CHAPITRE III
Spes, nostra, salve !
O notre espérance, nous vous saluons.
MARIE, NOTRE ESPÉRANCE
I
Marie est l'espérance de tous les hommes
Les hérétiques modernes
sont révoltés de nous entendre saluer et invoquer Marie comme
notre
Espérance. Spes nostra, salve
! Dieu seul, disent-ils, est notre espérance, et il maudit quiconque
met son
espérance dans la créature,
car il est écrit : Malédiction à l'homme qui se confie
en un homme. Comment
donc Marie peut-elle être
notre espérance, puisqu'elle est une simple créature ? Ainsi
disent les hérétiques
; mais, nonobstant leurs clameurs,
la sainte Église veut que, chaque jour, tous les ecclésiastiques
et tous
les religieux élèvent
la voix vers Marie, et qu'au nom de tous les fidèles, ils l'invoquent
et la saluent du
nom si doux de notre Espérance,
Espérance de tous les hommes : Spes nostra, salve ! " ô notre
Espérance, nous vous saluons
! "
Selon saint Thomas, il est deux manières
de placer son espérance en une personne, selon qu'on la
considère comme cause principale,
ou comme cause intermédiaire, Ceux qui attendent du roi quelque
faveur, l'attendent de lui comme
souverain, et de son ministre ou favori comme intercesseur. Si la grâce
est accordée, elle viendra
principalement du roi, mais par l'intercession de son favori ; ainsi, celui
qui la
sollicite, a bien raison d'appeler
l'intercesseur son espérance. Le Roi du ciel, en raison de sa bonté
infinie,
désire extrêmement
nous enrichir de ses grâces ; mais pour cela la confiance est nécessaire
de notre part ;
voulant donc augmenter en nous cette
confiance, il nous a donné pour Mère et pour Avocate sa propre
Mère, et l'a investie de
tout pouvoir pour nous appuyer ; il veut en conséquence que nous
mettions en elle
l'espoir de notre salut et de tous
les biens. Ceux qui placent leur espérance dans les créatures,
et d'une
manière indépendante
de Dieu, comme font les pécheurs, qui ne reculent pas devant l'offense
de Dieu,
pour gagner l'amitié ou la
faveur d'un homme, ceux-là sans aucun doute sont maudits de Dieu,
ainsi que
le déclare le prophète.
Mais ceux qui espère en Marie comme Mère de Dieu, ayant le
pouvoir de leur
obtenir la grâce et la gloire,
sont bénis du Seigneur ; ils font ce qui est agréable à
son coeur, car Dieu se
plaît à voir honorer
cette sublime créature, qui l'a aimé et glorifié en
ce monde plus que tous les hommes
et tous les anges.
C'est donc à juste titre que
nous proclamons la bienheureuse Vierge notre Espérance, puisque,
selon le
cardinal Bellarmin, nous espérons
obtenir par son intercession ce que n'obtiendraient pas nos prières
seules - Nous la prions, dit Suarez,
afin que la dignité d'une telle Médiatrice supplée
à notre bassesse. Or,
ajoute-t-il, prier Marie avec une
telle espérance, ce n'est pas témoigner que nous nous défions
de la
miséricorde divine, mais
que nous tremblons à la pensée de notre indignité.
Ainsi, l'Église a raison d'appeler
Marie, par un mot emprunté à l'Ecclésiastique, la
Mère de la sainte
espérance, c'est-à-dire,
celle qui fait naître en nous, non la vaine espérance des
biens misérables et
passagers de cette vie, mais la
sainte espérance des biens immenses et éternels de la vie
future.
Saint Ephrem, s'adressant à
la divine Mère, s'écrie : " Recevez mes hommages, ô
Marie, ô l'espérance de
mon âme, le slut assuré
des chrétiens, le refuge des pécheurs, le rampart des fidèles
et le salut du monde
entier " ! - Saint Bonaventure nous
avertit qu'après Dieu, nous n'avons pas d'autre espérance
que Marie.
Et saint Ephrem, considérant
l'ordre présent de la Providence, selon lequel Dieu a décrété,
comme
l'affirme saint Bernard, que tous
ceux qui se sauvent, soient redevables de leur salut à l'intercession
de
Marie, saint Ephrem, disons-nous
la prie en ces termes : O grande Reine ! ne cessez point de veiller sur
nous et de nous couvrir du manteau
de votre protection, car après Dieu, vous être notre seul
espoir. Saint
Thomas de Villeneuve proclame également
Marie notre unique refuge, notre unique ressource, notre
unique asile.
Tous ces beaux titres décernés
à la divine Mère, saint Bernard semble vouloir les justifier
quand il écrit : "
Considère, ô homme,
le dessein de Dieu, en vue de nous dispenser ses miséricordes avec
plus
d'abondance : ayant décrété
le rachat du genre humain, il a remis entre les mains de Marie tout le
prix de
la rédemption afin qu'elle
le leur distribue à son gré ".
Quand Dieu commanda à Moïse
de faire le propitiatoire : Tu le feras, dit-il, d'un or très pur
; c'est de là
que je te parlerai et te donnerai
mes ordres. Selon la remarque d'un auteur, Marie est le vrai propitiatoire
d'où le Seigneur parle aux
hommes, et leur accorde le pardon de leurs fautes, ses grâces, et
tous ses
bienfaits : " Vous êtes pour
l'univers entier le propitiatoire d'où le Seigneur nous parle au
coeur, rend des
oracles pleins de douceur et de
clémence, nous distribue ses faveurs, et répand, en un mot,
tous les biens
sur nous ". Avant de s'incarner
dans le sein de Marie, le Verbe divin lui fit demander son consentement
par un archange. Pourquoi cela ?
Il voulait, répond saint Irénée, que de Marie nous
vinssent tous les
biens, notamment l'Incarnation,
qui les renferme tous. Ainsi, conclut le savant Idiot, tout ce que les
hommes ont reçu ou recevront
jamais de biens, de secours, de grâces, c'est pas l'intercession
et par les
mains de Marie que Dieu le leur
a toujours accordé, et le leur accordera toujours.
O Marie, s'écrier avec raison
le pieux Louis de Blois, quel sera l'insensé, le malheureux qui
refusera de
vous aimer, vous, si aimable et
si généreuse envers ceux qui vous aiment ! Vous éclairez
l'esprit de ceux
qui s'adressent à vous dans
leurs doutes et leurs perpléxités ; vous consolez dans leurs
afflictions ceux qui
se confient en vous ; vous secourez
ceux qui vous invoquent dans le péril. Après votre divin
Fils, vous
êtes le salut assuré
de vos serviteurs fidèles. Je vous salue donc, ô espérance
des désespérés et secours
des abandonnés ! O Marie,
vous êtes toute-puissante, puisque votre Fils vous honore au point
d'accomplir
sans nul retard vos désirs.
A son tour, saint Germain voyait
en Marie la source de tous les biens et en attendait la délivrance
de tous
les maux. " O ma Souveraine, lui
disait-il, par la volonté de Dieu, vous êtes ma consolation,
le guide de
mon pèlerinage, la force
de ma faiblesse, la richesse de mon indigence, le remède de mes
blessures, le
soulagement de mes douleurs ; vous
seule pouvez briser mes chaînes, sur vous je fonde l'espoir de mon
salut ; exaucez mes prières,
soyez touchée de mes soupirs, ô vous, ma Maîtresse,
mon refuge, ma vie,
mon secours, ma force et mon espérance
" !
Elle est donc pleine de justesse,
l'application que fait saint Antonin à Marie, de ces mots de la
Sagesse :
Tous les biens me sont venus conjointement
avec elle. Et, en effet, comme l'affirme ce saint, Marie étant
la Mère et la Dispensatrice
de tous les biens, le genre humains, et spécialement quiconque qui
est attaché
au service de cette grande Reine,
peut se féliciter d'avoir obtenu tous les biens par le moyen de
Marie et
de la dévotion envers elle.
De là cette affirmation absolue de l'abbé De Celles : " Qui
trouve Marie, trouve
tous les biens ". Il trouve toutes
les grâces, toutes les evertus, car, par sa puissante intercession,
elle lui
obtient tout ce dont il a besoin,
et l'enrichit de tous les dons célestes. Elle-même nous fait
savoir par la
bouche du Sage, qu'elle tient entre
ses mains toutes les richesses de Dieu, c'est-à-dire, les divines
miséricordes, pour les distribuer
à ceux dont elle est aimée. Nous devons donc, selon l'avertissement
de
saint Bonaventure, tenir sans cesse
les yeux fixés sur les mains de cette tendre Mère, afin de
recevoir par
son moyen les biens que nous souhaitons.
Oh ! combien d'orgueilleux ont trouvé
l'humilité dans la dévotion à Marie ! combien de colères,
la
mansuétude ! combien d'aveugles,
la lumière ! combien de désespéré, la confiance
! combien d'âmes
perdues, le salut ! Mais tout cela,
n'est-il pas renfermé dans quelques mots prophétiques de
Marie
elle-même ? Dans le sublime
cantique qu'elle chanta chez Élisabeth, n'a-t-elle pas dit : Voici
que
désormais toutes les nations
me proclameront bienheureuse ? Ces paroles, saint Bernard les lui redit
en
les complétant : Oui, toutes
les générations vous proclameront bienheureuse, parce qu'à
toutes les
générations vous avez
donné la vie et la gloire ; car en vous les pécheurs trouvent
le pardon, et les justes
la persévérance dans
la grâce de Dieu.
Le pieux Lansperge fait ainsi parler
Notre-Seigneur à l'humanité entière : Pauvres enfants
d'Adam, qui
vivez au milieu de tant d'ennemis
et parmi tant de misères, ayez soin d'honorer avec une affection
particulière celle qui est
ma Mère et la vôtre. Car j'ai donné Marie au monde
comme le modèle dont vous
puissiez apprendre à vivre
saintement, et comme le refuge auquel vous puissiez recourir dans vos
afflictions. Je l'ai formée
moi-même de telle sorte que personne ne puisse la craindre ni avoir
de
répugnance à l'invoquer
; c'est pourquoi je l'ai créée avec un naturel si plein de
bonté et de compassion,
qu'elle ne saurait mépriser
aucun de ceux qui ont recours à elle, ni refuser une faveur qu'on
lui demande ;
elle tient ouvert à tous
le sein de sa miséricorde, et ne permet jamais qu'après s'être
jeté à ses pieds, on se
retire sans être consolé.
- Louée soit donc et bénie à jamais l'immense bonté
de notre Dieu, qui nous a
donné cette Mère,
et cette Avocate si tendre et si aimante.
O Dieu ! quelle tendresse dans les
sentiments de confiance que saint Bonaventure, si embrasé du divin
amour, ressentait à l'égard
de notre très aimant Rédempteur Jésus, et de notre
très aimante Avocate Marie
! Le Seigneur m'eût-il réprouvé,
disait-il, je sais qu'il ne peut se refuser à quiconque l'aime et
le cherche
de coeur. Je le serrerai dans les
bras de mon amour, et, s'il ne me bénit, je ne le laisserai point
aller ; il ne
pourra se retirer, sans m'entraîner
avec lui. Si je ne puis faire autre chose, je me cacherai au moins dans
ses plaies ; tant que je demeurerai
là, il ne pourra me trouver hors de lui. - Enfin, ajoutait-il, si,
en haine
de mes péchés, mon
Rédempteur me chasse loin de lui, j'irai me jeter aux pieds de sa
Mère ; et là
prosterné, je ne partirai
point qu'elle ne m'ait obtenu mon pardon. Car cette Mère de miséricorde
ne sait
et n'a jamais su être insensible
aux misères, ni refuser d'exaucer les misérables qui ont
recours à sa
protection. Ainsi, concluait le
saint, si ce n'est par obligation, au moins par compassion, elle ne manquera
pas d'engager son divin Fils à
me pardonner.
Terminons, en disant avec Euthymius
: Abaissez, ô Mère de miséricorde, abaissez vos regards
miséricordieux sur nous,
qui sommes vos serviteurs, et qui avons mis en vous toute notre espérance.
EXEMPLE
On lit dans le Trésir du Rosaire,
qu'un gentil homme, animé d'une grande dévotion envers la
Mère de
Dieu, s'était fait dans sa
maison un pieux oratoire où il allait souvent prier devant une belle
image de
Marie, non seulement pendant le
jour, mais encore pendant la nuit, interrompant son repos pour honorer
ainsi sa Reine bien-aimée.
Or, son épouse, personne du reste de beaucoup de piété,
observant qu'il se
levait dans le plus profond silence
de la nuit, sortait de la chambre, et ne revenait qu'au bout d'un temps
considérable, conçut
malheureusement de mauvais soupçons. Tourmentée par cette
cruelle épine, elle
hasarda un jour de demander à
son mari s'il aimait une autre femme qu'elle. Il lui répondit en
souriant : "
Sache que j'aime la dame la plus
aimable du monde. Je lui ai donné tout mon coeur, et je mourrais
plutôt
que de cesser de l'aimer. Si tu
la connaissais davantage, tu me dirais toi-même de l'aimer davantage.
"
Il entendait parler de la Sainte
Vierge, qu'il aimait d'un amour si tendre ; mais la pauvre femme, ne faisant
que tomber dans une plus grande
inquiétude, voulut s'assurer de la vérité et l'interrogea
de nouveau, afin
de savoir si c'était pour
aller trouver cette dame qu'il se levait la nuit et sortait de l'appartement.
Le
gentilhomme, qui ne connaissait
pas la violente agitation de son épouse, répondit que oui.
Ainsi persuadée
d'une chose qui n'était pas,
et aveuglée par la passion, que fit alors cette malheureuse ? Une
nuit que son
mari était sorti de sa chambre
à l'ordinaire, de désespoir, elle prit un couteau et se coupa
la gorge ; peu
après, elle expira.
Le mari, ayant accompli sa dévotion,
retourne dans l'appartement, va pour se remettre au lit, et le trouve
tout trempé ; il appelle
sa femme, et elle n rµpond point ; il la secoue de la main, et elle
reste insensible. A
la fin, ayant pris de la lumière,
il voit le lit plein de sang et son épouse étendue morte.
Il comprit alors
qu'elle s'était tuée
dans un accès de jalous, et que fit-il ? Il ferma la chambre à
clef, et revint à la chapelle,
se prosterna devant la sainte Vierge,
et là, pleurant à chaudes larmes, il se mit à dire
: " Ma Mère ! voyez
dans quelle affliction je me trouve
; si vous ne me consolez, à qui dois-je recourir ? Songez que c'est
pour
être venu ici vous honorer,
que j'ai le malheur de voir mon épouse morte et damnée. Ma
Mère ! vous le
pouvez, ah ! réparez ce malheur
". Lorsqu'on invoque avec conviance cette Mère de Miséricorde,
on en
obtient tout ce qu'on veut. A peine
le gentilhomme a-t-il fini sa prière, qu'il entend une servante
lui dire : "
Monsieur, veuillez retourner à
votre chambre ; Madame vous demande ". Mais, dans l'excès de sa
joie, il
n'ose croire cette heureuse nouvelle
: " Allez voir, répond-il, s'il est bien vrai qu'elle me demande.
- Oui,
dit la servante au retour, venez
vite ; Madame vous attend ".
Il va, ouvre la chambre, et voit
son épouse pleine de vie, qui, se jetant à ses pieds, les
arrose de ses
larmes et le prie de lui pardonner,
en disant : " Ah ! mon fidèle époux ! grâce à
vos prières, la Mère de
Dieu m'a délivrée
de l'enfer " ! Alors tous deux, pleurant de joie, se rendirent à
l'oratoire pour remercier la
bienheureuse Vierge. Le lendemain,
le mari invita tous ses parents à un festin, et leur fit raconter
le fait
par sa femme elle-même ; celle-ci
leur montra la marque de sa blessure, qui était encore visible ;
et toute
la famille conçut pour la
divine Mère des sentiments de confiance plus vifs que jamais.
PRIERE
O Mère du saint amour, notre
vie, notre refuge, et notre espérance ! vous savez que Jésus-Christ,
votre
Fils, non content de se faire notre
perpétuel avocat auprès de son Père, veut en outre
que vous
intercédiez auprès
de lui-même pour nous obtenir les divines miséricordes. Il
a décrété que vos prières
nous aideraient à nous sauver,
et il leur a donné tant de force qu'elles sont toujours exaucées.
C'est
donc à vous, ô espérance
des malheureux, c'est à vous que je m'adresse, moi misérable
pécheur ;
j'espère que, par les mérites
de Jésus-Christ et par votre intercession, je ferai mon salut. Telle
est ma
confiance, et elle va si loin que,
si mon salut éternel était entre mes mains, je le remettrais
dans les
vôtres ; car je me fie plus
en votre miséricorde et en votre protection que dans toutes mes
oeuvres. Ma
Mère et mon espérance,
ne m'abandonnez pas, comme je le mériterais ; considérez
ma misère, et
laissez-vous toucher de ma compassion
; secourez-moi et sauvez-moi. Bien des fois, je le confesse, mes
péchés ont fermé
la porte aux lumières et aux secours que vous m'avez obtenu de Dieu
; mais votre
compassion pour les misérables
et votre pouvoir auprès du Seigneur surpassent le nombre et la malice
de mes iniquités. C'est une
chose connue du ciel et de la terre que celui que vous protégez
ne saurait se
perdre. Que je sois donc oublié
de toutes les créatures, mais non de vous, ô Mère du
Tout-Puissant !
Dites à Dieu que je suis
votre serviteur, dites-lui que vous prenez ma défense, et je serai
sauvé. O
Marie, je me confie en vous ; c'est
avec cette confiance que je vie et que je veux et espère mourir,
disant toujours : " Mon unique espérance
est Jésus, et, après Jésus, la vierge Marie ".
II
Marie est l'espérance des pécheurs.
Après avoir créé
la terre, Dieu fit deux grands luminaires, l'un plus grand, pour présider
au jour,
l'autre moindre, pour présider
à la nuit. Selon le cardinal Hughes, le premier de ces deux luminaires,
le
soleil, est la figure de Jésus-Christ,
dont la lumière éclaire les justes qui vivent dans la grâce
de Dieu ; et le
second, la lune, est la figure de
Marie, dont la douce lueur reste aux malheureux plongés dans la
nuit du
péché. Marie étant
donc cet astre propice aux pécheurs, que doit faire le malheureux
qui se trouve
environné des ténèbres
de l'iniquité ? Puisqu'il a perdu la lumière du Soleil de
Justice en perdant la grâce
divine, répond Innocent III,
qu'il tourne ses regards vers l'astre qui brille pour lui ; qu'il invoque
Marie ;
elle l'éclairera sur le malheur
de son état et lui donnera la force d'en sortir sans retard. Au
dire de saint
Méthode, on pourrait à
peine compter les conversions dues au prières de Marie.
Parmi les titres sous lesquels la
sainte Église veut que nous invoquions la Mère de Dieu, le
plus
encourageant pour les pauvres pécheurs,
c'est le titre de Refuge des pécheurs, que nous lui donnons dans
les litanies. Anciennement, il y
avait en Judée plusieurs villes de refuge, où les délinquants
pouvaient se
retirer, afin d'échapper
à la peine qu'ils avaient encourue ; à présent, il
n'y a plus qu'une seule Cité de
refuge, et c'est Marie, à
qui s'applique cette parole prophétique : Bien glorieuse, ô
Cité de Dieu, sont les
choses qui ont été
dites à ton sujet. Mais il est une différence entre elle
et les asiles de la loi ancienne :
ceux-ci n'étaient pas ouverts
à tous les coupables, mais seulement à ceux qui étaient
prévenus de certains
délits ; au contraire, dès
qu'ils se réfugient sous le manteau de Marie, tous les pécheurs,
quelles que soient
leurs fautes, sont à l'abri
du châtiment. " Je suis, nous dit-elle, par la bouche de saint Jean
de Damas, je
suis la cité de refuge, tous
ceux qui viennent à moi sont sauvés ". Il suffit de se réfugier
dans cette Cité ;
quiconque est assez heureux pour
y entrer, y trouve toute sûreté, avant même d'avoir
plaidé sa cause.
Venez, entrons dans la ville forte,
dit Jérémie, et demeurons-y en silence. D'après le
bienheureux Albert
le Grand, cette ville forte est
la sainte Vierge, que la grâce et la gloire environnent comme un
rempart ; et
il ajoute, en citant la Glose :
Puisque nous n'osons demander nous-mêmes au Seigneur le pardon de
nos
péchés, nous pouvons
du moins nous retirer dans cette citadelle et nous y tenir en silence ;
ce sera assez,
Marie se chargera de parler et d'intercéder
pour nous. Un autre pieux auteur exhorte également tous les
pécheurs à s'abriter
sous le manteau de la Reine du ciel : " Réfugiez-vous, Adam et Eve,
et vous aussi,
leurs pauveres enfants, réfugiez-vous
tous dans le sein de cette bonne Mère. Ne savez-vous par qu'elle
est l'unique Cité de refuge,
et l'unique espérance des pécheurs ? " Oui, l'unique espérance
des pécheurs ;
ainsi l'appelle déjà
saint Augustin.
" O Marie, vous êtes l'unique
avocate des pécheurs et de ceux qui sont dénués de
toute ressource ", dit à
son tour saint Ephrem ; puis il
s'écrie : " Salut, ô vous, le refuge des pécheurs et
leur asile ; en vous seule,
ils peuvent trouver sûreté
et protection ". Et, selon un auteur, David désignait déjà
Marie quand il disait :
Dieu m'a mis à couvert dans
le secret de son tabernacle. Quel est, en effet, le tabernacle de Dieu,
sinon
Marie ? ainsi la nomme saint André
de Crète : " Vous êtes, dit-il, le tabernacle que Dieu lui-même
a
dressé, et dans lequel lui
seul est entré, pour accomplir les grands mystères de la
rédemption des hommes
".
L'illustre saint Basile dit à
ce propos qu'en nous donnant Marie, Dieu nous a en quelque sort ouvert
un
hôpital public, où
peuvent être reçus tous les malades pauvres et privés
de tout autre ressource. Or, je le
demande, les hôpitaux étant
fondés spécialement pour les pauvres, quels sont ceux qui
ont le plus de titre
à y être admis ? ne
sont-ce pas les plus indigents et les plus malades ? Celui donc qui se
trouve plongé
dans la misère, c'est-à-dire
dépourvu de tout mérite et chargé de péchés,
qui sont les maladies de l'âme, il
peut, ce semble, dire à Marie
: Auguste Dame ! vous êtes l'asile des pauvres malades ; ne me rejetez
donc
pas, puisque, plus pauvre et plus
malade que tous les autres, j'en aiplus de droit à être accueilli
par vous.
Disons-lui avec saint Thomas de Villeneuve
: O Marie, nous, pauvres pécheurs, nous ne connaissons
point d'autre refuge que vous ;
vous êtes notgre unique espérance dans l'affaire de notre
salut ; vous êtes
après Jésus-Christ
l'unique avocate vers laquelle nous tournons nos regards.
Dans les révélations
de sainte Brigitte, Marie est dite l'astre avant-coureur du soleil, pour
nous donner à
entendre que, quand la dévotion
à la divine Mère fait son apparition dans l'âme d'un
pécheur, c'est un
présage infaillible que bientôt
le Seigneur reviendra à elle avec les richesses de sa grâce.
Le glorieux saint
Bonaventure, pour réveiller
la confiance des pécheurs en la protection de Marie, les représente
d'abord
comme exposés à périr
dans une mer orageuse. Déjà tombés du navire dela
grâce, et ballotés ça et là par
le remords de leur conscience et
la crainte des jugements de Dieu, sans lumière et sans guide, les
infortunés se voient au moment
de perdre le dernier souffle d'espérance qui les fait encore vivre.
C'est
alors que le Seigneur, leur montrant
Marie, si connue sous le nom d'Étoile de la mer, élève
en quelque
sorte la voix pour crier à
ces naufragés : Pauvres pécheurs qui vous croyez perdus,
ne désespérez pas ;
levez les yeux vers cette belle
Étoile, reprenez haleine et courage ; car Marie vous retirera du
milieu de la
tempêtel et vous conduira
au port du salut. - Saint Bernard exprime la même pensée :
Si vous ne voulez
pas être submergé par
la tempête, regarde l'Étoile, appelez Marie à votre
secours.
Et, en effet, selon Louis de Blois,
"Marie est l'unique refuge de ceux qui ont eu le malheur d'offenser
Dieu ; elle est l'asile de tous
ceux qui sont en butte aux tentations et aux coups de l'adversité
; elle est
toute bonté, toute douceur,
non seulement envers les justes, mais encore envers les pécheurs
les plus
désespérés
: aussi, quand elle les voit venir à elle, et qu'elle les entend
implorer de tout coeur son
assistance, elle s'empresse de les
secourir, les accueille, et leur obtient leur pardon de son divin Fils.
Elle
n'en sait mépriser aucun,
si indigne qu'il soit ; elle ne refuse à aucun sa protection ; elle
les console tous ;
et à peine l'a-t-on invoquée,
qu'on en est aussitôt secouru. Bien souvent, par sa douceur, elle
sait attirer à
son culte et réveiller les
pécheurs les plus étrangers à l'amour de Dieu, les
plus profondément ensevelis
dans la léthargie du vice
; par là ils se disposent à recevoir la grâce divine
et à se rendre enfin dignes de la
gloire éternelle. En formant
cette Fille de prédilection, Dieu l'a douée d'un caractère
si compatissant et si
prévenant, que personne ne
peut jamais, par défaut de confiance, hésiter à réclamer
son intercession.
Enfin, conclut le pieux auteur,
il n'est pas possible qu'une âme se perde, qui cultive avec zèle
et humilité
la dévotion à cette
divine Mère."
Elle est comparée au platane
: Je me suis élevée comme le platane. C'est encore un encouragement
pour
les pauvres pécheurs. Le
platane protège contre les ardeurs du soleil les voyageurs qui se
réfugient sous
son feuillage, et quand Marie voit
la colère divine près d'éclater sur la tête
des pécheurs, elle les invite à se
réfugier sous l'ombre de
sa protection. C'était avec raison, remarque saint Bonaventure,
que le prophète
Isaïe se désolait de
son temps, et disait à Dieu : Vous voilà irrité contre
nous, et votre colère est juste,
car nous avons péché
; et il n'est personne qui se lève pour retenir votre bras, personne
qui puisse vous
fléchir en notre faveur.
Il disait vrai, car, en ces temps, Marie n'était pas encore au monde
; et, avant sa
naissance, dit le saint, personne
n'eût osé comme elle retenir le bras vengeur du Très-Haut.
Mais
aujourd'hui, quelque irrité
que soit le Seigneur contre un pécheur, si Marie le prend sous sa
protection,
elle parvient à le sauver
en empêchant son Fils de le punir. Et aucune créature, continue
le même saint, ne
pourrait, aussi bien qu'elle, aller
jusqu'à mettre la main sur le glaive de la divine justice, et suspendre
les
coups dont il menace les coupables.
Richard de Saint-Laurent exprime la même pensée : Avant la
naissance de Marie, dit-il, Dieu
se plaignait que personne ne s'opposât à ses vengeances sur
les pécheurs ;
mais, à présent que
Marie est dans le monde, elle apaise sa colère.
Basile de Séleucie encourage
aussi le pécheur, en lui disant : " Pécheur, ne perds pas
confiance, mais, en
toute circonstance, recours à
Marie et invoque-là ; tu la trouveras toujours prête à
te secourir, car c'est la
volonté de Dieu qu'elle nous
aide dans tous nos besoins ". - Cette Mère de miséricorde
est si désireuse de
sauver les pécheurs les plus
désespérés, qu'elle va elle-même à leur
recherche pour les secourir ; et, s'ils
implore son assistance, elle sait
bien trouver le moyen de les rendre chers à Dieu.
Isaac désirait un jour manger
du gibier ; il appela Ésaü et lui promit de le bénir
quand il lui en aurait
apporté. Mais Rébecca,
qui voulait que cette bénédiction fût l'apanage de
son autre fils Jacob, ordonna à
celui-ci de lui amener deux chevreaux,
qu'elle apprêterait au goût d'Isaac. Selon saint Antonin, Rébecca
fut ici la figure de Marie, et les
chevreaux celle des pécheurs : la Reine du ciel dit aux anges :
Amenez-moi
des pécheurs ; je leur procurerai
le repentir de leurs fautes avec une ferme résolution de ne plus
pécher, et
je saurai, par ce moyen, les rendre
agréable et chers au Seigneur. - L'abbé Francon, développant
la même
pensée, ajoute que Marie
sait si bien apprêter ses chevraux, qu'ils deviennent, pour le goût,
non seulement
comparables, mais parfois même
supérieurs aux cerfs.
Il n'est pas au monde de pécheur,
pour éloigné qu'il soit de Dieu, qui ne puisse se convertir,
et recouvrer
l'amitié divine, s'il veut
seulement recourir à Marie et réclamer son assistance. Elle-même
l'a révélé ainsi à
sainte Brigitte. La même sainte
entendit un jour Jésus-Christ dire à sa Mère, qu'elle
serait disposée à
demander la grâce pour Lucifer
même, si celui-ci pouvait s'humilier jusqu'à se recommander
à elle : "
Vous ne refuserie pas votre compassion
au démon lui-même, s'il vous priait humblement ". Jamais on
ne
verra cet esprit superbe s'abaisser
au point d'implorer la protection de Marie ; mais, si cela pouvait arriver,
la Mère de Dieu serait assez
bonne, assez puissantes seraient ses prières, pour lui obtenir du
Seigneur le
pardon et le salut. Mais ce qui
ne peut avoir lieu pour le démon, se réalise tous les jours
en faveur des
pécheurs qui ont recours
à cette Mère de miséricorde.
L'arche de Noé fut sans doute
une figure de Marie ; car, si l'arche offrit un abri à tous les
animaux de la
terre, le manteau de Marie sert
de refuge à tous les pécheurs, que leurs vices et leurs péchés
sensuels
assimilent aux brutes. Il y a cependant
une différence, observe un auteur : Les animaux entrés dans
l'arche demeurèrent ce qu'ils
étaient : le loup demeura lou, le tigre demeura tigre ; au lieu
que, sous le
manteau de Marie, le loup se transforme
en agneau, et le tigre en colombe. Sainge Gertrude vit un jour la
bienheureuse Vierge qui tenait son
manteau ouvert ; sous ce manteau, la sainte aperçut grand nombre
de
bêtes féroces de différentes
espèces, tels que léopards, lions, ours ;elle remarqua que
Marie, loin de les
chasser, les recevait avec bonté
et les caressait de sa douce main. Gertrude comprit que ces bêtes
féroces
sont les malheureux pécheurs,
que Marie accueille avec amour quand ils ont recours à elle.
Saint Bernard avait donc bien raison
de dire à Marie : Auguste Souveraine, jamais vous ne repoussez un
pécheur, si souillé
et abominable soit-il, s'il se réfugie auprès de vous ; dès
qu'il implore votre secours,
vous ne dédaignez pas d'étendre
votre main miséricordieuse pour le retirer de l'abîme du désespoir.
O
aimable Marie ! béni et remercié
soit à jamais le Seigneur qui vous a faite si douce et si bonne,
même
envers les misérables pécheurs
! Malheureux celui qui ne vous aime pas, malheureu celui qui pouvant
implorer votre pitié, ne
met pas en vous sa confiance ! - Celui-là se perd, qui ne recourt
pas à Marie.
Mais qui, après l'avoir fait,
s'est jamais perdu ?
On lit dans l'Écriture que
Booz permit à Ruth de ramasser les épis tombés des
mains des moissoneurs.
Saint Bonaventure fait là-dessus
cette réflexion : De même que Ruth trouva grâce aux
yeux de Booz, ainsi
Marie a trouvé grâce
aux yeux du Seigneur, qui lui a permis de recueuillir les épis échappés
aux
moissoneurs. Les moissoneurs sont
les ouvriers évangéliques, les missionaires, les prédicateurs,
les
confesseurs, dont les travaux gagnent
chaque jour des âmes à Dieu. Mais il est des âmes rebelles
et
endurcies que, malgré tout
leur zèle, ils se voient forcés d'abandonner ; c'est le privilège
exclusif de Marie
d'empêcher par sa puissante
intercession, que des épis délaissés ne se perdent.
Mais aussi, malheur aux
âmes qui résistent
à la main de cette douce glaneuse ! Assurément, elles resteront
à jamais perdues et
maudites. Bienheureuses, au contraire,
celles qui ont recours à une si bonne Mère ! Il n'y a pas
au
monde, dit le pieux Louis de Blois,
un pécheur tellement désespéré et plongé
dans la fange du vice, que
Marie en ait horreur et le repousse
: ah ! qu'il vienne seulement réclamer l'assistance de cette tendre
Mère
; il verra si elle veut et peut
le réconcilier avec son divin Fils, et lui obtenir son pardon.
Ce n'est donc pas à tort,
ô ma très douce Souveraine, que saint Jean Damascène
vous salue l'Espérance
des désespérés,
que saint Laurent Justinien vous proclame l'Espérance des coupables,
saint Augustin,
l'unique Ressource des pécheurs,
saint Ephrem, le Port assuré des naufragés. Le même
sait pousse la
hardiesse jusqu'à vous appeler
la protectrice des damnés.
C'est avec raison enfin que saint
Bernard exhorte les désespérés eux-mêmes à
ne pas désespérer ; et que,
plein de joie et de tendresse envers
sa Mère chérie, il lui dit amoureusement : Vierge sainte
! qui donc
n'aura pas confiance en vous, si
vous secourez même les désespérés ? Je ne doute
nullement, ajoute-t-il,
qu'à la seule condition de
réclamer votre secours, nous n'obtenions tout ce que nous voudrons
; celui
donc qui n'a plus d'espoir, doit
encore espérer en vous.
Saint Antonin raconte qu'un homme
qui vivait dans la disgrâce de Dieu, eut un jour une vision dans
laquelle il lui sembla se trouver
au tribunal de Jésus-Christ ; le démon présenta le
dossier de ses péchés,
lesquels, mis dans la balance de
la justice divine, l'emportèrent de beaucoup sur toutes ses bonnes
oeuvres. Que fit alors sa puissante
Avocate ? elle étendit sa douce main et l'appuya sur l'autre bassin
de la
balance qu'elle fit pencher en faveur
de son client. Par là, elle lui donnait à entendre qu'elle
lui obtiendrait
son pardon, s'il voulait changer
de vie ; et, en effet, après cette vision, le pécheur se
convertit et vécut en
bon chrétien.
EXEMPLE
Le vénérable Jean Herolt,
qui par humilité prit le nom de Disciple, rapporte le trait qu'on
va lire. Un
homme marié vivait dans le
désordre ; son épouse, femme vertueuse, ne pouvant lui persuader
de
renoncer au péché,
le pria de vouloir au moins, dans cet état misérable, pratiquer
quelque dévotion envers
la Mère de Dieu, ne fût-ce
que de la saluer en récitant un Ave Maria toutes les fois qu'il
passerait devant
une de ses images. Il consentit
à observer cette pratique.
Une nuit que ce malheureux était
sorti dans le dessein de se livrer au péché, il aperçut
de loin une lumière,
s'approcha et vit que c'était
une lampe qui brûlait devant une statue de Marie tenant entre ses
bras Jésus
enfant. Il récite l'Ave Maria
selon sa coutume ; mais ensuite, quel objet s'offre à ses regards
! Le divin
Enfant lui apparaît tout couvert
de plaies fraîchement ouvertes et d'où le sang tombe à
grosses gouttes.
Épouvanté et en même
temps attendri, considérant que c'était lui qui, par ses
péchés, avait ainsi déchiré
les membres de son Rédempteur,
il se mit à pleurer ; mais il remarqua que Jésus lui tournait
le dos. Alors,
tout pénétré
de confusion, il eut recours à la sainte Vierge, et lui parla ainsi
: " Mère de miséricorde, votre
Fils me repousse ; je ne puis trouver
d'avocate plus bienveillante ni plus puissante que vous, qui êtes
sa
Mère ; ô ma Reine,
assistez-moi, priez-le pour moi. " La Mère du Sauver lui répondit
par sa statue : "
Vous autres, pécheurs, vous
m'appelez Mère de miséricorde, mais, en même temps,
vous ne cessez de
faire de moi une mère de
misère, en renouvelant continuellement la passion de mon Fils et
mes propres
douleurs".
Néanmoins, comme Marie ne
sait jamais renvoyer sans consolation celui qui se jette à ses pieds,
elle se
tourna vers son divin Fils et le
pria de pardonner à ce malheureux. Jésus continuait de montrer
de la
répugnance à accorder
ce pardon ; mais la sainte Vierge, déposa son cher Enfant dans la
niche, se
prosterna devant lui, en disant
: " Mon Fils, je ne me relève pas, je reste ici à vos pieds,
si vous ne
pardonnez à ce pécheur.
- Ma Mère, dit alors Jésus, je ne vous puis rien refuser
: vous voulez qu'il lui soit
pardonné ; pour l'amour de
vous, je lui pardonne, faites-le venir baiser mes plaies ". Le pécheur
s'approcha tout en larmes ; et,
à mesure qu'il baisait les plaies du saint Enfant, elles guérissaient
aussitôt.
Enfin, Jésus l'embrassa en
signe de réconciliation. Dès ce moment, cet homme changea
de conduite,
mena une vie édifiante, et
donna des marques d'une ardente dévotion à la bienheureuse
Vierge, qui lui
avait obtenu une fabeur si grande.
PRIÈRE
O Vierge Immaculée, je vénère
votre très saint Coeur, qui fut les délices et le repos d'un
Dieu, ce
Coeur tout plein d'humilité,
de pureté et d'amour divin, Moi, malheureux pécheur, je viens
à vous, le
coeur rempli de fanges et d'ulcères
; ô Mère de miséricorde, ne me dédaignez pas
pour cela, mais n'en
ayez que plus de compassion, et
secourez-moi. Ne cherchez pas en moi, pour venir à mon aide, ni
vertus, ni mérites ; je suis
une âme perdue et qui ne mérite que l'enfer. Considérez
uniquement, je vous
prie, la confiance que j'ai en vous
et la résolution où je suis de me corriger. Considérez
ce que Jésus a
fait et souffert pour moi, et puis
abandonnez-moi si vous le pouvez. Souffrez que je vous remette sous
les yeux toutes les peines de sa
vie, le froid qu'il endur dans l'étable, le voyage qu'il fit en
Égypte, le
sang qu'il répandît,
la pauvreté, les sueurs, les tourments, la mort qu'il souffrit en
votre présence pour
l'amour de moi ; et, pour l'amour
de Jésus, songez à me sauver.
Ah ! ma Mère, je ne veux ni
ne puis craindre que vous me repoussiez, maintenant que j'ai recours à
vous et que j'implore votre assistance.
Si j'avais une telle crainte, je ferais injure à votre miséricorde,
qui va cherchant les malheureux
pour les secourir. Sainte Reine, ne refusez pas votre pitié
à celui à
qui Jésus-Christ n'a pas
refusé son sang. Mais les mérites de ce sang précieux
ne me seront pas
appliqués, si vous ne em
recommandez à Dieu. C'est de vous que j'espère mon
salut ; je ne vous
demande ni richesse, ni honneurs,
ni autres biens terrestres, je vous demande la grâce de Dieu,
l'amour de votre Fils, Jésus,
la grâce d'accomplir sa volonté, et enfin le paradis pour
l'aimer
éternellement. Est-il
possible que vous refusiez de m'exaucer ? Non, vertes ; vous m'exaucez
dès à
présent, j'en ai la confiance
: déjà vous priez pour moi, déjà vous me procurez
les grâces ue je sollicite
: déjà vous me prenez
sous votre protection. Ma Mère, ne m'abandonnez point ; continuez,
oui,
continuez de prier pour moi, jusqu'à
ce que vous me voyiez sauvé, reçu dans le ciel, et prosterné
à vos
pieds pour vous bénir et
vous remercier pendant toute l'éternité. Amen.
suite
des Gloires
de Marie de Saint Alphonse-Marie de Liguori