Chemin de la perfection de Ste Thérèse d'Avila

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CHAPITRE 41

Du grand gain qu'une âme retire à prier vocalement avec perfection, et comment Dieu l'élève à des choses surnaturelles.

1 Il est possible, tandis que vous récitez le Paternoster, que Dieu vous élève à la contemplation parfaite, si vous le récitez bien ; le Seigneur montre ainsi qu'il entend celui qui lui parle, et Sa Majesté suspend son entendement, arrête ses pensées et, comme on dit, lui coupe la parole, de sorte que même si l'on veut parler, c'est au prix d'un très grand effort.
2 L'âme comprend que, sans bruit de paroles, le Maître opère en elles et que les puissances sont au repos, tout au moins dans la mesure où il est possible de le percevoir. Ceci est la contemplation parfaite.
3 Vous saurez maintenant en quoi elle diffère de l'oraison mentale ; celle-ci, je le répète, consiste à penser à ce que nous disons et à le comprendre, comme aussi à considérer à qui nous parlons, et ce que nous sommes pour oser nous adresser à un si grand Seigneur. S'entretenir de ces pensées et d'autres semblables, comme songer, par exemple, au peu que nous l'avons servi et à la grande obligation où nous sommes de le servir, c'est pratiquer l'oraison mentale ; ne vous imaginez pas qu'elle soit quelque autre chose inintelligible et, par conséquent, que ce mot ne vous effraie pas. Réciter le Paternoster - ou une autre prière de votre choix - c'est pratiquer l'oraison vocale. Mais voyez combien l'oraison vocale serait discordante si vous vous y adonniez sans attention ; même les paroles ne seraient pas toujours dites en bon ordre. Dans ces deux formes d'oraison nous pouvons quelque chose par nous- mêmes, avec la grâce de Dieu. Dans la contemplation dont je viens de parler, nous ne pouvons rien ; c'est Dieu qui fait tout, c'est son oeuvre, et elle surpasse notre nature.
4 Comme j'ai expliqué toute la substance de la contemplation dans le livre que je dis avoir écrit, il est inutile que j'en parle ici en détail (dans ce récit, j'ai relaté tout ce que je savais à ce sujet). Celles qui parviendront à être élevées par Dieu à l'état de contemplation où vous êtes arrivées - car, comme je l'ai dit, plusieurs d'entre vous y sont parvenues - doivent se le procurer ; il aura pour elles la plus grande importance quand je serai morte 191. Quant aux autres, elles n'en ont pas besoin ; qu'elles s'efforcent seulement d'appliquer ce que je dis dans ce livre : progresser par tous les moyens possibles et veiller, en suppliant le Seigneur et en faisant ce qui dépend d'elles, à ce qu'il leur accorde ce don. Le reste, c'est au Seigneur lui-même de le donner, et il ne le refuse pas à celui qui, comme il a été dit, ne cesse de combattre jusqu'à ce qu'il soit arrivé à la fin du chemin.