29 Départ pour Jérusalem.

Je les vis se mettre en route pour Jérusalem dès le point du jour. La petite Marie désirait vivement arriver au temple ; elle sortit de la maison en toute hâte et vint prés des bêtes de somme. Les jeunes garçons se montrèrent encore des textes sur leurs rouleaux. L'un de ces textes disait que le temple était magnifique, mais que cette enfant renfermait quelque chose de plus magnifique encore, etc. Il y avait deux bêtes de somme. L'un des ânes, qui était très chargé, était conduit par un serviteur ; il devait toujours se tenir un peu en avant des voyageurs. Sur l'autre âne, chargé aussi de paquets, qui se tenait devant la maison, on avait préparé une place pour s'asseoir, et Marie y fut mise. Joachim conduisait l'âne, et portait un grand bâton avec une grosse pomme ronde au bout ; c'était comme un bâton de pèlerin. Anne allait un peu en avant avec la petite Marie de Cléophas. Elle était accompagnée d'une servante pour tout le voyage. En outre, quelques femmes et enfants lui firent la conduite pendant un certain temps : c'étaient des parents qui se séparaient d'elle aux embranchements de la route qui les ramenaient chez eux. L'un des prêtres accompagna le cortège pendant quelque temps. Ils avaient une lanterne avec eux. mais je vis la lueur disparaître tout à fait devant cette lumière que je vois dans les voyages de nuit la sainte Famille et d'antres saints encore répandre sur la route autour d'eux, sans que je remarque pourtant qu'ils voient cette lumière. Au commencement, le prêtre me semblait marcher derrière la petite Marie, avec les enfants-prophètes. Plus tard, quand elle fut à pied, je fus à ses côtés. J'entendis plus d'une fois mes jeunes compagnons chanter le psaume quarante-quatre : Eructavit cor meum, et le quarante-neuvième : Deux deorum Dominus locutus est, et j'appris d'eux que ces psaumes seraient chantés à deux choeurs lors de l'admission de l'enfant au temple. J'entendrai cela quand ils seront arrivés.


Je vis au commencement le chemin descendre la pente d'une colline, et plus tard remonter de nouveau. Comme il était de bonne heure et que le temps était beau, je vis Je cortège s'arrêter près d'une fontaine d'où sortait un ruisseau ; il y avait là une prairie. Les voyageurs se reposèrent contré une haie d'arbrisseaux de baume. On plaçait toujours sous ces arbrisseaux des écuelles de pierre où était recueilli le baume tombant goutte à goutte. Les voyageurs en mirent dans leur eau et en remplirent de petits vases. Il y avait là d'autres arbustes avec des baies qu'ils cueillirent et mangèrent. Ils mangèrent aussi des petits pains. Ici les deux enfants-prophètes avaient disparu. L'un d'eux était Elie ; l'autre me parut être Moise. La petite Marie les vit bien, mais elle n'en dit rien. C'est ainsi qu'on voit quelquefois dans son enfance de saints enfants, et dans un âge un peu plus avancé de saintes jeunes filles ou de saints jeunes gens apparaître près de soi, et qu'on ne le dit pas aux autres, parce que, dans cet état, on est tout à fait calme et recueilli.


Plus tard, je les vis entrer dans une maison isolée où ils furent bien accueillis et prirent quelques provisions. Les habitants de cette maison paraissaient être de leurs parents. C'est de là qu'on renvoya la petite Marie de Cléophas. Pendant la journée, je tournais encore plusieurs fois mes regards sur ce voyage, qui est assez pénible. On monte et on descend beaucoup. Souvent il y a dans les vallées du brouillard et de la rosée ; cependant je vois aussi certains endroits bien exposés, où il pousse maintenant des fleurs.


Avant d'arriver à l'endroit où ils devaient passer la nuit, ils trouvèrent un petit cours d'eau. Ils logèrent dans une auberge située au pied d'une montagne sur laquelle est une ville. Malheureusement je ne puis plus bien indiquer le nom de ce lieu. Je le vis à l'occasion d'autres voyages de la sainte Famille ; ce qui fait que je puis me tromper aisément sur le nom. Tout ce que je puis dire, quoique non avec une entière certitude, c'est qu'ils suivirent la direction de la route que fit Jésus, au mois de septembre dans sa trentième année, en allant de Nazareth à Béthanie, et ensuite au baptême de Jean. La sainte Famille suivit aussi ce même chemin lors de la fuite en Égypte. La première étape de cette fuite fut à Nazara, un petit endroit entre Massaloth et une ville située sur une hauteur, mais plus près de cette dernière. Je vois toujours de tous les côtés tant de lieux dont j'entends prononcer les noms, que je confonds aisément les uns avec les autres. La ville couvre le penchant d'une montagne et se divise en plusieurs parties, si tant est que toutes lui appartiennent. On y manque d'eau- : il faut la faire monter d'en bas avec des cordes. Il y a là de vieilles tours en ruine. Sur le sommet de la montagne est une tour comme un observatoire. Il s'y trouve un appareil en maçonnerie avec des poutres et des cordes, comme pour faire monter quelque chose de la ville, qui est placée plus bas. Les cordes y sont en si grand nombre que cela ressemble à des mats de navire. Il y a bien une heure du pied de la montagne jusqu'en haut. Les voyageurs entrèrent dans une auberge qui est en bas. On a une vue très étendue du haut de cette montagne. Il y avait dans une partie de la ville des paiens qui étaient comme des esclaves vis-à-vis des Juifs, et étaient obligés à beaucoup de corvées. Ainsi il leur a fallu travailler au temple et à d'autres bâtisses '.


D'après la situation du lieu, la mention de cette population en partie païenne, et la circonstance que Jésus voyages dans cette direction lorsqu'il alla recevoir le baptême, on peut conjecturer que cette ville était Endor : car dans ses visions quotidiennes sur les années de la prédication de Jésus, elle le vit dans le milieu du mois de septembre célébrer le sabbat dans un petit endroit au-dessous d'Endor ; et elle le vit aussi dans la ville haute d'Endor, en partie déserte, instruire des Chananéens qui s'étaient établis là depuis la défaite de Sisara, à l'armée duquel leurs ancêtres avaient appartenu.


Le 4 novembre l821, elle raconta ce qui suit : J'ai va ce soir la petite Marie arriver avec ses parents dans une ville située à environ six lieues de Jérusalem dans la direction du nord-ouest. Elle s'appelle Bethoron et se trouve au pied d'une montagne. Dans le voyage, ils ont travers une petite rivière qui se jette dans la mer, au couchant, dans les environs de Joppé, où saint Pierre enseigna après la descente au Saint Esprit. On a livré de grandes batailles près de Bethoron, je les ai oubliées. (Voyez Josué, X, 11 ; Macch. VII, 39-40). Il y avait de là encore deux lieues jusqu'à un endroit de la route d'où l'on pouvait voir Jérusalem. J'ai entendu le nom de cette route ou de cet endroit, mais je ne puis bien le préciser '. Bethoron est un endroit considérable. C'est une ville de lévites. On y trouve de très beaux raisins et beaucoup d'autres fruits. La sainte Famille entra chez des amis dans une maison bien disposée. Celui qui l'habitait était maître d'école. C'était une école de lévites, et il y avait plusieurs enfants dans la maison. Ce qui m'étonna, ce fut de voir là plusieurs des parentes d'Anne avec leurs petites filles ; je croyais qu'elles étaient retournées chez elles au commencement du voyage. Comme je le vois, elles étaient venues en avant par un chemin plus court, probablement pour annoncer la venue de la sainte Famille. Les parents de Nazareth, de Séphoris, de Zabulon, qui avaient assisté à l'examen de Marie, étaient ici avec leurs petites filles ; par exemple, la soeur aînée de Marie et sa fille Marie de Cléophas , et la soeur d'Anne, venue de Séphoris avec ses filles.


On fit une vraie fête à la petite Marie : on la conduisit, en compagnie des autres enfants, dans une grande salle ; on la mit sur un siège élevé qui était comme un petit trône préparé pour elle. Alors le maître d'école et d'autres personnes présentes lui firent toutes sortes de questions et mirent des guirlandes sur sa tête.


Elle se souvenait que ce nom ressemblait à Marion (peut-être Marom). On sait qu'il y avait une route de Jérusalem à Nicopolis et à Lydda, qui passait près de Betheron. La soeur donnait d'autres détails sur les montagnes et les vallées traversées antérieurement dans ce voyage ; mais, comme elle n'exprimait pas clairement Tout ce qu'elle voyait, et que son point de vue ne pouvait être bien déterminé, tout cela ne peut être reproduit.


Tout le monde était étonné de la sagesse de ses réponses. J'entendis parler aussi de l'esprit judicieux d'une autre jeune fille qui avait passé par là peu de temps auparavant en revenant de l'école du temple chez ses parents. Elle s'appelait Suzanne', et figura plus tard parmi les saintes femmes qui suivaient Jésus. Marie prit sa place, car il y avait au temple un nombre fixé de places pour les jeunes filles. Suzanne avait quinze ans quand elle quitta le temple, par conséquent environ onze ans de plus que Marie. Sainte Anne aussi avait été élevée dans le temple, mais elle n'y était venue que dans sa cinquième année.


La chère petite Marie était toute joyeuse d'être si près du temple. Je vis Joachim la serrer dans ses bras en pleurant, et lui dire : " Mon enfant, je ne te reverrai plus ". On avait préparé un repas, et je vis, pendant qu'on était à table, Marie aller de côté et d'autre d'une façon toute gracieuse et se serrer contre sa mère, ou, se tenant derrière elle, lui passer ses bras autour du cou.


Le 6 novembre, elle dit : Ce matin, de très bonne heure, je vis les voyageurs partir de Bethoron pour Jérusalem. Tous les parents, avec leurs enfants, s'étaient joints à eux, ainsi que leurs hôtes ; ils avaient avec eux des présents pour l'enfant : c'étaient des habits et des fruits. Il me semble qu'il y a une fête à Jérusalem. J'appris que Marie avait tout juste trois ans et trois mois ; mais elle était aussi avancée que chez nous un enfant de cinq ou six ans. Dans leur voyage, ils n'allèrent ni à Ussencheera, ni à Gophna, où pourtant ils avaient des connaissances, mais ils passèrent dans les environs.


La soeur donne plus de détails sur Suzanne et sa parente avec la sainte Famille le 28 septembre ou 27 élul de la première année de prédication de Notre-seigneur.

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