous rappelez qu’il a fallu remplir six amphores
( hydrias ), c’est à dire six énormes cuves fabriquées
avec de la pierre, avec lesquelles les Juifs faisaient les rites de purification.
Pourquoi y en avait-il six ? Jésus, après le baptême, avait
appelé Jean et André, puis Pierre, Philippe, Jacques et Nathanaël
: ils étaient six apôtres. Il est dit d’ailleurs dans les
noces de Cana que les disciples de Jésus étaient là. Je
ne dis pas qu’ils étaient six, je dis simplement que saint Jean
fait remarquer l’appel de ces six apôtres-là.
Pourquoi ce chiffre 6 ? C’est une reprise de la création.
C’est le principe même d’une foi vivante que Dieu veut inscrire
dans le monde : une foi va surgir pour permettre une recréation : Dieu
va recréer quelque chose de nouveau. Tout va être recréé.
Ces six jours symbolisent la création.
Le premier jour, Dieu avait dit :
‘‘Que la Lumière soit, et la Lumière fut’’.
La Lumière du Verbe éternel de Dieu a été manifestée
par la voix de Dieu le Père lui-même, dans la nuée du Saint
Esprit, lorsque Jésus s’est enfoncé dans les eaux qui vont
vers le dessous : le ciel s’est déchiré.
Dieu Créateur va pouvoir recréer et Il va commencer à faire
cela à travers les sacrements.
Et les mystères lumineux disent comment Dieu va tout recréer à
partir des sacrements.
Telle se révèle le principe de la recréation : Dieu va
faire un monde nouveau, une création nouvelle.
Retenons qu’il y a trois créations :
- la création originelle : dans le Principe, Dieu créa le ciel
et la terre,
- la création du Royaume de Dieu, la création des sacrements,
la recréation de toutes choses par la grâce, par un nouvel acte
créateur de Dieu qui reprend tout en le recréant dans la vie de
toute puissance créatrice du Verbe incarné rédempteur,
- et puis bien sûr, il va y avoir la création éternelle
: à partir de cette dormition de toutes affinités divines de la
création vis à vis du Verbe, du Père et du Saint Esprit,
il y aura une recréation : ‘‘voici que Je fais un Monde Nouveau’’
…Dieu crée la Jérusalem glorieuse où tout est assumé
dans l’Assomption universelle.
Il y a donc trois créations.
C’est normal, puisqu’il y a Trois Personnes dans la Très
Sainte Trinité : Ils sont Un et Trois, Trois en Un.
Ce chiffre des six jours montre bien cela.
C’est le premier point sur lequel il faut rester un petit peu pour comprendre
ce qu’est un sacrement : un sacrement est quelque chose de très
très grand, et son fruit est immense.
Quel est le premier sacrement qui va être au Principe des Œuvres
de Dieu, le premier signe ? L’Evangile de saint Jean parle du premier
signe :
‘‘Arkén ton séméion ô Iésus’’
le Principe de tous les signes de Jésus
Ce mot Principe, Arkén, est très rare dans la bible :
-vous le trouvez dans le début de la Genèse, ‘‘Bereshit
Bara’’, ‘‘ au commencement, dans le Principe, Dieu créa
le ciel et la terre’’
-vous le trouvez au début du Prologue de l’Evangile de saint Jean
: ‘‘dans le Principe est le Verbe, et le Verbe est Dieu, et le Verbe
est devenu chair’’.
-et ici, nous sommes dans le Principe de tous les signes de Dieu, de tous les
sacrements.
Et le Principe de tous les sacrements se dévoile à travers le
mystère du mariage.
C’est quand même étonnant.
Le fruit du mystère, je crois, c’est le fruit de tout ce qui peut
être repris directement par Dieu et recréé intégralement
à partir du fruit du sacrement de mariage.
Le mystère du mariage a quelque chose d’immense. Saint Paul dit
à propos du mariage comme sacrement et comme signe, que c’est le
plus grand de tous les sacrements : c’est le mystère du Christ
et de l’Eglise.
Nous disons parfois que l’eucharistie est le plus grand de tous les sacrements.
Personne ne dit que l’eucharisie n’est pas un grand sacrement, je
ne dis pas le contraire, je rappelle simplement : saint Paul dit que le mariage
est grand comme signe, comme sacrement. Et que c’est le seul signe sacramentel
qui soit déclaré comme étant grand dans l’Ecriture.
Mais pourquoi ?
Tout a démarré à partir de l’unité sponsale
de l’homme et de la femme. Tout.
Déjà en Dieu, tout est dans l’unité sponsale de la
Première et de la Seconde Personnes de la Très Sainte Trinité.
De manière extrêmement claire, c’est dans cette ferveur sponsale
que le Verbe de Dieu va regarder son incarnation. C’est pour cela que
Lui qui est l’Epousée intime, éternelle et vivante de l’Epoux
qui est le Père, Il veut réaliser dans son incarnation comme un
mariage d’amour avec l’humanité, et c’est pour cela
qu’Il prendra chair masculine. Tous les mystères de Dieu sont inscrits
à l’intérieur de l’Unité de l’Epoux et
de l’Epouse. Jésus à lui tout seul est le mariage incarné,
à la fois éternel et temporel : Il est masculin, époux
dans sa chair assumée, dans sa nature humaine, et Il est féminin
dans sa Personne vivante, et les deux dans une seule unité substantielle,
subsistent dans un seul amour, un seul don. Lui-même est un mariage, l’Incarnation
est un mariage entre l’humanité et la divinité ; entre l’humanité
et cette Divinité vivante ( le Verbe ) qui sort de la Divinité
dans son Principe ( le Père ). La divinité dans le Principe est
le Père. La divinité vivante qui émane de l’intérieur
de la divinité du Principe est l’Epouse, comme Eve émane
d’Adam, sort d’Adam, de la côte c’est à dire
du Principe d’Adam, par le côté de la fécondité
intime et profonde.
Tous les mystères de Dieu sont dans l’ordre sponsal, et donc c’est
une chose absolument magnifique que de méditer ce mystère des
noces de Cana en comprenant que c’est la base, la source de compréhension
de la fécondité ultime de tous les sacrements, c’est de
le vivre à la manière et avec tous les mariages que Dieu a réalisés,
réalise et réalisera en Lui-même et avec Lui-même,
en Lui-même dans l’éternité et dans le monde.
Voilà que Jésus arrive, il est invité avec ses disciples.
Marie était là.
C’est à Cana, à dix kilomètres environ de Nazareth.
Voyons ici toute la différence qu’il y a entre la fleur, Nazareth,
et le fruit, Cana, le vin des noces qui apparaît ici.
Cana veut dire roseau, voilà qui est intéressant :
Vous savez, quand on traverse la mer des roseaux, les eaux se séparent
en deux.
Ici ce ne sont pas les eaux de Jean Baptiste dans lesquelles Jésus est
descendu, ce sont les eaux de la Mer Rouge.
En hébreu, Cana s’écrit : ( Kaf, Noun, Hè ).
Cela veut dire roseau, et aussi mesure. La mesure de canne fait 6 coudées,
333 centimètres. Tout le monde sait ce qu’est 333.
3 est l’Epoux, l’Epouse, et l’unité de l’Epoux
et de l’Epouse.
3 fois, cela veut dire : dans les dimensions de l’homme.
[En théologie, dès que vous avez un nombre avec un seul chiffre,
cela désigne Dieu : 3 est l’amour de Dieu. Si vous avez un nombre
avec trois chiffres, comme 333, cela désigne ou une mission divine dans
l’homme, ou une mission surnaturelle et divine humaine à l’intérieur
de Dieu : 888, par exemple, désigne la mission du Verbe incarné
dans la chair, dans les trois dimensions de l’homme en plénitude
glorieuse : 888 désigne Jésus glorifié.]
Donc 333, vous l’avez compris, c’est l’amour dans toutes les
dimensions de l’homme, dans l’intelligence, dans l’affectivité
– le cœur – et dans le ‘oui’ éternel de
son incarnation créée par Dieu. Cana veut dire cela.
Nous allons voir, une fois n’est pas coutume, ce qu’est le (Kaf
), première lettre de Cana, la onzième lettre de l’alphabet
hébreu. [ 11 : ils sont deux, comme il y a deux « 1 » face
à face].
Cela vient tout de suite après le (Yod), la dixième lettre : si
vous accomplissez tous les commandements, que vous dépassez l’accomplissement
des dix Commandements de Dieu, alors vous vous trouvez dans le 11 : vous vous
trouvez face à face, vous êtes deux face à face dans un
seul 1. Vous voyez, il y a ce 1 qui se dit deux fois.
Le (Kaf ) représente pour les Hébreux l’intersubjectivité,
la pénétration et l’adaptation l’un dans l’autre,
la douceur commune, c’est vraiment le face à face intime, profond,
dans une onction très grande.
Cette onzième lettre a valeur 20, parce qu’effectivement, lorsque
nous sommes dans cette unité profonde, dans cet amour de similitude,
cette adaptation et cette douceur mutuelle, alors à ce moment-là,
dans cette intersubjectivité tout en onction, le Verbe de Dieu [ chiffre
2 ] s’efface [ chiffre 0 ] au-dedans de cet amour mutuel. Cana, c’est
exactement cela.
Le (Kaf ) se fait suivre par le (Noun).
Le (Noun) veut dire : qui se prolonge, qui s’ouvre, indéfiniment.
Le (Hè), c’est le parfum de l’Epousée : dans la bible,
dans le Cantique des Cantiques, le parfum de l’Epousée est toujours
attribué au parfum mystique du Peuple de Dieu qui est l’épousée
de Dieu, l’épousée du Messie.
Vous avez 2, Marie et Jésus, bien-sûr, Jésus et Marie qui
sont dans une unique onction intime et profonde. Du coup, 20, le Verbe de Dieu
s’efface devant cette unité profonde d’adaptation mutuelle
dans l’unité, et cela se prolonge dans le parfum de l’Eglise.
Voilà ce que l’on appelle une traduction littérale d’un
mot révélé en hébreu : une interprétation
littérale rabbinique d’un mot. Cana se traduit comme cela.
Vous savez, tout est écrit dans la bible avec nombre, poids et mesure.
Il n’y a pas un détail qui ne soit pas d’une extrême
importance. Nous pourrions nous demander : pourquoi Jésus a-t-il voulu
que ce soit à Cana ? Parce que Cana veut dire quelque chose, et donc
il y a eu ce déplacement de Nazareth à Cana.
Donc Jésus est là. Le mariage se passe probablement très
bien. Ce devait être un très grand mariage, parce qu’il y
avait un maître du repas. La tradition dit que Lazare était là,
il était donc venu de Jérusalem. A un moment donné, vous
le savez, le vin vient à manquer. Il se passe alors ce que vous savez
aussi, ce que tout le monde sait par cœur : Marie dit à Jésus
:
‘‘ils n’ont plus de vin’’.
Et Jésus a cette réponse extraordinaire – vous remarquerez
bien qu’il y a très très peu de paroles de Jésus
à Marie dans la bible – :
‘‘Ti emoï kaï soï, gunaï’’
‘‘quoi entre toi et moi, femme ?’’
La traduction, comme toujours, donne : ‘‘qu’y a-t-il entre
toi et moi ?’’
Ce n’est pas très Kaf (je suis ravi de cette expression, j’espère
qu’elle va se répandre : ‘ce n’est pas très
Kaf !’).
‘‘Ti emoï…(vous commencez à vous habituer : )…
kaï soï’’
Mais enfin : ‘‘Ti emoï kaï soï’’ ! «
kaï » est un ‘et’ de simultanéité, de proximité,
cela peut se traduire plutot par : ‘‘il n’y a rien entre toi
et moi, tu sais bien qu’il n’y a rien qui nous sépare, il
n’y a aucune différence’’. ‘‘Quoi entre
toi et moi ?’’
J’étais au Niger, c’est une expression qu’ils ont encore,
et au Rwanda aussi. Cette expression veut dire : ‘‘entre nous, il
n’y a pas la moindre distance’’.
Cela ne veut pas dire : ‘‘écoute, tu dégages’’,
comme les traductions en donnent plutôt l’impression. ‘‘Ti
emoï kaï soï’’, je traduirais cela par :
‘‘moi c’est à dire toi, toi c’est à dire
moi, quoi d’autre ?’’
‘‘quoi d’autre ? toi c’est à dire moi, moi c’est
à dire toi’’
‘‘toi et moi, quoi’’
C’est très intéressant, c’est très beau, et
c’est très important pour contempler le mystère de Cana
: à partir du moment où Joseph est mort, à partir du moment
où le ciel s’est déchiré, à partir du moment
où Jésus a commencé à choisir ses disciples, il
les a choisis avec Marie. Tandis qu’elle est là, il le dit :
‘‘tu sais bien, nous sommes d’accord, entre toi et moi il
n’y a aucune différence’’ et il dit « gunaï
» : femme.
C’est la première fois que Jésus dit à Marie : femme.
Il ne le dira que deux fois : là, et au pied de la croix ( en fait trois
fois sans doute, une troisième fois à la Résurrection,
mais cela n’est dit que symboliquement ).
Gunaï, femme : Marie est la Nouvelle Eve, Jésus est le Nouvel Adam
: entre la Nouvelle Eve et le Nouvel Adam tout va être recréé.
Au milieu de ce mariage, il y a la perspective d’un mariage qui est au
Principe de tous les signes de Dieu et qui rejoint le Principe de la Création
de Dieu, et qui rejoint le Principe de l’Incarnation : dans le Principe
était le Verbe, dans le Principe Dieu créa le ciel et la terre.
En février 1980, quand il a expliqué le mystère de la sponsalité,
le Pape – puisque c’est lui qui annonce ce mystère lumineux
– a souligné que : « Ceux qui ont la vocation du mariage
sont appelés avant tout à faire de cette théologie du corps
le contenu de leur vie et de leur comportement ; le Christ leur demande de se
situer sur ce seuil de l’innocence originelle de l’autre »
; il dit donc que tous ceux qui ont vocation à l’amour vrai, tous
ceux qui ont une vocation humaine à l’amour, doivent se situer
sur ce seuil entre le Christ rédempteur et l’innocence originelle
de l’homme et de la femme ( de cet amour originel sans aucune trace du
péché entre l’homme et la femme ), pour réaliser
l’unité sponsale dans la plénitude de la lumière
de Dieu.
Il faut se situer sur ce seuil pour rentrer dans le mystère de Cana :
‘‘Ti emoï kaï soï’’.
Il faut donc, quand nous allons contempler ce mystère, comprendre que
l’Immaculée est en pleine lumière à l’intérieur
de Jésus, et que Jésus est en pleine lumière, en unité
profonde, tout adapté en Elle dans la douceur : son onction, c’est
de s’adapter dans l’unité sponsale originelle en plénitude
de vie divine avec Marie.
Nous pouvons quand même garder l’interprétation : ‘‘oui,
c’est vrai, il y a de toi à moi une grande différence, Je
suis le Dieu vivant, tu n’es qu’une créature’’.
Beaucoup de commentaires ont dit cela, et ils ne sont pas faux : Marie n’est
qu’une créature, et le nouvel Adam, Lui, est le Dieu vivant et
vrai, et incarné. Et c’est vrai qu’il y a une différence.
Cependant, grâce à l’unité de l’homme et de
la femme, il n’y a plus aucune différence entre le Dieu vivant
incarné qui est le Nouvel Adam, et la femme qui est une créature.
A cause de l’unité sponsale, à cause du sacrement, il n’y
a plus de différence, il n’y a plus d’espace, il n’y
a plus de distance.
Il a fallu, bien sûr, attendre la mort de Joseph pour cela, nous sommes
d’accord. [ A chaque mystère du Rosaire, il faut toujours prendre
comme règle d’essayer de repérer où se trouve Joseph.
Cela complète beaucoup. A force de mettre les pierres d’une maison,
elle finit par se construire. Mais si vous ne mettez pas la pierre de Joseph,
vous n’avez pas la base. ]
Joseph est l’époux de l’Immaculée, il est mort de
la mort de Jésus, nous l’avions vu dans le premier mystère
lumineux. Marie est l’épouse de Joseph. Et avec le baptême,
la mort de Joseph, la mort du père de Jésus, est venue s’ouvrir
et s’unir en Jésus à la vie éternelle de Dieu le
Père, du dedans lui.
Vous comprenez bien que Marie n’est pas morte, mais elle vit ce que sa
moitié sponsale a vécu, elle en vit encore. Elle vit de cette
mort physique surnaturelle de Joseph dans son cœur immaculé. Et
Jésus dit :
‘‘mon heure n’est pas encore venue’’.
Elle vit de la blessure du cœur de Jésus à travers la ‘stigmatisation’
du cœur mort de Joseph. C’est extraordinaire, il faut le comprendre.
La transverbération du cœur de Marie par laquelle elle vivra la
mort de Jésus, physiquement, dans son cœur à elle, ce sera
au pied de la croix. Et Jésus lui dit :
‘‘Ti emoï kaï soï, gunaï’’
‘‘quoi entre toi et moi ? mon heure n’est pas encore venue’’
Le fait que Jésus dise ‘mon heure n’est pas encore venue’
montre qu’il y a encore tout un travail qui doit se faire, un travail
de transmission de lumière surnaturelle par l’amour, en le fécondant,
en l’engendrant, en le recréant par les sacrements, avant qu’il
y ait le terme final de l’heure du jour du Seigneur. Il y a le mystère
de l’Eglise entre les deux : le corps mystique de Jésus doit être
engendré, il doit être conçu. Et c’est dans la lumière
qu’il doit être créé : Dieu créa le ciel et
la terre, et Il dit : ‘‘la Lumière, qu’elle soit’’,
et elle fut. Et c’est le mystère lumineux de Cana.
Marie était unie à la blessure du cœur de Jésus, physiquement,
par la médiation de Joseph. Et c’est comme cela qu’il y a
une introduction, une adaptation de Marie comme épouse avec Jésus
comme homme, parce que la blessure du cœur de Joseph, qui est l’époux
de Marie, est la blessure du cœur de Dieu le Fils dans le cœur de
Jésus enfant, qui n’a cessé, au fond, de se communiquer
à son père ‘substantiellement’ ajusté à
son fils.
Alors c’est bien 333 centimètres, vous voyez, la mesure des 6 coudées
qui s’explique.
Il y a bien Jésus, Marie, Joseph, encore une fois.
Cette adaptation mutuelle de Jésus, Marie et Joseph dans la rencontre
nuptiale de Jésus et de Marie, Nouvel Adam et Nouvelle Eve, permet une
chose extraordinaire : elle va permettre à la Toute Puissance de Dieu
de se manifester dans le monde.
Jusqu’à maintenant, tant qu’il n’y avait pas eu cela,
la Toute Puissance de Dieu dans le Christ ne pouvait pas se manifester. Le premier
miracle : le Principe de tous les signes efficaces de Dieu dans son Messie.
Et Jésus avait besoin de cette adaptation, de cette unité sponsale
avec l’Immaculée, avec Marie, à travers son amour pour Joseph
d’ailleurs, dont elle garde mémoire. ‘‘Gardez mémoire
de ceux qui vous ont précédés, les justes’’,
ce que nous lisions dans l’épître : c’est ce qu’elle
faisait, elle en faisait mémoire, corporellement, en son cœur. Jésus
aussi, et c’est comme cela qu’ils étaient adaptés
l’un à l’autre dans la mort de Joseph et dans l’ouverture
du ciel de Dieu le Père.
Et c’est cette adaptation qui a réalisé le retour du Principe
de l’amour de l’homme et de la femme, et la première manifestation,
la recréation de toutes choses à travers le sacrement de mariage.
Nous avons ici la conception du sacrement de mariage, et donc la conception
de l’origine de tous les sacrements. Voilà pourquoi il y a six
jarres. Un Père de l’Eglise – j’avoue que je ne me
rappelle plus qui c’est – dit que les six jarres représentent
les six autres sacrements.
Ce sacrement est grand, et les gens qui sont mariés ne le savent pas,
quel malheur !
Le divorce, il ne faut pas y toucher.
Surtout pas d’adultère !
S’il y a un seul sacrement auquel il ne faut pas toucher, c’est
celui-là. Il est terrible de toucher à celui-là : parce
qu’il est trop grand, il est à la source de toute recréation.
Aussitôt, Marie dit : ‘‘faites tout ce qu’Il vous dira’’.
C’est là que nous allons commencer à contempler le mystère.
Jusqu’à maintenant nous avons vu les pierres d’attente, le
contexte.
‘‘O ti àn legeï umin, poiesatè’’
tout ce que son Logos va manifester, faites-le,
le Verbe va s’exprimer et vous, vous le ferez.
Vous voyez le sacrement ? Le Logos va l’exprimer, et vous, vous le ferez.
C’est Marie qui commande, parce que Marie a entendu ce que Jésus
a dit, comme elle avait entendu l’Ange Gabriel. Elle a très bien
entendu, et donc il va y avoir un nouvel acte de foi de Marie, il va y avoir
une nouvelle obombration de la Paternité de Dieu dans la chair, et il
va y avoir une nouvelle supervenue du Saint Esprit.
Et c’est ici que nous allons contempler le mystère, c’est
entre ces deux paroles :
‘‘qu’y a-t-il entre toi et moi, femme ? mon heure n’est
pas encore venue’’
et
‘‘tout ce qu’Il vous dira, faites-le’’
qui vient immédiatement après, peut-être même pas
deux secondes après.
Entre les deux il y a eu l’acte de foi qui fait le mystère de Cana.
Vous comprenez bien que la transformation de l’eau en vin n’est
qu’un résultat extérieur. Quand Marie a fait l’acte
de foi au jour de l’Incarnation, elle a dit ‘oui’ et du coup
le Verbe s’est fait chair, cela ne s’est vu que plus tard. Là,
c’est pareil, l’eau sera changée en vin.
Pourquoi l’eau s’est-elle changée en vin ? Nous allons voir
cela, petit à petit.
La chose complètement extraordinaire est qu’elle comprend que Jésus
lui dit qu’elle, qui est la créature, est adaptée à
la Divinité incréée, à la Toute Puissance de Dieu,
et donc que Jésus se marie avec elle, ou intègre tout ce qu’il
peut d’elle, pour qu’elle soit Un avec lui dans le mystère
de la création d’un Monde Nouveau. Donc elle comprend que Jésus
l’intégrer elle, Marie, dans la lumière de gloire de sa
vision béatifique pour tout recréer dans sa Toute Puissance.
Je suis sûr que Marie a rougi. Elle ne s’y attendait pas.
C’est pour cela : l’eau est l’Immaculée Conception,
et le vin, c’est pour faire comprendre que Marie a rougi.
Il y a une parole qui dit : ‘‘l’eau a reconnu son Maître
et rougit.’’
C’est joli, ça, pour Cana.
Marie a reconnu que son Maître allait jusqu’au bout de l’unité
avec elle jusque dans sa divine Puissance, Toute Puissance créatrice,
et du coup elle en a été émue, c’est évident.
Pourquoi le Créateur a-t-il voulu que nous, les hommes, dès que
nous sommes surpris et émus, nous rougissions ? Pourquoi ? Dieu fait
tout avec intention, vous savez. Ce n’est pas pour que nous rougissions
de honte. C’est à cause de Marie. Je crois que si nous voyons les
choses dans la paix, c’est à dire en unité totale avec Dieu,
nous voyons là quelque chose d’extraordinaire : un saut extraordinaire
s’est fait. Marie a compris que Jésus lui disait cela, elle a été
émue, et elle a forcément dit quelque part :
‘‘comment cela pourra-t-il se faire, je ne suis qu’une créature,
je ne suis mariée qu’avec l’humanité, au fond ;
mariée avec la divinité, c’est difficile, quand même.’’
Mais elle doit faire l’acte de foi. Et elle a fait l’acte de foi,
elle s’est laissée obombrée par cette parole qui certes,
par la suite, a été considérée comme une parole
sombre par ceux qui interprètent ce passage de l’Ecriture, elle
s’est laissée obombrer par la Paternité de Dieu, dans la
chair, et elle a cru jusqu’au bout, elle a dit ‘oui’, et à
travers ce ‘oui’, une super-venue du Saint Esprit s’est faite
et elle a été intégrée au conseil du Verbe de Dieu
dans la chair du Christ. C’est ce que dit saint Thomas d’Aquin.
Elle a été aussitôt intégrée, et le Verbe
de Dieu a donc ré-assumé son incarnation en assumant la liberté
créée de Marie, pour faire un seul acte de recréation avec
elle. Et donc il y a quelque chose de nouveau dans le mystère de l’Incarnation
et de la Rédemption : cela devient un mystère d’amour humain
autant que d’amour rédempteur.
Nous disons souvent : ‘‘moi, je sais ce que j’ai à
faire, les autres sont moins intelligents que moi.’’
Et cependant un petit piou-piou, notre petit enfant, notre cousin, notre voisin,
nous dit : ‘‘vous savez, je crois que j’ai un conseil à
vous donner, il vaudrait quand même mieux que vous fassiez des choses
de manière un petit peu plus adaptée à nous, parce que
les gens ne sont pas à votre niveau, vous comprenez.’’
Alors nous nous disons : ‘‘c’est moi qui ai raison, je suis
dans la vérité, je sais, laissez moi tranquille !’’
Mais si nous sommes dans le (Kaf), c’est à dire dans l’intersubjectivité,
dans l’amour, alors nous allons intégrer le conseil de cette personne,
pour nous décider en une intelligence pratique : c’est ce que l’on
appelle le don de conseil, un des sept dons du Saint Esprit.
Prendre des décisions qui imprègne de son onction l’huile
dans tous les rouages.
Et pour cela, notre intelligence lumineuse intègre le conseil de quelqu’un
d’autre à sa vision des choses.
C’est ce qui s’est passé à Cana sur le plan des personnes,
corps, âme, esprit.
Le conseil de Marie a été intégré par le Verbe de
Dieu et Lui qui est le Prêtre (les cinq premiers mystères joyeux),
Lui qui est Dieu le Fils (premier mystère lumineux), Il en a fait aussitôt
sa médiatrice. Il l’a intégrée en Son conseil : Il
l’a assumée.
Il a assumé la signification sponsale de l’intelligence incarnée
de Marie pour réaliser le mystère de l’Eglise.
Cana : Kaf, Noun, Hè.
Alors cette intersubjectivité, cette assomption nouvelle qui est le fruit
de l’acte de foi nouveau de Marie, va se prolonger, et faire que, comme
dit le Pape dans ce mystère, la Lumière divine incréée
du Verbe de Dieu va se communiquer à l’Eglise.
Par la foi de Marie, cette Lumière surnaturelle venant du ciel va se
communiquer aux disciples. C’est extraordinaire.
Vraiment extraordinaire de voir comment cela s’est passé de manière
si invisible, parce que les gens, malheureusement, n’ont vu que le vin,
que le vin était meilleur que celui du début, que c’était
un vin nouveau, que l’eau a été changée en vin :
personne n’a vu ce qui s’était passé.
Les mystères du Rosaire montrent à quel point les choses sont
cachées aux sages et aux savants sous forme de paraboles, et les simples
comprennent.
Marie est médiatrice du Vin nouveau : c’est par Marie que le Vin
nouveau va apparaître.
Quand nous vivrons ce mystère-là, il faudra contempler ce que
Marie a vécu. Elle savait qu’elle avait quelque chose à
demander, elle savait qu’elle devait demander à Jésus de
l’accueillir comme don, qu’elle devait s’abandonner à
Jésus, pour, invisiblement – comme Joseph l’avait fait en
s’effaçant –, venir habiter désormais dans une unité
totale avec Jésus, et à tout ce qu’il devait faire, tout
ce qu’ils devaient faire.
Il fallait qu’elle le fasse et c’est pour cela qu’elle Lui
dit : ‘‘et bien voilà, ils n’ont plus de vin’’.
Ce fut sa manière bien à elle de dire la disponibilité
nouvelle de la grâce.
Et en même temps, c’est vrai, c’était une manière
de dire que toute cette grande ascension des trente ans de vie cachée
où Dieu le Père et Dieu le Fils se retrouvaient dans une unité
totale incarnée à travers l’humanité du fils et l’humanité
du papa, tout cela avait disparu,
que l’unité sponsale par laquelle Joseph avait l’initiative
en Dieu le Père dans la Sainte Famille, n’était plus là,
son unité sponsale avec Marie n’était plus là : ils
n’ont plus de vin.
Il n’y avait plus le vin. Vous savez ce que représente le vin :
le vin est l’ivresse nuptiale en Dieu. C’est l’ivresse des
noces : notre intelligence est enivrée et elle se dépasse en elle-même,
parce qu’elle vit de l’amour incarné à l’intérieur
de Dieu. Le vin est vraiment l’unité sponsale vécue à
l’intérieur de Dieu.
Mais le vin n’est plus là, ils n’ont plus de vin. C’est
vrai, Joseph est mort, le ciel s’est déchiré, Dieu le Père
a dit :
‘‘voilà mon Aimé absolu’’, l’Aimé
éternel à l’état absolu d’aimance.
Il y a la sponsalité du Père, l’Epoux, et de Dieu le Fils
qui est Dieu aimé absolument.
Alors Marie, comme elle l’a fait avant l’apparition de l’Ange
Gabriel, s’abandonne en Dieu comme étant la servante, prête
à tout, comme les serviteurs de la noce, prête à tout ce
qu’on lui demanderait.
Après l’intégration de cette disponibilité extraordinaire
d’amour et de service, à ce moment-là, ce sont les serviteurs
qui vont tout faire, c’est l’Eglise qui va tout faire comme elle.
Mais qu’a-t-elle vécu à ce moment-là ?
Dans la réponse de Jésus, – évidemment il faudrait
que dans cette contemplation nous puissions entendre le ton avec lequel Jésus
l’a fait, et l’attraction véhémente qui s’est
opéré en Lui –, elle a été immédiatement
assumée.
‘‘Mon heure n’est pas encore venue’’… pas
encore, dans la seule médiation de son unité sponsale avec Joseph.
Sentir et voir dans quelle direction il faut contempler cela…
Nous sommes vraiment dans la Sainte Famille, tous les lieux sont représentés
: les lieux incréés de la vie éternelle, les lieux de la
mort, et les lieux de l’Eglise, 333, c’est vraiment extraordinaire,
la Sainte Famille est présente dans ses trois dimensions.
Et c’est par ce moyen-là que Jésus l’intègre,
et qu’il va y avoir cette origine, cet Arkèn : ‘‘Arkèn
ton séméion ô Jésus’’, ce Principe, cette
source, ce commencement de tous les signes, de tous les sacrements.
C’est dans un mystère divin de mariage que cela s’est fait.
Marie a été complètement intégrée dans le
Verbe de Dieu. Cette fois-ci, bien sûr, elle n’a pas été
emportée par l’obombration de Dieu le Père et l’opération
du Saint Esprit au-delà de ce monde, puisque là, c’était
dans le cœur de Jésus que se trouvaient Dieu le Père et Dieu
le Fils. Elle a été engloutie par la foi dans la divinité
intime de Dieu le Fils qui va jusqu’à la substance de son unité
avec le Père grâce à la blessure du cœur qu’elle
porte avec lui dans la mort de Joseph, et du coup elle peut y être aspirée
dans son Immaculée Conception. C’est bien l’Immaculée
Conception de Marie et l’Incarnation de Jésus qui vont s’associer
pour la première fois pour la création d’un monde nouveau.
Ne croyez pas qu’elle ne le comprenne pas, elle le comprend, mais seulement
elle doit dire ‘oui’.
Elle doit dire ‘oui’ et se laisser super-venir dans l’Esprit
Saint, dans cette Toute Puissance créatrice du Verbe incarné qui
va recréer le monde entier à partir de l’amour de l’homme
et de la femme.
Quand nous allons contempler ce mystère, il nous faut vraiment vivre
avec Marie, et nous allons nous aussi être intégrés avec
elle et comme elle, et l’Eglise avec nous, parce que cela va se prolonger
(Noun), dans le (Hè), dans le parfum des épousailles du Christ
avec son Eglise.
Nous-mêmes, dans ce mystère, nous allons être intégrés
au conseil du Christ, et le Christ ne fera rien sans nous, sans intégrer
le conseil que nous allons lui faire et lui signaler. Mais en lui signalant,
nous sommes prêts à être entièrement intégrés
comme étant source du fruit des sacrements. Ce mystère à
ce moment-là est vraiment un mystère de lumière, parce
que la foi de Marie qui est lumineuse à l’état absolu, se
communique dans le cœur des croyants. Voilà l’énoncé
du saint Père pour ce mystère.
La deuxième chose qu’il faut contempler dans ce mystère,
c’est le fruit du sacrement, le fruit de ce mariage.
Ils n’ont plus de vin : le vin des noces y était, c’est à
dire l’amour, l’unité sponsale parfaite, toute déployée
sous la motion de la vie divine et de la présence de Dieu, mais vers
la fin : il n’y en a plus.
Le fruit du sacrement de mariage qui est le vin nouveau, le fruit du deuxième
mystère lumineux doit donc surgir. Ce vin nouveau sera bien meilleur
que l’ancien.
Quel est le fruit du sacrement de mariage ?
Alors là, je peux vous interroger, parce que, moi, je ne suis pas marié,
je n’ai jamais reçu le sacrement de mariage. Vous, vous êtes
des spécialistes, parce que vous êtes presque tous mariés
sacramentellement (une fois, puisque nous ne pouvons pas davantage).
Le sacrement de mariage est une présence réelle.
Tous les sacrements ouvrent à la présence réelle de Jésus,
le Verbe recréateur du monde entier, mais à chaque fois d’une
manière différente. Vous voyez bien que le fruit du mystère
de Cana n’est pas le sacrement de mariage. Le fruit du mystère
de Cana est le vin nouveau, nous voulons dire : le sacrement de mariage dans
son fruit, dans sa fin.
Le sacrement de mariage est un robinet, tandis que le fruit, c’est différent
: Nazareth et Cana, ce n’est pas pareil ; la fleur et le fruit, ce n’est
pas pareil.
Le fruit.
Ce qui fait la béatitude de tous les gens qui sont divorcés, c’est
qu’ils ont le sacrement de mariage et ils peuvent en faire jaillir le
fruit continuellement. Les gens divorcés ont une chance formidable, parce
qu’ils peuvent en même temps être ermite, et vivre avec le
fruit du sacrement de mariage. Ils ont plus de chance que moi. Mais il ne faut
pas qu’ils cherchent à aller fricoter avec quelqu’un d’autre,
ce serait terrible. Avec le sacrement de mariage, ils peuvent faire donner un
fruit nouveau : ça, oui !
Mais quel est donc ce fruit du sacrement ?
Je n’aurai peut-être pas le temps d’en parler, je vais faire
très vite, mais je vous signale qu’il y a un petit livret qui s’appelle
« Sponsalité, Jalons » : vous prenez le dernier chapitre
de ce livre, et vous avez cinq ou six pages sur le fruit de l’unité
sponsale surnaturelle sacramentelle.
Alors attention, rappelez-vous bien : le fruit du sacrement de mariage est,
à travers la trans-actuation surnaturelle sponsale du sacrement, l’unité
de toutes les actuations incréées et surnaturelles des sponsalités
sorties du sein de Dieu.
L’expression est évidemment très difficile à retenir,
mais exprimons-le d’une manière différente :
Quand je suis dans le sacrement de mariage, il y a une unité profonde
qui se réalise entre moi et mon conjoint, de substance à substance,
d’innocence originelle à innocence originelle mutuelles : je me
conjoins à son innocence crucifiée triomphante dans l’innocence
divine du Christ (– je ne vais pas me conjoindre à ses défauts,
à ce qui m’énerve, c’est impossible – ) dans
le Principe de son innocence : ‘‘Arkèn ton séméion
ô Jésus’’.
Ceux qui vivent de la vocation d’amour doivent vivre au seuil du Principe
de l’origine de l’homme et de la femme :
Nous avons été créés homme et femme, et quand Dieu
nous a créés dans la première cellule, éternellement,
il nous a crées pour vivre de cette unité sponsale avec un autre
pour réaliser l’humanité intégrale.
Le péché nous en a parfaitement empêchés, mais du
coup, par le sacrement, tout redevient possible mystiquement, surnaturellement,
et même glorieusement.
Donc je vais m’unir à ce ‘oui’ originel de ma moitié
sponsale (si je suis une femme, c’est mon mari, si je suis un homme, c’est
ma femme, mon épouse).
C’est ce qu’a fait Jésus : il a réuni l’Immaculée
Conception, il l’a intégrée dans la Lumière de gloire
du Respectus de son regard d’incarnation, les deux origines se sont conjointes
en Lui ( dans le « Respectus du Verbe vis-à-vis de Son Incarnation
rédemptrice » ) pour recréer le monde nouveau à partir
du sacrement de mariage et par le fait même dans la foi des disciples.
Dans le sacrement de mariage, il y a une unité profonde que l’on
appelle l’unité sponsale entre l’homme et la femme : elle
est profonde parce que je vais rejoindre le ‘oui’ éternel
incarné de ma moitié sponsale, je vais engloutir mon ‘oui’
éternel devant Dieu dans ma moitié sponsale de manière
incarnée, dans toutes les cellules de mon corps et du sien, dans toutes
les profondeurs de son cœur, dans toutes les profondeurs de ses instants
où ce ‘oui’ continue à resplendir, même s’il
est caché, camouflé, éteint et oublié. Par l’unité
sponsale, je le retrouve et nous réalisons un seul ‘oui’
dans l’humanité intégrale de l’unité sponsale
de l’homme et de la femme, en présence de Dieu.
Cela, c’est l’eau.
Il faut que l’eau soit changée en vin parce qu’il va falloir
que tout se réalise dans le Principe de la grâce : il faut que
la grâce surnaturelle vienne prendre tout cela. Et il est sûr qu’il
a fallu qu’il y ait un rétablissement par le Christ, grâce
à Jésus et Marie, de cette grâce du mariage pour qu’elle
puisse être source de re-création universelle.
Ce qu’il faut comprendre, c’est qu’à partir du moment
où je vis de cette unité profonde dont je viens de parler –
parce qu’au fond c’est l’eau, cette très grande profondeur
d’unité où j’ai disparu, lui aussi a disparu dans
un seul ‘oui’ d’une humanité intégrale ni homme
ni femme mais unité sponsale, vraiment en présence de Dieu, et
Dieu illuminant tout – si cela déborde dans le mystère de
l’Incarnation, si cela déborde dans le Christ, si cela déborde
dans une grâce messianique, alors il y a du vin.
Tel était le mariage dans l’Ancien Testament. Mais ils n’ont
plus de vin, puisque le Verbe s’est fait chair.
Alors il faut un sacrement : désormais il faut l’Eglise…
Voilà pourquoi les disciples étaient là. Marie était
là, les apôtres étaient là.
Désormais, le mariage ne pourra plus se faire sans les sacrements de
l’Eglise, dans la grâce messianique, pour le Vin nouveau.
Une fois que je suis là, avec la puissance du sacrement de mariage, du
sacrement du Christ et de l’Eglise, je suis en présence à
ce moment-là, non seulement de cette unité sponsale parfaite en
Dieu, mais avec ce qui en elle est en même temps dépôt, lieu,
coupe [ – Cana est la coupe, on a versé le vin nouveau dans une
coupe pour donner au maître du repas – ], coupe des noces.
Dans la coupe de mon unité sponsale, la présence du Christ intègrant
son Epousée toute entière : l’Eglise, en un seul Corps mystique
éternel.
C’est cette unité-là qui se fait, telle est la présence
réelle du sacrement de mariage.
Et cette réalisation du Corps mystique de Jésus éternellement
glorieux ne peut pas se faire sans que les membres de l’Eglise intègrent
et réalisent dans l’obéissance au sacrement le fruit du
sacrement de mariage.
Le Christ va intégrer la charité sacramentelle de ceux qui vivent
du sacrement de mariage pour réaliser cela.
Autrement dit, il n’y aura pas de recréation de la Jérusalem
spirituelle de tous les temps et de tous les lieux, du Corps mystique de Jésus
en Jérusalem glorieuse, sans le fruit du sacrement de mariage…
si les disciples de Jésus ne vivent pas du sacrement de mariage en plénitude,
en pleine conscience, en pleine lumière.
C’est bien le sacrement de mariage qui a permis le mystère de l’Incarnation
: Marie et Joseph. C’est aussi le sacrement de mariage qui à la
fin des temps permettra le retour du Christ et cette réalisation plénière
de l’unité du Christ et de l’Eglise en plénitude jusque
dans l’éternité glorieuse : cette recréation attendue
et finale de l’Eglise en Jérusalem glorieuse.
Une chose est sûre : quand vous vivez du sacrement de mariage, c’est
très facile. Vous vous mettez à table, vous vous dites, ‘‘tiens,
mon mari a déjà bu tout le vin’’, alors vous lui direz
: ‘‘nous n’avons plus de vin’’. Il faut faire
les choses simplement, vous savez. Il ne faut pas croire que c’est du
mystico-dingo très compliqué. ‘‘Nous n’avons
plus de vin’’. Il va vous dire : ‘‘et bien va en chercher’’.
Et vous allez lui en apporter du meilleur ( c’est ce qu’on fait,
avec le digestif ! ). Mais en même temps vous allez en profiter pour rentrer
profondément en union avec votre mari (ou avec votre femme si vous êtes
un homme), où qu’il soit d’ailleurs, pendant que vous êtes
à la cave pour aller chercher le vin par exemple. Vous rentrez vraiment
en très grande union avec lui. Et dès lors que vous êtes
en sa présence, que vous faites surgir sa présence du dedans de
vous, que vous faites surgir la présence de votre liberté en Dieu
à l’intérieur, et sa liberté en Dieu à l’intérieur
de vous, que ce n’est plus vous ni lui, mais c’est l’unité
des deux qui remonte avec le vin, à ce moment-là vous invitez
Jésus et vous dites :
‘‘Jésus, Seigneur, tu es invité, et toute l’Eglise,
et toute la Jérusalem glorieuse’’.
Cela dure une seconde, même pas. Vous avez le pouvoir d’inviter
et de réaliser immédiatement la présence réelle
de Jésus, de Marie, de tous les apôtres, de tous les disciples,
de tous les membres vivants du corps mystique vivant de Jésus, dans cette
présence mutuelle sponsale avec votre conjoint, parce que vous avez le
sacrement de mariage.
Et du coup, il y a là une coupe nouvelle à l’intérieur
de vous : vous venez de réaliser une communion à la coupe nuptiale
des noces de Cana. Dedans l’intérieur de vous, et du coup à
l’intérieur de votre moitié sponsale sans qu’il s’en
rende compte (– puisque vous êtes unis avec lui par vases communicants
- c’est le cas de le dire- disons mieux : coupes communicantes –
) alors, dans cette coupe l’unité se fait entre toutes les unités
parfaites d’époux et d’épouses depuis le début
de la création du monde jusqu’à la fin du monde, en intégrant
aussi l’unité parfaite de Dieu Epoux (le Père), et de Dieu
Epouse (le Fils), dans la production du Saint Esprit.
Le fruit du sacrement de mariage est d’unifier en une seule présence,
tout ce qu’il y a de plus parfait dans toutes les unités sponsales,
et éternelles et temporelles, du monde de Dieu et du monde des hommes.
Vous faites l’unité, vous avez la présence réelle
de l’unité de tout ce qui est amour entre époux et épouse,
que ce soit complètement incréé en Dieu, que ce soit complètement
incarné dans les hommes qui vivent sans sacrement, et que ce soit complètement
surnaturalisé dans tous ceux qui vivent du sacrement de mariage. Vous
en faites l’unité… sacramentellement.
Voilà pourquoi j’ai dit que dans la trans-actuation surnaturelle
sponsale sacramentelle, vous pouvez faire surgir l’unité de toutes
les sponsalités incréées et créées, en un
seul acte de recréation.
Cela a commencé aux noces de Cana : l’eau est changée en
vin, et Jésus peut commencer. Il est parti d’un nouveau Principe
: la seconde création, à partir des noces de Cana, va pouvoir
commencer.
C’est quand même beau, vous savez, cela. C’est quand même
grand.
Et je suis assez impressionné de voir que le Pape a pris ces mystères
lumineux, car ils sont effectivement une très grande lumière pour
nous. Il va falloir bien sûr que petit à petit nous les contemplions,
nous les incarnions.
Vous allez me dire : ‘‘et alors, les pauvres malheureux qui n’ont
pas le sacrement de mariage ?’’. Ne vous inquiétez pas, ils
ne sont pas à plaindre. Vous me direz : ‘‘un prêtre,
par exemple, n’est pas marié, il n’a pas cette grâce
d’être intégré personnellement dans le fruit de ce
mystère lumineux des noces de Cana’’.
Ce n’est évidemment pas vrai, puisque, vous le savez, chacun d’entre
nous est issu de l’unité sponsale de ses parents en union avec
Dieu, et c’est l’acte créateur de Dieu ( la pro-création
) qui engendre les conditions, si je puis dire, incarnées, de notre ‘oui’
originel dans la création de l’âme spirituelle en notre corps
nouvellement apparu. Nous avons tous dans notre premier ‘oui’ originel,
une certaine présence du vin des noces de Cana, et donc en intégrant
actuellement cette identité de la signification sponsale de notre corps
à l’intérieur de Dieu, en en vivant pleinement, nous pouvons
reprendre non pas le sacrement puisque nous ne l'avons pas, mais le fruit du
sacrement, pour lui donner toute son extension de manière contemplative.
Fruit du sacrement de mariage : unifier tous les amours, ceux de Dieu, ceux
du monde, ceux qui sont avant la création du monde, et ceux qui sont
dans le monde, les unifier en un seul amour et de manière incarnée,
pour constituer un seul feu d’amour de l’Epoux et de l’Epouse
: la Jérusalem glorieuse.
Il est clair que la signification sponsale du corps qui nous échoit,
masculin ou féminin, ne nous est certes pas échue par hasard :
évidemment. Nous en reparlerons…
En tous cas pour les noces de Cana, avec tout ce qui vous est donné :
‘‘faites tout ce qu’Il vous dira’’.
Et ce qu’Il nous dit, c’est qu’il faut vivre de l’amour.
La Lumière n’a pas pu se manifester dans sa Toute Puissance sans
qu’il y ait l’amour originel de l’homme et de la femme resurgissant
à travers eux.
Il faut que nous retrouvions cet amour originel de l’homme et de la femme,
-soit dans notre premier ‘oui’ originel qui en est le fruit immédiat,
et qui en garde l’odeur, la grâce et la puissance,
-soit dans le fruit du sacrement de mariage,
-soit dans notre unité totale avec la Jérusalem glorieuse du ciel
en notre chair, en nous mettant en harmonie par la médiation de la mise
en place du corps spirituel.
- ou, mieux encore dans les trois tous ensemble
Pendant le repas des noces, la tradition voulait que l’on prenne un agneau,
que l’on partage cet agneau, et que tout le monde mange de l’agneau.
Il y avait la coupe, et il y avait l’agneau.
Les deux colombes et l’agneau qui étaient ensemble offerts dans
le quatrième mystère joyeux, la médiation sacerdotale du
Christ selon l’ordre de Melchisédech, vont se retrouver ici à
l’état de manducation.
Il ne faut pas oublier que c’est le premier repas que nous voyons dans
l’Evangile (il y a cinq repas).
L’agneau va être mangé : toute l’Eglise va se nourrir
de ce mystère de l’agneau dans la disparition des deux colombes
: Joseph est mort, Marie a disparu, assumée dans l’agneau, l’agneau
est alors partagé et mangé : le sacrement peut commencer, le vin
nouveau peut être bu.
Alors les disciples crurent en lui.
Cela veut dire que Marie, par sa foi, a été l’origine de
la lumière surnaturelle de la foi de tous les membres vivants du corps
mystique vivant de Jésus vivant, et du coup, Jésus va pouvoir
commencer à épouser son épousée principale, son
épousée immaculée : son corps mystique. Le Verbe, Dieu
vivant dans l’humanité de Jésus, va pouvoir recevoir l’abandon
de tous les membres de l’Eglise, de tous les membres qui ont la foi, de
tous les membres vivants de son corps vivant, intégrer cet abandon, et
réaliser avec eux une seule chair glorieuse dans un seul corps mystique.
Voilà pourquoi le fruit du sacrement de mariage est vraiment l’unité
de la Personne divine de Dieu vivant (le Verbe), avec son humanité (celle
de Jésus crucifié, l’agneau), et tous les membres vivants
du corps mystique vivant de Jésus, dans une seule subsistance, en une
seule Personne.
Et c’est cela la Lumière : la Lumière nous fait aller jusqu’à
l’intégration dans la décision du Verbe de Dieu de s’incarner
à travers nous, de sorte qu’il y ait vraiment des épousailles
entre l’homme, c’est à dire nous, et l’Epouse, c’est
à dire le Verbe de Dieu, en une seule sponsalité.
Et c’est cela que Marie a communiqué dans son nouvel acte de foi
aux noces de Cana.
Cet acte de foi nouveau a permis une nouvelle super-venue du Saint Esprit qui
a fait pénétrer la Lumière surnaturelle de sa foi jusque-là,
d’une manière telle que le Verbe de Dieu a été obligé
d’intégrer l’amour surnaturel lié à la mort
surnaturelle de Joseph, époux de Marie, dans la décision de créer
une nouvelle Sainte Famille.
Cette Sainte Famille, c’est la Jérusalem spirituelle, c’est
son Corps mystique vivant.
Et la Lumière du Verbe va se communiquer aux membres, à tous ceux
qui vont s’abandonner à ce mystère par la foi, en ayant
la même foi, en disant : ‘‘je vais jusqu’au fond du
mystère du Verbe éternel de Dieu pour en être l’instrument,
pour en être son serviteur’’.