27. Présentation de Marie. Préparatifs dans la maison de sainte Anne.

Le 28 octobre 1821, Anne-Catherine Emmerich raconta ce qui suit, étant dans l'état de veille : La petite Marie sera bientôt conduite au temple de Jérusalem. J'ai vu, il y a déjà quelques jours, Anne dans une chambre de la maison de Nazareth, ayant devant elle Marie, âgée alors de trois ans, et lui apprenant à prier, parce que les prêtres devaient venir bientôt pour examiner l'enfant à l'occasion de son admission dans le temple. Aujourd'hui, il y avait fête dans la maison de sainte Anne : c'était comme une préparation.


Selon la loi de Dieu (Lévit., XII), une femme israélite était impure pendant quatre-vingts jours après à naissance d'une fille, en sorte qu'elle ne pouvait toucher aucun objet consacré m paraître dans le temple, et pendant ce temps elle ne devait pu quitter sa maison jusqu'à ce qu'elle eût offert dans le temple un sacrifice pour sa purification. Une femme dans l'aisance offrait un agneau d'un an pour l'holocauste, et un petit pigeon ou un petit tourtereau pour le sacrifice pour le péché. Une mère pauvre n'avait besoin d'offrir que deux jeunes colombes ou deux tourterelles :, l'un pour l'holocauste, l'autre pour le sacrifice pour le péché.


La présentation de Marie et son séjour dans le temple sont attestés de plusieurs façons par l'autorité de l'Église. La commémoration de la Présentation de Marie est fixée au 21 novembre dans tous 1es missels c : les bréviaires. Dès les temps apostoliques, nous avons un garant de cette tradition dans la personne de l'évêque Evodius, cité par Nicéphore, Histoire ecclésiastique, Liv. II, C. 3. Saint Grégoire de Nysse, saint Épiphane, saint George de Nicomédie, saint Grégoire de Thessalonique, saint Jean Damascène et d'autres saints Pères rendent le même témoignage. L'Église grecque célèbre cette fête depuis onze siècles au moins. Même dans le Coran, .Sura Imram, v 3l, le séjour de Marie au temple est raconté avec détail.


Il se trouvait là des étrangers, des parents, des hommes, des femmes, même des enfants. Il y avait aussi trois prêtres présents, un de Séphoris, l'autre de Nazareth, le troisième d'un endroit situé sur une montagne, à quatre lieues environ de Nazareth. Le nom de cet endroit commence par la syllabe Ma... Ces prêtres étaient venus pour examiner si la petite Marie était en état de venir au temple, et en outre pour la faire habiller suivant un certain modèle déterminé. Il y avait trois habillements de différentes couleurs, dont chacun se composait d'une robe, d'une pièce d'étoffe pour Couvrir la poitrine et d'un manteau. A ce costume appartenaient aussi deux guirlandes en soie et en laine, et une couronne fermée par en haut. L'un des prêtres coupa lui-même quelques parties de cet habillement, et arrangea tout conformément à la règle.


Quelques jours plus tard, le 2 novembre, elle continua en ces termes : J'ai vu aujourd'hui une grande fête dans la maison des parents de Marie. Je ne sais pourtant pas si cela a eu lieu à pareil jour, ou si c'est la répétition d'un tableau qui m'a déjà été montré ; car j'ai vu des choses du même genre pendant les trois derniers jours, mais elles m'ont échappé au milieu de mes souffrances. Les trois prêtres étaient encore présents, ainsi que plusieurs parents et leurs petites filles, par exemple Marie Héli et son enfant, Marie de Cléophas, qui est beaucoup plus massive et plus forte que la sainte Vierge. Marie est très délicate ; elle a des cheveux d'un blond doré, légèrement bouclés à leur extrémité. Elle sait déjà lire, et tout le monde admire la sagesse de ses réponses.


Les habits de Marie, déjà taillés en partie par les prêtres, avaient été cousus par les femmes. On les mit à l'enfant à différentes reprises pendant cette fête, et on lui adressa alors plusieurs questions. Toute la cérémonie était grave et solennelle, et quoique les vieux prêtres l'accomplissent avec un sourire naïf, ils reprenaient leur sérieux par suite de l'admiration que faisaient naître les sages réponses de Marie, et à la vue des larmes de joie de ses parents.


La cérémonie eut lieu dans une chambre carrée, près de la pièce où l'on mangeait. La lumière entrait par une ouverture pratiquée dans le toit, laquelle était recouverte d'un voile transparent. On avait étendu par terre un tapis de couleur rouge ; il y avait une table d'autel au-dessus de laquelle une espèce de rideau cachait une petite niche où se trouvaient des rouleaux écrits contenant des prières. Devant cet autel, sur lequel étaient déposés les trois habillements de Marie, ainsi que plusieurs pièces d'étoffe que les parents avaient apportées pour le trousseau de l'enfant, se trouvait une espèce de petit trône élevé sur des gradins. Joachim, Anne et les autres membres de la famille étaient rassemblés. Les femmes se trouvaient derrière, et les petites filles à côté de Marie. Les prêtres entrèrent les pieds déchaussés. Il y avait cinq prêtres, mais trois seulement étaient en vêtements sacerdotaux et prenaient part à la cérémonie. L'un d'eux prit sur l'autel les différentes pièces de l'habillement, expliqua leur signification, et les présenta à la soeur d'Anne, Maraha de Séphoris, qui en revêtit l'enfant.


Marie se tenant debout ainsi habillée, les prêtres lui adressèrent différentes questions qui avaient rapport à la manière de vivre des vierges du temple. Ils lui dirent, entre autres choses : " Tes parents, en te consacrant au, temple, ont fait le voeu que tu ne boirais ni vin ni vinaigre, et que tu ne mangerais ni raisins ni figues ; que veux-tu ajouter toi-même à ce voeu, tu peux y réfléchir pendant le repas ". Les Juifs, et spécialement les jeunes filles juives, aimaient à boire du vinaigre' et Marie elle même y prenait plaisir. Après plusieurs demandes du même genre, on lui retira le premier habit et on lui mit le second : après quoi, tout le monde se rendit dans la chambre voisine pour le repas. Marie était placée à table entre deux des prêtres ; un troisième était en face d'elle.


Dans le livre des Nombres, VI, 3, il est dit que ceux qui ceux qui sont consacrés à Dieu doivent s'abstenir de vinaigre.


Les femmes et les jeunes filles étaient à un bout de la table séparées des hommes. Pendant le repas, l'enfant fut encore interrogée et répondit. On lui dit : " Maintenant, tu peux manger de tout ", et on lui offrit plusieurs choses pour l'éprouver. Mais Marie ne mangea que de peu de plats et en petite quantité, et elle étonna tout le monde par la sagesse enfantine de ses réponses. Pendant le repas et pendant toute l'épreuve. Je vis à ses côtés des anges qui l'assistaient et la dirigeaient dans tout ce qu'elle faisait.


Après le repas, tout le monde se rendit dans la première chambre, devant l'autel, où on déshabilla encore l'enfant et où on lui mit l'habit de cérémonie. C'était une robe d'un bleu violet à fleurs jaunes, puis un scapulaire ou une espèce de fichu brodé de diverses couleurs, et enfin un manteau de la couleur de la robe. Le manteau était ouvert jusque sous la poitrine et tombait en plis majestueux qui commençaient à la hauteur des bras. On lui mit en outre un grand voile, blanc d'un côté et violet de l'autre. La couronne qu'on lui plaça sur la tête se composait d'un cercle large et mince, dont le bord supérieur était découpé en pointes surmontées de boutons. Cette couronne était fermée par en haut et surmontée d'un bouton. Revêtue de cet habit de cérémonie dont le prêtre lui avait expliqué la signification, Marie fut conduite sur l'extrade à degrés qui était devant l'autel. Les petites filles se tenaient à ses côtés. Elle déclara alors à quoi elle s'engageait à renoncer en entrant dans le temple. Elle promettait de ne manger ni viande ni poisson et de ne pas boire de lait, mais seulement une boisson faite d'eau et de moelle de jonc, dont les gens pauvres faisaient usage. Elle se réservait seulement de mettre quelquefois dans son eau un peu de jus de térébinthe. C'est comme une huile blanche qui réconforte beaucoup, mais qui est moins agréable que le baume. Elle renonçait à toute espèce d'épices, et ne voulait pas manger de fruits, excepté une espèce de baies jaunes qui viennent en grappes. Je les connais bien ; les enfants et les pauvres gens en mangent. Elle voulait dormir sur la terre nue et se relever trois fois la nuit pour prier. Les autres vierges ne le faisaient qu'une fois toutes les nuits.


Les parents de Marie furent profondément émus de ses paroles. Joachim serra l'enfant dans ses bras en pleurant, et dit : " Mon enfant, c'est trop sévère : si tu mènes une vie si dure, ton vieux père ne te reverra pas ". Tout cela était très touchant à entendre. Les prêtres lui dirent qu'elle ne devait se relever qu'une fois la nuit pour prier, comme faisaient les autres, et ils lui imposèrent encore d'autres adoucissements : par exemple, l'usage du poisson aux jours de grandes fêtes. Il y avait à Jérusalem un grand marché au poisson dans une partie basse de la ville. Il recevait de l'eau de la piscine de Bethesda. Comme elle manqua une fois, Hérode le Grand voulut y établir une fontaine ou un aqueduc, et vendre pour cela des vêtements et des vases sacrés du temple. Il y eut presque une émeute à cette occasion Des Esséniens vinrent à Jérusalem de toutes les parties du pays et s'y opposèrent : car les Esséniens étaient chargés de l'inspection des vêtements sacerdotaux ; cela me revint alors subitement à la mémoire.-Les prêtres dirent encore à Marie : " Plusieurs des autres vierges qui sont reçues gratuitement au temple s'engagent, avec le consentement de leurs parents, aussitôt que leurs forces le leur permettent, à laver les habits des prêtres tout souillés du sang des victimes' et d'autres grossières étoffes de laine. C'est un rude travail, qui met souvent les mains en sang ; tu n'es pas obligée de t'y soumettre, parce que tes parents se chargent de ton entretien au temple ". Marie déclara alors qu'elle se chargerait volontiers de ce Travail si on l'en jugeait digne. La cérémonie de la vêture s'acheva parmi beaucoup d'interrogations et de réponses de ce genre.


Pendant cette sainte cérémonie, Marie m'apparut tellement grande, que sa taille dépassait celle des prêtres. On me donnait par là une image de sa sagesse et de la grâce qui était en elle. Les prêtres étaient pleins d'un étonnement joyeux. A la fin de la cérémonie, je vis le principal prêtre bénir Marie. Elle était debout sur un petit trône entre deux prêtres. Celui qui bénissait était en face d'elle, l'autre derrière elle. Les prêtres récitaient des prières qu'ils lisaient sur les rouleaux de parchemin et se répandaient alternativement. Le premier la bénit en étendant les mains sur elle. J'eus, à cette occasion, le bonheur de voir l'intérieur de la sainte enfant. Je la vis toute lumineuse pendant la bénédiction du prêtre, et, sous son coeur, je vis dans une gloire ce que j'avais vu en contemplant l'objet sacré contenu dans l'Arche d'alliance. Dans une sphère lumineuse de la même forme que le calice de Melchisédech, je vis des symboles figuratifs de la bénédiction. C'était comme du froment et du vin, de la chair et du sang, tendant à devenir une seule et même chose. Je vis aussi au-dessus de cette apparition son coeur s'ouvrir comme la porte d'un temple, et j'y vis entrer le symbole mystérieux, autour duquel il s'était formé comme un dais de pierres précieuses ayant toutes leur signification. Il me semblait voir l'Arche d'alliance entrant dans le Saint des saints du temple. Puis je ne vis plus que la sainte enfant inondée par la splendeur du feu qui brûlait au dedans d'elle. Elle m'apparut comme transfigurée et s'élevant au-dessus du sol. Je connus pendant cette apparition qu'un des prêtres ' avait acquis par une illumination d'en haut la conviction intérieure que Marie était le vase d'élection renfermant le mystère du salut ; car je le vis recevoir un rayon de la bénédiction qui sembla entrer en lui.


Les prêtres reconduisirent alors l'enfant vers ses parents émus. Anne prit Marie dans ses bras et l'embrassa avec une tendresse mêlée de vénération. Joachim, profondément ému, lui prit la main avec gravité et respect. La soeur aînée de Marie l'embrassa avec plus de vivacité qu'Anne, qui était modeste et réservée dans toutes ses actions. Marie de Cléophas, la petite nièce de la sainte enfant, lui jeta les bras au cou avec une joie enfantine.


Elle croyait, lorsqu'elle raconta la chose en 1820, que ce prêtre était Zacharie.


Quand tous les assistants l'eurent complimentée, on lui ôta ses habits de fête, et elle reparut dans son costume ordinaire

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