35 Fiançailles de la Sainte Vierge.

La sainte Vierge vivait dans le temple avec plusieurs autres vierges sous la surveillance de pieuses matrones. Ces vierges s'occupaient de broderies et d'ouvrages du même genre pour les tentures du temple et les vêtements sacerdotaux ; elles étaient aussi chargées de nettoyer ces vêtements et d'autres objets servant au culte divin. Elles avaient de petites cellules d'où elles avaient vue sur l'intérieur du temple et où elles priaient et méditaient Quand elles étaient arrivées à l'âge nubile, on les mariait. Leurs parents les avaient entièrement données à Dieu en les conduisant au temple, et il y avait chez les plus pieux d'entre les Israélites un pressentiment secret qu'un de ces mariages produirait un jour l'avènement du Messie'.


La sainte Vierge ayant quatorze ans et devant bientôt sortir du temple pour se marier, avec sept autres jeunes filles, je vis sainte Anne venir la visiter. Joachim ne vivait plus. Quand on annonça à Marie qu'elle devait quitter le temple et se marier, je la vis, profondément émue, déclarer au prêtre qu'elle ne désirait pas quitter le temple, qu'elle s'était consacrée à Dieu seul et n'avait pas de goût pour le mariage ; mais on lui répondit qu'elle devait prendre un époux'.


Quoique en général la littérature juive postérieure ne parle pas de femmes ou de jeunes filles employées au service du temple, nous trouvons pourtant, soit dans l'autorité de l'Eglise qui célèbre la fête de la Présentation de Marie (le 21 novembre), soit dans la Bible et dans d'anciens documents, des motifs suffisants pour nous donner l'assurance qu'il y en avait réellement. Déjà du temps de Moise (Exod. XXXVIII, 8) et à la dernière époque des Juges (I. Reg' , 22) nous trouvons des femmes ou de' jeunes filles employées au service du culte divin. Le psaume LXVIII en décrivant l'entrée de l'Arche dans Sion nous montre dans le cort45e des jeunes filles frappant sur des timbales. Il y avait des vierges vouées au temple et élevées dans son enceinte, a ce que dit déjà un disciple des apôtres, Evodius, successeur de saint Pierre à Antioche, dans une lettre citée, il est vrai, pour la première fois, par Nicéphore, lli. Il, c. Ill, et où il est parlé de la sainte Vierge. Saint Grégoire de Nysse, saint Jean Damascène et d'autres écrivains en parlent aussi. Le rabbin Azarias, dans son ouvrage intitulé Imreh Binah, C LX, mentionne des femmes employées au service du temple qui restaient vierges et vivaient en communauté. On peut donc citer une autorité juive pour l'existence de ces vierges du temple.


Dans l'ancienne alliance l'état de virginité n'était pas considéré comme méritoire, au moins en général. Parmi les nombreuses espèces de voeux qu'énumère la Michnah comme étant usités chez les Juifs, on ne trouve pas trace du voeu de chasteté. Tant qu'on était encore dans l'attente de la venue du Rédempteur, le mariage avec une nombreuse postérité passait pour l'état le plus heureux et le plus agréable à Dieu sur la terre. "Ceux que Dieu aime, dit le psaume CXXVI, reçoivent du Seigneur des enfants en héritage : le fruit des entrailles est leur récompense. "Et longtemps avant Dieu avait déjà fait cette promesse :


"Tu seras béni entre tous les peuples : il n'y aura point de stérilité chez toi dans l'un l'autre sexe. "(Deut. VII, 14.) Cela explique pourquoi les prêtres n'accédèrent pas au désir de Marie, quoiqu'il y eut des exemples de personnes vivant dans l'état de virginité, spécialement chez les Esséniens.


Je la vis ensuite dans son oratoire prier Dieu avec ferveur. Je me souviens aussi qu'étant très altérée, elle descendit avec sa petite cruche pour puiser de l'eau à une fontaine ou à un réservoir, et que là, sans apparition visible, elle entendit une voix qui la consola et la fortifia, tout en lui faisant connaître qu'elle devait consentir à se marier. Ce ne fut pas là l'Annonciation, car je la vis plus tard à Nazareth. Je crus pourtant pendant un certain temps avoir vu cette fois aussi apparaître un ange ; car, dans ma jeunesse, je confondais souvent cet incident avec l'Annonciation, et je croyais que celle-ci avait eu lieu dans le temple.


Il est remarquable que dans le Protevangelium Jacobi, déclare apocryphe par l'Eglise, on lit entre autres choses que Marie alla il Nazareth en compagnie d'autres vierges. On leur avait donné au temple des fils d'espèce différente qu'elles devaient filer : la pourpre et l'écarlate étaient échus par le sort à Marie, "et, dit l'Évangile apocryphe, quand elle prit sa cruche et sortit pour aller puiser de l'eau, voilà qu'une voix lui dit : "Je vous salue, Marie, etc. "Marie regarda à droite et à gauche pour savoir d'où venait cette voix ; elle rentra effrayée dans la maison, posa la cru' ne, prit la pourpre et s'assit pour travailler. Et l'ange du Seigneur se tint debout en sa présence et lui dit : "Ne craignez rien, Marie, etc. "Ici aussi il est question d'une voix qu'elle entend en allant puiser de l'eau, mais tout cela se passe à Nazareth et se lie à l'Annonciation. Cet événement est raconté de la même manière dans un manuscrit latin de la Bibliothèque de Paris, publié par Thilo, et contenant un récit apocryphe intitulé : Histoire de Joachim et d'Anne, de la naissance de la bienheureuse Mère de Dieu, Marie, toujours vierge, et de l'enfance du Rédempteur. Seulement il y a ici un intervalle de trois jours entre la vois entendue à la fontaine et l'apparition de l'ange dans la Salutation angélique.


Je vis aussi un prêtre très vieux, qui ne pouvait plus marcher ; ce devait être le grand prêtre. Il fut porté par d'autres prêtres dans le Saint des saints, et pendant qu'il allumait un sacrifice d'encens, il lisait des prières sur un rouleau de parchemin placé sur une espèce de pupitre. Je le vis ravi en esprit. Il eut une apparition, et son doigt fut placé sur le passage suivant du prophète Isaie, qui se trouvait écrit sur le rouleau : " une branche sortira de la racine de Jessé, et une fleur naîtra de sa racine ". (Isaïe, IX, l.) Quand le vieux prêtre revint à lui, il lut ce passage et connut quelque chose par là.


Je vis ensuite qu'on envoyait des messagers de tous les cotés dans le pays, et qu'on convoquait au temple tous les hommes de la race de David qui n'étaient pas mariés. Lorsque plusieurs d'entre eux se furent rassemblés dans le temple, en habits de fête, on leur présenta la sainte Vierge ; et je vis parmi eux un jeune homme très pieux de la contrée de Bethléhem. Ce jeune homme avait demandé à Dieu avec une grande ferveur l'accomplissement de la promesse, et je vis dans son coeur un grand désir de devenir l'époux de Marie. Quant à celle-ci, elle revint dans sa cellule et versa de saintes larmes, ne pouvant pas s'imaginer qu'elle ne dût pas rester vierge.


Je vis alors le grand prêtre, obéissant à une impulsion intérieure qu'il avait reçue, présenter des branches à chacun des assistants, et leur enjoindre de marquer chacun une branche de leur nom et de la tenir à la main pendant la prière et le sacrifice. Quand ils eurent fait ce qui leur avait été dit, on leur reprit les branches, qui furent mises sur un autel devant le Saint des saints, et il leur fut annoncé que celui d'entre eux dont la branche fleurirait était désigné par le Seigneur pour devenir l'époux de Marie de Nazareth.

Pendant que les branches étaient devant le Saint des saints, on continua le sacrifice et la prière. Je vis durant ce temps le jeune homme, dont le nom me reviendra peut-être', crier vers Dieu, les bras étendus, dans une salle du temple, et verser des larmes brûlantes lorsque, après le temps fixé, on leur rendit les branches en leur annonçant qu'aucun d'entre eux n'était désigné par Dieu comme devant être le fiancé de cette vierge. Ces hommes furent alors renvoyés chez eux, et ce jeune homme se retira sur le mont Carmel, auprès des anachorètes qui vivaient là depuis le temps d'Elie ; il y vécut aussi depuis lors, priant continuellement pour l'accomplissement de la promesse.


La tradition le nomme Agabus, et dans le tableau de Raphaël, appelé vulgairement Sposatisio, il est représenté sous la figure d'un jeune homme qui brise un bâton sur son genou.


Je vis ensuite les prêtres du temple chercher de nouveau dans les registres des familles s'il n'existait pas quelque descendant de David qu'on eût oublié'. Comme ils y trouvèrent l'indication de six frères de Bethléhem, dont l'un était inconnu et absent depuis longtemps, ils s'enquirent du séjour de Joseph et le découvrirent à peu de distance de Samarie, dans un lieu situé près d'une petite rivière, où il habitait au bord de l'eau. travaillant pour un maître charpentier.


Sur l'ordre du grand prêtre, Joseph vint à Jérusalem et se présenta au temple. On lui fit, à lui aussi, tenir une branche à la main pendant qu'on priait et qu'on offrait un sacrifice ; comme il se disposait à la poser sur l'autel devant le Saint des saints, il en sortit une fleur blanche semblable à un ils, et je vis une apparition lumineuse descendre sur lui : c'était comme s'il eût reçu le Saint Esprit. On connut donc que Joseph était l'homme désigné par Dieu pour être le fiancé de la sainte Vierge, et les prêtres le présentèrent à Marie en présence de sa mère. varie, résignée à la volonté de Dieu, l'accepta humblement pour son fiancé, car elle savait que tout est possible Dieu, qui avait reçu son voeu de n'appartenir qu'à lui.


Selon l'opinion commune, la conservation des registres généalogiques était l'affaire privée des familles, Le sacerdoce israélite dut néanmoins se mêler du maintien et de la continuation de ces documents : on peut l'induire de cette circonstance qu'on avait à faire des règlements et des arrangements très importants pour la société juive, suivant la manière dont les tribus et les familles étaient réparties. Nous savons, par les anciens documents, qu'au moins depuis la captivité de Babylone on tenait au temple des registres généalogiques exacts. Voyez Lightfoot., Horae hebr., t. I, p. 178, ed. Carpzovi., et Otho. Le rabinico-philos., 1625, p. 250.

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