72. Arrivée de la sainte Famille chez Sainte Anne

Je vis le soir la sainte Famille arrivée dans la maison d'Anne, à une demi lieue de Nazareth, vers la vallée de Zabulon. Il y eut une petite fête de famille du genre de celle qui avait eu lieu lors du départ de Marie pour le temple. La fille aînée d'Anne, Marie d'Héli, était présente. L'âne était déchargé. Ils voulaient rester là un certain temps. Tous accueillirent l'Enfant-Jésus avec une grande joie ; mais cette joie était paisible et tout intérieure. Je n'ai jamais rien vu de très passionné chez tous ces personnages. Il y avait aussi là de vieux prêtres. On fit un petit festin. Les femmes mangèrent, comme toujours, séparées des hommes.


Je vis encore la sainte Famille chez Anne. Il y avait quelques femmes : la fille aînée d'Anne, Marie Héli, avec sa fille, Marie de Cléophas, puis une femme du pays d'Elisabeth, et la servante qui s'était trouvée près de Marie à Bethléhem. Cette servante, après avoir perdu son mari qui ne s'était pas bien conduit envers elle, n'avait pas voulu se remarier et elle était venue à Juttah, chez Elisabeth, où Marie l'avait connue lors de sa visite à sa cousine ; de là, cette veuve était venue chez Anne. Je vis aujourd'hui Joseph faire plusieurs paquets chez Anne et aller avec la servante à Nazareth, précédant des ânes, qui étaient au nombre de deux ou de trois.


Je ne me souviens plus en détail de tout ce que j'ai vu aujourd'hui dans la maison de sainte Anne ; mais je dois y avoir eu de vives impressions, car j'y avais une ardeur pour la prière dont je ne comprends peut-être plus bien la cause. Avant d'aller chez Anne, je me trouvai en esprit prés d'un couple de jeunes mariés qui nourrissent leur vieille mère ; tous deux sont maintenant atteints d'une maladie mortelle, et s'ils n'en guérissent pas, leur mère sera sans ressource. Je connais cette pauvre famille, mais je n'en ai pas entendu parler depuis longtemps. Dans les cas désespérés, j'invoque toujours la sainte mère de Marie ; et aujourd'hui, comme j'étais chez elle en vision, je vis dans son jardin, malgré la saison, beaucoup de poires, de prunes et d'autres fruits pendants aux arbres, quoiqu'ils n'eussent plus de feuilles ; je voulus les cueillir en m'en allant, et je portai les poires aux époux malades, qui ont été guéris par là. Il me fallut ensuite en donner à beaucoup de pauvres âmes, connues et inconnues, qui en furent soulagées. Vraisemblablement ces fruits signifient des grâces obtenues par l'intercession de sainte Anne. Je crains que ces fruits n'indiquent pour moi beaucoup de douleurs et de souffrances ; j'éprouve toujours cela lors de semblables visions où je cueille des fruits dans les jardins des saints, car il faut toujours payer cela cher. Je ne sais pas bien pourquoi je cueillis ces fruits dans le jardin de sainte Anne ; peut-être ces personnes et ces âmes sont-elles sous la protection particulière de sainte Anne, en sorte que les fruits de la grâce doivent provenir pour elles de son jardin ; ou peut-être cela eut-il lieu parce qu'elle est particulièrement secourable dans les circonstances désespérées, ainsi que je l'ai toujours reconnu.


Comme on demandait à la soeur comment elle voyait le climat de la Palestine dans cette saison, elle répondit : J'oublie toujours de le dire, parce que tout cela me parait si naturel, qu'il me semble que tout le monde doit le savoir. Je vois souvent de la pluie et du brouillard, quelquefois aussi un peu de neige, mais qui fond tout de suite. Je vois souvent des arbres sans feuilles où pendent encore des fruits. Je vois plusieurs récoltes dans l'année ; je vois déjà faire la moisson dans la saison qui correspond à notre printemps. Dans l'hiver, je vois les gens qui sont sur les chemins, tout enveloppés ; ils ont leurs manteaux sur la tête.


(Le 6.) Aujourd'hui, dans l'après midi, je vis la sainte Vierge, accompagnée de sa mère qui portait l'Enfant-Jésus, se rendre dans la maison de Joseph, à Nazareth. Le chemin est très agréable : il a environ une demi lieue de long, et passe entre des collines et des jardins.


Anne envoie des aliments à Joseph et à Marie dans leur maison de Nazareth. Combien tout est touchant dans la sainte Famille ! Marie est comme une mère et en même temps comme la servante la plus soumise du saint enfant ; elle est aussi comme la servante de saint Joseph. Joseph est vis-à-vis d'elle comme l'ami le plus dévoué et comme le serviteur le plus humble. Combien je suis touchée de voir la sainte Vierge remuer et retourner le petit Jésus comme un enfant qui ne peut s'aider lui-même ! Quand on songe que c'est le Dieu de miséricorde qui a créé le monde, et qui, par amour, se laisse ainsi mouvoir en tous sens, combien on est douloureusement affecté de la dureté, de la froideur et de l'égoïsme des hommes !

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