Quelques jours après l'Annonciation de l'ange à Marie, saint Joseph revint à Nazareth et il fit certains arrangements dans la maison pour pouvoir exercer son métier, car il n'avait pas encore été à demeure à Nazareth, où il avait passé à peine deux jours. Il ne savait rien de l'incarnation de Dieu dans Marie ; elle était la mère du Seigneur, mais elle était aussi la servante du Seigneur et gardait humblement son secret. La sainte Vierge, lorsqu'elle sentit que le Verbe s'était fait chair en elle, éprouva un grand désir d'aller tout de suite à Juttah, près d'Hébron, visiter sa cousine Élisabeth, que l'ange lui avait dit être enceinte depuis six mois. Comme on approchait du temps où Joseph devait se rendre à Jérusalem pour la fête de Pâques, elle désira l'accompagner pour aller assister Elisabeth pendant sa grossesse. Joseph se mit donc en route pour Juttah avec la sainte Vierge.
La soeur Emmerich raconta les détails suivants du voyage de Joseph
et de Marie ; mais il y a dans ses récits beaucoup de lacunes, causées
par son état de maladie et par des dérangements continuels.
Elle ne raconta pas le départ, mais pendant quelques jours consécutifs
différentes scènes de voyage que nous communiquons ici.
Leur route se dirigeait vers le midi ; ils avaient avec eux un Ane sur lequel
Marie montait de temps en temps. Il portait quelques effets, entre autres
un sac appartenant à Joseph, où se trouvait une longue robe
brune de la sainte Vierge avec une espèce de capuchon. On l'attacha
sur le cou de l'âne. Marie mettait cet habit quand elle allait au. temple
ou à la synagogue. En voyage elle portait une tunique de laine brune,
une robe grise avec une ceinture par-dessus, et une coiffe tirant sur le jaune.
Ils voyageaient assez vite. Je les vis, après avoir traversé
la plaine d'Esdrelon, dans la direction du midi, gravir une hauteur et entrer
dans la ville de Dothan, chez un ami du père de Joseph. C'était
un homme assez riche,. Originaire de Bethléhem. Le père de Joseph
l'appelait son frère, quoiqu'il ne le fût pas : mais il descendait
de David par un homme qui était aussi roi, à ce que je crois,
et qui s'appelait Éla, ou Eldoa, ou Eldad, je ne sais plus bien lequel
'. Cet endroit était très commerçant.
Je les vis une fois passer la nuit sous un hangar ; puis, comme ils étaient
encore à douze lieues de la demeure de Zacharie, je les vis un soir
dans un bois sous une cabane de branchages, toute recouverte de feuillage
vert avec de belles fleurs blanches. On trouve souvent dans ce pays, au bord
des routes, de ces cabanes de verdure ou même des bâtiments plus
solides dans lesquels les voyageurs peuvent passer la nuit ou se rafraîchir
et apprêter les aliments qu'ils ont avec eux. Une famille du voisinage
a la surveillance de plusieurs abris de ce genre et fournit plusieurs choses
nécessaires moyennant une modique rétribution.
La soeur Emmerich vit Jésus, le 2 novembre (12 Marcheswan) de sa trente
et unième année, dans cette même maison de Dothan où
il guérit de l'hydropisie un homme de cinquante ans, nommé Issachar,
mari de Salomé, la fille des maîtres de cette maison. A cette
occasion Issachar parla du séjour qui7 avaient fait Marie et Joseph.
Le rejeton de David que la soeur nomme Eldoa ou Eldad, et par lequel le père
de cette Salomé était parent de saint Joseph, pourrait bien
être Elioda ou Eliada, fils de David cité dans le second livre
des rois, V, 16, et dans le premier livre des Paralipomènes, III, 8.
Quoiqu'on doive admettre naturellement des confusions fréquentes dans
les noms prononcés par la soeur, on ne doit pourtant pas admettre que
cette confusion ait toujours lieu. Les noms propres en hébreu ont en
général une signification précise ; mais comme un seul
et même sens peut s'exprimer de différentes manières dans
la langue hébraïque, les mêmes personnes portent souvent
différents noms. Ainsi nous trouvons un fils de David appelé
tantôt Elischna " Dieu aide ", tantôt Elischama "
Dieu entend ". Ainsi Eldea ou Eldoa peut aussi bien signifier "
Dieu vient " qu'Eliada. La mention peu précise que ce rejeton
de David aurait été roi, ne doit point étonner, car il
est indubitable que des fils ou petits-fils de David eurent le gouvernement
de certains pays dépendant du royaume d'Israel.
Ici il semble y avoir une lacune dans le récit. Vraisemblablement la
sainte Vierge alla avec Joseph à Jérusalem pour la fête
de Pâques, et ce n'est que de là qu'elle se rendit chez Elisabeth,
car il est dit plus haut que Joseph allait à la fête, et plus
loin que Zacharie était revenu chez lui après les fêtes
de Pâques la veille de la visitation de Marie.
De Jérusalem ils n'allèrent pas tout droit à Juttah,
mais ils firent un détour vers le levant pour voyager plus solitairement.
Ils contournèrent une petite ville à deux lieues d'Emmaus, et
prirent alors des chemins que Jésus suivit souvent pendant ses années
de prédication. Ils eurent ensuite deux montagnes à franchir.
Entre ces deux montagnes je les vis une fois se reposer, manger du pain et
mêler dans leur eau des gouttes de baume qu'ils avaient recueillies
pendant le voyage. Le pays ici était très montagneux. Ils passèrent
devant des rochers qui étaient plus larges d'en haut que d'en bas ;
on voyait aussi là de grandes cavernes dans lesquelles étaient
toutes sortes de pierres singulières. Les vallées étaient
très fertiles.
Leur chemin les conduisit encore à travers des bois, des landes, des
prés et des champs. Dans un endroit assez rapproché du terme
du voyage, je remarquai particulièrement une plante qui avait de jolies
petites feuilles vertes et des grappes de fleurs, formées de neuf clochettes
roses fermées. Il y avait là quelque chose dont j'avais à
m'occuper, mais j'ai oublié de quoi il s'agissait '.
Cette fleur' avec neuf clochettes, avait peut-être pour la soeur un
rapport mystique aux neuf mois que le Seigneur passa dans le sein de sa mère
; peut-être aussi y vit-elle le symbole de quelque dévotes ou
exercice de piété se rattachant a la fête de la Visitation.
Du reste, un ami versé dans la connaissance de l'Écriture sainte,
communiqua à l'écrivain l'observation suivante : " La fleur
indiquée ici est probablement la petite grappe de cypre (Lawsonia spinosa
inerrnis, Linn.), dont il est dit dans le Cantique des Cantiques (I, 13) :
"Mon bien-aimé est pour moi une grappe de cypre (botrus cypri)
cueillie dans les vignes d'Engaddi. "Mariti, dans son voyage en Syrie
et en Palestine, a vu cet arbrisseau et sa fleur dans la contrée où
la soeur fait voyager la sainte Vierge. Les feuilles sont, d'après
lui, plus petites et plus élégantes que celles du myrte ; les
fleurs, couleur de rose, disposées par bouquets en forme de grappe,
ce qui, d'ailleurs, correspond à la description sommaire de la soeur,
quand elle dit qu'elle a à s'occuper de quelque chose qu'elle a oublié
touchant ces fleurs campaniformes ; il s'agit peut-être d'une méditation
sur le Cantique des Cantiques (I, 13). Comme en os moment le bien-aimé
était encore sous le coeur virginal de sa mère, elle célébrait
peut-être, en contemplant les capsules de cet arbrisseau, le degré
de développement du Verbe fait chair, et cette méditation pouvait
être d'autant plus féconde, que la grappe odorante des fleurs
de cypre s'appelle en hébreu grappe de kopher, c'est-à-dire
grappe de la réconciliation, et c'est pourquoi quelques commentateurs
trouvent dans les paroles : "Mon bien-aimé est pour moi une grappe
de cypre, "le sens suivant : " Mon bien-aimé a donné
pour moi la grappe sanglante de la réconciliation ". De même
que les Orientaux estiment beaucoup ces bouquets de fleurs odorantes et les
regardent comme un présent très agréable, la soeur, en
voyant passer la sainte Vierge près de ces grappes de fleurs, pouvait
fêter les progrès de la maturité de la grappe du sang
de la réconciliation dans le fruit béni de ses entrailles Elle
considérait peut-être, dans le texte du Cantique des Cantiques
le sens suivant lequel on pouvait dire : La vraie grappe du kopher mûrit
pour nous sous le coeur de Marie, de même que dans le texte : "
Mon bien-aimé est pour moi un bouquet de myrrhe qui repose entre mes
mamelles ; "elle peut avoir considéré que Marie, plus tard,
porta Jésus enfant sur son sein, et dans la suite, après la
descente de croix, reçut le Sauveur dans ses bras lorsqu'on l'embauma
avec de la myrrhe, quoique lui-même fut la véritable myrrhe qui
préserve de ta corruption.
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