68. La sainte Famille dans la grotte de Maraha.
- Joseph sépare l'Enfant
Jésus de Marie pendant quelques heures.
- Marie, dans son inquiétude, exprime du lait de son sein.
- Origine d'un miracle qui s'est perpétué jusqu'à nos
jours.
La soeur Emmerich raconta à diverses reprises les deux incidents qui suivent comme ayant eu lieu lorsque la sainte Vierge était cachée dans la grotte de Maraha. Ayant toujours été distraite par la souffrance ou par des visites, elle ne les raconta pas le jour même où elle les vit, mais par forme de supplément, comme quelque chose qu'elle avait oublié ; nous les mettons donc ensemble, laissant au lecteur le soin de les placer dans un autre ordre selon qu'il le jugera convenable.
La sainte Vierge raconta à sa mère tout ce qui s'était
passé lors de la visite des saints rois, et elles parlèrent
aussi de la manière dont elle avait été laissée
dans la grotte du tombeau de Maraha.
Je vis deux bergers venir trouver la sainte Vierge, et l'avertir qu'il venait
des gens chargés par les autorités de s'enquérir de son
enfant. Marie ressentit une vive inquiétude, et je vis bientôt
après saint Joseph entrer, retirer l'Enfant-Jésus de ses bras,
l'envelopper dans un manteau et l'emporter. Je ne me souviens plus où
il alla avec lui.
Je vis alors la sainte Vierge livrée à ses inquiétudes
maternelles, rester seule dans la grotte sans l'Enfant-Jésus pendant
l'espace d'une demi journée. Quand vint l'heure où on devait
l'appeler pour allaiter l'enfant, elle fit ce qu'ont coutume de faire des
mères soigneuses lorsqu'elles ont été agitées
violemment par quelque frayeur ou quelque vive émotion. Avant de donner
à boire à l'enfant, elle exprima de son sein le lait que ses
angoisses avaient pu altérer, dans une petite cavité de la couche
de pierre blanche qui se trouvait dans la grotte. Elle parla de la précaution
qu'elle avait prise à un des bergers, homme pieux et grave, qui était
venu la trouver (probablement pour la conduire auprès de l'enfant)
; cet homme, profondément convaincu de la sainteté de la mère
du Rédempteur, recueillit plus tard avec soin le lait virginal qui
était resté dans la petite cavité de la pierre, et le
porta avec une simplicité pleine de foi à sa femme, qui avait
alors un nourrisson qu'elle ne pouvait pas satisfaire ni calmer. Cette bonne
femme prit cet aliment sacré avec une respectueuse confiance, et sa
foi fut récompensée, car son lait devint aussitôt très
abondant. Depuis cet événement la pierre blanche de cette grotte
reçut une vertu semblable, et j'ai vu que, de nos jours encore, même
des infidèles mahométans en font usage comme d'un remède,
dans ce cas et dans plusieurs autres'.
La tradition de ce miracle est rapportée avec diverses variantes dans
beaucoup de descriptions anciennes et modernes de la Palestine. Suivant la
tradition la plus ordinaire, la sainte Famille, passant près de Bethléhem
lors de la fuite en Egypte, se serait cachée dans cette grotte, et
quelques gouttes de lait tombées du sein de la mère de Dieu
auraient donné cette vertu à la pierre de la grotte. C'est la
soeur Emmerich qui a dit la première que cette grotte avait servi de
tombeau à la nourrice d'Abraham ; quelle s'appelait dès lors
la grotte de la nourrice ; et aussi que les inquiétudes maternelles
de Marie avaient été la cause de cette vertu communiquée
à la pierre de la grotte en question. Le savant franciscain Fr. Quaresmius,
commissaire apostolique dans la Terre Sainte au dix-neuvième siècle,
dit entre autres choses, à propos de cette grotte, dans son Historica
Terra' Sanctae elucidatio, Antwerpiæ, 1632, t. II, p. 678 : "à
peu de distance de la grotte de la Nativité et de l'église de
la sainte Vierge, à Bethléhem (suivant d'autres indications
elle en est éloignée de deux cents pas), se trouve un souterrain
dans lequel sont creusées trois grottes ; dans cette qui est au milieu,
le saint sacrifice de la messe a été souvent célébré
en mémoire du miracle qui s'y est opéré : on l'appelle
communément la grotte de la Vierge ou l'église de Saint Nicolas
une bulle du pape Grégoire Xl (mort en 1378) mentionne cette chapelle
de Saint Nicolas à Bethléhem, et permet aux franciscains d'y
bâtir une maison avec clocher et cimetière. "On lit encore
dans un ancien manuscrit sur les lieux saints : "Item, l'église
de Saint Nicolas, où est la grotte dans laquelle, suivant la tradition,
la sainte Vierge s'est cachée avec l'Enfant-Jésus ". Quaresmius,
après avoir rapporté la tradition vulgaire sur cette grotte,
ajoute que la terre de cette grotte est naturellement rouge ; mais qu'étant
réduite en poussière, lavée et séchée au
soleil, elle devient blanche comme la neige, et que, mêlée avec
de l'eau, elle ressemble parfaitement à du lait. La terre ainsi préparée
s'appelle lait de la sainte Vierge. On en fait une potion très salutaire
pour les femmes qui ne peuvent pas nourrir, et on l'emploie aussi avec succès
contre d'autres maladies. Même les femmes turques et arabes en retirent
une telle quantité de terre pour l'employer ainsi, que ce qui était
autrefois une seule grotte en forme trois aujourd'hui. Les reliques qui, dans
plusieurs Lieux de pèlerinage, portent le nom de lac bestoe Virginia,
et donnent lien à beaucoup de moqueries, ne sont le plus souvent que
de la terre de cette grotte de Bethléhem, dont parle la soeur Emmerich.
Quaresmius, à ce propos, mentionne un miracle rapporté par Baronius,
lequel dit, dans ses Annales (an 158), que depuis que saint Paul a rejeté
la vipère qui l'avait mordu à la main dans l'île de Malte
(Act. XXIX), il n'y a plus dans cette île ni serpents ni animaux venimeux,
et même que la terre de Malte est devenue un contrepoison ; puis il
ajoute ces paroles : " Si une telle vertu a été donnée
à cette terre à cause de saint Paul, pourquoi refuserions-nous
de croire que Dieu, pour honorer la Vierge mère, a communiqué
une vertu semblable et encore plus grande d cette grotte, sanctifiée
par la présence de Jésus et de Marie " ! Castro, dans la
vie de Marie, Grotonus, dans la vie de saint Joseph, rapportent la même
tradition d'après un vieil écrit arménien.
Depuis ce temps, cette terre passée à l'eau et pressée
dans de petits moules a été répandue dans la chrétienté
comme un objet de dévotion ; c'est d'elle que se composent les reliques
appelées lait de la très sainte Vierge.
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